RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :
Jean ARNAUD : La chasse aux figures
Pour Michel Guérin, c'est une pratique de l'écriture et la forme de l'essai qui donnent corps à la Figure pour composer une pensée du réel. Mais l'artiste, comme le philosophe, configure lui aussi, produisant du réel afin de caractériser son époque. On envisagera ici comment la plasticité de la Figure philosophique se concrétise en art, les artistes s'exprimant par des gestes, médiums et technologies plus diversifiés pour faire œuvre, déplaçant des images, transformant la matière ou faisant visuellement récit. On analysera donc quelques méthodes de chasse aux figures avec des images, liées à des expériences artistiques personnelles et à l'usage récurrent de quelques gestes (entrelacer, métamorphoser, troubler, flotter, raconter, ouvrir/fermer). À travers une réflexion sur la vie des différentes formes ainsi produites, celles-ci conservant toujours une mémoire de leur genèse, il sera principalement question de la figure biomorphique du nuage.
Jean Arnaud est artiste et professeur des universités en Arts plastiques à AMU (Laboratoire d'Études en Sciences des Arts — LESA). Il a récemment (co)dirigé plusieurs programmes de création-recherche concernant les phénomènes de déplacement des images et leurs relations actuelles au récit visuel. Ses recherches concernent également les interactions entre formes de vie et vie des formes artistiques (biomorphisme). Il a récemment publié Biomorphisme. Approches sensibles et conceptuelles des formes du vivant (Romand, Bernard, Pic et Arnaud (dir.), Naima/PUP, 2023), co-fondé la revue en ligne Turbulences (LESA) dont il a codirigé le n°1 ("Images en tr@nsit", fin 2023). Il expose régulièrement ses œuvres plastiques en France et ailleurs.
https://jeanarnaud.fr/
Pierre BAUMANN : Prendre, poser, placer : expérience et disposition pratiques de quelques outils philosophiques de Michel Guérin
L'anthropologie, plus précisément l'ethnologie et l'archéologie expérimentale représentent souvent une source d'inspiration importante pour les artistes, parce que ces approches sont chargées de savoirs pratiques élémentaires. Peut-on appréhender de même la philosophie de Michel Guérin comme on s'emparerait d'outils au service de l'expérience plastique ? Autrement dit, les grandes idées de Michel Guérin peuvent-elles porter une pensée pratique évidente, directe, sans détour ni effet rebond ? Cette pensée pratique, ductile, chère à Leroi-Gourhan, placerait les concepts battus par Guérin (comme la transparence, le geste, la courbure, la figure, le nihilisme ou la topoïétique) dans le champ anthropologique, comme une philosophie au plus près de l'humain, rabaissée délibérément à son potentiel opératoire élémentaire : prendre, poser, placer. Est-il possible, sinon d'en faire un inventaire, tout au moins de disposer concrètement quelques-uns de ces outils façonnés par le philosophe écrivain ? Quelle portée actuelle pourraient avoir ceux-ci dans et en dehors de l'art, au cœur des processus d'apprentissage ?
Pierre Baumann est professeur des Universités en Arts, membre de l'Unité de Recherche ARTES 24141 de l'université Bordeaux Montaigne, responsable du master recherche Arts plastiques. Il a créé en 2015 Le laboratoire des objets libres, qui étudie le caractère migratoire des objets artistiques dans un contexte anthropologique élargi à partir d'une approche écologique et mésologique. Il dirige depuis 2017 le programme de recherche expérimentale Moby-Dick. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, dont L'usure (codir.), 2016, PUB/ARBA, Dire Moby-Dick, PUB, 2018, Réalités de la recherche (collective) en arts, PUB, 2019, Sillage Melville, PUB, 2020.
Amélie de BEAUFFORT
Amélie de Beauffort est artiste, responsable de l'atelier de dessin, Académie royale des Beaux-Arts de Bruxelles.
Pascal KRAJEWSKI : L'autre du geste technique
Dans l'idée de continuer et d'interroger les derniers écrits de Michel Guérin autour de la Troisième main et de Leroi-Gourhan, nous voudrions proposer l'analyse d'un geste qui est peut-être le comble de ce que l'auteur appelle des "gestes actés" : celui de reposer. Ce terme doit résonner dans diverses directions : se reposer (pour la main qui ouvrage), laisser reposer (le fer qui refroidit), laisser en repos (la ressource qui s'amenuise). Ce geste serait alors peut-être comme le double, sage et limitatif, du geste technique, impétueux et efficace : geste qui contraint l'hybris prométhéenne de l'homme par la prise en compte de la limitation des moyens disponibles et des forces en présence, littéralement son garde-fou. Il serait ainsi le geste hyper-contemporain de notre société technicienne, devenue soudainement consciente de l'abîme qui la guette à l'heure du glas "anthropocène"…
Pascal Krajewski est docteur en sciences de l'art, chercheur associé au CIEBA de l'université de Lisbonne (FBAUL). Sa recherche porte sur les effets de la technologie dans les arts plastiques et les arts médiatiques du XXe siècle. Ses plus récents travaux s'intéressent au livre, au jeu et au jeu vidéo. Il est l'auteur de trois essais : L'art au risque de la technologie (2013), L'enquête : sur l'art de Marc-Antoine Mathieu (2016) et L'ordre technologique (2016).
Pierre SAUVANET : Percussions Répercussions
Avec son intitulé en écho, cette communication entend suivre le fil tissé par la trilogie du geste de Michel Guérin (Philosophie du geste, 1995, 2011 ; La Troisième Main, 2021 ; Le Signe et la touche, 2023). En reprenant notamment la typologie des percussions d'André Leroi-Gourhan (posée, lancée, ou posée avec percuteur ; perpendiculaire ou oblique ; linéaire longitudinale, linéaire transversale, punctiforme ou diffuse ; le tout à croiser dans un tableau à vingt-quatre entrées), il s'agira d'interroger les gestes de percussion depuis le domaine musical, par une sorte de transfert entre la technique et la musique. Quels enjeux, quels objectifs ? Quelles différences, quelles correspondances ? Logiquement, la communication devrait se faire avec un instrument de percussion entre les mains.
Né en 1966, agrégé de philosophie, ancien élève de l'ENS Fontenay-Saint-Cloud, Pierre Sauvanet est professeur d'esthétique à l'université Bordeaux Montaigne, et directeur du laboratoire ARTES (UR 24141). Ses recherches (qui s'appuient aussi sur une pratique) portent avant tout sur une approche philosophique des phénomènes rythmiques, dans des contextes aussi différents que la pensée grecque, l'histoire de l'esthétique, la survivance des images, les relations entre les arts, le jazz et les musiques improvisées. Il est l'auteur de nombreux articles et ouvrages (dont Le Rythme grec, d'Héraclite à Aristote, PUF, 1999, Le Rythme et la Raison, Kimé, 2000, Jazzs, avec Colas Duflo, MF, 2008, L'Insu. Une pensée en suspens, Arléa, 2011, Dionysos plasticien. Une lecture nietzschéenne de l'art contemporain, PUP, 2023).