Programme 2019 : un des colloques

Programme complet


LA REVUE CRITIQUE : PASSIONS, PASSAGES


DU VENDREDI 14 JUIN (19 H) AU VENDREDI 21 JUIN (14 H) 2019

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

François BORDES, Sylvie PATRON, Philippe ROGER


COMITÉ SCIENTIFIQUE :

Per BUVIK, Patrice CANIVEZ, Éric MARTY, Claire PAULHAN, Thomas PIEL


ARGUMENT :

C'est l'une des grandes revues de la seconde moitié du XXe et du début du XXIe siècles. Ce fut aussi pendant longtemps la plus discrète. En juin 1946 paraît le premier numéro de Critique, revue générale des publications françaises et étrangères. Après des débuts difficiles, marqués par deux changements d'éditeurs et une interruption d'un an, elle trouve son équilibre aux Éditions de Minuit. Dirigée par Georges Bataille, assisté pendant quelques années du philosophe Éric Weil, puis par Jean Piel, le beau-frère de Bataille, et à partir de 1996 par Philippe Roger, Critique se propose de recenser les ouvrages les plus importants parus en France et à l'étranger, dans tous les domaines de la connaissance. Ce faisant, elle permet, dans des proportions encore modestes au vu des évolutions ultérieures, la diffusion de la pensée allemande et anglo-saxonne de l'après-guerre, et accompagne les premiers développements des sciences humaines en France. Elle contribue ensuite à l'émergence du "nouveau roman" et de la "nouvelle critique". Elle encourage le projet intellectuel d'auteurs comme Roland Barthes, Michel Deguy, Michel Foucault, Jacques Derrida, Michel Serres, et connaît son heure de gloire avec l'avènement du structuralisme. Année après année, elle réunit les éléments d'une "encyclopédie de l'esprit moderne" (Georges Bataille). Selon les mots de Philippe Roger, son directeur actuel, "[é]chappant tout à la fois à l'urgence inhérente au journalisme culturel et à l'inévitable spécialisation des revues savantes, Critique est un instrument d'information et un espace de réflexion plus indispensables que jamais".

Cette rencontre s'inscrit dans la lignée des colloques de Cerisy consacrés à des revues (Tel Quel, Change), mais y ajoute une dimension historique. Elle propose une réflexion partagée autour de Philippe Roger, des membres du conseil de rédaction actuel, des figures de Georges Bataille et de Jean Piel, ainsi que de la revue Critique en tant qu'expression de la passion des livres et des idées. Elle réunira des chercheurs de différentes spécialités et de toutes les générations ainsi que des témoins des différentes époques de Critique. Au-delà des spécialistes, les lecteurs de Critique et toutes les personnes intéressées seront invités à élargir les débats qui suivront les communications, les tables rondes ou les témoignages d'intellectuels et d'écrivains.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Vendredi 14 juin
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Samedi 15 juin
LA REVUE DE GEORGES BATAILLE (OU ÉPOQUE BATAILLE-WEIL)
Matin
Marina GALLETTI : D'Acéphale à Critique
Koichiro HAMANO : Georges Bataille : Critique et la révolte

Après-midi
Sylvie PATRON : Georges Bataille-Éric Weil : correspondance et antipodie
Nicola APICELLA : Kojève critique : la souveraineté de Bataille à l'épreuve du "sérieux"


Dimanche 16 juin
LA REVUE DE GEORGES BATAILLE (OU ÉPOQUE BATAILLE-WEIL)
Matin
Patrice CANIVEZ : Éric Weil et Critique. Une pratique de la philosophie
Thomas FRANCK : La philosophie allemande comme rempart critique (1946-1949)

Après-midi
Éric HOPPENOT : Maurice Blanchot, compagnon de route de Critique ?
François BORDES : Face au Sphinx. La revue Critique et la question totalitaire durant la Guerre froide


Lundi 17 juin
CRITIQUE SOUS LA DIRECTION DE JEAN PIEL (L'ÉPOQUE STRUCTURALISTE ET AU-DELÀ)
Matin
Grand entretien : Michel DEGUY : Avec Jean Piel
Antoine COMPAGNON : Critique sous Piel [texte lu par Yves HERSANT]

Après-midi
Yves HERSANT : Critique, Jean Piel et les arts [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Martin RUEFF : Jean Starobinski et la relation Critique

Soirée
SÉANCE PUBLIQUE
"HORS LES MURS" — À LA MÉDIATHÈQUE DE SAINT-LÔ
"Poésie contemporaine. Autour de Michel Deguy", lecture de poésie avec François BORDES, Michel DEGUY, Martin RUEFF et Sanda VOICA


Mardi 18 juin
CRITIQUE SOUS LA DIRECTION DE JEAN PIEL (L'ÉPOQUE STRUCTURALISTE ET AU-DELÀ)
Matin
Éric MARTY : Roland Barthes à Critique
Niilo KAUPPI : Avant-gardes : Critique, Tel Quel

Après-midi
Pedro CORDOBA : Critique à l'épreuve des structuralismes
Lawrence D. KRITZMAN : La révolution post-structuraliste : Derrida et Foucault

Soirée
Jacques BOUVERESSE : Grand entretien


Mercredi 19 juin
CRITIQUE AUJOURD'HUI
Matin
Critique vue de l'étranger, table ronde avec Wolfgang ASHOLT, Per BUVIK (Critique vue de la Scandinavie [texte lu par Sylvie PATRON]), Marina GALLETTI et Lawrence D. KRITZMAN

Après-midi
Charles COUSTILLE : Un rapport ambigu à l'université
Philippe ROGER : Michel Serres dans Critique

Soirée
En commun avec le colloque en parallèle "Univers pluriels d’Alexander Kluge"


Jeudi 20 juin
Matin
DÉTENTE

Après-midi
SÉANCE PUBLIQUE
"HORS LES MURS" — À L'IMEC (abbaye d'Ardenne de Caen)
Visite de l'abbaye d'Ardenne et de l'exposition

Marielle MACÉ : Poésie pour un monde élargi

Pourquoi des revues ?, table ronde animée par François BORDES, avec Nicola APICELLA, Philippe CHANIAL, Yves HERSANT, Marielle MACÉ et Philippe ROGER

Soirée
Grand soir "Alain Corbin" à l'IMEC, avec Alain CORBIN, Philippe ROGER et François BORDES


Vendredi 21 juin
Matin
Synthèse du colloque

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Nicola APICELLA : Kojève critique : la souveraineté de Bataille à l'épreuve du "sérieux"
Depuis l'immédiat après-guerre et jusqu'à la fin de ses jours, tous les efforts de Bataille seront voués à la construction d'un système — inachevé et inachevable — du non-savoir qui aurait rivalisé, par exhaustivité, avec le système hégélien. Mieux : il l'aurait complété. En ce sens, un entretien de 1948 nous fait saisir, par le biais d'un tiers, toute la portée de cette opération : "Critique cherche les rapports qu'il peut y avoir entre l'économie politique et la littérature, entre la philosophie et la politique. À cet égard, l'article d'Alexandre Kojève — je crois que c'est le plus grand philosophe qui existe en ce moment – paru dans Critique sous le titre "Hegel, Marx et le Christianisme", est ce qui a été fait de plus important. Il marque le mieux les intentions de Critique qui veut être le carrefour de la philosophie, de la littérature, de la religion et de l'économie politique". Dans notre communication, nous chercherons à comprendre pourquoi Kojève serait le véritable moteur dialectique de cette nouvelle aventure du non-savoir, envisagé sous l'angle du "sérieux" et de l'"Histoire universelle".

Nicola Apicella est titulaire d'un doctorat en "Philosophie et Sciences Sociales" obtenu à l'EHESS avec une thèse intitulée "Georges Bataille et Alexandre Kojève : la blessure de l'Histoire". Ses recherches portent sur la dialectique du désir dans la pensée française du XXe siècle. Il est co-directeur de rédaction des Cahiers Bataille, où il a publié plusieurs articles et édité, avec Marina Galletti, un texte inédit de Bataille, "Honte" (n°4, 2019). Il a également collaboré à la revue Critique (n°810, 2014), à la revue de psychanalyse La Cause du désir, où il a publié un article inédit de Kojève, "Hegel et Freud, essai d'une confrontation interprétative" (n°92, 2016) ainsi qu'à un ouvrage collectif sur L'Expérience-limite chez Bataille-Blanchot-Klossowski (Presses universitaires de Paris Ouest, 2019).

François BORDES : Face au Sphinx. La revue Critique et la question totalitaire durant la Guerre froide
Georges Bataille est un auteur essentiel du "laboratoire parisien" de la critique antitotalitaire des années 1930, en particulier dans la revue La Critique sociale. Comment le prisme de la notion de totalitarisme a-t-il été utilisé durant la Guerre froide par la revue ? Quelle place la question totalitaire a-t-elle occupée dans Critique ? À partir d'une étude de l'ensemble de la revue et de différentes sources archivistiques, cette intervention propose de cartographier et d'analyser le rapport de la revue à cette question tout au long de la guerre froide intellectuelle en Europe, de 1946 à la chute du mur de Berlin. En quoi la revue Critique contribue-t-elle à écrire une autre histoire de la critique antitotalitaire ?

François Bordes est délégué à la recherche à l'Institut mémoires de l'édition contemporaine (IMEC). Docteur en histoire de l'Institut d'études politiques de Paris (CHSP), il s'intéresse à la relation entre mémoire, création et démocratie. Membre du comité de rédaction de La Revue des revues, il participe aux revues Hippocampe et Nunc.
Publications
Essai biographique sur Kostas Papaïoannou, Les Idées contre le néant, La Bibliothèque, 2015.
La Canne à pêche de Georges Orwell, Corlevour, 2018.

Per BUVIK : Critique vue de la Scandinavie
L'intervention sera basée sur ma propre expérience et sur une enquête.

Per Buvik est professeur émérite de littérature comparée à l'université de Bergen, Norvège. Actuellement membre de l'équipe préparant l'édition des romans et nouvelles de Joris-Karl Huysmans dans la Bibliothèque de la Pléiade.
Publications
Monographie sur Georges Bataille, rédigée en norvégien, Oslo, éd. Gyldendal, 1998.
L'Identité des contraires. Sur Georges Bataille et christianisme, Paris, Éditions du Sandre, 2010.

Patrice CANIVEZ : Éric Weil et Critique. Une pratique de la philosophie
Cette communication portera sur les articles publiés par Éric Weil dans Critique. Elle tentera de dégager les spécificités de ces articles, tant du point de vue des thèmes abordés que des caractéristiques rédactionnelles. J'essaierai aussi de mettre en rapport les articles rédigés pour Critique avec la conception que se fait Éric Weil de la pratique de la philosophie, conception développée dans les ouvrages majeurs (en particulier Logique de la philosophie, Philosophie politique et Philosophie morale), ainsi que dans certains essais et conférences.

Patrice Canivez est professeur de philosophie morale et politique à l'université de Lille, où il dirige l'Institut Éric Weil. Il a publié des travaux sur Éric Weil, Hannah Arendt, Paul Ricœur, Aristote, Rousseau, Hegel, et sur des problèmes de politique contemporaine : l'éducation et la démocratie, l'État-nation et le nationalisme, l'argumentation politique, la théorie de l'action et la théorie de l'histoire.
Publications
Le politique et sa logique dans l'œuvre d'Éric Weil, Paris, Kimè, 1993.
Éric Weil ou la question du sens, Paris, Ellipses, 1998.
Weil, Paris, Les Belles Lettres, 1999.
Qu'est-ce que l'action politique ?, Paris, Vrin, 2013.

Antoine COMPAGNON : Critique sous Piel
Il s'agira surtout d'évoquer mes premiers contacts avec Jean Piel en 1974, après l'envoi d'un manuscrit, puis ma collaboration à la revue, les réunions du conseil de rédaction auxquelles j'ai participé à partir de 1977, ou encore la géographie parisienne de nos déjeuners, puis les visites chez lui à Neuilly, autant d'étapes qui m'ont formé et de moments qui ont marqué une vingtaine d'années d'amitié. Ce sera aussi l'occasion de parler de la succession de Jean Piel, des discussions avec Jérôme Lindon sur l'interruption de Critique, et enfin de la décision de continuer, du passage du relais à Philippe Roger.

Antoine Compagnon est professeur au Collège de France. Il est membre du comité de rédaction de Critique.
Dernière publication
Les Chiffonniers de Paris, Gallimard, 2017.

Pedro CORDOBA : Critique à l'épreuve des structuralismes
On a souvent associé Critique à "l'aventure structuraliste". Non sans de bonnes raisons. Mais si les liens tissés par la revue avec ceux qui incarnent (parfois malgré eux) le structuralisme triomphant sont indéniables et puissants, ils sont pris dans un environnement plus complexe. Il va de soi que l'apogée se situe à la charnière des années 1960-1970. Mais il ne faut négliger ni l'avant ni l'après : dès janvier 1951, Bataille consacre une étude aux Structures élémentaires de la parenté; et pour nous en tenir ici à Lévi-Strauss, c'est en 1999 que Critique lui adresse, sous forme d'hommage, un numéro spécial. Entre ces deux dates, la référence mathématique a changé: on est passé de Bourbaki à René Thom. C'est ce fil mathématique que nous entendons suivre pour "bricoler" une analyse… structurale des divers structuralismes rassemblés dans Critique. Une sorte de "mythologique aujourd'hui" qui, fidèle à la fois à Barthes et à Lévi-Strauss, refusera de séparer le bon grain de l'ivraie, les grands maîtres et les égarés, le sublime et le trivial, le programme de recherches et les ravages de la mode. D'où la marque du pluriel.

Ancien élève de l'ENS et agrégé d'espagnol, Pedro Cordoba est titulaire d'un doctorat sur les fêtes et légendes andalouses. Spécialiste d'ethnohistoire, il a été membre de la Casa de Vélasquez, attaché de recherches au CNRS et chargé de conférences à l'EHESS. Il a enseigné dans différentes universités françaises et étrangères. Il a publié La corrida (Le Cavalier bleu, 2008) et coordonné les numéros de Critique intitulés Dieu (2006, avec A. de Libéra) et Éthique et esthétique de la corrida (2007, avec F. Wolff).

Charles COUSTILLE : Un rapport ambigu à l'université
En ses commencements, Critique n'était pas directement liée à l'université. Georges Bataille n'était pas universitaire, pas plus que Jean Piel, qui ne se cachait pas de préférer les "épiciers" aux professeurs. Dans sa version contemporaine, si la revue espère toujours "échapper à l'inévitable spécialisation des revues savantes", son comité de rédaction est exclusivement composé d'enseignants-chercheurs. Alors, qui a changé : l'université ou Critique ?

Charles Coustille est enseignant dans le secondaire et à NYU Paris.
Publication
Antithèses. Mallarmé, Péguy, Paulhan, Céline, Barthes, Gallimard, coll. "Bibliothèque des idées", 2018.

Thomas FRANCK : La philosophie allemande comme rempart critique (1946-1949)
Nous étudierons la manière dont se constitue, dès les premiers numéros de Critique, une théorie critique se positionnant par rapport à l'héritage de la philosophie allemande. Ce parti pris se justifie par le projet d'une mise en lumière des stratégies intellectuelles et discursives visant à renouer, après la Seconde Guerre mondiale, avec une philosophie politique allemande susceptible de fournir des outils théoriques à l'analyse des conflits nationaux et internationaux. Il apparaît en effet que plusieurs animateurs fondamentaux de la revue considèrent ce rapport comme l'un des enjeux majeurs pour le champ intellectuel français d'après-guerre. Le recours (souvent ambivalent) à des philosophes tels que Kant, Hegel, Feuerbach, Marx, Engels, Bloch, Lukács et Heidegger, à la musique de Schönberg, Berg, Wagner et Beethoven et aux interprétations de Eisler, Adorno et Schönberg lui-même ou encore les analyses des politiques et des idéologies allemandes de guerre et d'après-guerre constituent en effet une part non négligeable des articles parus dans les premiers numéros de Critique. Par souci méthodologique, nous restreindrons notre étude aux années 1946 à 1949, cette date correspondant à l'émergence de nouvelles problématiques liées à l'avenir des deux Allemagne dans la continuité de la Grundgesetz für die Bundesrepublik Deutschland signée en mai 1949.

Thomas Franck est doctorant en philosophie politique et en rhétorique à l'université de Liège et prépare une thèse de doctorat sur la réception de Theodor Adorno dans les revues françaises, et plus précisément dans Arguments et Communications.
Publications
Lecture philosophique du discours romanesque, Lambert-Lucas, 2017.
À codirigé le 12e numéro des Cahiers du GRM intitulé "Matérialités et actualité de la forme revue".

Marina GALLETTI : D'Acéphale à Critique
En 1948, interviewé à propos du prix de la "meilleure revue de l'année" attribué à Critique, Bataille en fait remonter l'origine à l'idée qu’il avait eue, travaillant au service des périodiques de la Bibliothèque nationale, "d'une revue représentant l'essentiel de la pensée humaine prise dans les meilleurs livres". Sa rupture avec son activité d'avant-guerre n'en est que renforcée, et surtout celle avec la société secrète Acéphale dont la revue homonyme avait été conçue comme lieu de prédication de la religion "antichrétienne" et "nietzschéenne" de cette même société. Mais la page d'Acéphale est-elle vraiment tournée ? Non seulement parmi les collaborateurs de Critique, on peut repérer des membres de la société secrète, mais dans Critique et un certain nombre de revues immédiatement précédentes ou contemporaines de la naissance de celle-ci, Bataille prolonge ses thématiques d'avant-guerre. En 1946, c'est l'expérience même de la société secrète qu'il fait resurgir par le biais d'un dessin de Masson paru dans Acéphale… Par une analyse portant simultanément sur Critique et sur ces revues il s'agira de réouvrir la question d'Acéphale pour en tester les enjeux dans le parcours intellectuel de Bataille dans l'après-guerre.

Professeure émérite de littérature française à l'université Roma Tre, Marina Galletti a collaboré à l'édition de la Pléiade des Romans et récits de Georges Bataille (Gallimard, 2004, rééd. 2014), dont elle a reconstruit le parcours communautaire dans La comunità impossibile di Georges Bataille (Kaplan 2008) et dans Georges Bataille, L'Apprenti Sorcier (La Différence, 1999) réédité partiellement au Japon (Shobo, 2006), en Angleterre et aux USA (Atlas Press, 2017).

Koichiro HAMANO : Georges Bataille : Critique et la révolte
Il est, à première vue, paradoxal de parler de la révolte au sujet de Critique. Placée "en dehors de la bagarre" par son fondateur et bornée au recensement de la production intellectuelle contemporaine, la revue n'a en effet rien de ce que d'ordinaire le mot de révolte évoque de passionnel ou d'oppositionnel. Néanmoins, se vouloir apolitique à un moment fort politique comme l'immédiat après-guerre, ce fut déjà, comme le dit Philippe Roger, se mettre délibérément dans une position réfractaire. Certains articles de Bataille, examinant de près ou de loin la question de la révolte, ne viennent-ils pas par ailleurs faire de la résistance à la politique la seule contestation nécessaire au "temps de la révolte", justifiant ainsi, implicitement, le parti pris de la revue Critique ? Notre intervention se propose de repenser le "négativisme politique" de la revue Critique dans son rapport à la notion de révolte telle qu'elle s'élabore dans les textes de Bataille.

Titulaire d'un doctorat de lettres modernes, Koichiro Hamano est professeur de langue et littérature françaises à l'université Aoyama-Gakuin (Tokyo).
Publication
Georges Bataille : la perte, le don et l'écriture, Dijon, 2004.

Yves HERSANT : Critique, Jean Piel et les arts
Grand amateur d'art, en particulier d'art contemporain, Jean Piel a engagé Critique (et s'est personnellement engagé) non seulement dans la défense d'artistes qui lui tenaient à cœur, mais aussi dans une étude attentive et originale des rapports entre art et commerce. Ce travail mérite réexamen.

Directeur d'études à l'EHESS, Yves Hersant a consacré son enseignement et ses recherches à l'Humanisme et à la Renaissance. Il est également directeur de collection aux Belles Lettres, membre du comité de rédaction de Critique et traducteur; il a été un commissaire de l'exposition "La Renaissance et le rêve" (Paris, Musée du Luxembourg).
Publications
Édition commentée de Huysmans, Là-Bas, Paris, Gallimard, 1985.
Italies : les voyageurs français aux XVIIe et XVIIIe siècles, Paris, Robert Laffont, 1988.
Europes. Anthologie critique et commentée, en collaboration avec Fabienne Durand-Bogaert, Paris, Robert Laffont, 2000.
La Métaphore baroque. D'Aristote à Tesauro, Paris, Le Seuil, 2001.
Mélancolies. De l'Antiquité au XXe siècle, Paris, Laffont, 2005.

Éric HOPPENOT : Maurice Blanchot, compagnon de route de Critique ?
Maurice Blanchot publie la quasi-totalité de son œuvre critique (y compris certains fragments fictionnels) dans des revues, l'essai n'étant qu'une écriture seconde. La récollection de textes semble offrir au lecteur l'apparence d'une unité signifiante sans pour autant effacer intégralement la fragmentation initiale.
Écrire dans une revue correspond toujours chez Blanchot — en dehors de son accord tacite à la ligne éditoriale —, à un mouvement amical et généreux. Si Blanchot participe à Critique, et rejoint son comité, c'est essentiellement par amitié pour Georges Bataille. Sa coopération ponctuelle confirme cette hypothèse : Blanchot se joint à Critique pour lancer la revue et lui donner une assise intellectuelle, c'est pourquoi il accepte sans doute sans réserve d'être membre du Comité de Critique, son nom y figurera jusqu'à sa mort.
Entre le numéro 3-4 de Critique (août-septembre 1946) et le numéro 25 (juin 1948) il publie neuf articles. Il n'éditera ensuite que neuf autres textes, dont un consacré à Bataille "Le jeu de la pensée" (n°195-196, août-septembre 1963) et un ultime bref hommage, au titre prémonitoire, dédié à Beckett "O tout finir" (n°519-520, août-septembre 1990), fragment qui ouvre le numéro d'hommages à l'écrivain irlandais.
Notre communication se donnera un double objectif, d'une part, questionner cette petite vingtaine d'articles afin de déceler s'ils sont donnés à Critique pour des raisons circonstancielles ou s'ils correspondent à une dimension particulière de la pensée de Blanchot. D'autre part, on s'interrogera sur des liens plus invisibles que Blanchot a pu tisser avec tel numéro de la revue ou avec tel ou tel auteur ou article auquel il a pu s'attacher particulièrement.

Éric Hoppenot est docteur qualifié en Littérature française et professeur agrégé, il enseigne à l'ESPE de Paris (Université Paris Sorbonne). Il est membre du laboratoire CERILAC (Université Denis Diderot) et chercheur associé au GRES (Université autonome de Barcelone). Il est membre du comité de rédaction de la revue Mémoires en jeu. Il codirige deux collections consacrées à Maurice Blanchot : "Résonances de Maurice Blanchot" (Presses universitaires de Paris X) et "Archives Blanchot" (Éditions Kimé). Il est membre du comité de rédaction de la revue Mémoires en jeu et du comité scientifique de la collection italienne "Macula". Ses recherches portent sur l'œuvre de Maurice Blanchot mais également sur la littérature contemporaine et notamment certaines thématiques : les littératures génocidaires, les rapports entre Bible et littérature, la théorie littéraire (écriture fragmentaire, théorie de la lecture, fictions contemporaines). Il a publié plusieurs articles et dirigé des ouvrages sur Levinas. Il enseigne également le cinéma.

Niilo KAUPPI : Avant-gardes : Critique, Tel Quel
Cette communication se propose d'examiner les rapports de coopération et de compétition entre Critique et Tel Quel dans les années 1960. Au début des années 60, un rapport de filiation se développe entre Georges Bataille et Philippe Sollers. Tel Quel se transforme rapidement d'une revue purement littéraire soutenue entres autres par Michel Foucault en plateforme de toutes les avant-gardes. La radicalisation politique qui en suit crée de nouvelles tensions avec Critique.

Niilo Kauppi est professeur à l'Académie de Finlande et directeur de recherche au CNRS.
Publication
Tel Quel : la constitution sociale d'une avant-garde, 1990, Kelsinki, Societas Scientiarum Fennica (Commentationes Scientiarum Socialium, n°43).

Lawrence D. KRITZMAN : La révolution post-structuraliste : Derrida et Foucault
Cette communication traite des innovations intellectuelles de Jacques Derrida et Michel Foucault dans l'histoire de la pensée française au début des années 1960 dans Critique. Chez Foucault, on examinera des concepts tels que le nom du père, la pensée du dehors et l'idée de transgression. Derrida lance la pratique de la déconstruction dans des essais consacrés à la dissémination et à la force et la signification.

Lawrence D. Kritzman est Pat and John Rosenwald Research Professor of French and Comparative Literature et Director of the Institute of French Cultural Studies. Il a beaucoup écrit sur la Renaissance en France et l'histoire de la pensée française au XXe siècle.

Marielle MACÉ : Poésie pour un monde élargi
La pensée contemporaine, en écho à la crise écologique, a considérablement élargi ses objets d'interrogation : elle invite à reconnaître le statut de "sujets" non pas seulement aux hommes, mais à toutes sortes d'existants, en leur reconnaissant une intériorité, une capacité à agir, parfois même une personnalité juridique… "Être fleuve", "être pierre", "être forêt", fantôme, machine, chimère, oiseau… : autant de modes d'être désormais rassemblés sur une même scène ontologique ou politique, puisque c'est avec chacune de ces formes de vie que nous savons désormais que nous avons à nous lier.
Or la poésie a son mot à dire (et plus qu'un mot) dans cet élargissement, elle qui est, selon le mot de Jean-Christophe Bailly, l'élargissement même. Car ces choses de la nature, qui réclament aujourd'hui si fort qu'on les traite autrement, ce sont les très anciennes choses lyriques. Mieux que quiconque, les poètes savent leur prêter l'oreille (prêter l'oreille à leur plainte, à leur silence, à leur chant, et pourquoi pas à leurs idées, aux nôtres opposées), et nous y aident.

Marielle Macé enseigne la littérature à l'EHESS, où elle est directrice d'études. Elle fait partie des animateurs de la revue Critique. Son travail a porté successivement sur le genre de l'essai, sur la mémoire littéraire, et sur un renouveau de la pensée du style, élargie du domaine de l'art à la qualification de la vie, dans la grande variété de ses modalités.
Publications
Le Temps de l'essai, Belin, 2006.
Façons de lire, manières d'être, Gallimard, 2011.
Styles. Critique de nos formes de vie, Gallimard, 2016.
"Nous", Critique, n°841-842, 2017.
Sidérer, considérer. Migrants en France, Verdier, 2017.
Les Noues, Verdier, à paraître.

Éric MARTY : Roland Barthes à Critique
Les relations entre Roland Barthes et la revue Critique, ce sont d'abord les articles qu'il y publie, ce sont les lettres qu'il envoie à Jean Piel, ce sont enfin les souvenirs de ce dernier. La dimension encyclopédique à laquelle la revue aspire ne pouvait que séduire Roland Barthes même si elle a pu impliquer une certaine neutralité politique, idéologique tout à l'inverse du Théâtre populaire de Robert Voisin, des Lettres nouvelles dirigée par Maurice Nadeau ou encore de la revue Arguments à laquelle Barthes participe avec Edgar Morin ou Kostas Axelos, qui ont été davantage des espaces d'engagement et d'amitié. C'est cette spécificité de la revue Critique et l'usage qu'en a fait Roland Barthes qui seront au centre de notre propos.

Éric Marty est écrivain et universitaire, il enseigne la littérature contemporaine à l'université Paris-Diderot, il est l'auteur de nombreux essais et romans. Il est l'éditeur des œuvres de Roland Barthes.

Sylvie PATRON : Georges Bataille-Éric Weil : correspondance et antipodie
"Sans Blanchot, pas plus que sans Éric Weil, je n'aurais pu réaliser ma revue", déclare Georges Bataille dans un entretien au Figaro littéraire en 1948. Cette communication reviendra sur la correspondance échangée par Georges Bataille et le philosophe Éric Weil ou du moins sur ce qui, de cette correspondance, a pu être retrouvé : quarante-neuf lettres de Weil à Bataille, seize lettres ou copies de lettres de Bataille à Weil, couvrant environ une période de cinq ans et demi. Bien que lacunaire et tronquée, cette correspondance se révèle très intéressante. À travers certaines lettres de Weil, on devine la teneur de celles de Bataille. L'ensemble constitue un témoignage crucial sur les premières années de Critique. On s'intéressera à la fabrique de la revue, aux affaires internes et externes, aux difficultés financières, aux tractations éditoriales, aux problèmes liés à sa direction. On essaiera de déterminer ce qui se joue dans cet échange entre deux hommes que tout oppose, comme le souligne la métaphore des antipodes, utilisée par Weil bien des années plus tard, à la mort de Bataille.

Sylvie Patron est maître de conférences habilitée à diriger des recherches en langue et littérature françaises à l'université Paris Diderot. Ses recherches actuelles concernent la théorie du récit.
Publications
Critique (1946-1996). Une encyclopédie de l'esprit moderne, IMEC, 1999.
À en-tête de Critique. Correspondance [entre Georges Bataille et Éric Weil] (1946-1951), Nouvelles éditions Lignes / IMEC, 2014.

Martin RUEFF
Poète, traducteur et philosophe, Martin Rueff est professeur ordinaire à l'université de Genève. Auteur de plusieurs essais et livres de poésie, il est spécialiste de Rousseau et de l'anthropologie morale des classiques. Il a contribué à l'édition des œuvres de Claude Lévi-Strauss et de Michel Foucault dans la "Bibliothèque de la Pléiade". En 2016, il a publié un recueil des textes de Jean Starobinski sous le titre La beauté du monde, Paris, Gallimard, Quarto. Il est co-rédacteur en chef de la revue Po&sie.


BIBLIOGRAPHIE :

Georges Bataille, Éric Weil, À en-tête de Critique. Correspondance, 1946-1951, édition établie, présentée et annotée par Sylvie Patron, Fécamp et Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, Nouvelles éditions Lignes et IMEC, coll. "Archives de la pensée critique", 2014.
• Sylvie Patron, Critique (1946-1996). Une encyclopédie de l'esprit moderne, Paris, Éditions de l'IMEC, coll. "L'Édition contemporaine", 1999.
• Jean Piel, La Rencontre et la différence, Paris, Fayard, 1982.
• Pierre Prévost, Pierre Prévost rencontre Georges Bataille, Paris, Jean-Michel Place, 1987.


PARTENARIAT :

• Institut Mémoires de l'édition contemporaine (IMEC)


SOUTIENS :

• Centre d’études et de recherches interdisciplinaires de l'UFR Lettres, Arts, Cinéma (CERILAC, URP 441) | Université Paris Cité
Institut Éric Weil | Université de Lille
Revue Critique
• Direction régionale des affaires culturelles Normandie (DRAC)

Programme 2019 : un des colloques

Programme complet


LES SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES

EN RECHERCHE TECHNOLOGIQUE


DU MERCREDI 5 JUIN (19 H) AU MERCREDI 12 JUIN (14 H) 2019

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Charles LENAY, Pascal SALEMBIER, Loic SAUVÉE, Mathieu TRICLOT


ARGUMENT :

L'idée d'une recherche technologique en sciences humaines et sociales peut apparaître comme un paradoxe, tant elle prend à rebours les partages institués entre comprendre et faire, sciences humaines et sciences pour l'ingénieur, savoirs fondamentaux et applications... Alors que le faire technique devrait être une question centrale pour les sciences humaines, la rencontre prend souvent la forme décevante d'une opposition ou d'une instrumentalisation. Opposition, lorsque les techniques sont considérées comme de simples moyens, par différence avec la culture, seule source de sens. Instrumentalisation, lorsque les sciences humaines sont convoquées comme vecteur d'acceptabilité. Mais, à front renversé, ce sont aussi les sciences humaines qui s'emparent des techniques comme des instruments supposés neutres quant à leur propre questionnement.

Le mot d'ordre d'une recherche technologique a réémergé récemment au sein des universités de technologie. De cette "expérimentation" résulte aujourd'hui une diversité de pratiques : elle peut désigner l'ambition d'une techno-logie, prenant les techniques comme terrain d'études, mais elle peut aussi conduire, à rebours, à des formes d'instrumentation technique originales des disciplines des sciences humaines et sociales sur le mode d'un "faire pour comprendre", ou encore s'inscrire dans des démarches de co-conception embarquées sur des projets technologiques. Le groupement d'intérêt scientifique "Unité des Technologies et des Sciences de l'Homme", regroupant les chercheurs des universités de technologie et de l'école d'agronomie UniLaSalle, a nourri la réflexivité sur ces pratiques. L'enjeu de ce colloque consiste à confronter les travaux, menés sur des terrains particuliers — agronomie, design, soin, humanités du numérique, transport —, avec d'autres modes d'intervention des sciences humaines dans les processus d'innovation, de façon à relever le défi du caractère constituant des techniques pour nos sociétés, nos savoirs, nos formes d'expérience.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 5 juin
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Jeudi 6 juin
CONCEPTION
Matin
Charles LENAY : Introduction : Enjeux d'une recherche technologique en SHS

Conception et design, table ronde organisée par Charles LENAY, Pascal SALEMBIER, Matthieu TIXIER & Mathieu TRICLOT, avec :
Nicolas NOVA : Ethnographie du présent, ethnographie des possibles
Emeline EUDES & Véronique MAIRE : La Chaire IDIS, un outil de co-transformation
Anne GUÉNAND : Le design en Université de Technologie
Jacques THEUREAU : La construction d'un programme de recherche technologique en relation organique avec des recherches en sciences humaines et sociales

Après-midi
Véhicule autonome, atelier organisé par Nathalie KROICHVILI, Charles LENAY & Pascal SALEMBIER, animé par Florence BAZZARO, Marjorie CHARRIER & Denis CHOULIER (UTBM)

Soirée
Bernard STIEGLER & Maël MONTÉVIL : La recherche technologique à l'IRI : méthode pour une clinique contributive, avec une intervention vidéo de Gerald MOORE


Vendredi 7 juin
Matin
CONCEPTION
Technologie du Care, table ronde organisée par Xavier GUCHET & Matthieu TIXIER, avec :
Gaël GUILLOUX : La recherche au Care Design Lab
Jean-Philippe PIERRON : Éthique du soin
Benoît SIJOBERT

Après-midi
TECHNO-LOGIES
Faire l'histoire de la technologie / faire de la technologie en histoire : quelle place pour les concepts technologiques en histoire des techniques ?, table ronde organisée par Timothée DELDICQUE & Sacha LOEVE, avec :
Liliane HILAIRE-PÉREZ : Le cultural turn de l'histoire des techniques
Delphine SPICQ : L'Histoire des techniques en Chine dans l'histoire des techniques
Catherine VERNA : L'histoire des techniques médiévales au miroir de la technologie
Pascal BRIOIST : Réseaux et pratiques techniques à la Renaissance

Soirée
Gaëlle GARIBALDI : Expérimenter le design minimaliste avec Tactos


Samedi 8 juin
TECHNO-LOGIES
Matin
Promesses technologiques, table ronde organisée par Guillaume CARNINO, avec :
Cecilia CALHEIROS : IA et corps augmentés : registres d'anticipation chez les transhumanistes
Arnaud SAINT-MARTIN : Le New Space
Aurore STEPHANT : Les promesses de l'extraction minière du futur

Après-midi
Constitutivité sociale, organisée par Guillaume CARNINO, avec Andrew FEENBERG : Technoscience et déréification de la Nature [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]


Dimanche 9 juin
Matin
TECHNO-LOGIES
Qu'est-ce qu'un milieu technique ?, atelier animé par Victor PETIT

Après-midi
AGROTECHNIES
Agrotechniques, table ronde organisée par Michel DUBOIS (La problématique de la domestication dans le contexte des enjeux agricoles contemporains) & Loïc SAUVÉE (L'agriculteur et l'innovation agrotechnique : enjeux contemporains), avec :
José HALLOY : Contraintes de l'anthropocène : des technologies zombies aux technologies vivantes
Georges GUILLE-ESCURET : Les paroles s'envolent et les techniques restent : une source d'instabilité des sciences sociales dans l'interdisciplinarité
Rémi LAURENT : La transformation digitale de l'agriculture comme mutation de l'activité humaine
Séverine LAGNEAUX : Penser l'inter-relation humain - animal - machine

Soirée
Documenter la recherche en train de se faire, animée par Sébastien AUGIER


Lundi 10 juin
AGROTECHNIES
Matin
Constitutivité cognition, organisée par Pierre STEINER, avec Lambros MALAFOURIS : How things shape the mind ?

Après-midi
"HORS LES MURS"
Visite de la ferme expérimentale de La Blanche Maison, animée par Michel DUBOIS et Loïc SAUVÉE

Soirée
Projection-Débat du film Bienvenue les vers de terre, en présence du réalisateur François STUCK


Mardi 11 juin
HUMANITÉS DU NUMÉRIQUE ET PATRIMOINE
Matin
"HORS LES MURS"
Visite du site Fonderie de cloches Cornille-Havard à Villedieu-les-Poêles, animée par Marina GASNIER et Yannick LECHERBONNIER
Présentation de l'activité des fondeurs de cloches sur le long terme, par Philippe CLAIRAY, conservateur des musées de Villedieu, sur le site dit de la Cour du Foyer
Visite de l'entreprise de Fonderie, Villedieu-les-Poêles
Échanges avec Paul BERGAMO, président de Cornille-Havard

Après-midi
Humanités du numérique, table ronde organisée par Marina GASNIER, avec :
Sébastien REMY : Numérisation 3D et conception mécanique
Alexandre DURUPT : Le concept de jumeau numérique
Florent LAROCHE : Le numérique comme outil pour comprendre notre histoire : pour une nécessaire interdisciplinarité


Mercredi 12 juin
Matin
Synthèse, conclusion et perspectives

Après-midi
DÉPARTS


VIDÉO :

Court métrage issu de l'installation "le Confessionnal", réalisé par Sébastien AUGIER (UFC / IUT de Belfort-Montbéliard - Département Métiers du Multimédia & d'Internet).


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Cecilia CALHEIROS
Cecilia Calheiros est en doctorat de sociologie et d'anthropologie à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales où elle est accueillie au sein du laboratoire le Cesor. Ses recherches portent sur les façons dont les technosciences et les environnements technoscientifiques suscitent des croyances autour de la notion de dépassement de soi chez les transhumanistes.

Michel DUBOIS : La problématique de la domestication dans le contexte des enjeux agricoles contemporains
Lorsque la possibilité de créer des plantes transgéniques est apparue il y a quarante ans, les acteurs du monde professionnel des semences étaient partagés : était-ce un nouvel apport dans la continuité de la multimillénaire domestication ou était-ce une rupture ? De même actuellement, où la génomique prend le pouvoir dans l'orientation de la sélection végétale et animale, est-ce pensable comme une continuité de la domestication ou comme une rupture ? On peut penser le fait technique agricole et son évolution sous le prisme de la domestication. Si F. Sigaut a estimé que "la notion empirique de domestication confond des réalités différentes, qu'il faut démêler pour mettre fin à la confusion", notre hypothèse est que, si la production agricole conduit à la domestication, mais que celle-ci semble possible sans agriculture, c'est que la domestication est un processus plus général qu'agricole qui doit être pensé dans une interaction entre technicité humaine et vivant soumis à cette technicité. C'est le triangle vivant-technique-humain qui doit être interrogé. La domestication est un processus qui implique les trois pôles; analyser la relation technique-animal, dans un contexte humain de production, c'est décortiquer le processus de la domestication qui n'est ni une technique, ni un système technique, ni un dispositif technique, et dont la "disparation" vient du fait de l'originalité de chaque espèce et des conditions et contextes de sa domestication. Penser la domestication, c'est donc aussi revoir notre relation aux objets techniques complexes qui peu à peu deviennent biomimétiques, par concrétisation, et "demandent" à être considérés...

Michel Dubois, enseignant-chercheur HDR en épistémologie et philosophie des techniques, ingénieur agronome, docteur en biologie moléculaire végétale, est chercheur dans l'unité de recherche InTerACT à UniLaSalle et chercheur associé au LIED, Univ. Paris-Diderot. Il est membre du GIS UTSH. Ses recherches traitent des problématiques du développement durable et de la transition énergétique, de la transition sociotechnique agricole dans un contexte de développement durable et des mutations conceptuelles associées.
Publications
Dubois M. J. F., 2019, "De nouveaux agriculteurs pour une nouvelle agriculture ?", Nouvelle Revue de Psychosociologie, 28 (à venir).
Fourati-Jamoussi F., Dubois M. J. F., Agnès M., Leroux V., Sauvée L., 2019, "Sustainable development as a driver for educational innovation in engineering school : the case of UniLaSalle", European Journal of Engineering Education, pp 1-19 (à venir).
Dubois M. J. F., Fourati-Jamoussi F., Dantan J., Rizzo D., Jaber M., & Sauvée L., 2019, "The Agricultural Innovation Under Digitalization", in Business Transformations in the Era of Digitalization (Mezghani K., Aloulou W., Eds), pp 276-303, Hershey, Pennsylvania, IGI Global.
Caroux D., Dubois M. J. F., Sauvée L., 2018, Évolution agrotechnique contemporaine II. Transformation de l'agromachinisme : fonctions, puissance, information, invention, Collection "Ingénieur au XXIe siècle", Presses de l'UTBM, 248 p.
Dubois M. J. F., Vitali M.-L., Sonntag M., 2018, Création, créativité et innovation dans la formation et l'activité d'ingénieur, Collection "Ingénieur au XXIe siècle", Presses de l'UTBM, 282 p.
Traitler H., Dubois M., Heikes K., Petiard V., Zilberman D., 2017, Megatrends in Food and Agriculture : Technology, Water Use and Nutrition, London, John Wiley & sons.
Dubois M. J. F., Fourati-Jamoussi F., 2017, "Intelligence économique et développement durable : réflexion intégrative", Revue internationale d'Intelligence Économique, 9 (1), pp 77-94.
Dubois M. J. F., Sauvée L., 2016, Évolution agrotechnique contemporaine. Les transformations de la culture technique agricole, Collection "Ingénieur au XXIe siècle", Presses de l'UTBM, 236 p.
Dubois M. J. F., 2016, Vivre dans un monde sans croissance - Quelle transition énergétique ?, Paris, Desclée de Brouwer, 278 p.
Fourati-Jamoussi F., Agnès M., Dubois M. J. F., Leroux V., Rakotonandraina N., Kotbi G., & Sauvée L., 2015, "How to promote, support and experiment sustainability in higher education institutions ? The case of LaSalle Beauvais", in France. Int. J. Innovation and Sustainable Development, 9 (3-4), pp 227-245.
Dubois M. J. F., 2015, La métaphore et l'improbable, Paris, L'Harmattan, Col. "Ouverture philosophique".

Emeline EUDES & Véronique MAIRE : La Chaire IDIS, un outil de co-transformation
À la Chaire IDIS - Industrie, Design & Innovation Sociale, nous développons une esthétique du déplacement. Déplacement des compétences, des discours, déplacement des manières de fabriquer du sens, de l'objet et des histoires. Projet après projet, nous interrogeons la forme de "l'entreprise collective" (Guattari, 1989) dans le but de créer des milieux de production et de vie où s'active la co-transformation des acteurs d'un territoire. La méthodologie du design y est exploitée en tant qu'outil pour une recherche engagée vers des solutions réelles, pour les acteurs de la production locale, mais aussi pour les habitants et le milieu associatif. En passant par le projet de design et les collaborations avec différents corps professionnels (sociologues, designers, entrepreneurs, artisans, compagnons du devoir, formateurs…), nous prototypons des situations de recherche, des situations de transfert de connaissances, mais aussi des situations pédagogiques donnant elles-mêmes lieu à des prototypes d'objets. Au fil des rencontres et des projets, c'est finalement l'enjeu de la co-transformation qui s'est fait jour et que nous proposons ici d'explorer davantage.

Docteur en Esthétique, Sciences et Technologies des Arts de l'Université Paris 8, Emeline Eudes est chercheuse en esthétique environnementale. Ses travaux s'attachent à étudier les points de rencontre entre art, environnement et politique. Elle a ainsi travaillé sur les créativités habitantes en milieu urbain (post-doctorat au Ladyss-CNRS), sur l'art et l'activisme environnemental ou encore sur le rôle culturel et politique de l'artiste en milieu scolaire (chargée du post-diplôme Artiste Intervenant en Milieu Scolaire - AIMS - de l'ENSBA, Paris).
Publications
Avec Sandrine Baudry : "Urban Gardening : between Green Resistance and Ideological Instrument", in The Sage Handbook of Resistance, dir. Couprasson & Vallas, 2016.
Machines de guerre urbaines, dir. Antonioli, 2015.
Faut pas pousser, Design et végétal, ESAD de Reims, 2013.
Au-delà du Land Art, revue Marges, n°14, 2012.
Elle est actuellement responsable de la recherche à l'ESAD de Reims et accompagne la Chaire IDIS dans sa démarche de recherche en design, avec qui elle a publié, en co-direction avec Véronique Maire, La fabrique à écosystèmes. Design, territoire et innovation sociale, Loco, 2018.

Véronique Maire est designer et enseignante en design à l'ESAD de Reims. Elle a débuté sa carrière au sein du studio de création Andrée Putman où elle a développé des produits pour la maison. En 2001, elle a cofondé le studio IK Design, puis elle a créé son propre bureau de création en 2006, en privilégiant son intérêt pour les savoir-faire et l'univers de la table. Elle a, aujourd'hui, lancé sa propre marque, mamama, dédié aux objets de la table, lui permettant de toucher directement les problématiques de la production et de la distribution. Au sein de l'ESAD de Reims, elle est impliquée dans le programme de recherche fondateur sur l'autoproduction, qui s'inscrit dans l'unité de recherche "Formes de l'Innovation Sociale". Depuis 2015, elle est titulaire de la Chaire IDIS. Son rôle est d'animer, de fédérer et de médiatiser les différentes actions de la Chaire IDIS et de mener des projets de recherche avec les étudiants de Master Design objet. En 2018, elle a publié, en co-direction avec Emeline Eudes, La fabrique à écosystèmes. Design, territoire et innovation sociale (Loco).

Andrew FEENBERG : Technoscience et déréification de la Nature
Quelle est le rapport entre la science et la technologie ? Autrefois on a cru que la technologie était une science appliquée et que la science proprement dite occupait une "tour d'ivoire", isolée du monde social. Mais on comprend aujourd'hui que la science dépend de la technologie tout autant que l'inverse. De plus, après la deuxième guerre mondiale, les gouvernements s'intéressent à la science et interviennent pour orienter son développement. Plus récemment, depuis la montée de la biologie comme science dominante, les entreprises pharmaceutique et chimique jouent de plus en plus un rôle actif dans les sciences, les subordonnant aux objectifs techniques et à la production de produits commerciaux. Et, finalement, c'est le public qui commence à s'intéresser aux agissements de tous ces acteurs officiels et professionnels. Notre vie de tous les jours est impliquée dans leurs décisions. La pollution et surtout le changement climatique mobilisent l'opinion et maintenant aussi de nombreux jeunes dans la rue. La paix de la tour d'ivoire est définitivement troublée. Le mot "technoscience" résume cette nouvelle condition.

Andrew Feenberg est philosophe. Il a occupé la Canada Research Chair in Philosophy of Technology à Simon Fraser University. Il est aussi Directeur de Programme au Collège International de Philosophie.
Ses recherches portent sur la philosophie de la technologie, l'internet et L'École de Frankfort. Il a écrit de nombreux articles et livres sur la philosophie de la technologie.
Sont disponibles en français (Re)Penser la technique (La Découverte, 2004) ; Pour une théorie critique de la technique (Lux Éditeur, 2014) ; Philosophie de la praxis (Lux Éditeur, 2016). Son dernier livre est Technosystem : The Social Life of Reason (Harvard, 2017).
Pour plus d'information, consulter sa page web : sfu.ca/~andrewf.

Georges GUILLE-ESCURET : Les paroles s'envolent et les techniques restent : une source d'instabilité des sciences sociales dans l'interdisciplinarité
Les techniques représentent avec le langage et le substrat biologique l'une des trois entrées principales dans les faits humains, y compris au niveau de la société. Hélas, depuis le milieu du XIXe siècle, l'antagonisme idéologique qui hante les sciences sociales entre le réductionnisme biologique et la puissance de la faculté symbolique, a systématiquement marginalisé et amoindri le rôle intrinsèque des techniques dans l'organisation des modes de vie humains. Le fait est que, sans le rétablissement complet de cette catégorie de faits au premier plan des discussions, l'interdisciplinarité incorpore une instabilité désastreuse dès qu'elle implique l'action des données sociologiques dans ses recherches. On peut d'ailleurs inverser la formulation : le rééquilibrage de l'interdisciplinarité, grâce à une prise en compte complète des rapports techniques, constitue sans doute le meilleur moyen de délivrer l'anthropologie des obsessions que l'évolutionnisme infiltre encore et toujours dans nos problématiques.

Georges Guille-Escuret est directeur de recherche en anthropologie au CNRS, centre Norbert Elias, UMR 8562, Marseille et Avignon, il a orienté ses domaines de recherche en ethno-écologie, c'est-à-dire au niveau de l'interaction entre sciences naturelles (du vivant) et sciences humaines et sociales, selon une approche épistémologique et méthodologique des relations interdisciplinaires sur la frontière sciences naturelles/sciences sociales.
Publications
2018, Structures sociales et systèmes naturels : l'assemblage scientifique est-il réalisable ?, ISTE, Londres, 233 pages (puis parution en anglais chez ISTE & Wiley).
2017, avec S. Park, Sociobiology vs Socioecology : Consequences of an Unraveling Debate, ISTE & Wiley, London, 196 pages (puis paru aussi en français chez ISTE).
2017, avec G. Anichini, F. Carraro, Ph. Geslin, Technicity vs Scientificity : Complementarities and Rivalries, ISTE & Wiley, London, 203 pages (puis paru aussi en français chez ISTE).
2016, "L'observation des hommes boutée hors du champ scientifique : une rouerie épistémologique", Raison Présente, n°195 ("L'anthropologie et ses raisons"), p. 91-100.
2015, "Darwin Charles", "Écologie humaine" et "Haeckel Ernst", in D. Bourg et A. Papaux (dir.), Dictionnaire de la pensée écologique, Paris, PUF, p. 239-240, p. 328, 330, et p. 516-518.
2015, "Un homme renversant. Réflexions sur l'escamotage de l'anthropologie de Darwin", in Guillaume Lecointre et Patrick Tort (éds), Le monde de Darwin, Paris, Éditions de La Martinière, p. 133-149.
2014, L'écologie kidnappée, Paris, PUF, 360 pages.
2012, Les mangeurs d'autres. Civilisation et cannibalisme, Paris, Éditions de l'EHESS, Cahiers de L'Homme, 292 pages.
2011, "Retour aux modes de production sans contrôle philosophique", in Cultures matérielles, Techniques & Culture, n°54-55, pp. 484-503, (daté 2010).
2010, "L'homme modifié, la nature manipulée et les savoirs décousus", Actes de la Xe Rencontres Internationales de Carthage, L'Homme et la Nature (2007), Académie Beit El Hikma, Tunis, pp. 79-104.
2008, "Le syndrome micromégas et les glissières du rapport nature/culture : l'exemple du cannibalisme", Techniques & Culture, n°50, pp. 182-205.
2007, "L'homme modifié, la nature manipulée et les savoirs décousus", Xe Rencontres Internationales de Carthage, L'Homme et la Nature, Académie Beit El Hikma, Tunis, pp. 79-104.
2004, "Les techniques entre tradition et intention", Techniques & Culture, n°42, pp. 97-110.
1994, Le décalage humain - Le fait social dans l'évolution, Paris, Éditions Kimé.

José HALLOY : Contraintes de l'anthropocène : des technologies zombies aux technologies vivantes
L'avènement de l'anthropocène pose des questions existentielles et remet en question l'ensemble des technologies issues des révolutions industrielles survenues depuis le XVIIIe siècle. L'anthropocène impose des analyses sur la longue, voire la très longue durée. L'utilisation progressivement massive des combustibles fossiles (charbons, pétroles, gaz) a favorisé le développement de technologies basées sur des matériaux, essentiellement d'origines minérales, ou des dérivés de la pétrochimie. L'ensemble de ces technologies posent deux questions fondamentales qui sont liées : d'une part, leurs contributions respectives aux dérèglements climatiques, et, d'autre part, l'épuisement des ressources minérales. Les technologies devraient perdurer sur la très longue durée et être installables à l'échelle planétaire. L'essentiel des technologies héritières de la révolution industrielle sont en fait des technologies zombies qui agissent et continuent d'envahir le monde, mais sont déjà mortes à l'aune de la durabilité. Par comparaison et comme élément de solution, le vivant sur Terre existe depuis environ 3 milliards d'années, ce que nous pouvons considérer comme durable. L'agriculture inventée depuis environ 12000 ans est potentiellement durable. Hélas, l'agriculture industrielle est également devenue un zombie. Dès lors, les questions qui nous occupent sont de déterminer les liens entre technologies vivantes et soutenabilité maus aussi de rappeler à la vie certaines des technologies zombies. De nouveaux systèmes techniques, fondés sur des machines vivantes, devraient permettre à l'humanité de traverser des millénaires.
Bibliographie
IPCC, 2014, Climate Change 2014 : Synthesis Report. Contribution of Working Groups I, II and III to the Fifth Assessment Report of the Intergovernmental Panel on Climate Change [Core Writing Team, R.K. Pachauri and L.A. Meyer (eds.)], IPCC, Geneva, Switzerland, 151 pp.
IPCC, 2018, Summary for Policymakers. In : Global Warming of 1.5°C. An IPCC Special Report on the impacts of global warming of 1.5°C above pre-industrial levels and related global greenhouse gas emission pathways, in the context of strengthening the global response to the threat of climate change, sustainable development, and efforts to eradicate poverty [Masson-Delmotte, V., P. Zhai, H.-O. Pörtner, D. Roberts, J. Skea, P.R. Shukla, A. Pirani, W. Moufouma-Okia, C. Péan, R. Pidcock, S. Connors, J.B.R. Matthews, Y. Chen, X. Zhou, M.I. Gomis, E. Lonnoy, Maycock, M. Tignor, and T. Waterfield (eds.)], World Meteorological Organization, Geneva, Switzerland, 32 pp.
Smil, V. (1994), Energy in world history.
Smil, V. (2008), Energy in nature and society : general energetics of complex systems, MIT press.
Smil, V. (2016), Making the modern world : materials and dematerialization, Lulu Press, Inc.

José Halloy est professeur de physique au Laboratoire interdisciplinaire des énergies de demain, LIED UMR 8236 à l'université Paris Diderot. Il enseigne la modélisation de systèmes complexes et la physique. Ses recherches portent sur deux domaines : la durabilité et les systèmes bio-hybrides. La recherche sur la durabilité porte sur le couplage entre les matériaux, la production d'énergie et les technologies. La recherche sur les systèmes bio-hybrides porte sur les comportements collectifs et l'intelligence émergente que les systèmes biologiques et artificiels peuvent produire. Il est nécessaire de développer des interfaces entre systèmes intelligents vivants et artificiels tels que des robots et des systèmes intelligents.
Publications
Halloy J., Sempo G., Caprari G., Rivault C., Asadpour M., Tâche F., … & Detrain C. (2007), "Social integration of robots into groups of cockroaches to control self-organized choices", Science, 318 (5853), 1155-1158.
Caprari G., Colot A., Siegwart R., Halloy J., & Deneubourg J. L. (2005), "Building mixed societies of animals and robots", IEEE Robotics & Automation Magazine, 12 (2), 58-65.
Gribovskiy A., Halloy J., Deneubourg J. L., Bleuler H., & Mondada F. (2010, October), "Towards mixed societies of chickens and robots", 2010 IEEE/RSJ International Conference on Intelligent Robots and Systems (pp. 4722-4728), IEEE.
Bonnet F., Gribovskiy A., Halloy J., & Mondada F. (2018), "Closed-loop interactions between a shoal of zebrafish and a group of robotic fish in a circular corridor", Swarm Intelligence, 12 (3), 227-244.
Cazenille L., Collignon B., Chemtob Y., Bonnet F., Gribovskiy A., Mondada F., … & Halloy J. (2018), "How mimetic should a robotic fish be to socially integrate into zebrafish groups ?", Bioinspiration & biomimetics, 13 (2), 025001.
Bonnet F., Mills R., Szopek M., Schönwetter-Fuchs S., Halloy J., Bogdan S., … & Schmickl T. (2019), "Robots mediating interactions between animals for interspecies collective behaviors", Science Robotics, 4 (28), eaau7897.

Liliane HILAIRE-PÉREZ : Le cultural turn de l'histoire des techniques
Depuis deux générations, l'histoire des techniques s'est détachée d'approches internalistes qui la réduisaient à la succession de grandes inventions — une histoire linéaire et eurocentrée fondée sur le culte du progrès. Une attention croissante a été portée aux dynamiques culturelles, aux médiations et aux contextes locaux : sciences du génie, inventivité, circulations et transmissions, "espace public" des techniques, secret et publicité des savoirs, littérature technique sont devenus des objets d'histoire. L'un des apports majeurs concerne l'histoire de l'invention, thème classique de l'histoire des techniques. Loin du mythe du génie et des révolutions techniques, loin des dynamiques internes du changement technique, l'invention a été analysée à la lumière des travaux sur l'intelligence technique, comme résultant de capacités à imiter, adapter, transposer et combiner des procédés, des outils, des équipements d'un secteur à un autre. C'est la nature relationnelle de l'invention qui a retenu l'attention, ses liens avec les aptitudes au réseau et à l'échange. Cette dynamique sociale de l'invention est indissociable de dispositifs institutionnels. De multiples manières, les pouvoirs publics, conscients des atouts de la technique pour la guerre, le prestige et la puissance économique, ont encouragé la publicisation des inventions et les dynamiques d'intéressement collectives. Un jalon dans ces approches a été fourni par la notion d'"open technology", de "technique ouverte". En parallèle, s'est développé un courant d'étude spécifique sur la pensée technique. D'une part, des études sur les ingénieurs ont mis en valeur les sciences de la conception, les méthodes de résolution de problème et les modes de communication spécifique à cette communauté naissante depuis la fin du Moyen Âge. D'autre part, l'analyse d'un genre littéraire, les réductions en art, a promu une compréhension des techniques comme objet d'abstraction et de théorisation. Ces arts participent de la naissance d'une science des arts qui aboutit au XVIIIe siècle à des grandes entreprises, comme l'Encyclopédie. En même temps, en Allemagne, apparaissent des enseignements de "technologie", définie comme la science des arts. On retient notamment L'introduction à la technologie (Anleitung zur Technologie) de Johann Beckmann en 1777. C'est au cours du XIXe siècle que le mot "technologie" acquiert le sens de technique industrielle, notamment en anglais, aux États-Unis. L'un des points forts de l'histoire culturelle des techniques a été de montrer que la technique pouvait donner lieu à une théorisation qui ne se confondait pas avec l'application de la science à la pratique. Actuellement, de nouvelles pistes sont ouvertes comme l'attestent, d'une part, les études sur les processus intellectuels de l'analogie et de la pensée de synthèse, clés de voûte de la pensée technique, pratique et théorique, et, d'autre part, les recherches sur la place des techniques dans la pensée métaphorique et symbolique, qu'il s'agisse des cosmogonies grecques antiques, de l'étude des concepts économiques qui, depuis le XVIIIe siècle, ont fait un large usage de la mécanique et de la thermo-dynamique, de l'analyse des figures du discours de la transition énergétique ou encore du vocabulaire des sciences sociales dans les années 1990-2000. Ainsi, alors que les techniques sont omniprésentes dans notre monde, les historiens se donnent la possibilité d’historiciser les schèmes techniques qui informent nos "images du monde" (du vivant, de l'univers, du social …). Cet exercice réflexif, ce jeu de miroirs entre la pensée et l'objet qui est le propre des techniques et que les logiques instrumentales effacent si souvent, fait l'une des originalités de la recherche actuelle.

Liliane Hilaire-Pérez est professeur d'histoire moderne à l'université Paris Diderot et directrice d'études à l'EHESS. Ses travaux actuels concernent l'histoire intellectuelle des techniques, qu'il s'agisse de la théorisation des techniques, codifiées et réduites en principes ou de l'histoire de l'abstraction en milieu artisanal, à partir des langages des praticiens. Elle est directrice de la revue ARTEFACT. Techniques, histoire et sciences humaines.
Publications
L'invention technique au siècle des Lumières, Paris, Albin Michel, 2000.
La pièce et le geste. Artisans, marchands et savoirs techniques à Londres au XVIIIe siècle, Paris, Albin Michel, 2013.

Séverine LAGNEAUX : Penser l'inter-relation humain - animal - machine
L'approche "humanimachine" repose sur une empirie longue dans différents élevages européens. Deux éléments la caractérisent. Tout d'abord, adopter les points de vues "humanimachines", c'est d'emblée penser par trois. Grâce à cette triple prise en compte des pratiques quotidiennes des protagonistes principaux de l'élevage (l'éleveur, les animaux de rente et les machines), il est possible de s'extraire de la polémique opposant technophiles et technophobes, d'outrepasser la controverse envisageant la machine soit comme un instrument de libération soit comme une menace d'asservissement. En effet, et c'est là une seconde caractéristique, ce sont les processus multiples à l'œuvre dans les étables qui sont au cœur de l'analyse. Suivre les formes d'attachement/détachement, upgradation/rétrogradation, connexion/déconnexion/dysconnexions sans toutefois faire de ces processus l'apanage exclusif des humains permet de comprendre que les catégories ontologiques fluctuent. Par-delà toute forme d'essentialisation, il s'agit donc d'analyser les jeux de forces contraires ou convergentes entre les protagonistes et leurs environnements. Ainsi que le dévoile le terrain, les éleveurs sont pris dans des agencements suscités par les non-humains, en même temps que bêtes et robots sont également producteurs de liaison et de déliaison. Cette approche évite de poser un regard trop statique sur les protagonistes de l'élevage. Elle vise à penser les effets, les adaptations ou les transformations que chacun fait subir aux autres. En plongeant au cœur d'un élevage laitier robotisé, en observant les interactions et les pratiques quotidiennes de chaque protagoniste, une esthétique de la routine ouverte s'est faite jour. En analysant les processus qui président à l'anticipation dont l'éleveur doit sans cesse faire preuve pour maintenir l'équilibre éphémère de son système d'élevage fondé sur la routine, diverses formes de décentrement et de multiples manières de faire exister les altérités constituantes surgissent. Elles permettent de composer et de penser une communauté de dissemblables en permanente transformation.

Séverine Lagneaux est chercheure en anthropologie, professeure invitée de l'UCLouvain où elle coordonne la Chaire P. Lamy "Anthropologie de l'Europe contemporaine". Ses travaux portent sur la paysannerie européenne ainsi que sur les relations entre humains et non humains (animaux d'élevage et robots) dans divers milieux techniques en Belgique, France et Roumanie. Récemment, ses recherches s'ouvrent aux multiples formes d'attachements/détachements entre les acteurs du milieu danubien (les riverains, le Danube, ses infrastructures, sa faune, les institutions, …). Ce projet a pour ambition de dégager des trajectoires cosmopolitiques le long du fleuve, de penser et construire un "vivre ensemble et séparé en même temps" au cœur de l'Europe infrapolitique.
Ouvrages publiés
LAGNEAUX S., Eternel provisoire. Ethnographie de la paysannerie roumaine à l'heure européenne, Louvain-la-Neuve, Academia/L'Harmattan, 2016.
VAN DAM D., LAGNEAUX S., STREITH M., NIZET J., Les collectifs en agriculture bio, entre idéalisation et réalisation, Paris, Educagri, 2017.
LAGNEAUX S., SERVAIS O. (dir.), Humanimachine : fabriquer, apprivoiser, intégrer, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2019 (à paraître).
LAGNEAUX S., BECKER J., Routines et peau de vache, film documentaire, 30 minutes (à paraître).
Chapitres d'ouvrages
LAGNEAUX S., "Joana et l'héritier du gospodar : une incorporation réciproque à valoriser", in MIHAILESCU V. (dir.), Noi culturi. Noi antropologii, Bucarest, Humanitas, 2012, pp. 155-161 (en ligne).
LAGNEAUX S., ""Transition insécurisée" dans les campagnes roumaines ?", in BREDA C., DERIDER M., LAURENT P-J. (dir.), Modernité insécurisée, LLN, Academia, 2012.
LAGNEAUX S., "Robot de ferme : reformuler la dichotomie naturel – artefact", in MAZZOCCHETTI J., SERVAIS O., BOELLSTORFF T., MAURER B. (dir.), Humanités réticulaires. Nouvelles technologies, altérités et pratiques ethnographiques en contextes globalisés, LLN, Academia/L'Harmattan, 2015, pp. 217-241.
LAGNEAUX S., "La ferme 2.0 ou la libération contrainte d'une communauté hybride en Belgique", in CROS M., BONDAZ J., LAUGRAND F. (dir.), Bêtes à pensées. Visions des mondes animaux, Vrin, 2015, pp. 87-115.
CHARLIER B., LAGNEAUX S., SIMON L., STRIVAY L., "Animaux", in SAILLANT F., KILANI M. (dir.) Anthropen. Le Dictionnaire francophone d'anthropologie ancré dans le contemporain.
LAGNEAUX S., "Domesticating the machine ? (Re)configuring domestication practices in robotic dairy farming", in STEPANOFF C., VIGNE J-D., Hybrid Communities. Biosocial Approaches to Domestication and Other Trans-species Relationships, London, Routledge, 2018.
LAGNEAUX S, BECKER J., "Routines. Le travail en élevage laitier robotisé : de la libération à la coopération humanimachine", in LAGNEAUX S., SERVAIS O. (dir.), Humanimachine : fabriquer, apprivoiser, intégrer, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2019 (à paraître).
LAGNEAUX S., "What is like to be a vache ? Réflexion sur l'ethnographie et l'expérimentation de points de vue autres", in CHARLIER B., GRARD C., LAUGRAND F., et al., Écritures des terrains anthropologiques, L'Harmattan, 2019 (à paraître).
Articles
LAGNEAUX S., "La vache, l'éleveur et l'investisseur. De la tradition à l'industrialisation une reconfiguration des campagnes ?", in Sociologie romaneasca, n°2/2012.
LAGNEAUX S., SERVAIS O., "De la traite robotisée aux raids d'avatar. Incorporation et virtualisation", in Parcours anthropologique, 2014 (en ligne).
LAGNEAUX S., "Faire comme si et faire comme ça. Imitation et analogisme en élevage laitier robotisé", in Tsantsa, n°20, 2015.
LAGNEAUX S., STREITH M., VAN DAM D., NIZET J., "Fabriquer un fromage de chèvre et démultiplier le "local"", in Anthropology of food, 2018 (en ligne).
Articles à paraître et en soumission
LAGNEAUX S., "Cosmogonie et agonie, le dilemme du cochon roumain", in Frontières (en révision).
LAGNEAUX S., NIZET J., ""Faut que ça tourne !", une esthétique de la routine ouverte en élevage européen ?", in Anthropologica (révision soumise).

Rémi LAURENT : La transformation digitale de l'agriculture comme mutation de l'activité humaine
L'agriculture bénéficie aujourd'hui de la croissance rapide des technologies numériques. Les robots, d'abord fixes pour la traite, se déploient à présent dans les champs pour désherber. Les drones, équipés de caméras multi-spectrales, viennent compléter les images satellite pour cartographier les parcelles et optimiser les différents apports (engrais, phytosanitaires). Les objets connectés mettent à disposition des alertes ou des données alimentant en continu des outils d'aide à la décision basés sur des modèles issus de la R&D, contribuant ainsi à une "agriculture de précision". Les outils et réseaux sociaux permettent aux agriculteurs d'échanger des bonnes pratiques, imaginer ensemble de nouveaux itinéraires techniques, partager main d'œuvre et matériel, avec la pratique du "co-farming". Ces technologies, mises au service d'une agriculture durable, renforcent la culture collective du secteur agricole et pose de nouvelles questions. L'une d’elles, centrale, est la place de l'activité humaine. Celle-ci, qui pouvait parfois apparaître comme une application de recettes issues de la recherche, (re)devient une activité d'agronome et de décideur grâce aux informations disponibles à tout moment et appliquées à l'exploitation agricole. Ces technologies améliorent considérablement les conditions de travail (organisation, pénibilité) mais transforment aussi radicalement le métier d'agriculteur. Plus que les technologies, qui trouveront progressivement leur place partout où elles prouveront leur utilité, c'est donc bien par la place de l'homme et de ses nouvelles activités que se fera la réussite de cette transformation digitale, ce qui forgera l'agriculture de demain.

Ingénieur en intelligence artificielle et robotique de formation, Rémi Laurent est directeur Innovation-R&D des Chambres d'agriculture de Normandie. Il a contribué au développement de l'innovation dans les TPE régionales durant vingt ans avant de mettre en place et de diriger un pôle d'innovation national dédié à l'intelligence économique, l'innovation et les technologies numériques pour l'artisanat. Il coordonne les actions d'innovation et de R&D des Chambres d'agriculture de Normandie depuis bientôt dix ans et pilote plusieurs actions de transformation digitale de l'agriculture.
Publications
Bisson Christophe, Guibey Ingrid, Laurent Rémi, Dagron Pascal, "Prospective territoriale et Système Stratégique de Signaux Précoces pour une Intelligence Collective de l'Agriculture appliquée aux filières de l’élevage bovin", in Torre A., Vollet D. (eds), 2016, Partenariats pour le développement territorial, Éditions Quæ, Collection "Update Sciences & technologies", 256 p.
"Droit des données agricoles : dossiers propriété (Christophe ALLEAUME), contrats (Thibault DOUVILLE), droit de la concurrence (Anne-Sophie CHONÉ-GRIMALDI)", in Droit rural, n°469 (janvier 2019).
Management de l'innovation : recueil de normes, AFNOR, mai 2014, 428 p.

Charles LENAY : Introduction : Enjeux d'une recherche technologique en SHS
Il s'agira de montrer l'urgence, l'ambition et en même temps la nécessaire humilité, d'une recherche sur le fait et le faire technique. En effet, si les outils et systèmes techniques sont bien constituants de notre humanité — de nos façons d'agir, de percevoir, de penser, d'interagir et de former des collectifs — alors il est urgent de comprendre ce qui nous arrive avec les grandes mutations technologiques actuelles, numériques, systémiques et écologiques. L'ambition d'une telle recherche technologique devrait être de comprendre comment les schèmes de fonctionnement des outils, machines et algorithmes structurent nos interactions avec le monde et nos organisations sociales, comment le sens même de nos activités humaines est reconfiguré dans le mouvement de l'innovation. Mais, en même temps, la constitutivité technique de nos activités cognitives implique une nécessaire réflexivité sur les conditions de nos propres recherches, réflexivité qui désarme les classiques positions de surplomb de la philosophie et des sciences humaines vis-à-vis des phénomènes techniques et sociaux. Pour cela, nous avons besoin de cadres théoriques et de méthodes originales, comme de savoir participer aux processus de conception, savoir négocier les questions de recherche avec le monde industriel, ou savoir outiller les débats citoyens sur les orientations de politique technologique.

Charles Lenay est professeur en philosophie et sciences cognitives à l'université de technologie de Compiègne, directeur adjoint du laboratoire Connaissances, Organisations et Systèmes TECHniques (COSTECH), co-responsable du master User eXperience Design (UxD) et du Groupement d'Intérêt Scientifique (GIS) - Unité des Technologies et des Sciences de l'Homme (UTSH). Ses travaux visent à développer une recherche technologique en sciences humaines, en particulier dans le champ des technologies cognitives. Dans ce cadre, il a mis en place une plateforme de Suppléance Perceptive dans laquelle sont développés différents systèmes d'aide pour les personnes aveugles (système Tactos, Intertact, Dialtact). En sciences et technologies cognitives il développe un paradigme expérimental minimaliste permettant une étude systématique de la constitutivité technique de l'expérience humaine, et ouvrant sur une approche interactionniste de la cognition sociale.
Publications
C. Lenay, P. Salembier, P. Lamard, Y.-C. Lequin, et L. Sauvée, "Pour une recherche technologique en sciences humaines et sociales", in SHS Web of Conferences, Vol. 13, Paris-Est Créteil, 2014.
C. Lenay et M. Tixier, "From Sensory Substitution to Perceptual Supplementation : Appropriation and Augmentation", in Living Machines : A Handbook of Biomimetic and Biohybrid Systems, Oxford University Press, Tony J. Prescott, Nathan Lepora, and Paul F.M.J Verschure (Eds.), 2018, pp. 548-555.
C. Lenay, "Leroi-Gourhan : Technical trends and human cognition", in French philosophy of Technology, Springer, 2018.
C. Lenay et G. Declerck, "Technologies to Access Space Without Vision. Some Empirical Facts and Guiding Theoretical Principles", in Mobility of Visually Impaired People, E. Pissaloux et R. Velazquez (Eds.), Springer, 2018, pp. 53 75.
C. Lenay, "Explanatory schemes for social cognition - A minimalist Interaction-based approach", Pragmatism Today, Vol. 8, Issue 1, 2017, pp. 63-86.

Nicolas NOVA : Ethnographie du présent, ethnographie des possibles
Si des formes diverses d'observation, participante ou non, ont été mobilisées par les designers tout au long du XXe siècle, les trente dernières années ont vu une intensification des liens entre ethnographie et design. En parallèle des démarches maintenant courantes de design centré-utilisateurs — qui s'appuient sur une compréhension des usages afin d'imaginer des produits ou services technologiques — d'autres approches sont apparues récemment. En présentant une série d'exemples, cette intervention décrira comment l'enquête de terrain ethnographique peut être mobilisée dans la création de design fiction, c'est-à-dire de scénarios prospectifs matérialisés sous forme d'objets (court-métrage vidéo, catalogues ou manuels d'objets fictifs). Le résultat peut être vu comme une forme d'"ethnographie des possibles" (Halse, 2016) ou d'"ethnographie spéculative" dont l'objet est moins de décrire une situation présente en vue de la modifier, que de servir de moyen pour débattre des produits, services ou technologies, et, plus largement, de discuter des conséquences et enjeux éventuels posés par ceux-ci.

Bibliographie
Léchot Hirt L., Nova N., Kilchör F. & Fasel S., 2016, "Design et ethnographie : comment les designers pratiquent les études de terrain", Technique et Culture, n°64, "Essais de bricologie. Ethnologie de l’art et du design contemporains", p. 27-38.
Nova N., Léchot Hirt L., Kilchör F. & Fasel S., 2015, "De l’ethnographie au design, du terrain à la création : tactiques de traduction", Sciences du design, n°1, pp. 86-93.
Nova N., 2014, Futurs ? La panne des imaginaires technologiques, Lyon, Les Moutons Électriques.
Nova N. 2014, Beyond Design Ethnography : How Designers Practice Ethnographic Research, SHS Publishing, Berlin.

Jean-Philippe PIERRON : Éthique du soin
Les philosophies du soin et les éthiques du care ont mis en valeur, à partir d'une anthropologie de la vulnérabilité, l'importance d'une autonomie relationnelle. À cette fin, elles nous rendent attentives à toutes ces relations qui nous individuent, valorisant de ce fait des interactions humaines, souvent invisibles ou invisibilisées, qu'elles haussent au rang de relations pour prendre leur distance à l'égard de rapports fonctionnels purs. Dans cet esprit la technique demeure impensée, sous-entendu elle serait impersonnelle, ne serait pas du soin et risquerait de le perturber sinon de l'empêcher. Pourtant, cette valorisation des relations questionne le cadre organisationnel et technique au sein duquel ces relations se déploient. Plutôt que de le concevoir simplement comme un décor, peut-on l'envisager comme un cadre interprétatif au sein duquel des valorisations sont présentes et à vivre ? La chambre d'hôpital par exemple, plutôt que de n'être pensée que comme une théorie matérialisée (asepsie, pneumologie avec la rampe à oxygène, etc.), pourrait-elle se penser comme du soin matérialisé (ergonomie de la prise en charge avec le lit médicalisé, numéro de chambre sans nom et arbitrage sur la confidentialité) ? Dans cette perspective, le soin ne sera pas toujours là où il s'exhiberait le plus. Non seulement il forcerait à prendre soin des donneurs de soin, mais également à mettre au jour le soin par et dans la technique comme elle-même porteuse de valeurs du soin. Peut-on faire l'hypothèse alors que le soin se donne aussi dans de légitimes objectivations — ce qui n'empêche pas de contester les formes que prennent les relations humaines quand elles sont distordues par des systèmes techniques ? Nous prendrons l'exemple de l'irruption du numérique dans le monde du soin, sous la triple figure de la robotique (le carebot), de l'Intelligence artificielle dans le traitement des données massives et du logiciel de saisie des actes de soin, comme donnant l'occasion de penser ce que pourrait être un soin dans la technique, dans un système technique concret et individuant, de façon à ce que les valeurs relationnelles du soin pénètrent la technique.

Loïc SAUVÉE : L'agriculteur et l'innovation agrotechnique : enjeux contemporains
Comprendre le fait technique agricole et son évolution, c'est tenter de saisir le mouvement à la fois constitutif et constituant des multiples interactions entre l'agriculteur et ses réseaux sociotechniques, le vivant animal et végétal, et la société. La conjonction de demandes sociétales, de transformations numériques et de changement climatique place l'évolution agrotechnique contemporaine dans un vaste champ des possibles, avec de nombreuses opportunités permises par les potentialités quasi infinies d'invention, d'innovation, de concrétisation à l'interface vivant/technique, avec l'émergence de solutions souvent implémentées par les agriculteurs eux-mêmes. Le fait technique agricole apparaît ainsi au cœur des problématiques d'intensification écologique, de changement d'échelle de la production agricole (du modèle permacole au méga fermes) et d'activation plus ou moins poussée d'interactions agroécologiques mobilisant les espèces vivantes. L'agriculteur, en tant que praticien de l'activité agricole, mobilise en effet le vivant et le technique, agit conjointement sur et avec le vivant, sur et avec la technique. L'activité agricole s'opérationnalise donc en systèmes où territoires et acteurs définissent, et redessinent en permanence, leurs espaces de configurations et d'interactions sociotechniques. La place future des agriculteurs dans les activités de conception et leur rôle dans les configurations organisationnelles de R&D et de transfert technologique sont au cœur des interrogations contemporaines sur le devenir du fait technique agricole.

Loïc Sauvée, enseignant-chercheur HDR en sciences de gestion, docteur en agroéconomie et ingénieur agronome, est directeur de l'unité de recherche InTerACT à UniLaSalle et chercheur associé au laboratoire COSTECH, UTC. Il est membre fondateur du GIS UTSH. Ses recherches traitent des formes de gouvernance de l'innovation dans les secteurs agricoles et agroalimentaires, de l'apprentissage organisationnel de la RSE dans les PME agroalimentaires, de la transition sociotechnique agricole dans un contexte de développement durable.
Articles
Abdirahman Z.-Z., Shiri G., Sauvée L., 2019, "Network characteristics and the adoption of organizational innovation in the food sector", International Journal of Entrepreneurship and Innovation Management, vol. 19, forthcoming.
Fourati-Jamoussi F., Dubois M. J., Agnès M., Leroux V., Sauvée L., 2019, "Sustainable development as a driver for educational innovation in engineering school : the case of UniLaSalle", European Journal of Engineering Education, pp 1-19, forthcoming.
Abdirahman Z.-Z., Bourquin L. D., Sauvée L., Thiagarajan D., 2018, "Food safety implementation in the perspective of network learning", International Journal of Food Studies, October, Vol. 7, 2, pp 17-29.
Abdirahman Z. Z., Sauvée L., 2016, "Non-technological innovations from organisational design and change perspectives in VSEs and SMEs : the case of management systems", International Journal of Organisational Design and Engineering, 4(3-4), pp 177-194.
Bossle M. B., de Barcellos M. D., Vieira L. M., Sauvée L., 2016, "The drivers for adoption of eco-innovation", Journal of Cleaner Production, 113, pp 861-872.
Ceapraz I. L., Kotbi G., Sauvée L., 2016, "The territorial biorefinery as a new business model", Bio-based and Applied Economics, v. 5, n. 1, pp 47-62, April.
Ghozzi H., Soregaroli C., Boccaletti S., Sauvée L., 2016, "Impacts of non-GMO standards on poultry supply chain governance : transaction cost approach vs resource-based view", Supply Chain Management : An International Journal, 21(6), pp 743-758.
Ouvrages et chapitres d'ouvrages
Caroux D., Dubois M. J. F., Sauvée L., 2018, Évolution agrotechnique contemporaine II. Transformation de l'agromachinisme : fonctions, puissance, information, invention, Collection "Ingénieur au XXIe siècle", Presses de l’UTBM, 236 p., Mai, 246 p.
Abdirahman Z.-Z., Sauvée L., 2017, "RSE dans le secteur agroalimentaire", in Écoconception et innovation responsable, Techniques de l'Ingénieur, 14 p., octobre.
Ceapraz I. L., Kotbi G., Sauvée L., 2017, "Conceptualiser la bioraffinerie territorialisée : quelle approche théorique ?", in Écologie Industrielle et territoriale, COLEIT 2014, Brullot S. et Junqua G. (Eds) Presses des Mines, Juillet.
Dubois M. J. F., Sauvée L., 2016, Évolution agrotechnique contemporaine. Les transformations de la culture technique agricole, Collection "Ingénieur au XXIe siècle", Presses de l'UTBM, 236 p.
Lenay C., Salembier P., Lamard P., Lequin Y. C., Sauvée L., 2014, "Pour une recherche technologique en sciences humaines et sociales", in SHS Web of Conference, vol. 13. SHST 2013-UPEC : sciences humaines en sciences et techniques – Les sciences humaines dans les parcours scientifiques et techniques professionnalisants : quelles finalités et quelles modalités pratiques ? Paris-Est Créteil, France, 7–8 Février, 2013, A. Bernard, M. Dell’Angelo, S. de Montgolfier, A.-S. Godfroy, M. Huchette, A. Mayrargue et C. Roux (Eds.).

Delphine SPICQ : L'Histoire des techniques en Chine dans l'histoire des techniques
Il s'agira d'interroger les rapports Orient Occident pour ce qui concerne l'histoire des techniques, notamment l'évolution de la façon dont ces techniques ont été envisagées et analysées de part et d'autre. Nous nous attacherons notamment à montrer la place croissante de l'Asie et de la Chine dans l'étude de l'histoire des techniques au gré de l'évolution des questionnements de la discipline, depuis la vision universelle euro-centrée des techniques jusqu'aux notions plus récentes de circulation, de divergence, d'histoire globale et connectée dans lesquelles une place grandissante est faite aux conditions sociales et culturelles de production des techniques, loin du discours traditionnel centré sur les aspects économiques.

Delphine Spicq est maître de conférences à l'Institut des hautes études chinoises du Collège de France, responsable de la bibliothèque de l'Institut et membre statutaire de l'UMR 8173 Chine Corée Japon, EHESS/CNRS. Ses travaux portent sur l'histoire et l'histoire des techniques en Chine sous la dynastie des Qing et sous la République.
Publications
Caroline Bodolec, Delphine Spicq (coord.), Aperçus sur les recherches en histoire des techniques sur la Chine, Artefact, Techniques, histoire et sciences humaines, n°8, 2018.
Chapitre 3. "Linqing, official handbooks and the construction of knowledge on water conservancy", in Jami Catherine (ed.), Human mobility and the circulation of scientific and technical knowledge in late imperial China, Paris, Institut des hautes études chinoises, Collège de France, 2017, p. 99-132.
Hilaire-Perez Liliane, Nègre Valérie, Spicq Delphine et Vermeir Koen (dir.), Le livre technique avant le XXe siècle. À l’échelle du monde, actes de colloque, Paris, CNRS éditions (collection Alpha), 2017, 502 p.
"Les cartes traditionnelles hydrologiques chinoises : le Huang Yun hekou gujin tushuo 黃運河口古今圖說 de Linqing 麟慶 (1791-1846)", in Le livre technique avant le XXe siècle. À l’échelle du monde, actes de colloque, Paris, CNRS éditions (collection Alpha), 2017, p. 43-57.
Avec Virol Michèle, chapitre 11 "les Techniques de la puissance", in Carnino Guillaume, Hilaire-Perez Liliane et Aleksandra Kobiljski (dir.), Histoire des techniques, mondes, sociétés, cultures (XVIe-XVIIIe siècle), Paris, PUF (Nouvelle Clio), 2016, p. 253-292.
"A Collection of the College de France Institute of Advanced Chinese Studies", Collège de France Newsletter, 9, 2015, p. 113-114.

Jacques THEUREAU : La construction d'un programme de recherche technologique en relation organique avec des recherches en sciences humaines et sociales
La recherche technologique diffère de la simple recherche technique par sa relation organique avec une ou plusieurs sortes de recherches scientifiques. Aujourd'hui, l'épistémologie scientifique, à la suite des débats du siècle dernier entre Karl Popper, Thomas Kuhn, Paul Feyerabend et Imre Lakatos, tend à s'accorder sur la "méthodologie des programmes de recherche" proposée par ce dernier. Comme l'ont bien remarqué ses critiques, cette dernière n'a rien qui la réserve à la recherche scientifique. C'est justement ce qui ouvre sur sa spécification à différentes sortes de recherches et, en particulier, à la recherche technologique. Après avoir précisé les principes de cette spécification à la recherche technologique en relation organique avec des recherches en sciences humaines et sociales, je montrerai comment se sont construits de tels programmes de recherche technologiques, portant sur artefacts et procédures, dans deux cas, (1) en ingénierie de situations informatisées, (2) en ingénierie de l'éducation, et généraliserai en considérant plus sommairement d'autres cas.

Jacques Theureau, chargé de recherche au CNRS retraité, a reçu notamment une formation d'ingénierie, puis de physiologie du travail et d'ergonomie. Après 10 années, durant lesquelles, après quelques stages d'ingénieur, il a occupé des fonctions variées, il a développé, avec d'autres chercheurs et praticiens, deux programmes de recherche, (1) empirique sur l’activité humaine dans des situations variées et (2) technologique en ingénierie de ces situations, en relation organique entre eux et avec (3) un programme de recherche philosophique.

Catherine VERNA : L'histoire des techniques médiévales au miroir de la technologie
Si l'histoire des techniques médiévales partage des concepts avec celle des autres périodes, elle s'est également emparée de certains d'entre eux différemment, en partie du fait des sources dont elle dispose (il est certain que l'irruption de l'archéologie, de l'archéométrie et des sciences dures dans le socle interdisciplinaire de l'histoire des techniques médiévales a bousculé sa construction) et également de par sa confrontation avec l'histoire du Moyen Âge dans son ensemble et très spécifiquement avec l'histoire des sciences médiévales. Ainsi, des concepts ont été particulièrement discutés par les médiévistes. Je souhaiterais en présenter la place spécifique et les débats dont ils ont été l'objet, en particulier (1) la question de l'innovation technique, qui rejoint celle de l'inventivité; (2) la question des savoirs, autour de la notion de "savoirs tacites" et de la pratique de la codification des savoirs, une façon d'appréhender la pensée technique au Moyen Âge.

Catherine Verna est professeur d'histoire médiévale à l'université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Ses recherches sont consacrées à l'histoire du travail dans les campagnes de la fin du Moyen Âge, à l'histoire des techniques et aux relations entre science et technique médiévales. Dans sa thèse, elle a étudié le processus d'émergence et de diffusion d’une innovation technique (Le temps des moulines. Fer, technique et société dans les Pyrénées centrales, XIIIe-XVIe siècles, Publications de la Sorbonne, Paris, 2001). Elle travaille régulièrement avec des historiens des sciences, des archéologues et des archéomètres sur les relations entre scientia et ars et sur les "savoirs tacites", des thèmes qu'elle a explorés récemment avec Joël Chandelier et Nicolas Weill-Parot dans Science et technique au Moyen Âge, Saint-Denis, 2017. Son dernier ouvrage, publié aux Belles-Lettres en 2017, s'intitule L'industrie au village. Essai de micro-histoire (Arles-sur-Tech, XIVe et XVe siècles). Cette enquête, à partir de l'exploitation de sources inédites et de la reconstitution de biographies d'entrepreneurs ruraux, révèle le dynamisme de l'industrie et de l'entreprise au Moyen Âge.


Humanités du numérique, table ronde organisée par Marina GASNIER, avec Alexandre DURUPT (Le concept de jumeau numérique), Florent LAROCHE (Le numérique comme outil pour comprendre notre histoire : pour une nécessaire interdisciplinarité) et Sébastien REMY (Numérisation 3D et conception mécanique)
Le champ récent de "l'archéologie industrielle avancée" (Laroche, 2007) consiste à partir du présent pour remonter au passé en croisant les sources d'archives et les observations de terrain, puis à enrichir ces données historiques par l'utilisation des outils numériques (notamment dans une démarche de rétro-conception). Cette session a pour objectif d'interroger la diversité des approches scientifiques dans ce domaine autour d'objets patrimoniaux dont la modélisation 3D devient de plus en plus courante. Le questionnement sera double et portera, non seulement sur l'apport des technologies numériques dans la connaissance du patrimoine industriel et technique et la gestion de ses données, mais aussi sur la transformation des usages qu'elles suscitent. Les humanités numériques apparaissent en effet tout à fait intéressantes pour générer de nouvelles formes de relations avec l'héritage patrimonial en tant qu'objet d'étude, mais aussi pour déployer un éventail d'outils favorisant la production de la connaissance et sa diffusion. Comment l'outil numérique peut-il aider à se réapproprier les gestes techniques et les mécanismes anciens, ainsi que leur filiation à travers le temps ? En quoi l'usage du numérique modifie-t-il notre rapport à l'histoire des techniques ? Comment assurer l'évolution du contenu des outils développés et la compatibilité des formats ? Telles sont les questions auxquelles tentera de répondre cette table ronde, en écho à la première session consacrée à l'histoire des techniques.

Marina GASNIER
Marina Gasnier est maître de conférences HDR à l'université de technologie Belfort-Montbéliard en histoire des techniques et épistémologie du patrimoine industriel. Membre du pôle Humanités, elle exerce ses recherches au sein de RECITS, axe transverse pluridisciplinaire en sciences humaines et sociales de l'institut FEMTO-ST (UMR 6174).
Publications
"Réflexion épistémologique sur le patrimoine industriel. De la pluridisciplinarité à l'interdisciplinarité", Revue d'Histoire des Sciences, à paraître au 1er semestre 2019.
Le patrimoine industriel au prisme de nouveaux défis. Usages économiques et enjeux environnementaux, Besançon, PUFC, 2018, 295 p.
Patrimoine industriel et technique. Perspectives et retour sur 30 ans de politiques publiques au service des territoires, Lyon, Lieux Dits, 2011, 304 p. (Cahiers du patrimoine).

Florent LAROCHE
Florent Laroche est Maître de conférences HDR à l'École Centrale de Nantes, directeur du Département IPSI. Chercheur au laboratoire LS2N - Laboratoire des Sciences du Numérique de Nantes (UMR CNRS 6004). D'abord ingénieur puis docteur, il utilise son expérience en ingénierie au profit du patrimoine culturel en utilisant les outils du numérique pour préserver et valoriser les connaissances du passé. Ses travaux de recherches portent sur la Gestion du Cycle de Vie des Connaissances Patrimoniales - "KLM for Heritage". "Pourquoi réinventer la roue ?" : l'objectif est de pouvoir réutiliser notre savoir-faire ancien comme base pour l'innovation sociétale, vers un patrimoine durable. Il travaille tant pour les entreprises que comme expert pour les Musées ou l'ICOMOS. Il est également le parrain de la Fête de la Science en tant qu'ambassadeur pour la Région Pays de Loire.


Projection-Débat du film Bienvenue les vers de terre, en présence du réalisateur François STUCK
Bienvenue les vers de terre est un film sur l'agriculture de conservation et de régénération des sols cultivés. Le réalisateur nous en fait découvrir les enjeux en donnant la parole à ceux qui pratiquent et travaillent au développement de cette agriculture. Le film nous parle de la transition agroécologique commencée par des agriculteurs engagés dans l’émergence de pratiques culturales qui tendent à faire de nos sociétés des sociétés durables. La vie du sol, et donc des hommes, est au cœur de cette agriculture. D'une durée de 1h11, il s'agit d'une production IDÉtorial en partenariat avec l'association Clé 2 sol conçue pour créer un lieu d'échange et d'information sur le semis direct sous couverture végétale et toutes les techniques favorisant la restauration et la régénération des sols.

Pour François Stuck, "Être réalisateur, c'est être comme un messager de la parole et du sens. Depuis qu'il réalise des films, la préoccupation de la paix et de la dignité est un fil rouge qui traverse ses documentaires. Bienvenue les vers de terre s'inscrit dans cette lignée sur le thème de la réconciliation de l'homme avec son milieu, la terre, avec lui-même et avec les autres".


SOUTIEN :

• GIS-UTSH - Unité Technologies & Sciences de l'Homme

Les quatre établissements fondateurs du GIS-UTSH :

UniLaSalle
• Université de Technologie de Belfort-Montbéliard (UTBM)
• Université de Technologie de Compiègne (UTC)
• Université de Technologie de Troyes (UTT)

Programme 2019 : un des colloques

Programme complet


ART, INDUSTRIE ET SOCIÉTÉ

AU TEMPS DE LA RECONSTRUCTION ET DE LA CROISSANCE D'APRÈS-GUERRE


DU MERCREDI 5 JUIN (19 H) AU MERCREDI 12 JUIN (19 H) 2019

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Gwenaële ROT, François VATIN


ARGUMENT :

Art et industrie peuvent-ils faire bon ménage ? La question est probablement aussi ancienne que l'industrie elle-même et rares sont ceux qui, tel Achille Kaufmann en 1853, ont revendiqué la "poésie de l'industrie".

Après la première guerre mondiale, la "querelle du machinisme" fit rage entre ceux qui ne voyaient plus dans la machine qu'un instrument de mort et ceux que fascinaient sa puissance et sa beauté fonctionnelle. L'après seconde guerre ne laissa guère de place au refus romantique du progrès, car il fallait reconstruire, et vite. Mais, des exigences de rapidité de la Reconstruction, on a trop vite conclu, rétrospectivement, qu'on n'aurait, à l'époque, eu aucun souci de l'esthétique. C'est cette question que l'on entend revisiter en discutant des relations entre art et industrie au cours de cette époque.

Il s'agira d'abord de s'interroger sur l'esthétique fonctionnelle de l'usine elle-même et sur son influence sur l'ensemble de l'architecture de la période. La question est, ensuite, celle des médias artistiques et de leur renouvellement : la photographie et le cinéma sont directement en phase avec l'esthétique usinière, mais la peinture, la sculpture, la tapisserie sont aussi mobilisées. Il faut réconcilier les hommes avec leur nouvel univers. Si l'industrie peut pénétrer l'art, l'art pourra aussi pénétrer l'industrie. Car l'enjeu est aussi social. Cette période est celle des grandes ambitions de démocratisation artistique. La beauté doit appartenir à tout le monde comme l'affirmait André Malraux. Il faudra aussi s'intéresser aux représentations de l'activité productive, longtemps marquées par la figure ouvriériste de la puissance corporelle. Comment rendre compte de l'usine moderne, celle où l'homme semble disparaître derrière le gigantisme industriel ?

L'organisation de ce colloque en Normandie, région durement touchée par les destructions de la guerre et où la "Reconstruction" d'après-guerre fut en conséquence particulièrement importante, a une portée symbolique. Mais ce sera aussi l'occasion d'aborder, in situ, notamment à Saint-Lô, "capitale des ruines", ville détruite à 90% pendant la guerre, un certain nombre de problématiques du colloque. L'idée de "l'heure de la Reconstruction" est en ce sens à entendre dans une acception plus large que les années d'immédiat après-guerre. Elle renvoie à l'idée de "relèvement" de la France, urbanistique, industriel, mais aussi social et culturel qui marqua les décennies d'après-guerre et a laissé des traces vives jusqu'à aujourd'hui.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 5 juin
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Jeudi 6 juin
Matin
Gwenaële ROT & François VATIN :
Introduction générale

ESTHÉTIQUE ET MACHINISME
Max BONHOMME : Machinisme ou humanisme ? La culture visuelle du communisme français de 1925 à 1939
Thierry PILLON : De la couleur dans les bureaux en France de 1950 à 1970

Après-midi
RECONSTRUIRE PLUS BEAU, PLUS FONCTIONNEL ET PLUS ÉCONOMIQUE
Robert BLAIZEAU : La Reconstruction de Saint-Lô
Patrice GOURBIN : La belle et la bête. Esthétique urbaine et nécessités industrielles pendant la Reconstruction
Carlos SAUTCHUK : Corps, nature, béton : technique et rythme à Brasilia


Vendredi 7 juin
Matin
TECHNIQUE ET ESTHÉTIQUE USINIÈRE
Stéphanie DUPONT : Minoteries reconstruites : programmes et esthétique architectural. Les cas de Caen (14) et de Cérences (50)
Florence HACHEZ-LEROY : L'aluminium et l'esthétique architecturale
Nicolas PIERROT : "Refuser d'enlaidir la vie" : l'esthétique de l'usine dans la France de la "grande croissance" (1945-1973)

Après-midi
DES OBJETS DE L'INDUSTRIE
Florence BRACHET-CHAMPSAUR : Les Galeries Lafayette, pionner de l'esthétique industrielle. "Le Festival de la création française" (1954)
Guillaume BLANC : L'industrie photographique et sa nation. Kodak-Pathé et la Biennale Photo-Optique à Paris (1955)
Delphine DROUIN-PROUVÉ : L'œuvre de Jean Prouvé dans l'urgence de la Reconstruction, une réponse industrielle et humaniste au mal logement (1945-1956)


Samedi 8 juin
Matin
LES ENTREPRISES, LES COMITÉS D'ENTREPRISE ET L'ART
Jean-Michel LETERRIER : Les comités d'entreprise de la médiation au métissage
Patrick FRIDENSON : Renault et l'art (1945-1985)
Gwenaële ROT & François VATIN : L'art et l'usine. Raymond Gosselin (1924-2017) et la sculpture automobile

Après-midi
"HORS LES MURS" — À L'USINE UTOPIK (Centre d'Art Contemporain de Tessy-Bocage)

Soirée
MUSIQUE ÉLECTROACOUSTIQUE ET INDUSTRIE
Hubert MICHEL : Présentation d'œuvres du répertoire de musique concrète


Dimanche 9 juin
Matin
L'ART EN SES LIEUX : MUSÉES, GALERIES, ÉTAT
Julie VERLAINE : Le marché de l'art français, créateur de liens entre art et industrie ?
Clothilde ROULLIER : Origine et devenir des peintures d'industrie achetées ou commandées par l'État
Clémence DUCROIX : Le musée-outil de Reynold Arnould. Le Havre, 1952-1961

Après-midi
DÉCORER LA VILLE
Marie-Laure VIALE : Sculpter, peindre à l'échelle monumentale : les modes de fabrication au service du 1% artistique
Raphaëlle SAINT-PIERRE : Les interventions d'artistes dans la Chambre de Commerce et d'Industrie du Havre et le Palais des Consuls de Rouen
Marie-Domitille PORCHERON : "Le lieu naturel du peintre est dans les grands moments de la civilisation, sur les chantiers (…) La vie des échafaudages est passionnante humainement (…)" [Alfred Manessier, 1978]
Grégor BLOT-JULIENNE & Sophie DERROT : Le luxe public de la reconstruction : le mobilier de Jacques Quinet pour l'université de Caen


Lundi 10 juin
Matin
LA PEINTURE ET LE MOTIF INDUSTRIEL
Bénédicte DUVERNAY : Fernand Léger, peinture et architecture
Odile LASSÈRE : La peinture industrielle de Camille Hilaire
Gwenaële ROT & François VATIN : Reynold Arnould : un portrait de la France industrielle à la fin des années 1950

Après-midi
PHOTOGRAPHIER L'INDUSTRIE
Véronique FIGINI-VERON : Aux frontières de l'art, la documentation photographique industrielle comme communication d'État
Dominique VERSAVEL : John Craven (1912-1981), chantre du développement industriel ?
Sandrine BULA : La France industrielle dans l'objectif d'Alain Perceval


Mardi 11 juin
SÉANCE PUBLIQUE
"HORS LES MURS" — À SAINT-LÔ
La reconstruction de la "capitale des ruines" : Saint-Lô, coordonnée par Robert BLAIZEAU (Directeur du pôle attractivité et développement territorial, Directeur des musées)
Visite de l'hôpital-mémorial (architectes P. Nelson, M. Mersier, Ch. Sébillotte, Roger Gilbert, 1956)
Visite du théâtre municipal et de sa salle des fêtes (architecte M. Mersier, 1963)
Visite de l'hôtel de ville de Saint-Lô (architecte Marcel Mersier, 1958) et de la place de l'hôtel de ville
Visite de l'appartement-témoin des années 1950
Balade dans le cœur historique reconstruit de Saint-Lô : préfecture, église Notre-Dame, remparts
Musée des beaux-arts : présentation du projet d'espace historique dédié à l'histoire de la Reconstruction de Saint-Lô et visite du musée


Mercredi 12 juin
Matin
Bilan et perspectives

Après-midi
SÉANCE PUBLIQUE
"HORS LES MURS" — À L'UNIVERSITÉ DE CAEN NORMANDIE (amphithéâtre de la MRSH)
La patrimonialisation de l'art d'après-guerre : villes, entreprises, musées, table ronde avec :
Daniel DELAHAYE (Vice-président de l'université de Caen Normandie) : L'université reconstruite : une vision qui s'impose [enregistrement vidéo en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie]
Stéphanie DUPONT (Pôle "Inventaire général du patrimoine culturel", Région Normandie) & Isabelle ROBERGE (Service "Aménagement", Région Normandie) : Région Normandie : Label "Patrimoine de la reconstruction [enregistrement vidéo en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie]
Nicolas PIERROT : La difficile patrimonialisation de l'héritage industriel des années 50-70 [enregistrement vidéo en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie]
Marie de LAUBIER (Directrice des relations générales de Saint-Gobain) : Saint-Gobain, le paradoxe de l'âge d'or de la reconstruction
Christine MANESSIER (Créatrice en textiles - Fille du peintre Alfred Manessier - Ancienne documentaliste au Musée des arts décoratifs de Paris) : Autour d'Albert Manessier (1911-1993) [enregistrement vidéo en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie]

François VATIN : Bilan du colloque [enregistrement vidéo en ligne sur la Chaîne YouTube de Cerisy]

Visite du patrimoine artistique du campus de l'université de Caen Normandie

DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Robert BLAIZEAU : La Reconstruction de Saint-Lô
Préfecture du département de la Manche en Normandie, Saint-Lô a été reconstruite en quasi-totalité après les bombardements alliés de juin et juillet 1944. Le nouveau plan d'urbanisme prend en compte la dimension historique et patrimoniale de la ville mais apporte aussi plusieurs nouveautés en matière de circulation, de règles de construction, d'aménagement public. Ville avant tout administrative et commerçante, Saint-Lô compte toutefois un certain nombre d'équipements techniques qui font écho à la modernisation de la société : hôpital, stations services, etc. L'art est également présent dans l'espace public comme au sein des équipements scolaires. À la présentation générale à Cerisy succèdera une visite d'application à Saint-Lô.

Robert Blaizeau est conservateur du patrimoine à la Ville de Saint-Lô depuis 2015. Il dirige les musées de Saint-Lô et est également directeur général adjoint en charge de la culture et de l'attractivité. Ses travaux de recherche portent notamment sur le patrimoine de la Reconstruction. Il conduit actuellement le réaménagement du musée des beaux-arts de Saint-Lô en vue d'y présenter l'histoire de la Reconstruction de la ville.

Guillaume BLANC : L'industrie photographique et sa nation. Kodak-Pathé et la Biennale Photo-Optique à Paris (1955)
Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, l'industrie photographique française entreprend sa reconstruction et sa réorganisation. Son principal objectif, dans un contexte de pénurie de matières premières, est de retrouver le plus rapidement possible une productivité vigoureuse et stable face aux pays concurrents qui la distancent largement du point de vue technique. Mais rapidement se dessinent dans l'industrie des impératifs qui excèdent son périmètre d'activité et de compétence : on se donne pour mission de répondre aux enjeux de la Nation, à savoir regagner la souveraineté culturelle perdue au cours de la guerre et réaffirmer pour la France un statut d'universalisme. À partir du cas de la maison Kodak-Pathé, dirigée par Alfred Landucci depuis 1946 et jusqu'à son décès en 1962, on cherchera à opérer un retour critique sur cette stratégie pour interroger, d'une part, les fondements idéologiques d'une telle entreprise, et, d'autre part, ses conséquences sur la fonction de la photographie dans la constitution d'un imaginaire national, à l'heure où progrès et modernisation constituent les maîtres-mots d'une France en pleine transformation.

Guillaume Blanc, doctorant en histoire de l'art contemporain à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, est secrétaire général de la Société française de photographie et chargé de cours à l'université catholique de l'Ouest et l'université Paris-Est Marne-la-Vallée. Il prépare une thèse sur le champ photographique français d'après-guerre et les enjeux idéologiques qui le traversent et le structurent. Ses publications récentes incluent des articles pour les revues Transbordeur (2019) et Image & Narrative (2019) et un essai pour le catalogue de l'exposition Icônes de Mai 68. Les images ont une histoire (BnF, 2018).

Grégor BLOT-JULIENNE & Sophie DERROT : Le luxe public de la reconstruction : le mobilier de Jacques Quinet pour l'université de Caen
La reconstruction de l'université de Caen, à partir de 1949, se déroule sur un programme, celui de la modernité d'un campus à l'organisation repensée. Dans ce cadre, l'architecte Henry Bernard est chargé de la construction, mais le mobilier ne fait largement pas partie de ses attributions. Il s'agit ici d'évoquer la commande faite au designer et ébéniste Jacques Quinet d'un ensemble mobilier destiné à la bibliothèque et à la faculté de Droit, qui s'inscrit pleinement dans l'idée d'aménagement d'un palais du savoir. Cette réalisation, qui intervient à un moment de transition dans la carrière de Quinet, doit s'inscrire dans des bâtiments soigneusement organisés et dans un fonctionnement moderne, notamment celui d'une grande bibliothèque universitaire au service des étudiants et des professeurs.

Grégor Blot-Julienne est conservateur des bibliothèques, directeur du service commun de documentation de l'université de Caen Normandie.

Docteure en histoire de l'art, Sophie Derrot est conservatrice à la bibliothèque de l'Institut national d'histoire de l'art, responsable des fonds d'archives patrimoniaux.

Max BONHOMME : Machinisme ou humanisme ? La culture visuelle du communisme français de 1925 à 1939
De façon à éclairer les débats sur l'art et l'industrie après 1945, il est nécessaire de revenir à la période de l'entre-deux-guerres, dans laquelle la question a été débattue de façon particulièrement intense. Alors que les courants modernistes en architecture et en design prônent une "esthétique de la machine", celle-ci fait l'objet de vives critiques de part des contempteurs du "machinisme". Vers 1930 en effet, le monde intellectuel français est saisi d'une hantise anti-moderne, nourrie d'un imaginaire du déclin civilisationnel, qui n'est pas le fait exclusif de penseurs conservateurs. La presse illustrée donne corps à ces spéculations, par le biais d'une iconographie apocalyptique. À l'encontre de ce pessimisme techno-critique, les communistes accompagnent en général l'élan moderniste au nom d'un rationalisme technophile, et la propagande par l'image qu'ils développent va grandement contribuer à forger une vision humaniste du rapport entre l'homme et la machine.

Max Bonhomme est diplômé de l'École du Louvre et doctorant en histoire de l'art à l'université Paris–Nanterre. Il travaille sous la direction de Rémi Labrusse et Christian Joschke et sa recherche est financée par le Labex Arts-H2H. Sa thèse s'intitule "Propagande graphique : les usages politiques du photomontage en France face aux exemples étrangers (1925-1945)". Dans l'optique d'une histoire graphique de la presse politique, ses recherches interrogent les formes du graphisme militant, qui engagent nécessairement une collaboration entre amateurs et professionnels de l'image. Il a contribué au catalogue de l'exposition "Photographie, arme de classe" qui s'est tenue au Centre Pompidou en 2018-2019.

Florence BRACHET-CHAMPSAUR : Les Galeries Lafayette, pionner de l'esthétique industrielle. "Le Festival de la création française" (1954)
Le Festival organisé en 1954 par les Galeries Lafayette, pour mettre en relation créateurs et fabricants, est à replacer plus largement dans le contexte d'émergence en France d'une "esthétique industrielle" après la Seconde Guerre mondiale. Cette initiative du grand magasin renvoie aux deux grands enjeux qui ont alimenté un siècle de débats depuis le milieu du XIXe siècle : la démocratisation de la création par la production en série et la difficile collaboration entre artistes, artisans et industriels. Après 1945, la question du rapport entre créateurs et industriels se pose en des termes nouveaux. Dans la France des années 1950, deux associations font la promotion du design industriel : Formes Utiles sous l'égide de l'architecte André Hermant et l'Institut d'esthétique industrielle fondé par Jacques Viénot. Elles mettent en place des stratégies différentes. Par leur initiative, les Galeries Lafayette s'engagent dans la voie ouverte par Jacques Viénot convaincu qu'une sensibilisation des producteurs donnera des résultats plus rapidement que l'éducation des consommateurs. Le dispositif mis en œuvre par le grand magasin pour le festival de 1954 montre plus largement que les fonctions du grand magasin ne peuvent se résumer à acheter et vendre des marchandises. La distribution n'est pas à la périphérie, elle est plus que le chaînon manquant entre le producteur et le consommateur, elle est au cœur du management de la création.

Florence Brachet-Champsaur a soutenu sa thèse en histoire, "Créer c'est avoir vu le premier. Les Galeries Lafayette et la mode (1893-1969)", à l'École des hautes études en sciences Sociales (EHESS) en juin 2018. Elle est diplômée de l'EM Lyon business school et de l'université de Lyon. Rattachée au Centre de recherches historiques (CRH), en tant qu'historienne des entreprises, ses recherches portent sur les industries créatives, l'histoire de la mode, des grands magasins, et l'histoire de la distribution.
Publications récentes
"Buying abroad, selling in Paris : the 1953 Italian fair at Galeries Lafayette", in Regina Lee Blaszczyk & Véronique Pouillard (ed.), European fashion : The creation of a global industry, Oxford University Press, 2018.
"Madeleine Vionnet and Galeries Lafayette. The unlikely marriage of a couture house and a French department store. 1922-1940", Business History, special issue on fashion, Volume 54, Issue1, 2012, pp. 48-66.

Sandrine BULA : La France industrielle dans l'objectif d'Alain Perceval
Les années d'après-guerre sont marquées par l'essor du marché de la photographie aérienne. Des pilotes-opérateurs, souvent à la tête de leur propre société, répondent aux demandes éditoriales émanant d'institutions et d'entreprises privées. Alain Perceval est l'un de ces entrepreneurs-photographes, acteur majeur dans son secteur d’activité depuis la fin des années 1950. Il a, au cours de près de trois décennies, saisi l'évolution du territoire français dans toutes ses composantes, notamment les paysages et sites industriels. Dans quel contexte technique et économique ces vues aériennes ont-elles été produites par Alain Perceval ? Pour répondre à quels impératifs de communication et d'information, suivant quelles intentions esthétiques ? À travers l'étude des commandes passées par Saint-Gobain, EDF et la Documentation française, l'on tentera de cerner les spécificités de création et d'usage de ces photographies, replacées dans la perspective du regard porté durant les Trente Glorieuses sur le monde industriel.

Sandrine Bula est conservateur aux Archives nationales, depuis 2012 responsable de la mission photographie à la Direction des fonds.
Publications
"Les archives photographiques de presse aux Archives nationales : un patrimoine adventice ?", in In situ - Revue des patrimoines, n°36, octobre 2018.
"Sels et lumière : un siècle de procédés photographiques", in La Haute-Marne vue par les premiers photographes : 1850-1880, 2019.

Marie de LAUBIER : Saint-Gobain, le paradoxe de l’âge d’or de la reconstruction
La période de la reconstruction est une période faste pour Saint-Gobain, qui participe de manière intense à l’effort de reconstruction : nouveaux centres de recherche, nouveaux produits, nouveaux procédés industriels, nouveaux marchés. Le chiffre d'affaires de Saint-Gobain croît d'environ 10% chaque année de 1950 à 1969. C'est la plus forte progression de la longue histoire de ce Groupe tricentenaire, créé par Louis XIV et Colbert. Saint-Gobain a saisi toutes les occasions que la reconstruction lui offrait et a compris aussi que l'esthétique avait un rôle important à jouer dans ce vent de modernité. Cela ne va pas sans quelques contradictions : tout en s'intéressant à son histoire, Saint-Gobain ne prend pas toujours soin de son patrimoine industriel; tout en étant soucieux de l'esthétique des réalisations architecturales auxquelles il concourt, dans ses usines, le rationalisme passe avant l'esthétique. Tout en soutenant ou en initiant des démarches artistiques originales et remarquables dans le monde industriel, le Groupe n'a pas toujours le souci de la conservation ou de la pérennité des œuvres qu'il commande. À partir de 1980, un centre d'archives et de mémoire est créé qui va permettre de retrouver l'héritage de cette période, d'en conserver la mémoire et de mettre en place une politique d'acquisitions, de préservation et de partage de ce patrimoine.

Marie de Laubier rejoint le groupe industriel Saint-Gobain en 2012 en tant que directrice des relations générales, en charge des archives et de l'histoire du Groupe, de la coordination des célébrations du 350e anniversaire de Saint-Gobain en 2015, du mécénat culturel. La responsabilité de la Fondation du Groupe lui est également confiée. Elle a publié en 2015 un ouvrage sur Saint-Gobain aux éditions Albin Michel. Auparavant, Marie de Laubier, archiviste paléographe, a été conservateur à la Bibliothèque nationale de France (1997-2012) où elle a rempli plusieurs missions.

Delphine DROUIN-PROUVÉ : L'œuvre de Jean Prouvé dans l'urgence de la Reconstruction, une réponse industrielle et humaniste au mal logement (1945-1956)
Jean Prouvé (1901-1984) a grandi dans le milieu artistique de l'École de Nancy qui visait à concilier l'homme et la nature par le biais de l'art et de l'industrie. Il appliqua ce précepte tout au long de sa vie professionnelle dont le point culminant se situe entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et le premier choc pétrolier. Au cours des années 1950, en particulier, Jean Prouvé propose une réponse à la crise du logement en mettant au point un outil industriel à même de produire des éléments de construction — métal en feuilles d'acier ou d'aluminium pliées — ajustables à la demande, légers et bon marché : "il faut des maisons usinées !". Il conçoit notamment la Maison des Jours Meilleurs en réponse à l'appel de l'Abbé Pierre (1954) puis l'École de Villejuif en 1956. Un nouveau vocabulaire constructif voit le jour, faisant l'objet de brevets d'invention. De ses "Ateliers" sortent des meubles, des maisons et des écoles préfabriquées dont les structures creuses et élancées expriment les lignes de force. Avant que Studal, la filière économique de Péchiney, ne prenne le contrôle financier des Ateliers en 1952, les Ateliers Jean Prouvé maîtrisaient toute la chaine de production, depuis la conception jusqu'à la fabrication d'un produit fini, sa livraison et son montage. Le passage de ce modèle de petite "industrie fermée" à un modèle d'"industrie ouverte", ne produisant et ne commercialisant que les fragments d'un tout, entraîne la démission de Jean Prouvé en 1954. Il crée en 1956 un bureau d'études où il poursuit ses créations et innovations. Mais malgré ses efforts, les pouvoirs publics ne lui accordent pas l'homologation nécessaire pour la reproductibilité du modèle. À l'échelle de l'État, la Reconstruction est une affaire de poids lourds avec des enjeux d'emplois à la clé. L'industrialisation ouverte permet de rendre interdépendants les industriels et de contrôler la répartition des marchés. Le débouché pour la préfabrication légère se limitera aux parois des immeubles (cloisons et façades) tandis que la préfabrication lourde se concentrera sur les structures (noyaux et planchers). Les "techniques" de Jean Prouvé influenceront toutefois l'architecture de la seconde moitié du XXe siècle. Ses œuvres figurent aujourd'hui dans les plus grands musées d'art contemporain.

Delphine Drouin-Prouvé est architecte DPLG, et diplômée de troisième cycle en Histoire culturelle et sociale à l'université de Saint-Quentin-en-Yvelines. Collaboratrice régulière du service régional de l'Inventaire général du patrimoine de la Région Île-de-France, elle travaille sur l'architecture des années de reconstruction et de croissance, et notamment sur l'œuvre de Jean Prouvé.
Publication
"Les Renardières, centre de recherches et d'essais EDF", dans L'Industrie au vert, patrimoine industriel et artisanal de la vallée de la Seine en Seine-et-Marne, Paris, Somogy Éditions d'Art, 2017.
Bibliographie
Olivier CINQUALBRE, Jean Prouvé bâtisseur, collection "Carnets d'architectes", Éditions du Patrimoine / Centre des monuments nationaux, Paris, 2016.
Armelle LAVALOU, Jean Prouvé par lui-même, Éditions du Linteau, Paris, 2001.
Nicolas PIERROT (sous la direction de), L'Industrie au vert, patrimoine industriel et artisanal de la vallée de la Seine en Seine-et-Marne, p. 164-169: "Les Renardières, centre de recherches et d'essais EDF", Éditions Somogy, Paris, 2017.
Peter SULZER, Jean Prouvé, œuvre complète, volumes 3 (1944-1954) et 4 (1954-1984), Éditions Birkäuser, Bâle, 2008.
Jean Prouvé "constructeur", collection "Monographie", Éditions du Centre Pompidou, Paris, 1990.
Jean Prouvé, Monographies de la Galerie Patrick Seguin, volumes 1 (maison démontable 6x6, 1944), 7 (maison démontable métropole, 1949), 8 (maison démontable Les jours meilleurs, 1956) et 10 (école provisoire Villejuif, 1957).

Bénédicte DUVERNAY : Fernand Léger, peinture et architecture
La communication mettra en relation les décorations monumentales de Fernand Léger avec l'évolution interne à sa peinture. Elle s'attachera particulièrement à la période de la reconstruction, marquée par des relations étroites avec deux personnalités importantes de l'architecture et de sa théorie : Sigfried Giedion et Paul Nelson. Elle s'intéressera également de près à la dernière commande passée à l'artiste, la décoration murale de la cokerie d'Alfortville.

Bénédicte Duvernay est docteure en histoire de l'art. Elle a étudié à l'École des Hautes Études en Sciences Sociales, puis a enseigné dans les universités Paris XII, Paris I et Rennes 2. Elle est actuellement professeure à l'École supérieure d'art de Lorraine et chargée de recherches et d'expositions au Centre Pompidou-Metz. Elle prépare une exposition Fernand Léger au musée des beaux-arts de Caen pour le prochain festival Normandie impressionniste.

Véronique FIGINI-VERON : Aux frontières de l'art, la documentation photographique industrielle comme communication d'État
Alors qu'au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, démonstration est faite d'une efficacité politique de l'image, les photothèques publiques se développent en corollaire d'une demande croissante en documentation, notamment industrielle. Destinée en premier lieu comme aide à la prise de décision des pouvoirs publics en vue de redresser et de moderniser la France, cette information revêt d'autres fonctions, dont celle de préparer les citoyens à un monde nouveau. Sur fond de défiance à l'égard d'une communication d'État assimilée systématiquement à de la propagande, l'élaboration d'une information neutre est revendiquée, parmi laquelle figure la documentation photographique. À partir de l'exemple industriel, comment traduire cette neutralité sous forme visuelle ? Quels rôle et enjeux sont réservés à la documentation photographique ? Sous couvert d'objectivité et d'impartialité, une nouvelle forme de propagande n'est-elle pas mise en place ? En dehors des circuits des musées ou des galeries, une légitimation artistique peut-elle exister ? Autant d'approches qui permettront de questionner tant les frontières entre propagande et communication publique, entre secteurs public et privé, que celle entre document et œuvre d'art où le regard de l'ingénieur sera mis en exergue.

Maître de conférences à l'ENS Louis-Lumière, expert près la cour d'appel de Paris, Véronique Figini-Veron est historienne de la photographie. Ses recherches sont centrées sur l'État et la Photographie ; les politiques publiques photographiques (patrimoine, création, information et communication) et leurs enjeux tant sur le plan national (leurs usages à caractère social et pédagogique) que transnational (leur rôle dans les relations internationales). Son champ d'étude est axé sur les problématiques liées à l'objet/photographie, sans exclusive, du domaine des médias à celui des arts visuels. Carnet de recherches : 4p.hypotheses.org.
Prochain ouvrage à paraître
L'État et le patrimoine photographique (1968-2000). Son rôle, ses ambitions, ses réalisations, Paris, Éditions Filigranes.

Patrick FRIDENSON : Renault et l'art (1945-1985)
La présence de l'art dans l'entreprise et pas seulement dans la conception des produits apparaît progressivement comme un des signes de rupture entre le Renault nationalisé et le Renault privé. Nous examinerons trois éléments distinctifs. Le premier est la conférence de 1954 du PDG Pierre Lefaucheux sur l'esthétique industrielle. Le deuxième est le recours à de grands architectes : Bernard Zehrfuss pour l'usine de Flins sous Pierre Lefaucheux, Oscar Niemeyer pour le projet de nouveau siège social sous son successeur Pierre Dreyfus. Le troisième est la constitution à partir de 1967, à l'initiative d'un cadre supérieur, Claude Renard, d'une collection Renault d'art contemporain. Comment s'expliquent ces trois développements ? Forment-ils ou non un ensemble ? Comment sont-ils perçus dans et hors de Renault ? Qu'en reste-t-il aujourd'hui ?

Patrice GOURBIN : La belle et la bête. Esthétique urbaine et nécessités industrielles pendant la Reconstruction
Dans le Projet de reconstruction et d'aménagement, document réglementaire servant de socle à la reconstruction, les rapports entre la ville et l'industrie sont énoncés sous forme d'exclusion. La ville doit suivre les règles de l'esthétique classique alors que l'industrie doit être mise à distance par de grands espaces et camouflée par des alignements d'arbres. Mais dans la réalité, les choses ne sont pas si tranchées. Certaines usines ou activités annexes se maintiennent en centre-ville. Elles doivent alors se plier avec plus ou moins de bonheur à la discipline architecturale prévue pour le logement. Ailleurs, on conçoit de véritables quartiers industriels, qui sont réglés par des normes esthétiques inspirées de celles des quartiers centraux. Enfin les usines qui répondent à la règle de la mise à l'écart dans les zones industrielles sont à la recherche de formes monumentales et signifiantes. Elles peuvent être inspirées par le rationalisme structurel de Perret. Elles peuvent aussi se concentrer sur des bâtiments de bureaux très architecturés, qui dissimulent des installations industrielles très frustes.

Patrice Gourbin est actuellement enseignant à l'École nationale supérieure d'architecture de Normandie. Ses recherches portent sur le patrimoine ancien pendant la seconde guerre mondiale et la reconstruction, sur le patrimoine comme objet politique et social, et sur son utilisation au service du projet d'architecture. Il dirige actuellement un programme de recherche sur le devenir des villes reconstruites et leur capacité à répondre aux attendus du XXIe siècle. Il participe à la mise en place d'un label régional "villes reconstruites".

Florence HACHEZ-LEROY : L'aluminium et l'esthétique architecturale
L'industrie française de l'aluminium, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, doit faire face à une situation complexe : outre les dégâts sur son appareil de production, la nationalisation des équipements de production électrique prive le premier producteur d'électricité d'avant-guerre de l'ensemble de son parc énergétique. Ces obstacles surmontés, l'entreprise Pechiney se relance dans la conquête des marchés interrompue pendant la guerre. Nous nous attacherons ici à comprendre le rapport de l'entreprise à l'Art, en interne comme en externe, au travers notamment du cas de la décoration et de l'architecture, dont le secteur est perçu comme l'un des plus prometteurs. Fer de lance du développement, la société de vente L'Aluminium Français promeut une certaine image de l'aluminium. Celle-ci évolue ensuite au contact d'architectes qui s'approprient le métal au nom d'une esthétique qui se veut nouvelle.

Odile LASSÈRE : La peinture industrielle de Camille Hilaire
En 2016, le musée de l'Histoire du fer a reçu en don de la société ArcelorMittal France une œuvre monumentale de Camille Hilaire (1916-2004) intitulée "Sidérurgie". Cette œuvre constitue un portrait de l'industrie sidérurgique lorraine dans les années de "grande croissance". De dimensions monumentales (7,45 m x 3,25 m), d'une valeur décorative plus que documentaire, cette œuvre est à la fois un témoin et un manifeste de la puissance sidérurgique lorraine, l'homme semblant disparaître derrière le gigantisme industriel. La communication mettra en perspective la permanence du motif industriel dans la peinture de Camille Hilaire, son systématisme pour répondre aux commandes des industriels, ses influences et son cercle artistique. Elle s'intéressera tout particulièrement à "Sidérurgie", la commande de Sidélor à l'artiste en 1956 en tant qu'œuvre décorative de la salle du Conseil d'administration à Paris, aujourd'hui œuvre muséale présentée dans les espaces permanents du musée, elle traitera également des commandes effectuées pour l'entreprise Saint-Gobain de Pont-à-Mousson.

Odile Lassère est conservatrice en chef du patrimoine à la Métropole du Grand Nancy depuis 2012. Elle dirige le musée de l'Histoire du fer de Jarville-la-Malgrange dont elle conduit actuellement la refonte des espaces permanents en vue, d'une part, d'y présenter l'histoire industrielle de la région et, d'autre part, d'y créer un espace dédié aux sciences et aux techniques. Elle a mené des travaux de recherche d'inventaire du patrimoine industriel et agit pour faire connaître et valoriser patrimoine et objets techniques en direction du plus large public.
Publications récentes
L'industrie au vert, patrimoine industriel et artisanal de la vallée de la Seine en Seine-et-Marne, Paris, Somogy, 2017.
Des maisons métalliques pour l'Afrique, la maison tropicale de Jean Prouvé, Cahiers du LHAC, École Nationale Supérieure d'Architecture de Nancy, 2017.
Tour Eiffel made in Lorraine, petit journal de l'exposition présentée du 24 février 2018 au 7 janvier 2019, Musée de l'Histoire du fer, 2018.
Neuves-Maisons, une ville industrielle dans la nature, collection "Les Patrimoines", Édition L'Est Républicain, 2019.

Hubert MICHEL : Présentation d'œuvres du répertoire de musique concrète
La musique concrète a été conçue par Pierre Schaeffer en 1948. Cette nouvelle façon de composer de la musique est en résonance avec le contexte de l'époque, celui de la reconstruction de la France d'après-guerre. Lors du concert, seront exécutées deux œuvres de Pierre Henry composées dans les année 1950, une œuvre contemporaine de Samuel Sighicelli, ainsi qu'une œuvre personnelle sur le thème du polystyrène.

Hubert Michel est titulaire du diplôme d'étude musicale en composition électroacoustique (Prix Sacem). Compositeur de musique concrète, il travaille la matière sonore pour réaliser des musiques de concert ou des installations sonores. Il collabore actuellement avec différentes compagnies de danse et de théâtre et intervient dans des festivals de musique contemporaine. Membre du collectif "Module étrange", il possède son propre instrument d'interprétation de la musique concrète : la Bétonneuse.

Nicolas PIERROT : "Refuser d'enlaidir la vie" : l'esthétique de l'usine dans la France de la "grande croissance" (1945-1973)
La Reconstruction et les années de la "grande croissance" ont-elles été le laboratoire de l'"usine nouvelle" ? En amont, face à l'urgence de reconstituer les moyens de production, les usines sont pour la plupart élevées sans architecte. Quel fut alors l'écho des appels d'un André Chastel, rêvant d'une reconstruction soignée, contrôlée par "la masse française, de l'instituteur au journaliste, de l'industriel au paysan", ou d'un Albert Laprade, prônant le "travail en commun des ingénieurs et des architectes" pour "rechercher la beauté dans les usines" et "refuser d'enlaidir la vie" ? En aval, à partir des années 1970, sous la triple influence des revendications sociales de Mai 1968, du "tournant environnemental" et des premiers signes de la désindustrialisation, s'élabore le projet d'une "usine post-industrielle" dont le programme serait certes toujours dicté par les ingénieurs — garants des exigences de la production — mais dont l'"humanisation" et l'insertion dans l'environnement seraient confiées aux architectes, jusqu'alors cantonnés à valoriser '’image de marque de l'entreprise par le dessin des façades… Qu'en est-il entre ces deux périodes ? On esquissera ici, à partir des revues d'architecture et des travaux de l'inventaire général, l'évolution de la pensée architecturale de l'usine, marquée durant ces trente années de constructions massives et de radicalité de choix esthétiques oscillant entre l'effacement visuel des fonctions, le retour au décor et l'hypertrophie formelle, par la fréquence du gigantisme, l'évolution des chaînes opératoires vers toujours plus de modularité, la rivalité entre les professions.

Nicolas Pierrot est conservateur en chef du patrimoine au service Patrimoines et Inventaire de la Région Île-de-France et chercheur associé au Centre d'Histoire des techniques de l'université Paris I Panthéon-Sorbonne (IHMC). Il partage ses activités entre l'histoire culturelle de l'industrie et l'archéologie industrielle.
Dernières publications
L'industrie au vert, Paris, Somogy, 2017.
Industries. Paysages, formes, patrimoines, avec P. Ayrault, F. Hébel et J. Corteville, coll. "Ré-Inventaire", n°3, Paris, Éd. Loco, 2018.

Marie-Domitille PORCHERON : "Le lieu naturel du peintre est dans les grands moments de la civilisation, sur les chantiers (…) La vie des échafaudages est passionnante humainement (…)" [Alfred Manessier, 1978]
Né et élevé dans le paysage industriel textile de la Somme (Usines Saint-Frères de Saint-Ouen près de Flixecourt), Alfred Manessier, formé, en 1931 à l'architecture à l'École des Beaux-Arts de Paris (atelier Recoura et Mathon) à la fresque à l'Académie Ranson, collabore en 1937 à l'exposition internationale de Paris, avec l'équipe de Félix Aublet et de Robert Delaunay : une composition monumentale sur le thème de la machine. Dès 1948 commence l'aventure du "peintre-verrier" : les vitraux à Sainte-Agathe des Bréseux, les murs de lumière de l'église Sainte-Thérèse-de-l'Enfant-Jésus-et-de-la-Sainte-Face de Hem (1956), qui trouvera son acmé dans la reconstruction "intime" de l'artiste avec le Saint-Sépulcre d'Abbeville (1993). De la peinture, au vitrail, à la tapisserie, cette intervention s'attachera à cerner l'un des acteurs majeurs et dérangeant de la reconstruction come du renouveau de l'art sacré.

Marie-Domitille Porcheron est maître de conférences d'histoire de l'art moderne et contemporain à l'UFR Arts de l'université de Picardie Jules Verne (UPJV), Amiens. Membre du CRÆ - EA 4291 (Centre de Recherches en Arts et Esthétique), UFR Arts de l'UPJV.
Commissaire de l'exposition Alfred Manessier. Le tragique et la lumière (1937-1989), Abbaye de Saint-Riquier - Baie-de-Somme - Centre Culturel de Rencontre, 24 juin - 24 septembre 2012.
Catalogue de l'exposition, Alfred Manessier. Le tragique et la lumière (1937-1989) (dir.), Abbaye de Saint-Riquier - Baie-de-Somme - Centre Culturel de Rencontre, 24 juin- 24 septembre 2012, Service des Affaires culturelles de l'UPJV, Illustria, 2012.
Dir. sc. du colloque "Alfred Manessier : Le politique, le spirituel, le naturel", 11 et 12 avril 2012, Logis du Roy, Amiens, Villa Les Martinets, Saint-Valery-sur-Somme.
"Manessier à Paris, dans la seconde École de Paris", catalogue de l'exposition Alfred Manessier. Du crépuscule au matin clair. 1927-1992, Philippe Leburgue (dir.), Musée Mendjisky-Écoles de Paris, 5 juin-5 octobre 2015, Fonds de dotation Mendjisky-Écoles de Paris, 2015.
Conférence "Alfred Manessier, ancrages et encrages picards" dans le cadre du cinquantenaire de l'université de Picardie Jules Verne, jeudi 7 mars 2019, Logis du Roy, Amiens.

Gwenaële ROT & François VATIN : Reynold Arnould : un portrait de la France industrielle à la fin des années 1950
Formé par Jacques-Emile Blanche, Reynold Arnould fut d'abord un portraitiste. Prix de Rome en 1939, il a, dans le sillage de son premier maître, vécu de la réalisation de "portraits mondains". La rencontre en 1947 de Jacques Villon chez le restaurateur-mécène de Puteaux, Camille Renault, va réorienter son destin artistique. Prenant Camille Renault, surnommé big boy pour son obésité, pour modèle, il en développe, pour sa première grande exposition personnelle en 1949, l'image en 145 portraits dans une recherche de saisie de la multiplicité du personnage. En 1955, c'est une série de portraits d'automobiles qu'il présente au musée des Arts décoratifs. En 1959 enfin, c'est la France de la modernité industrielle qu'il entend fixer en une série de portraits de machines, d'usines, d'installations techniques. Il pratique, sur ces objets qu'on dit inanimés, mais qui sont en fait animés par les intentions des hommes, la même technique de décomposition analytique que celle dont il avait usé pour les portraits de Camille Renault. Ce n'est pas l'anatomie de la machine qu'il entend figurer, mais bien sa physiologie, c'est-à-dire sa dynamique productive. Il n'est pas étonnant en ce sens que l'enquête picturale de Reynold Arnould converge avec celle, sociotechnique, menée à la même époque par le sociologue Pierre Naville sur les mêmes terrains. Cet exposé s'efforcera d'interroger la signification d'une telle représentation picturale de l'industrie moderne, automatisée. La peinture peut-elle nous dire, à côté de la photographie, du cinéma, de la littérature, voire de la sociologie, quelque chose d'original sur l'industrie ? Autrement dit, peut-on faire un portrait de l'industrie ?

Gwenaële Rot est professeur de sociologie à l'Institut d'études politiques de Paris (CSO/CNRS). Ses travaux portent sur la sociologie du travail, la sociologie de l'art, la sociologie visuelle et l'histoire de la sociologie.

François Vatin est professeur de sociologie à l'université de Paris Nanterre (IDHES/CNRS) où il dirige le master de sciences économiques et sociales. Ses travaux portent sur la sociologie du travail, la sociologie économique et l'histoire des idées aux XIXe et XXe siècle.

Ils mènent ensemble depuis plusieurs années des recherches d'histoire et de sociologie des arts plastiques en France au cours de la seconde moitié du XXe siècle, centrées sur les relations entre les artistes et l'industrie. Dans ce cadre, ils ont notamment publié :
"Reynold Arnould : un peintre à l'usine. Esthétique industrielle et mécénat d'entreprises dans la France de la Reconstruction", Artefact, février 2016, n°2.
"The poectics of automation", Cogent – Arts & humanities, vol. 4, n°1.
"Effets de miroir à Saint-Gobain. Relations publiques et sociologie du travail (1956-1958)", Le Mouvement social, 2018, n°262 .
Reynold Arnould, La Poétique de l'industrie, Presses universitaires de Paris, Ouest (à paraître en juin 2019).

Clothilde ROULLIER : Origine et devenir des peintures d'industrie achetées ou commandées par l'État
Cette communication se propose de partir des fonds présents aux Archives nationales pour explorer les possibilités de réponses aux questions posées par le colloque, à travers la question de l'investissement de l'État dans les œuvres d'art donnant à voir l'activité industrielle sous ses différentes facettes. En 1945, l'enthousiasme qu'entraîne la libération du pays amène les représentants politiques — du maire au chef de l'État — à s'engager dans la célébration de la victoire. Par l'intermédiaire du bureau des Travaux d'art, les communes ont pu demander la réalisation d'œuvres hautement symboliques ou plus discrètes, installées sur l'ensemble du territoire. Prenant part au grand chantier de la reconstruction et côtoyant, au sein de l'espace public, l'architecture moderniste, les œuvres d'art s'attachent généralement à enraciner l'image d'une renaissance urbaine et culturelle succédant au délabrement de villes parfois réduites à l'état de ruines. Au sortir de la guerre, près de deux millions de bâtiments d'habitation — et plus de cent mille bâtiments industriels — sont en ruine sur le sol français. Face à cette situation, le ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme tente de mettre en place une véritable politique de reconstruction et d'aménagement. Dans ce contexte, les artistes sont confrontés, à travers la commande d'œuvres monumentales, à cette nouvelle architecture marquée par l'industrialisation, notamment au sein des grands ensembles qui connaissent leur essor au milieu des années 1950. Il a donc paru intéressant d'examiner de plus près l'attention portée, dans ce contexte, aux œuvres incarnant elles-mêmes ces thématiques, que ces œuvres aient eu vocation à enrichir les collections nationales (aujourd'hui sous la responsabilité du Centre national des arts plastiques) ou à décorer les édifices scolaires (via la procédure du 1% artistique).

Clothilde Roullier, docteur es lettres, chargée d'études documentaires aux Archives nationales, responsable des fonds relatifs à la création artistique.
Publications et direction d'ouvrages
Archives en acte – arts plastiques, danse, performance, avec Yann Potin et Paul-Louis Rinuy, Presses universitaires de Vincennes, 2018.
Un art d'État ? Commandes publiques aux artistes plasticiens (1945-1965), avec Christian Hottin et en collaboration avec le Centre national des arts plastiques, Archives nationales / Presses universitaires de Rennes, 2017 (qui accompagnait une exposition éponyme dont elle a été commissaire aux Archives nationales).

Raphaëlle SAINT-PIERRE : Les interventions d'artistes dans la Chambre de Commerce et d'Industrie du Havre et le Palais des Consuls de Rouen
Les chantiers de reconstruction de la Chambre de Commerce du Havre et du Palais des Consuls de Rouen ont débuté l'un et l'autre en 1953. D'importantes et diverses commandes sont alors passées à plusieurs artistes. Bien que transformé ensuite en hôtel-casino, le bâtiment havrais a conservé deux œuvres de très grandes dimensions : une fresque de Nicolas Untersteller rappelant les activités portuaires (navigation, industries, importation de produits exotiques) et un étonnant bas-relief de Paul Lemagny sur un monde sous-marin fantasmagorique. À Rouen, l'escalier monumental est accompagné d'un bas-relief sculpté en pleine pierre par Maurice de Bus : il évoque le port, les industries, les relations avec les pays d'Afrique. Dans le Grand Salon, une frise en staff de Sylvia Bernt illustre l'épopée des Vikings. Dans la Salle de l'Assemblée, une fresque du peintre Toutblanc symbolise l'économie rouennaise et une toile de Reynold Arnould est destinée à orner la grande galerie. Récemment vendu, le Palais a été vidé de son mobilier et d'une partie de ses œuvres d'art pour laisser place à une opération de promotion immobilière.

Historienne et journaliste d'architecture, Raphaëlle Saint-Pierre est l'auteure de Villas 50 en France et Villas 60-70 en France (éd. Norma, 2005 et 2013), Maisons-bulles (éd. du Patrimoine, 2015) et Roger-Henri Expert à Metz, l'église Sainte-Thérèse de l'Enfant-Jésus (avec Pierre Maurer, éd. Jean-Michel Place, 2018). Entre 2003 et 2005, elle a réalisé pour Docomomo France et la ville du Havre une étude sur son centre reconstruit dans le cadre de son inscription au Patrimoine mondial de l'Unesco.

Carlos SAUTCHUK : Corps, nature, béton : technique et rythme à Brasilia
Brasilia, la ville moderniste inaugurée en 1960, a suscité deux débats : l'un sur les raisons et les conséquences de la décision politique de construire la nouvelle capitale; l'autre sur le contraste entre le projet et la ville réelle. Il est vrai que les utopies politiques et urbanistes de Brasília ne se sont pas réalisé comme prévu. La conception moderniste de la ville-machine, avec ses fonctions combinées dans une totalité synergique, a subi des adaptations "brésiliennes" au cours de la réalisation du projet lui-même et a été ensuite l'objet d'une réélaboration des formes et des sens dans l'usage quotidien des habitants. Par conséquent, plutôt que de s'interroger sur la réalisation ou la trahison du plan original, il est plus pertinent de chercher à comprendre la relation entre le projet et le vécu. Le rapport dynamique entre le béton, la nature et les corps nous amène à penser la genèse de la technique et du rythme à Brasilia métropole du XXIe siècle.

Carlos Sautchuk est professeur du Département d'Anthropologie de l'université de Brasília. Il y enseigne l'anthropologie de la technique et de l'environnement. Il a mené des études de terrain dans l'Amazonie et dans le Cerrado (la savane du centre du Brésil) sur les savoirs traditionnels et les changements techniques. Il a récemment publié Técnica e Transformação: perspectivas antropológicas (ABA Publicações, 2017) ainsi que divers articles sur ces sujets.

Julie VERLAINE : Le marché de l'art français, créateur de liens entre art et industrie ?
La présente contribution examinera les diverses manières par lesquelles les galeries d'art parisiennes des années de la Reconstruction participent à (re)nouer des liens entre art et industrie, ou plutôt entre artistes et industriels : de la présentation d'expositions individuelles et collectives ayant pour thème la question de la reconstruction du pays, à la mise en relation de plasticiens avec des entrepreneurs et industriels (certains collectionneurs d'art, d'autres pas du tout), en passant par la théorisation d'un "art de la reconstruction" tournant délibérément la page des Années noires et faisant le lien avec la réconciliation entre l'art vivant et le public, les galeries d'art sont des lieux à considérer pour qui s'interroge sur les modalités intellectuelles et socio-économiques du rapprochement entre art et industrie après-guerre.

Julie Verlaine est agrégée d'histoire et maîtresse de conférences en histoire culturelle contemporaine à l'université de Paris I Panthéon-Sorbonne, rattachée au Centre d'histoire sociale du XXe siècle (UMR 8058). Ses recherches portent sur les rapports entre arts et sociétés à l'époque contemporaine, avec une attention particulière pour le marché de l'art (thèse sur les galeries d'art parisiennes après 1945 publiée en 2012; monographie Daniel Templon, une histoire d'art contemporain, Flammarion, 2016), l'histoire des collections publiques et privées (ouvrage sur les Femmes collectionneuses d'art et mécènes publié chez Hazan en 2014), et la question des rapports artistiques de genre — assignations, frontières et transgressions du masculin et du féminin – qui est au centre de plusieurs projets achevés ou en cours. Le processus de patrimonialisation, dans ses dimensions sociales, économiques et culturelles, l'intéresse également, tout comme les questions de philanthropie et de mécénat au musée aux XXe et XXIe siècles.
Publications
Les Galeries d'art contemporain à Paris. Une histoire culturelle du marché de l'art, 1944-1970, Paris, Publications de la Sorbonne, 2012, 584 p.
Avec Séverine Sofio, "Tableaux croisés : le marché de la peinture, entre sociologie de l'art et histoire culturelle", Biens symboliques / Symbolic Goods, n°3, 2018 [en ligne].
"Les associations professionnelles de marchands d'art après 1945 : lobbying et modernisation à Paris et à New York", Le Mouvement social, 2013/2, n°243, p. 53-65.
"Une histoire de la société ArtCo. Le commerce des reproductions d'art après la Seconde Guerre mondiale", Vingtième Siècle, n°108, octobre-décembre 2010, p. 141-151.

Dominique VERSAVEL : John Craven (1912-1981), chantre du développement industriel ?
On retient principalement de John Craven (1912-1981) son activité de photographe industriel, qui, des années 1950 à 1970, contribue à promouvoir l'essor de nouvelles infrastructures en France. Mais John Craven est alors également un fervent promoteur d'art (galeriste et commissaire d'expositions) et un grand reporter spécialiste des États-Unis. Comme le montre l'analyse des images qu'il produit ou promeut, ainsi que ses reportages et ses écrits dans la presse professionnelle ou artistique, le regard de Craven sur l'industrie varie en fonction du rôle qu'il endosse : selon qu'il l'aborde au travers de commandes photographiques à visée promotionnelle, en tant que promoteur d'un art avant-gardiste devant user de techniques de pointe ou comme reporter témoin des conséquences sociales et des limites du modèle américain, John Craven adopte face au développement industriel une posture changeante et ambiguë — entre enthousiasmes esthétiques et appréhension de l'avenir.

Archiviste-paléographe, Dominique Versavel est, depuis 2002, conservatrice chargée de photographie moderne ainsi que, depuis 2014, chef du service de la photographie au département des Estampes et de la photographie de la Bibliothèque nationale de France. Elle a participé à de nombreux colloques ainsi qu'à la conception et aux catalogues de plusieurs expositions dont "Objets dans l'objectif" (2005), "La Photographie humaniste" (2006), "Presse à la Une" (2012), "Alix-Cléo Roubaud" (2014), "Icônes de Mai 68 : les images ont une histoire" (2018).

Marie-Laure VIALE : Sculpter, peindre à l'échelle monumentale : les modes de fabrication au service du 1% artistique
Le 18 mai 1951, paraît au Journal Officiel un arrêté, texte fondateur concernant les travaux de décoration dans les établissements scolaires et universitaires. En octobre de la même année, le Groupe Espace est fondé par l'ingénieur, sculpteur et directeur de revues André Bloc et l’artiste Félix Del Marle. Réunissant des architectes, des ingénieurs et des plasticiens, le groupe rassemble des créateurs autour d'une volonté commune: parvenir à une synthèse des arts pour dépasser le clivage traditionnel entre peinture, sculpture et architecture. Toujours en 1951, le ministère de l'Éducation crée une commission du Plan de l'Équipement scolaire, universitaire et sportif pour répondre à l'essor de la construction scolaire. Ces trois événements contribuent à la réalisation d'œuvres 1% dans l'architecture scolaire et favorisent les influences réciproques entre architectes et artistes. Ces derniers empruntent les modes industriels de la construction architecturale pour réaliser des œuvres à l'échelle de l’architecture qui les reçoit.

Marie-Laure Viale est enseignante à l'École des beaux-arts de Nantes-Saint-Nazaire. Elle développe depuis Nantes une pratique curatoriale en art public dans le cadre d'Entre-deux, association qu'elle a fondée en 1996 et qu'elle dirige avec Jacques Rivet. Suite à des missions d'inventaire des œuvres réalisées dans le cadre du 1%, elle entame un doctorat en histoire de l'art et de l'architecture à l'université de Rennes 2 sur le 1% artistique dans l'architecture scolaire (1948-1983). La recherche s'intéresse particulièrement à l'histoire de l'enseignement croisé de l'art et de l'architecture, aux influences réciproques des modes de production industrielles architecturales et artistiques, aux environnements sculptés et à la sculpture d'usage.
Publications
"M + O + I = Joséphine Chevry", Bulletin de la Bibliothèque Forney, n°212, 3e & 4e trimestre 2018, p. 24-27.
"Reprendre : Une histoire retrouvée de la commande publique", Substrat, carnet d’un chercheur, Saint-Nazaire, centre d’art contemporain (à paraître).
"Faire œuvre à la croisée des politiques des arts et de l'architecture sous la tutelle de l'éducation : les débuts du 1% de décoration", in Un Art d'État ? Commandes publiques aux artistes plasticiens 1945-1965, Paris, Rennes, coédition des Archives nationales et des Presses universitaires de Rennes, 2017, p. 50-65.
"Le concours d'art monumental à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris : refonte d'un enseignement simultané et collectif des sections d'architecture, de peinture et de sculpture, de 1950 à 1967", in Carnets de recherche du ministère de la culture [en ligne].
"Le concours d'art monumental à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris : refonte d'un enseignement simultané et collectif des sections d’architecture, de peinture et de sculpture, de 1950 à 1967", in Cahier HensA20, Strasbourg, Éd. Ensas, 2017.
"L'Œuvre d'Hervé Beurel produit de l'art en public", in Collection publique, Hervé Beurel, Rennes, Éd. Frac Bretagne, 2016, p. 54-57 (fr), p. 104-106 (an).
"Le 1% et l'architecture scolaire dans une ville en reconstruction : Saint-Nazaire (1951-1973)", In Situ, revue des patrimoines.
"À la cité scolaire de Saint-Nazaire, les premiers pas du 1% artistique", in Place Publique, n°54, nov-dec 2015, p. 140-146.


SOUTIENS :

SciencesPo, Paris
Région Normandie
Université de Caen Normandie
Ville de Saint-Lô
• Direction régionale des affaires culturelles Normandie (DRAC)

Programme 2019 : un des colloques

Programme complet


ENTREPRISE, RESPONSABILITÉ ET CIVILISATION :

UN NOUVEAU CYCLE EST-IL POSSIBLE ?


DU LUNDI 27 MAI (19 H) AU LUNDI 3 JUIN (9 H) 2019

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Kevin LEVILLAIN, Blanche SEGRESTIN, Stéphane VERNAC

Colloque organisé à l'initiative du Cercle des partenaires


ARGUMENT :

L'entreprise était jusqu'à récemment un "point aveugle du savoir"(1), réduite à un acteur économique ou à un lieu de production et de confrontation entre capital et travail. Or, plusieurs travaux récents et le contexte contemporain conduisent à reconnaître aujourd'hui la capacité qu'a l'entreprise de transformer le monde.

Cette capacité de transformation a des conséquences multiples. Ce sont le plus souvent les conséquences "négatives" qui sont discutées : pollutions, consommations excessives des ressources naturelles, inégalités sociales. Pour autant, depuis 150 ans, l'entreprise contribue aussi à construire notre culture en introduisant de nouvelles technologies, de nouvelles médecines et de nouveaux arts… Ainsi, l'activité des entreprises n'a pas seulement un impact sur les rapports sociaux ou sur l'environnement. Elle participe aussi de la dynamique des connaissances, de la détermination des modes de vie, des cultures ou des écosystèmes.

Il faut donc considérer la responsabilité "civilisationnelle" de l'entreprise dans toute sa complexité. La notion de civilisation est ici envisagée dans son acception la plus dynamique et la plus opératoire, comme l'ensemble des pratiques, savoirs et valeurs qui conditionnent le fonctionnement des sociétés humaines. Face aux déstabilisateurs de civilisation que sont la menace climatique, la mondialisation, la digitalisation, les mutations financières, les inégalités ou les atteintes aux droits humains, l'entreprise ne peut se dérober. Un tel élargissement de sa responsabilité impose d'analyser les entreprises multinationales comme des puissances d'une nature nouvelle qui impose de repenser l'architecture du politique et la mission des États eux-mêmes. Il exige symétriquement de ne pas sous-estimer les capacités d'innovation de l'entreprise, qui se révèlent critiques pour faire face aux défis contemporains.

Le colloque portera sur les liens entre entreprise et civilisation et sur les nouvelles responsabilités de l'entreprise. Il cherchera d'abord à mieux comprendre comment l'entreprise a été, depuis son émergence et tout au long du XXe siècle, à la fois un objet, un vecteur ou un destructeur de civilisation. Il s'attachera ensuite à faire le point sur les réformes de l'entreprise engagées en France et à l'étranger, qui comme la loi PACTE, reconnaissent la responsabilité civilisationnelle de l'entreprise. Mais il reste à tirer toutes les implications pratiques et conceptuelles de ces réformes pour comprendre ce qu'elles apportent ou ce qu'elles désignent comme terrains de réformes futures. In fine, un nouveau cycle est-il possible ? Et quels sont les cadres de pensée qui permettraient de construire des rapports plus soutenables et plus souhaitables entre entreprise et civilisation ?

(1) Segrestin B., Roger B., & Vernac S. (Eds.), L'entreprise. Point aveugle du savoir, Colloque de Cerisy, Éditions Sciences Humaines, 2014.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Lundi 27 mai
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Mardi 28 mai
REPÈRES ET OUVERTURES. L'ENTREPRISE, OBJET DE CIVILISATION ?
Matin
Kevin LEVILLAIN, Blanche SEGRESTIN & Stéphane VERNAC : Ouverture
Armand HATCHUEL : Entreprise et civilisation : des couplages à repenser
Patrick FRIDENSON : L'éducation au management comme marqueur de civilisation

Après-midi
Pascal LE MASSON : Histoire de l'entreprise et révolutions scientifiques : inventer des formes de liberté et de responsabilité face à l'inconnu [communication établie avec Benoît WEIL]
Joël RUET : L'impensé de l'entreprise en Chine

Soirée
Hamid BOUCHIKHI : L'entreprise moderne au Maroc. Regard d'un indigène sur une autre civilisation


Mercredi 29 mai
ENTREPRISE, FACTEUR DE CIVILISATION ET RESPONSABILITÉ COLLECTIVE
Matin
Aurore CHAIGNEAU : Entreprise et commun
François EWALD : Responsabilité, entreprise, civilisation : un nouveau cycle est-il possible ? [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Après-midi
Jean-Louis BANCEL : L'entreprise un monde en soi ou un levier pour un monde meilleur ? Les coopératives, mutuelles et autres entreprises sociales et solidaires comparées à l'entreprise à capital
Jean-Baptiste BARFETY & Jean-Baptiste de FOUCAULD : L'Entreprise vis-à-vis de l'État : civilisatrice ou à civiliser ?

Soirée
Perspective syndicale sur l'histoire de l'entreprise, table ronde animée par Stéphane VERNAC, avec Jean-Paul BOUCHET, Claude CAMBUS, Vincent GAUTHERON et Nicolas HATZFELD


Jeudi 30 mai
ENTREPRISE DESTRUCTRICE DE CIVILISATION ? LE CHOC CONTEMPORAIN
Matin
Elsa BERTHET : Face aux défis de l'Anthropocène, s'inspirer de l'écologie pour innover ? [communication établie avec Vincent BRETAGNOLLE]
Bettina LAVILLE : L'entreprise face à la notion de capital naturel

Après-midi
DÉTENTE


Vendredi 31 mai
CHOCS CONTEMPORAINS ET NOUVELLES VOIES
Matin
Arnaud STIMEC & Pierre VICTORIA : Entreprises et territoires
François FAURE : Inverser la relation entre entreprise et capital

Après-midi
Francis JUTAND : La Métamorphose Numérique
Gilles BERHAULT : Lost in transitions ? Accélérons !

Soirée
Les pionniers de l'entreprise à mission, table ronde animée par Kevin LEVILLAIN, avec Isabelle LESCANNE, Laurence MÉHAIGNERIE et Pierre-Dominique VITOUX


Samedi 1er juin
CHOCS CONTEMPORAINS ET NOUVELLES VOIES
Matin
Errol COHEN & Kevin LEVILLAIN : Les entreprises à mission
Christophe CLERC : L'avenir du modèle pluraliste de gouvernement d'entreprise

Après-midi
Véronique CAMERER & Mathilde MESNARD : L'avenir des normes internationales
Stéphane VERNAC : Quelles nouvelles réformes pour l'entreprise ? [communication établie avec Antoine LYON-CAEN]

Soirée
Quelles perspectives après la loi PACTE ?, table ronde animée par Armand HATCHUEL, avec Antoine FRÉROT et Philippe ZAOUATI


Dimanche 2 juin
UN NOUVEAU CYCLE ?
Matin
Paul ALLIBERT & Bernard RAMANANTSOA : Quelles perspectives pour l'enseignement ?

Clôture et discussion générale

Après-midi
DÉTENTE & PROMENADE


Lundi 3 juin
DÉPARTS


ENTRETIENS RÉALISÉS PAR SYLVAIN ALLEMAND :

"De la responsabilité et du rôle civilisationnel… de l'entreprise", entretien avec Blanche SEGRESTIN (co-directrice du colloque) [en ligne sur le site de Paris-Saclay Le Média].

"Entre science et débat, la Revue française de gestion", entretien avec Jean-Philippe DENIS (participant au colloque) [en ligne sur le site de Paris-Saclay Le Média].

"Entreprise à mission ou comment transformer le monde en innovant", entretien avec Kevin LEVILLAIN (co-directeur du colloque) [en ligne sur le site de Paris-Saclay Le Média].

"Écosystème à mission : le point de vue du juriste", entretien avec Stéphane VERNAC (co-directeur du colloque) [en ligne sur le site de Paris-Saclay Le Média].


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Jean-Louis BANCEL : L'entreprise, un monde en soi ou un levier pour un monde meilleur ? Les coopératives, mutuelles et autres entreprises sociales et solidaires comparées à l'entreprise à capital
Analyser les pratiques coopératives, mutualistes et autres formes d'Économie Sociale et Solidaire pour comprendre l'interaction entre entreprise et civilisations vient spontanément à l'esprit lorsqu'on se rappelle que le slogan retenu par l'ONU pour l'année internationale des coopératives, en 2012, était : "les coopératives, des entreprises pour un monde meilleur". Cette communication analysera le rôle et la place des valeurs et des principes définis par l'Alliance Coopérative Internationale comme outil d'identification de l'entreprise coopérative au-delà de la diversité des référentiels historiques, juridiques et culturels qui prévalent dans les différents pays où ces structures agissent. Nous tenterons de voir comment s'exercent les tensions au sein de l'Entreprise entre les aspirations des humains qui la mettent en mouvement et les nécessités induites par la durabilité du projet et sa capacité à avoir un impact sur le Monde. Seront également examinées les analyses conduites sur la démarche coopérative afin de voir si, en tant qu'entreprise, une coopérative est une communauté qui constitue par elle-même un monde meilleur ou si elle est un levier pour construire au-delà d'elle-même un monde meilleur. Ces analyses s'appuieront sur des éléments théoriques mais également seront nourries par de nombreux exemples concrets existant dans différents pays. Il sera également fait référence aux apports du colloque de Cerisy de 2016 "Vers une république des biens communs ?" en ce qui concerne les entreprises.

Jean-Louis Bancel est le président d'une banque coopérative et exerce depuis de nombreuses années des responsabilités à l'échelon national et international dans les secteurs coopératifs et mutualistes. À ce titre, il connaît bien la diversité des expériences coopératives en France et à l'étranger. Il a été en charge, au sein de l'Alliance Coopérative internationale, de rédiger, en 2015, les notes d'orientation pour les principes coopératifs. Il a été co-directeur du colloque de Cerisy de 2016 "Vers une république des biens communs ?". Il est fondateur de la Coop des communs, association qui travaille à construire des alliances entre l'Économie Sociale et Solidaire et les Communs et qui s'intéresse à l'émergence de nouvelles formes d'entreprises autour des communs.

Jean-Baptiste BARFETY : L'Entreprise vis-à-vis de l'État : civilisatrice ou à civiliser ?
L'État et l'entreprise se situent a priori sur deux plans différents et sont donc davantage complémentaires que concurrents. L'injonction entrepreneuriale faite à l'État d'une part, la théorie moderne de l'entreprise d'autre part, qui la présente comme une institution politique, rebattent cependant les cartes. L'entreprise se comporte dès lors en civilisatrice de l'État, tandis que celui-ci cherche lui-même à civiliser l'entreprise par ses normes et selon ses représentations. Quelle est cette guerre des représentations, voire de civilisations ? Comment a-t-elle été rendue possible et a-t-elle des précédents historiques ? Que serait la civilisation de l'entreprise et qui désigne-t-elle comme "barbares" ? L'entreprise n'apparaît-elle pas réciproquement comme un pouvoir primitif, d'une faible civilité politique, bien peu responsable en comparaison de l'auto-contrainte que l'État s'impose à lui-même ? Peut-on enfin dépasser cette opposition par un mouvement politique de l'entreprise ?

Jean-Baptiste Barfety, ancien élève de l'ESSEC et de l'ENA, inspecteur des affaires sociales, est secrétaire général du Conseil de l'inclusion dans l'emploi et conseiller inclusion auprès du Délégué général à l'emploi et à la formation professionnelle et maître de conférences à Sciences Po Paris.
Publications
Co-rédacteur du rapport de l'IGAS-IGF-CGEDD sur le reporting de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises (2016).
Co-auteur du manuel Politiques économiques (Lextenso éditions, 2017).
Rapporteur du rapport de Jean-Marc Borello sur l'inclusion dans l'emploi (2018).
Rapporteur du rapport de Nicole Notat et de Jean-Dominique Senard "L'Entreprise, objet d'intérêt collectif" (2018).

Gilles BERHAULT : Lost in transitions ? Accélérons !
Comment se comporter face aux grands enjeux sociétaux ? Nous nous devons de penser et d'agir sur une démarche large qui adresse le changement d'échelle. C'est d'autant plus important qu'il ne s'agit plus d'inventer une nouvelle bonne pratique mais bien de changer d'ambition sociétale pour l'entreprise en s'engageant dans les Objectifs de développement durable dont la lutte contre les exclusions. Est-ce justement l'opportunité pour l'entreprise de prendre toute sa place en une réconciliation avec la société ? […] La notion d'intégrité sociétale est particulièrement questionnée par des crises profondes : écologiques, sociales, sociétales, sanitaires, culturelles… L'innovation technologique change tout, apporte des solutions, mais cela ne suffit pas. Les changements de comportements, et même de modèles civilisationnels, s'imposent. […] La démarche transitionnelle se nourrit d'une approche pluriacteurs et très transversale autour de cinq clés pour une transition réussie — utile, efficace et agréable. La première clé est un socle : renforcer les capacités et attirer les talents. La deuxième clé consiste à donner toute sa place à l'innovation technologique. La troisième est celle de l'acceptabilité, et donc de l'adaptation. La quatrième est liée à l'innovation dans le financement et aussi dans les modèles économiques. Enfin la cinquième clé réside dans la gestion des différences temporelles. Ce qui caractérise les transitions actuelles auxquelles sont confrontées les entreprises est leur rapidité, et le fait qu'elles soient en accélération depuis 10 ans. C'est une question générationnelle bien sûr, mais pas seulement. Chacun intègre, avance, expérimente à son rythme… C'est une grande cohabitation, où l'intégration des transitions renvoie à une individuation renforcée.

Ancien président du Comité 21, du Club France Développement durable, du Pavillon de la France lors du Sommet de la Terre Rio+20, de l'exposition SolutionsCOP21 au Grand Palais, du comité de programme de la MedCOP Climat 2016/COP22 Maroc… Après avoir été comédien, agent artistique, producteur, Gilles Berhault s'est intéressé à l'interactivité (site pour les professionnels de la musique, bornes interactives). Il s'est ensuite consacré à la communication principalement événementielle, se centrant de plus en plus sur des sujets liés au développement durable. Il a créé en 2000 ACIDD (Association communication et innovation pour le développement durable), et organise de nombreuses rencontres et événements, dont depuis 16 ans l'Université d'été de la communication pour le développement durable, devenue en 2017 l'Université d'été des Transitions. Ses premiers engagements sociétaux orientés sur les droits de l'homme et l'éducation populaire se sont ouverts à l'écologie suite aux premières grandes marées noires sur les côtes bretonnes, sa région d'origine.
Publications
Développement durable 2.0, Éd. de l'Aube, 2009 (Aube Poche, 2011).
Propriétaire ou artiste ? Manifeste pour une écologie de l'être, Éd. de l'Aube, 2015.
Co-auteur de GreenIT (Éd. Lavoisier), Métamorphose numérique (Alternative Gallimard), Nouveaux imaginaires pour un monde durable (Éd. Les Petits Matins), Un autre monde est possible. Lost in transition ? (Éd. de l'Aube).
Auteur de deux rapports pour la DATAR : Adaptation aux changements climatiques et Aménagement numérique et durable des territoires.

Elsa BERTHET : Face aux défis de l'Anthropocène, s'inspirer de l'écologie pour innover ? [communication établie avec Vincent BRETAGNOLLE]
La science écologique s'est développée au fil des derniers siècles en restant fidèle au programme énoncé par Humboldt en 1799, à savoir "explorer l'unité de la nature": elle cherche à comprendre les interactions complexes et dynamiques entre les êtres vivants et avec leur milieu. Cette connaissance de la nature a souvent été utilisée par notre civilisation pour en améliorer la maîtrise, dans une perspective de domination de la nature par l'homme. Cependant, alors que l'impact environnemental des activités humaines s'est intensifié et généralisé depuis la révolution industrielle, au point que certains scientifiques parlent aujourd'hui d'Anthropocène, l'écologie s'est affirmée comme "une pensée des limites et de la complexité de notre monde" ainsi que "la conscience aigüe des dangers de cette évolution" (Deléage, 1992). L'écologie a progressivement renouvelé ses concepts, non seulement pour mieux appréhender les systèmes complexes, mais aussi pour prendre davantage en compte l'action de l'homme. Ces concepts ont essentiellement été introduits en vue de produire de nouvelles connaissances. Or, face aux crises multiples auxquelles notre civilisation est confrontée, les connaissances ne suffisent pas; nous avons aussi besoin d'imaginaires inspirants pour penser conjointement des solutions sociales et écologiques. N'est-ce pas l'un des défis actuels de l'écologie que de contribuer à les formuler ? Dans cette intervention, nous analyserons en quoi mobiliser les concepts scientifiques, non plus pour simplement produire des connaissances mais aussi pour imaginer de nouvelles modalités d'action, peut nous aider à repenser les liens entre notre civilisation et la nature.

Elsa Berthet est Chargée de recherches à l'INRA. Ingénieur agronome, elle est titulaire d'un doctorat en Sciences de Gestion (Mines ParisTech et INRA) et a réalisé un post-doctorat de deux ans à l'université McGill (Canada). Sa recherche porte sur la gouvernance des écosystèmes cultivés, et plus particulièrement sur la générativité de la science en vue d'imaginer des formes de gouvernance innovantes. Elle est l'auteur du livre Concevoir l'écosystème, un nouveau défi pour l'agriculture, paru en 2014 aux Presse des Mines, ainsi que d'une quinzaine d'articles dans des revues à comité de lecture dans le champ des sciences de gestion, de l'écologie et de l'agronomie.

Vincent Bretagnolle est Directeur de echerches au CNRS. Il a fondé en 1994 la Zone Atelier Plaine & Val de Sèvre (département des Deux Sèvres), dans laquelle il mène des recherches sur les conséquences du changement global (principalement l'intensification des pratiques agricoles) sur la dynamique spatiale et temporelle des populations et des communautés animales et végétales dans les milieux agricoles. Ses recherches en Agroécologie des territoires visent à concilier l'agriculture et l'environnement, en identifiant des systèmes de culture innovants à partir de solutions fondées sur la nature. Il est l'auteur de plus de 300 publications scientifiques et siège dans de nombreux comités d'experts sur la biodiversité.

Claude CAMBUS
L'activité humaine a toujours eu un effet sur son environnement, naturel et social. La sédentarisation depuis le néolithique, l'exode rural avec l'ère industrielle, la globalisation aujourd'hui. L'impact dépasse l'aménagement du territoire, il porte sur les libertés et l'humanité elle-même avec le génie génétique, l'intelligence artificielle… Et l'entreprise intervient plus ou moins volontairement dans ces impacts. La relation de l'entreprise à la société et à la civilisation est affectée désormais par la globalisation et la financiarisation qui concourent à abstraire l'humain de la décision économique. Il est impératif de sortir de l'analyse du conflit d'intérêt entre actionnaires et salariés comme de la relation d'aide ou de charge fiscale avec la puissance publique. Il faut inventer des modes de régulation intégrant l'ensemble des parties prenantes de l'entreprise, fondés sur la coopération, l'intérêt partagé et la définition de son objet social et des conditions de sa pérennité.
La CFE-CGC, confédération syndicale de l'encadrement, est une organisation singulière qui a, du fait de ses adhérents, toujours considéré que l'intérêt des salariés et celui des propriétaires de la société avaient en commun le succès et la pérennité de l'entreprise. Pour cette confédération, l'entreprise aurait dû considérer ses salariés comme un second groupe d'associés. En ce sens, elle a soutenu "la participation" des salariés dès l'origine, dans les années 60. Elle a ensuite participé activement au développement de la responsabilité sociétale des entreprises en fondant l'ORSE avec Geneviève Férone. Aujourd’hui, elle est tout à fait convaincue que l'émergence d'un nouveau statut juridique de l'entreprise est nécessaire et elle fait des propositions en ce sens.

Claude Cambus est Ingénieur Arts et Métiers ParisTech, 1960. Ancien Secrétaire général et Vice-président délégué de la CFE-CGC et Secrétaire général de la CEC (confédération européenne des cadres). Ancien membre du CESE et du CES européen. Co-auteur de Cadres et Techniciens témoins pour l'avenir (Le Centurion, 1981) et coordinateur de Considérations économiques et sociales (IRSEH Institut du management LEXIES), ainsi que de nombreuses publications de la CFE-CGC.

François EWALD : Responsabilité, entreprise, civilisation
Nous vivons un nouveau temps de la responsabilité des entreprises : en-dehors ou au-delà d'une référence à des obligations légales, on demande aux entreprises, en raison des pouvoirs qu'elles exercent, d'expliciter ce dont elles s'estiment devoir répondre, non seulement aux apporteurs de capitaux, mais à la société. Il ne s'agit pas seulement pour elles de définir leur raison d'être ou leur mission, mais de leur vision des conséquences de leur activité pour la société. Mais cette demande est-elle si nouvelle ? Le triangle "responsabilité, entreprise, civilisation" n'accompagne-t-il pas la présence d'acteurs économiques et financiers dans la cité ? Et pour comprendre le moment contemporain, ne convient-il pas de le comparer aux figures précédentes qu'il a pu prendre ?

Philosophe, juriste, François Ewald est professeur honoraire au Conservatoire national des arts et métiers où ses travaux portent plus particulièrement sur la politique du risque. Ancien assistant de Michel Foucault au Collège de France, il a créé l'Association pour le centre Michel-Foucault. François Ewald est délégué général du Comité Médicis. Sa publication la plus récente est : Aux risques d'innover : Les entreprises face au principe de précaution, Autrement, 2009.

François FAURE : Inverser la relation entre entreprise et capital
L'entreprise doit pouvoir mettre en concurrence les fournisseurs de capitaux propres, comme elle le fait pour les préteurs et pour tous les fournisseurs de ses ressources essentielles. Cela libérera l'entreprise de son objectif contestable de maximiser à tout prix la valeur pour l'actionnaire, et créera un cadre favorable à une relation plus saine et efficace avec l'ensemble de ses parties prenantes, en plaçant le capital humain au centre du projet d'entreprise. Une telle approche est implémentable en utilisant l'infrastructure actuelle des marchés financiers, qui s’en trouvera revalorisée aux yeux du public, de manière synergique avec la montée en puissance des considérations ESG des grands investisseurs. Du côté de l'entreprise, elle est également implémentable en utilisant les dispositions légales existantes, en particulier les plus récentes, du droit des sociétés. Au plan opérationnel, elle favorisera une transformation de la fonction managériale, en établissant pour les dirigeants une communauté d'intérêt avec et une responsabilité vis-a-vis du capital humain de l'entreprise.

François Faure a 30 ans d'expérience en banque d'affaires. Il a exercé des responsabilités importantes dans plusieurs établissements financiers de premier rang, français, européens et américains. Il est le co-fondateur de l'Académie NewCode, qui propose un cadre formel pour une refonte de l'entreprise dans ses 5 dimensions fondamentales : Le Projet d'Entreprise, sa Gouvernance, le Partage de la Valeur, la Gestion des Difficultés, et la Structuration Financière (academienewcode.com).

Pascal LE MASSON : Histoire de l'entreprise et révolutions scientifiques: inventer des formes de liberté et de responsabilité face à l'inconnu [communication établie avec Benoît WEIL]
On peut difficilement faire l'histoire des entreprises sans noter ce que ces dernières doivent à la science — depuis les mathématiques et l'astronomie si nécessaires pour la navigation commerciale à la physique la plus pointue pour les semi-conducteurs contemporains. Il est moins évident, et pourtant tout aussi vrai, que les entreprises ont contribué aux avancées de la science, en fournissant les instruments, les organisations, voire les phénomènes et les questions nécessaires. Les interactions fortes entre science et entreprise sont au cœur de nos civilisations contemporaines — et il importe donc d'en comprendre la variété, la fécondité mais aussi les risques, voire les limites intrinsèques. Car on est surpris de voir que, si les rapports entre science et entreprise ont pu conduire à des réussites remarquables, ils prennent aussi parfois la forme d'un asservissement dramatique ou d'une déresponsabilisation mutuelle. Lors de la présentation, on reviendra sur ces formes d'interdépendance. On s'interrogera ensuite sur le fait que science et entreprise réclament toutes deux, face à l'inconnu, une forme de liberté (liberté du chercheur, liberté d'entreprendre) doublée d'une responsabilité limitée. La similitude est d'autant plus troublante qu'elles en sont parfois mutuellement garantes, ce qui pourrait être la clé des formes d'interdépendance entre science et entreprise pour explorer l'inconnu.

Pascal Le Masson et Benoît Weil sont professeur à MINES ParisTech - PSL, chaire de théorie et méthodes de la conception innovante. Leurs travaux sur la conception, et notamment l'histoire des bureaux d'études et des laboratoires de recherche, ont contribué à mettre en lumière le rôle crucial de la conception dans le développement de la grande entreprise et l'importance des inconnus communs non-appropriables dans l'invention des formes nouvelles de l'action collective.

Arnaud STIMEC
L'intervention consiste à présenter une étude de cas, l'entreprise Legallais, installée à Caen. Cette entreprise se distingue par son engagement social et sociétal et sa capacité à s'adapter dans un contexte difficile. En outre, cette entreprise a défini sa "raison d'être", témoignant ainsi d'un intérêt marqué pour la thématique de ce colloque. L'étude de cas est menée avec des étudiants de l'IEP avec bienveillance mais sans complaisance. Quatre thématiques particulières sont étudiées: la gouvernance; l'engagement sociétal et territorial; l'économie circulaire et l'environnemen; le management, la gestion des ressources humaines et la qualité de vie au travail. Les données du cas seront confrontées aux acquis des études de cas antérieures et aux concepts issus des travaux sur les entreprises à mission.

Arnaud Stimec est professeur à l'Institut d'Études Politiques de Rennes et responsable du campus de Caen (consacré à la transition écologique). Ses travaux portent principalement sur le dialogue dans les organisations (mais aussi les conflits et les négociations), les conditions de sa pérennité et ses effets, notamment en termes de responsabilité sociétale des organisations (en particulier santé au travail et impact environnemental).

Philippe ZAOUATI
En créant Mirova, une société de gestion entièrement dédiée à l'investissement responsable, Philippe Zaouati a contribué à l'émergence d'une finance durable en France comme dans le reste de l'Europe. Il s'est également impliqué, à cette même fin, dans différentes associations professionnelles (l'Association française de la gestion financière — AFG et l'EFAMA, l'association qui représente l'ensemble des acteurs de la gestion collective d'actifs) et initiatives internationales (International Corporate Governance Network-ICGN, International Integrated Reporting Council-IIRC, Investment Leaders Group-ILG). Il a récemment été nommé membre du High-Level Expert Group on Sustainable Finance (HLEG) de la Commission européenne, et préside Finance for Tomorrow, une initiative lancée au sein de Paris Europlace pour développer et promouvoir l'écosystème français en matière de finance verte et durable. Philippe Zaouati était précédemment directeur général délégué de Natixis Asset Management. Son expérience antérieure comprend également des rôles de gestion de haut niveau au sein du Groupe Caisse des Dépôts, de La Banque Postale et du Crédit Agricole. Membre accrédité de la Société française des actuaires, il est diplômé de l'École nationale de la statistique et de l'administration économique (ENSAE).


SOUTIENS :

Chaire Théorie de l'Entreprise | MINES ParisTech
• Organisation de coopération et de développement économique (OCDE)
• Centre de droit privé et de sciences criminelles d'Amiens (Ceprisca) | Université de Picardie Jules Verne (UPJV)
Veolia

Programme 2019 : un des colloques

Programme complet


LA PENSÉE INDISCIPLINÉE DE LA DÉMOCRATIE ÉCOLOGIQUE

( DÉMOCRATIE, PARTICIPATION ET ENVIRONNEMENT )


DU LUNDI 13 MAI (19 H) AU VENDREDI 17 MAI (14 H) 2019

[ colloque de 4 jours ]



DIRECTION :

Loïc BLONDIAUX, Dominique BOURG, Marie-Anne COHENDET, Jean-Michel FOURNIAU


ARGUMENT :

Alors qu'il y a peu encore, le principe de "concerter autrement [et de] participer effectivement" semblait acquis à la vie démocratique, l'utilité du débat public est questionnée par différents vents contraires. Le retour du populisme d'une part, la tentation d'un retour à la décision autoritaire d'autre part, contribuent à cette remise en cause. Alors que la création de la Cndp (1995-2002) faisait sens dans un contexte où l'on s'imaginait pacifier les rapports de l'humanité avec la Nature, les potentialités de la délibération démocratique se trouvent confrontées à l'urgence climatique et écologique. C'est une des leçons de Notre-Dame-des-Landes (avec Sivens, Bure, etc.) : la démocratie se définit aussi à partir de conflits et de ruptures qu'exigent aujourd’hui de nouvelles formes de vie plus respectueuse de l'écologie. La démocratie confrontée à de nouveaux défis est toujours à réinventer.

La réflexion collective sur la démocratie écologique ne peut qu'être indisciplinée, une invitation à dépasser les disciplines à travers lesquelles sont pensées la démocratie, ses institutions et la participation. L'indiscipline est aussi un caractère du débat public, qui n'exclut ni ne trie, mais propose l'intelligence collective comme fabrique de la raison. L'indiscipline enfin, parce que les innovations et les formes nouvelles de vies démocratiques émergent en dehors de tout cadre institutionnel et n'en revendiquent pas nécessairement d'autres. La démarche indisciplinée de ce colloque vise une réelle confrontation entre la théorie et sa mise en œuvre dans des pratiques institutionnelles.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Lundi 13 mai
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Mardi 14 mai
LA DÉMOCRATIE À L'ÈRE DE L'ANTHROPOCÈNE
Matin
Dominique BOURG [Université de Lausanne] : La difficulté à exprimer la radicalité écologique dans les modes d'expression démocratique actuels
Serge AUDIER [Paris IV Lettres Sorbonne Université] : Le défi écologique : une question soluble démocratiquement ? [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Après-midi
Loïc BLONDIAUX [Centre européen de sociologie et de science politique de la Sorbonne, Université Paris I Panthéon-Sorbonne] : Les pathologies de la démocratie contemporaine : stratégies pour une renaissance

La réforme constitutionnelle et la démocratie écologique, table ronde avec :
Marie-Anne COHENDET [Centre de recherche en droit constitutionnel (CRDC), Université Paris I Panthéon-Sorbonne]
Loïc BLONDIAUX [Centre européen de sociologie et de science politique de la Sorbonne, Université Paris I Panthéon-Sorbonne]
Dominique BOURG [Université de Lausanne]
Jean-Michel FOURNIAU [pilote de l'Observatoire des débats]

Soirée
Le "grand débat national", une réponse à la crise politique et sociale ?, table ronde avec :
Maxime GABORIT & Théo GRÉMION [équipe Enquêtes Gilets jaunes (Centre Émile Durkheim)]
Jean-Michel FOURNIAU [pilote de l'Observatoire des débats]
Manuel CERVERA MARZAL [UMR DICE 7318, LabexMed, Aix-Marseille Université]


Mercredi 15 mai
CONFLITS ENVIRONNEMENTAUX ET FORMES NOUVELLES DE VIE DÉMOCRATIQUE
Matin
L'écologie a-t-elle besoin de la démocratie ?
Joëlle ZASK [Aix-Marseille Université] : Qu'est-ce que la notion de "public" ? Pourquoi cette notion (ré)émerge-t-elle avec l'écologie ?
Étienne BALLAN : Généalogie des conflits : ce que l'environnement apporte à la vitalité démocratique
Corinne GENDRON & Mandy VEILLETTE [CRSDD, UQAM] : Science pacificatrice et controverses : dynamique de l'acceptabilité sociale au Québec

Après-midi
La démocratie entre procédures et émotions
Corine PELLUCHON [Université Paris-Est-Marne-La-Vallée] : La démocratie écologique au-delà des procédures

Expertise scientifique et débat public
Catherine LARRÈRE [Université Paris I Panthéon-Sorbonne] : Compétence et autonomie démocratiques
Françoise VERCHÈRE : Est-ce le projet qui est conflictuel ou est-ce la procédure, c'est-à-dire la manière dont les projets sont décidés ? À propos de Notre-Dame-des-Landes
Michel BADRÉ : Le rôle et la place de l'expertise dans le débat public

Soirée
Expérimentations démocratiques, participation du public et démocratie participative, table ronde avec les lauréates et lauréats des deux éditions du prix de thèse de la Commission nationale du débat public et du Gis Démocratie et Participation :
Baptiste GODRIE [CREMIS] : Savoirs expérientiels et professionnels en santé mentale : tensions entre les modèles intégrationniste et écologique [lauréat du deuxième prix en 2015]
Laura SEGUIN [Istéa] : Faire participer pour faire accepter ? Quand les sciences de la nature en appellent aux sciences sociales dans un projet de recherche participatif [lauréate du premier prix en 2017]
Barbara BERARDI-TADIÉ : Démocratie participative et pesticides : techniques de contre-lobbying citoyen [lauréate du troisième prix en 2017]


Jeudi 16 mai
L'INSTITUTIONNALISATION DE LA DÉMOCRATIE ÉCOLOGIQUE
Matin
Réinventer le débat public
Jean-Michel FOURNIAU : Le débat public et l'agir citoyen pour la transition écologique
Mario GAUTHIER [UQO] & Louis SIMARD [Université d'Ottawa] : Le BAPE, 40 ans de démocratie écologique : entre survie et innovation

Après-midi
Ce que peut le droit pour la démocratie écologique
Erin DALY [Université de Dalaware (USA)] : Le droit de la dignité humaine, comme instrument utile pour la démocratie écologique
Marie-Anne COHENDET [Centre de recherche en droit constitutionnel (CRDC), Université Paris I Panthéon-Sorbonne] : La synergie entre droit international et droit constitutionnel pour renforcer la démocratie écologique

Fin d'après-midi & Soirée
SÉANCE PUBLIQUE
"HORS LES MURS" — À ART PLUME (Saint-Lô)
La Parenthèse Utopique : explorons les possibles de la démocratie écologique, présentation animée par les étudiants du Parcours Concertation et Territoires en Transition du Master politiques publiques de Sciences Po Rennes à Caen : Emma BEAUDOIN, Noémie BESSETTE, Clément BRANDELON, Julie FRANÇOIS, Aloïse GERMAIN, Samuel LAFORGE, Goulven LEBRETON, Clara LE DIOLEN, Louison LEVRARD, Nala LORIOT, Flore PETIT, Coline PHILIPPE, Élise RIBARDIÈRE, Nolwenn THIRIET, Romane THOMAZEAU et Sandra VIAN, avec le concours d'Anne CHEVREL


Vendredi 17 mai
FACE AUX URGENCES, EST-IL ENCORE POSSIBLE ET TEMPS DE DÉLIBÉRER ?
Matin
Jeunes chercheurs, table ronde avec :
Juliette ROUSSIN [Centre de recherche en éthique, Université de Montréal] : La démocratie au secours de l'écologie
Caroline LEJEUNE [Institut de géographie et durabilité, Université de Lausanne] : De la justice environnementale à la justice écologique
Dimitri COURANT [Institut d'études politiques, historiques et internationales, Université de Lausanne, et CRESSPA-Paris 8 Saint-Denis] : Délibérer pour sauver la planète ? L'assemblée citoyenne irlandaise et la lutte contre le réchauffement climatique

Conclusions, par Floran AUGAGNEUR & Ilaria CASILLO [Cndp]

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIE :

Serge AUDIER : Le défi écologique : une question soluble démocratiquement ?
La crise écologique impose de repenser nos catégories politiques et notre conception même de la démocratie. En dialogue avec l'exposé de Dominique Bourg prononcé à Cerisy, et en réponse aux tentatives récentes de proposer en France une "démocratie écologique" — notamment dans l'ouvrage collectif, Pour une 6e République écologique —, Serge Audier esquisse quelques pistes de réflexion. La démocratie, dans ses modalités actuelles, est-elle armée pour affronter le péril écologique ? Doit-elle muter dans ses institutions ? Si les défis de l'anthropocène suggèrent la nécessité d'un renouvellement intellectuel, moral et institutionnel, ces questions ne sont toutefois pas toujours si inédites qu'on l'imagine. Dès le XIXe siècle, les enjeux de très long terme ont été affrontés par les théoriciens de la démocratie. Nous avons peut-être là un bagage théorique qu'il est possible de transformer sans faire un saut périlleux, et sans tomber dans les périls, agités par les adversaires d'une "démocratie écologique", d'une dictature des savants ou d'une expertocratie court-circuitant la souveraineté populaire. Ce qui suppose aussi d'articuler enjeux sociaux et environnementaux dans un sens égalitaire, et de réfléchir à ce que signifie le mot "peuple"…

Serge Audier, philosophe, est maître de conférences à l'université Paris-Sorbonne.
Publications
La Société écologique et ses ennemis. Pour une histoire alternative de l'émancipation, La Découverte, 2017.
Âge productiviste. Hégémonie prométhéenne, résistances et alternatives écologiques, La Découverte, 2018.

Loïc BLONDIAUX : Les pathologies de la démocratie contemporaine : stratégies pour une renaissance
La décomposition des institutions de la démocratie libérale représentative est à l'œuvre, l'épuisement est manifeste au point que l'effondrement semble désormais proche. Menaces sur les libertés, tentations autoritaires et épistocratiques, rétrécissement des espaces de délibération, discrédit des représentants : les pathologies qui affectent les démocraties contemporaines sont multiples et les dégâts qu'elles provoquent apparaissent pour beaucoup irréparables. Le dérèglement climatique et l'érosion de la bio-diversité risquent par ailleurs d'imposer un cadre de contraintes susceptible de rendre de plus en plus chimérique le gouvernement démocratique de nos sociétés. Au moment où certains en viennent à prophétiser la "mort des démocraties" (Levitsky et Ziblatt), le moment est venu d'une réflexion sur les antidotes. Tout en regardant le mal en face, il nous faut inventorier les remèdes mais aussi les alternatives possibles à cette démocratie malade. Car le moment présent est aussi celui de mobilisations nombreuses contre l'état des choses, de l'invention ou de la réinvention de formes démocratiques nouvelles, d'initiatives multiples de partage, de coopération et de vie commune. Quel bilan peut-on tirer de ces expériences ? Quelle stratégies peuvent-elle permettre de déjouer les mécanismes autoritaires à l'œuvre ? Comment sortir de ce piège mortel ? Au delà du précis de décomposition, il s'agira aussi de chercher des voies de guérison.

Loïc Blondiaux est professeur de science politique à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où il dirige le parcours "Ingénierie de la concertation" du Master de science politique. Il est également chercheur au Centre d'études sociologiques et de science politique de La Sorbonne (CESSP/Paris I/CNRS/EHESS). Il dirige la revue Participations (De Boeck éditeurs) et participe à la direction collégiale du GIS Démocratie et participation. Il est membre du conseil scientifique de la Fondation pour la Nature et l'Homme (FNH), de "Décider ensemble" ainsi que du collectif "Mieux voter" et co-anime l'Institut de la Concertation et de la Participation Citoyenne. Ses travaux de recherche portent sur les théories de la démocratie, la démocratie participative et la démocratie délibérative.
Publications
En collaboration : Inventer la Démocratie du XXIe siècle, Les Liens qui Libèrent, 2017.
Avec C. Traïni : La démocratie des émotions, Presses de Sciences Po, 2018.

Dominique BOURG : La difficulté à exprimer la radicalité écologique dans les modes d'expression démocratique actuels
Le moment démocratique actuel : où en est la démocratie et comment la crise environnementale la questionne ? Je repartirai des difficultés présentes de la démocratie française avec au premier chef une crise violente de la représentation, manifeste avec la crise des Gilets jaunes et le soutien populaire qu'a connu durant des semaines ce mouvement. Les causes en sont probablement multiples, mais il semble que quelque chose comme un sentiment de trahison des élites politiques, soupçonnées de servir des intérêts financiers internationaux aux lieu et place de l'intérêt des citoyens, y ait joué un rôle déterminant. Vient créditer un tel soupçon l'effondrement général, largement au-delà du cas français, du capital public vis-à-vis du capital privé; effondrement qui, dans le cas spécifique du dirigisme français, ne pouvait se réaliser sans la collaboration des élites publiques, lesquelles passent désormais avec une grande facilité du public au privé. La revendication du RIC prend bien sûr tout son sens dans un tel contexte. Un contexte qui rend délicate l'interprétation du détonateur écologique de la crise des Gilets jaunes, à savoir une pseudo-taxe carbone, mal ficelée et essentiellement destinée à combler les déficits publics. Mais il n'en reste pas moins vrai que cette première crise se déploie sur fond de transformations plus profondes et au long cours. À la fin des trente glorieuses, qui n'est pas étrangère à la crise politique évoquée, se superpose l'incapacité des régimes représentatifs à faire face aux difficultés écologiques. Une incapacité qui était jusqu'alors sans conséquences, les problèmes en question paraissant lointains. Or, tel n'est plus le cas. Le dérèglement climatique devient accessible à nos sens. L'effondrement des faunes sauvages pourrait au moins dans ses effets devenir également sensible. Autrement dit le faux-semblant des politiques publiques environnementales devient visible. Or, en un sens, ni les élites politiques, trop proches des élites économiques, ni le "peuple" ne veulent en majorité sortir de ce faux-semblant. Du côté des élites politiques et économiques car la logique de la croissance exige la destruction de mécanismes naturels auquel il convient de substituer des processus industriels; du côté de la population, car elle reste, pour une grande part, attachée au confort matériel produit par le productivisme antérieur. Et si l'on prend au sérieux le devenir de quelque chose comme une démocratie écologique, force est de constater qu'il mettrait à mal l'un des fondements des démocraties représentatives, à savoir le renvoi à la seule liberté négative de la détermination des modes de vie individuels.

Dominique Bourg est philosophe, professeur, Université de Lausanne, Faculté des Géosciences et de l'Environnement. Dirige la collection "L'écologie en questions" et lapenseeecologique.com aux Puf. Appartenance à : CFDD, Commission Coppens, Conseil national du développement durable, Grenelle de l'environnement, etc.; à conseils scientifiques : Ademe (2004-2006), Fondation pour la Nature et l'Homme (1998-2018; Paris) ; Organe de prospective de l'État de Vaud (2008-2017); Fondation Zoein (Genève). Domaines de recherches : pensée écologique, risques et principe de précaution, économie circulaire et démocratie écologique.
Derniers ouvrages parus
Perspectives on Industrial Ecology, Greenleaf Publishing, 2003 / Routledge, 2017.
Dictionnaire de la pensée écologique, avec Alain Papaux, Puf, 2015.
Écologie intégrale. Pour une société permacirculaire, avec Christian Arnsperger, Puf, 2017.
Inventer la démocratie du XXIe siècle. Une Assemblée citoyenne du futur, D. Bourg et alii, L.L.L., 2017.
Une nouvelle Terre, Desclée de Brouwer, 2018.

Marie-Anne COHENDET : La synergie entre droit international et droit constitutionnel pour renforcer la démocratie écologique
À la fin des années 1960 pratiquement aucune constitution ne traite de la protection de l'environnement. La première à le faire est la Constitution de la Pennsylvannie, en 1970. Deux ans plus tard, la déclaration Stockholm ouvre la voie à l'échelle mondiale, à une reconnaissance du droit de l'homme à un environnement sain et, plus globalement, à une protection internationale des droits de l'homme. Depuis lors, la quasi-totalité des constitutions d'États démocratiques qui modifient leur constitution y intègrent la protection de l'environnement. La Conférence de Rio, en 1992, donne un nouvel élan à ce mouvement en droit international et c'est justement deux ans après que la Cour Européenne des Droits de l'Homme interprète la Convention de 1950 à la lumière de cette évolution pour reconnaître un droit de l'homme à un environnement sain à l'appui du droit à une vie familiale normale et du droit à la vie. Cette jurisprudence a exercé une grande influence pour la constitutionnalisation de la protection de l'environnement dans de nombreux pays et notamment en France, où la Charte de l'environnement est intégrée dans la Constitution en 2005. Aujourd'hui, 170 États sur 193 ont des dispositions constitutionnelles relatives à la protection de l'environnement. Les principes majeurs du droit international sont de plus en plus souvent reconnus et appliqués en droit constitutionnel et/ou directement dans l'ordre interne. Ainsi, les principes de la Convention d'Aahrus ont donné lieu à la moitié des décisions QPC du Conseil constitutionnel, via les dispositions de la Charte de l'environnement qui les reprend en grande partie, notamment sur la démocratie participative. Sur le terrain, la démocratie écologique a beaucoup progressé par cette voie dans de nombreux pays, puisque les constitutions s'imposent immédiatement à tous, pouvoirs publics, juges et particuliers. Cependant ces progrès restent très insuffisants.

Marie-Anne Cohendet est professeure de droit constitutionnel, et de droit constitutionnel de l'environnement à l'École de droit de la Sorbonne, Université Paris 1. Elle co-dirige l'axe "Environnement" à l'ISJPS (UMR CNRS).
Publications
Droit constitutionnel, Éditions LGDJ, 4ème éd., 2019 (à paraître).
Droit constitutionnel de l'environnement, (dir.), Éditions Mare et Martin, 2019 (à paraître).
Droit de l'environnement, avec M. Prieur, J. Bétaille, H. Delzancles, J. Makoviak et P. Steichen, précis Dalloz, 8ème éd., 2019 (à paraître).
Rapport sur Le Référendum d'Initiative Citoyenne délibératif, avec L. Blondiaux, M. Fleury, B. François, J. Lang, J.-F. Laslier, Q. Sauzay et F. Sawicki, Terra Nova, Février 2019.
Inventer la démocratie du XXIe siècle. L'Assemblée citoyenne du futur, avec F. Augagneur, L. Blondiaux, D. Bourg, J.-M. Fourniau, B. François et M. Prieur, Éditions Les Liens qui Libèrent, 2014.
Pour une 6ème République écologique, avec D. Bourg, J. Bétaille, L. Blondiaux, J.-M. Fourniau, B. François, P. Marzolf et Y. Sintomer, Éditions O. Jacob, 2011.

Dimitri COURANT : Délibérer pour sauver la planète ? L'assemblée citoyenne irlandaise et la lutte contre le réchauffement climatique
Depuis presque dix ans, la démocratie délibérative irlandaise se développe et constitue un laboratoire pour des transformations politiques majeures. Trois assemblées citoyennes tirées au sort se sont succédées faisant la preuve par l'exemple que l'inclusion de citoyens ordinaires dans les processus de décision permettait d'avancer sur des enjeux complexes et clivants. Les récents référendums issus des propositions des assemblées et ayant permis la légalisation du mariage pour tous, du droit à l'IVG et du blasphème, ont monopolisé l'attention médiatique et académique, au point de faire oublier les autres sujets traités par les mini-publics irlandais. En effet, outre la question de l'avortement, la troisième assemblée citoyenne a également délibéré sur les enjeux du vieillissement de la population, des référendums, des parlements et de la lutte contre le réchauffement climatique. C'est sur ce dernier thème que la présente contribution se concentre. Elle se base sur des données empiriques de première main, observations ethnographiques, entretiens semi-directifs, analyses de discours et de documents, produites lors d'une enquête de terrain qualitative de plusieurs années. Comment délibérer pour sauver la planète ? Quels sont les effets de cadrage du dispositif ? En quoi les délibérations sur des enjeux écologiques de long terme sont-elles différentes de celles sur des enjeux sociétaux précis, comme le droit à l'avortement ? Quels sont les apports d'un mini-public comparés à la délibération de politiciens élus ? Comment penser la légitimité démocratique de citoyens tirés au sort ?

Dimitri Courant est doctorant en science politique à l'université de Lausanne (IEPHI) et à l'université Paris-VIII-Saint-Denis (CRESPPA). Ses travaux portent sur la délibération, la représentation politique, la démocratie et les usages du tirage au sort aux XXe et XXIe siècles. Ses enquêtes qualitatives de terrain comparent les assemblées citoyennes irlandaises, le CSFM français et les PubliForums suisses, ainsi que le groupe citoyen du CESE et le Grand Débat National. Sa thèse s'intitule "Le nouvel esprit du tirage au sort. Représentation et principes démocratiques au sein de dispositifs délibératifs contemporains".
https://www.cresppa.cnrs.fr/csu/equipe/les-membres-du-csu/courant-dimitri/
Publications
"Penser le tirage au sort. Modes de sélection, cadres délibératifs et principes démocratiques", in Chollet A., Fontaine A. (dir.), Expériences du tirage au sort en Suisse et en Europe : un état des lieux, Berne, Schriftenreihe der Bibliothek am Guisanplatz, p. 257-28, 2018.
"Les assemblées citoyennes en Irlande. Tirage au sort, référendum et constitution", La Vie des Idées, 2019a.
"Petit bilan du Grand Débat National", AOC, 2019b.
"Délibération et tirage au sort au sein d’une institution permanente. Le Conseil Supérieur de la Fonction Militaire (1968-2016)", Participations, vol. 23, n°1, 2019c.
"Du klérotèrion à la cryptologie. L'acte de tirage au sort au XXIe siècle, pratiques et instruments", Participations, numéro hors-série : Tirage au sort et démocratie, Pratiques, instruments, théories, 2019d.
Le tirage au sort au XXIe siècle, (dir.) avec Yves Sintomer, (Participations, dossier spécial, vol. 23, n°1), 2019e.

Erin DALY : Le droit de la dignité humaine, comme instrument utile pour la démocratie écologique
En cherchant des approches indisciplinées et transversales qui transcendent les voies bien établies pour aborder les défis de la démocratie environnementale, la reconnaissance du droit à la dignité humaine peut constituer l'un des terrains les plus fertiles. Le droit à la dignité humaine est inhérent à la personne humaine et globalement reconnu comme un droit constitutionnel et fondamental qui lie tous les autres droits de l'homme. La dignité humaine est comprise comme protégeant le droit de toute personne de développer pleinement sa personnalité, en tant qu'individu et en tant que membre d'un groupe. Elle nourrit ainsi l'action démocratique et, en particulier, les activités particulièrement liées à l'environnement naturel dont dépendent tous les êtres humains, car elle fonde le droit de chacun de prendre des décisions au niveau de l'individu et de la communauté. Ainsi, participer à la démocratie environnementale est en soi un acte de dignité. De plus, le caractère unique de la dignité humaine réside dans le fait qu’elle n'est pas seulement la source des droits, mais aussi leur objectif : les personnes peuvent exercer leurs droits démocratiques en matière d'environnement parce qu'elles jouissent de la dignité humaine, et elles y participent dans le but de renforcer leur capacité de vivre dans la dignité.

Erin Daly, professeur de droit au Delaware Law School, aux États-Unis, est la co-fondateur du Dignity Rights Project.
Publications
Dignity rights : courts, constitutions and the worth of the human person, Penn. Press, 2013.
Avec James R May, Global environmental constitutionalism, Cambridge 2015.
Co-editeur de plusieurs tomes, y compris, Implementing environmental constitutionalism (Cambridge, 2018) et Encyclopedia of human rights and the environment legality, indivisibility, dignity, and geography (Edward Elgar, 2019).

Jean-Michel FOURNIAU : Le débat public et l'agir citoyen pour la transition écologique
Après vingt années d'existence, il ne s'agit pas seulement pour la Commission nationale du débat public de renouveler les modalités de son activité mais d'en refonder la légitimité et l'efficacité. Le cycle engagé avec la création de la CNDP, de démocratisation de la décision environnementale, s'achève en effet. D'une part, la défiance vis-à-vis des institutions et des experts à laquelle un débat ouvert offre une occasion d'expression libre tend à favoriser des formes de populisme quand les transitions imposées aux populations conduisent la force des attachements territoriaux et la montée des peurs devant les risques au repli sur une identité territoriale restreinte, plutôt qu'au travail du commun dont le déploiement déborde le temps du débat. D'autre part, la défiance des élus et des exécutifs face à l'expression populaire se lit dans les divers retours de la décision tranchée (y compris sous des formes apparemment démocratiques comme le référendum sur Notre-Dame-des-Landes) pour couper court à la recherche de compromis sociotechniques partagés. Dans ce jeu de défiances croisées, l'élargissement des missions et la consolidation d'une ingénierie de la participation attentive aux évolutions des attentes des publics ne suffisent plus à assurer le fait politique du débat public. Son institution perd en légitimité et sa pratique tend à être perçue comme une technique de participation. L'éviction de la CNDP de la conduite du "grand débat national" l'a souligné. Aussi, face aux enjeux radicalement nouveaux qu'impose la crise écologique à la vie démocratique, il s'agit de réinventer le débat public comme forme d'exploration et d'expérimentation de l'agir démocratique dans une société en transition.

Jean-Michel Fourniau est sociologue et directeur de recherche au laboratoire Dynamiques Économiques et Sociales des Transports de l'IFSTTAR. Il enseigne à l'EHESS où il est chercheur associé de Groupe de sociologie pragmatique et réflexive. Il est président du Groupement d'Intérêt scientifique du CNRS Démocratie et Participation. Il préside le programme de recherche Cit'in, financé par le ministère de la transition écologique et composé de 12 projets de recherche qui explorent "Les expérimentations démocratiques pour la transition écologique". Il pilote l'Observatoire des débats, initiative indépendante organisée dans le temps du "grand débat national". Il est membre du comité éditorial de la revue Participations (Éditions De Boeck) et co-directeur de la collection "Pragmatismes" aux Éditions Petra.
Publications
Inventer la Démocratie du XXIe siècle, Les Liens qui Libèrent, 2017.
La portée de la participation face au retour du conflit territorial, Ifsttar, 2015.
Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la participation, Gis Démocratie & Participation, 2013.
Démocratie et participation : un état des savoirs, De Boeck, 2011 (Participations, n°1).
Pour une 6ème République écologique, Paris, Odile Jacob, 2011.

Mario GAUTHIER & Louis SIMARD : Le BAPE, 40 ans de démocratie écologique : entre survie et innovation
Après 40 ans d'existence, le BAPE est devenu une véritable institution dans le paysage québécois de la démocratie écologique. Pionnier dans le domaine de la participation publique en aménagement du territoire et en évaluation environnementale, au fil des décennies, il a fait face à plusieurs tentatives de réformes qui visaient tant à freiner voir à bannir ses activités qu'à les renforcer ou les développer. Le BAPE apparait aujourd'hui comme une référence tant par les principes qu'il a développés que pour les pratiques qu'il a engendrées. Au cœur des tensions entre développement économique, protection de l'environnement et acceptabilité sociale, le BAPE a participé au développement d'une culture de la participation au Québec dans le domaine et au-delà. La communication propose de rendre compte des principales étapes qui ont marqué son parcours, des innovations observables et de l'influence que l'institution a pu avoir au-delà des disciplines et des tensions en tant qu'instrument participatif.

Mario Gauthier (Ph. D. études urbaines) est professeur titulaire au Département des sciences sociales de l'université du Québec en Outaouais (UQO) depuis 2006, où il enseigne aux trois cycles universitaires. Géographe et urbaniste de formation, il est chercheur régulier au sein du réseau de recherche Villes Régions Monde et du Centre de recherche sur le développement territorial, deux regroupements stratégiques reconnus par le FRQSC. Ses travaux de recherche et publications portent sur la planification urbaine et métropolitaine, l'aménagement du territoire et l'urbanisme, l'évaluation environnementale et le développement durable des territoires. Au cours des dernières années, il s’est particulièrement intéressé à la question de la participation publique en environnement, aménagement et urbanisme.
Publications
Bacqué M.-H. & Gauthier M., 2017, "Participation, Urban Planning and Urban Studies : Four Decades of Debates and Experiments since S. R. Arnstein's "A Ladder of Citizen Participation"", in C. Silver, R. Freestone and C. Demaziere (Ed.), Dialogues in Urban and Regional Planning 6, Routledge, Taylor & Francis group.
Bherer L., Gauthier M. & Simard L. (eds.), 2017, The Professionalization of Public Participation, Routledge, Taylor & Francis.
Bherer L., Gauthier M. & Simard L. (eds.), 2018, "Quarante ans de participation publique en environnement, aménagement du territoire et urbanisme au Québec : entre expression des conflits et gestion consensuelle", Les Cahiers de géographie du Québec, Vol. 62, n°175, p.15-40.
Gauthier M. & Simard L., 2017, "Le BAPE et l'institutionnalisation de la participation publique au Québec", dans A. Chaloux (dir.), L'action publique environnementale au Québec : entre local et mondial, Montréal, Les Presses de l'université de Montréal, p.129-151.

Détenteur d'un doctorat de sociologie de l'Institut d'études politiques de Paris et d'une maîtrise en science politique de l'UQAM, Louis Simard enseigne l'administration publique à l'École d'études politiques de l'université d'Ottawa. Ses travaux de recherche portent sur la participation publique dans les secteurs de l'environnement et de l'énergie, plus particulièrement sur les effets des instruments de participation publique sur les processus de régulation, la mise en œuvre de l'action publique et l'apprentissage organisationnel. Il travaille actuellement sur l'acceptabilité sociale comme instrument normatif de l'action publique. Il est notamment co-auteur du livre The Professionalization of the Public Participation (2017, Routledge).

Baptiste GODRIE : Savoirs expérientiels et professionnels en santé mentale : tensions entre les modèles intégrationniste et écologique
Cette intervention décrit les tensions actuelles entre les modèles intégrationniste et écologique des savoirs expérientiels et professionnels dans les institutions publiques de la santé à la lumière d'enquêtes empiriques réalisées à Montréal dans des équipes multidisciplinaires en santé mentale qui emploient des intervenants pairs-aidants. La perspective écologique se situe au cœur du projet des épistémologies du Sud proposé par le sociologue Boaventura de Sousa Santos. Elle offre une perspective critique de la vision positiviste de la connaissance et des soins au cœur du modèle intégrationniste, qui vise essentiellement à valider et à mobiliser les différents savoirs professionnels et expérientiels au sein du cadre médical. L'écologie des savoirs vise, quant à elle, à interroger les mondes rendus possibles par ces savoirs et les pratiques qu'ils permettent de développer sans les ramener à une seule et unique hiérarchie médicale.

Baptiste Godrie est sociologue au Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté (CREMIS) où il dirige l'axe Savoirs et professeur associé au Département de sociologie de l'université de Montréal. Il co-dirige le groupe de travail 21 Diversité des savoirs de l'AISLF. Ses recherches portent sur les inégalités sociales, la participation sociale et la production des savoirs dans le champ des services sociaux et des soins de santé.

Catherine LARRÈRE : Compétence et autonomie démocratiques
La démocratie reconnaît, dans son principe, la capacité de chaque citoyen à participer aux décisions qui engagent l'avenir commun. Mais la compétence ainsi reconnue concerne le juste, l'action politique entre citoyens. Qu'en est-il quand ces décisions, comme c'est souvent le cas dans les questions écologiques, font appel à un savoir scientifique et technique, censé réservé à des experts ? Le risque, dans ce genre de cas, d'une extension du pouvoir technique et bureaucratique au détriment de l'autonomie politique des citoyens, a souvent été dénoncé. Peut-on lutter contre ce risque ? Il s'agira, à partir d'exemples tirés des débats publics sur les questions environnementales, d'examiner quelles peuvent être les compétences du public dans ce genre de débat. Renvoient-elles à l'information et à la capacité à comprendre les enjeux techniques d'une question, capacité que les conférences de citoyens mettent régulièrement en évidence ? Ou y a-t-il des compétences propres au public, au citoyen ordinaire, non réductibles à un savoir technique ou scientifique ?

Catherine Larrère, philosophe, professeure émérite à l'université de Paris I-Panthéon-Sorbonne, travaille depuis 1992 sur les questions de philosophie et d'éthique environnementales.
Publications
Avec Raphaël Larrère, Penser et agir avec la nature, une enquête philosophique, La Découverte, 2015.
Avec Raphaël Larrère, Bulles technologiques, Marseille, Éditions Wildproject, 2017.
Collectif, Les inégalités environnementales, Paris, PUF, 2017.
Direction avec Rémi Beau, Penser l’anthropocène, Presses de Sciences Po, 2018.

Caroline LEJEUNE : De la justice environnementale à la justice écologique
La notion de "démocratie écologique" est née dans les années 90 de l'engagement de chercheurs anglosaxons et francophones en sciences humaines et sociales au sein de la théorie politique environnementale. Cette notion a été construite pour apporter des solutions pragmatiques aux défis politiques du long terme qu'impose la réalité physique de la crise écologique aux systèmes participatifs et représentatifs des démocraties occidentales. Des propositions ont tenté de faire entrer la nature en politique en conciliant des systèmes de valeurs et des temporalités politiques des démocraties occidentales, a priori incompatibles, avec ceux de la nature. Elles ont nourri jusqu'ici les débats théoriques en tentant d'inclure les générations futures et les données physiques par des ajustements procéduraux. Certains ont parfois été diffusés dans les procédures participatives et institutionnelles. Le dilemme de la compatibilité des valeurs semble toutefois perdurer. Cette communication reviendra sur ces propositions. Elle insistera sur les valeurs ontologiques et épistémiques que la notion de "démocratie écologique" diffuse dans les arènes participatives et institutionnelles. Elle énoncera enfin quelques angles morts de la démocratie écologique visant à discuter des sentiers inexplorés de cette notion.

Caroline Lejeune, docteure en sciences politiques environnementales, travaille dans le domaine des humanités environnementales sur les implications éthiques et politiques des transformations environnementales à partir des enjeux de justice. Pour cela, elle questionne les cadres théoriques des sciences humaines et sociales à partir d'études empiriques. Elle est première assistante au sein du groupe des humanités environnementales de l'Institut de géographie et de durabilité de l'université de Lausanne en Suisse. Elle est secrétaire de rédaction de la revue La Pensée écologique et membre du comité de rédaction de la revue Développement durable et territoires.
Pour en savoir plus : https://igd.unil.ch/clejeune/

Corine PELLUCHON : La démocratie écologique au-delà des procédures
Les conditions sont-elles réunies pour mettre en œuvre la transition écologique et solidaire qui implique une reconversion des modes de production et des changements importants dans les styles de vie des personnes, mais aussi dans la manière de penser le rapport entre le local et le global ? Lorsqu'elle est conçue comme une sagesse de l'habitation de la Terre et de la cohabitation avec les autres, l'écologie ne se limite pas à sa dimension environnementale. Elle est articulée à une écologie sociale, liée à la répartition équitable des coûts de la pollution et à une réorganisation du travail. Elle est aussi indissociable d'une modification profonde de notre manière de nous rapporter aux autres et de consommer. Ainsi, au lieu de conduire à des mesures atomistes, souvent vécues comme des punitions, cette approche holistique de l'écologie, qui ne sépare pas les impératifs de réduction des GES des enjeux d'équité sociale, requiert aussi des remaniements importants dans notre manière de faire de la politique. Il s'agira d'insister sur les traits moraux qui sont requis de la part des gouvernants et des gouvernés afin de transformer la transition énergétique en un projet de coopération. Nous verrons que, si les citoyen.ne.s doivent s'organiser afin de valoriser leurs expérimentations et leur savoir-faire dans le domaine de l'efficacité énergétique, de l'agriculture, de l'alimentation et des échanges, les représentants, de leur côté, sont invités à abandonner leur conception technocratique de l'État et à réaffirmer ses missions principales.

Corine Pelluchon, philosophe, professeur à l'université Paris-Est-Marne-La-Vallée. Spécialiste de philosophie politique et d'éthique appliquée (bioéthique, philosophie de l’environnement et de l'animalité).
Publications
Leo Strauss, une autre raison, d'autres Lumières, Vrin, 2005, Prix F. Furet.
L'autonomie brisée. Bioéthique et philosophie, PUF, 2009, 2014.
Éléments pour une éthique de la vulnérabilité. Les hommes, les animaux, la nature, Cerf, 2011, Grand Prix Moron de l'Académie française.
Les Nourritures. Philosophie du corps politique, Seuil, 2015, Prix É. Bonnefous de l'Institut des Sciences Morales et Politiques et Prix de l'essai francophone Paris Liège.
Manifeste animaliste. Politiser la cause animale, Alma, 2017.
Éthique de la considération, Seuil, 2018.
http://corine-pelluchon.fr/

Juliette ROUSSIN
Juliette Roussin est chercheuse postdoctorale au Centre de recherche en éthique de l'université de Montréal. Elle travaille sur la légitimité démocratique et les conditions sociales du jugement politique.
Publications
"Frontiers of Responsibility for Global Justice", Journal of Social Philosophy, 2018 (avec Mathilde Unger).
"Démocratie contestataire ou contestation de la démocratie ? L'impératif de la bonne décision et ses ambiguïtés", Philosophiques, 2013.
Constitution de la démocratie : Ronald Dworkin et le principe d'égalité, Hermann Éditeurs, À paraître fin 2019.


La Parenthèse Utopique : explorons les possibles de la démocratie écologique, présentation animée par les étudiants du Parcours Concertation et Territoires en Transition du Master politiques publiques de Sciences Po Rennes à Caen : Emma BEAUDOIN, Noémie BESSETTE, Clément BRANDELON, Julie FRANÇOIS, Aloise GERMAIN, Samuel LAFORGE, Goulven LEBRETON, Clara LE DIOLEN, Louison LEVRARD, Nala LORIOT, Flore PETIT, Coline PHILIPPE, Romane RAIFFÉ, Élise RIBARDIÈRE, Lucile TAMAGNAN, Nolwenn THIRIET, Romane THOMAZEAU et Sandra VIAN, avec le concours d'Anne CHEVREL

Cette présentation grand public, organisée dans les locaux d'Art Plume à Saint-Lô, proposera à chacun(e) de s'interroger sur la ou les manière(s) de faire entendre sa voix et de contribuer à la démocratie environnementale. Il s'agira de questionner et d'entendre celles et ceux qui sont déjà impliqués comme celles et ceux qui ne se sentent pas encore concernés dans ce lieu utopique de la démocratie écologique, un espace/temps d'échanges simple et lisible, déculpabilisant et permettant à chacun d'imaginer une véritable capacité d'agir.
Les sujets abordés à travers les différents ateliers proposés viseront à répondre aux questions suivantes :
- démocratie sauvage, démocratie d'élevage : quelle(s) forme(s) de démocratie(s) pour assurer les transitions ?
- quelle place pour les citoyens, les associations, les partis politiques, les syndicats dans la démocratie environnementale ?
Cette présentation se voudra également un temps de convivialité et d'échanges informels associant restauration, musique et arts graphiques.

Les étudiants du Master Politiques Publiques de Sciences Po Rennes à Caen, parcours Concertation et Territoires en Transition se forment à devenir des "transitionneurs", citoyens et professionnels en capacité de comprendre les enjeux de la démocratie écologique pour mettre en œuvre des politiques et projets de transition. Leur enseignante, Anne Chevrel, est consultante, dirigeante du cabinet de concertation Vox Operatio et maître de conférences associée à Sciences Po Rennes.


SOUTIENS :

• Commission nationale du débat public (Cndp)
• Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (ISJPS, UMR 8103) | Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
• Centre européen de sociologie et de science politique de la Sorbonne (CESSP, UMR 8209) | Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
• Groupement d'intérêt scientifique Démocratie & Participation
• Université de Lausanne (Unil)

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


L'ARCHITECTURE EN NORMANDIE À L'ÂGE CLASSIQUE


DU MERCREDI 3 OCTOBRE (19 H) AU DIMANCHE 7 OCTOBRE (14 H) 2018

[ colloque de 4 jours ]



DIRECTION :

Étienne FAISANT


ARGUMENT :

À la suite des deux colloques tenus à Cerisy : L'architecture normande au Moyen Âge (1994) et L'architecture de la Renaissance en Normandie (1998), cette nouvelle rencontre poursuivra l'examen et la valorisation du patrimoine normand en s'intéressant aux XVIIe et XVIIIe siècles. Si elle demeure peu étudiée, nombre d'importants monuments de Normandie attendant encore leur première monographie, cette période ne fut en effet pas un moment moins intense : d'innombrables châteaux et de grands bâtiments monastiques, entre autres, témoignent toujours de l'activité qui régna alors dans la province. Celle-ci abrite ainsi des monuments majeurs, comme le château de Balleroy dû à François Mansart, celui de Bénouville conçu par Claude-Nicolas Ledoux, ou les bâtiments conventuels des abbayes de Rouen et de Caen.

Ce colloque n'entend néanmoins pas se cantonner à l'examen d'œuvres exceptionnelles ou très célèbres, mais souhaite proposer des approches variées : études de carrières, de grandes opérations urbaines et rurales, de types architecturaux… en considérant aussi bien l'architecture privée et religieuse que l'architecture publique, les fortifications et les jardins. Il s'agira ce faisant d'explorer plus largement les dynamiques et les tendances qui marquèrent la province, en s'interrogeant notamment sur le rapport à Paris.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 3 octobre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Jeudi 4 octobre
Matin
Étienne FAISANT : Introduction
Alain HUGON : La Normandie et la monarchie française : regards croisés sur les relations de la Province avec l'Ile de France (XVIIe-XVIIIe s.)
Alexis DOUCHIN : Le regard des érudits sur l'architecture de leur temps dans la Normandie des XVIIe et XVIIIe siècles

Après-midi
Visite révisée du château de Cerisy, par Étienne FAISANT

ARCHIVES CONTEMPORAINES
Gilles DÉSIRÉ DIT GOSSET : L'architecture des XVIIe et XVIIIe siècles en Normandie vue par l'administration des Monuments historiques

VILLES ET URBANISMES
Julien DESHAYES : Construction d'hôtels particuliers et mutations urbaines dans le Valognes des XVIIe et XVIIIe siècles
Claire ÉTIENNE-STEINER : Le Havre, ville royale
Viviane MANASE : La reconstruction de Dieppe après 1694 : entre idéal urbain et réalités


Vendredi 5 octobre
"HORS LES MURS" — À CAEN
Matin
SÉANCE PUBLIQUE À L'HÔTEL DE VILLE DE CAEN (SALLE DES MARIAGES)
CAEN AU XVIIIe SIÈCLE
Étienne FAISANT : L'œuvre architecturale des Intendants à Caen
Alexandre GADY : À l'ombre de Saint-Étienne : les bâtiments monastiques de l'abbaye aux Hommes de Caen

Visite du rez-de-chaussée de l'Hôtel de ville (sacristie, escalier des mâtines, cloître, grand escalier, pavillon d'entrée)

Après-midi
Visite en ville : Ancien couvent de la Visitation (actuel quartier Lorge, désormais Fonds régional d'art contemporain), Place Fontette, Place Saint-Sauveur, Place de la République, Hôtel de Blangy (aujourd'hui Centre communal d'action sociale) et Bâtiments monastiques de l'abbaye aux Dames (siège de la Région)


Samedi 6 octobre
GRANDES DEMEURES, ARCHITECTURE RELIGIEUSE ET JARDINS
Matin
Claude MIGNOT : Balleroy et les échos normands d'un château de François Mansart [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Vincent SIMONET : Des thèmes et des variations. Les façades de quelques châteaux haut-normands du XVIIe siècle
Erwan PATTE : Éléments sur la construction des châteaux de la seconde moitié du XVIIIe siècle à partir de quelques études de cas en Normandie

Après-midi
Christine GOUZI : De Versailles à Mondaye : les modèles du décor de l'abbaye de Mondaye à la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle
Yves LESCROART : Les hôtels particuliers de Rouen : entre diffusion des modèles parisiens et créations originales
Étienne FAISANT : Parterres, allées et perspectives : aspects des jardins dans la Normandie du XVIIe siècle
Jeanne POTTIER : L'influence des Lumières sur les jardins normands du XVIIIe siècle au travers des cas de Thury-Harcourt et de Canon
Emmanuel LUIS : Construire dans le monde rural en Normandie : édifier, restaurer, décorer les églises aux XVIIe et XVIIIe siècles


Dimanche 7 octobre
Matin
TRAVAUX EN NORMANDIE ET CARRIÈRES D'ARCHITECTES
Vincent DROGUET : Antoine-Mathieu Le Carpentier et la Normandie
Sophie POIRIER-HAUDEBERT : Jacques Basché, ingénieur-géographe des Ponts-et-Chaussées et architecte en Normandie
Nicolas FAUCHERRE : Vauban et la Normandie
Étienne FAISANT : Conclusions

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Étienne FAISANT : L'œuvre architecturale des intendants à Caen
Commissaires départis pour l'exécution des ordres du roi dans les généralités, les intendants de justice, police et finances ont régulièrement joué un rôle éminent dans l'aménagement des villes françaises au XVIIIe siècle. À Caen, ils s'employèrent ainsi à faciliter les circulations et desserrer le tissu urbain, en faisant supprimer les points d'étranglement et abattre les murailles, comme en témoigne encore la place Saint-Sauveur. Ils tinrent également un rôle essentiel dans la construction, aux entrées de la ville, de grands bâtiments qui ne furent pas uniquement conçus pour répondre à une fonction utilitaire — casernes au sud, palais des juridictions à l'ouest — mais reçurent également un aspect particulièrement monumental. Ils se dotèrent enfin d'un hôtel, rue des Carmes. En examinant ces diverses réalisations, cette communication s'attachera à préciser le rôle exact des intendants et les relations que ceux-ci entretinrent avec les échevins et les autres autorités de la ville. Elle tentera également de distinguer ce qui releva du cadre de leurs missions de ce qui résulta de leurs goûts propres. La comparaison entre leurs différentes œuvres pourra en effet permettre de mettre en évidence des personnalités fort entreprenantes, au premier rang desquelles s'impose le baron de Fontette.

Docteur en histoire de l'art, Étienne Faisant a consacré sa thèse à l'Architecture de Caen du règne de Charles VIII au début du règne de Louis XIII. Secrétaire-adjoint de la Société des antiquaires de Normandie, il consacre une large part de ses travaux au patrimoine normand.
Publications
"Les Grandes Écoles, siège de l'université de Caen (1432-1789)", dans Éduquer et instruire en Normandie, Actes du congrès tenu à Saint-Lô du 14 au 17 octobre 2015, Louviers, FSHAN, 2015, p. 371-382.
"Une place Royale avant les places royales : l'exemple de Caen", dans Alexandre Gady (dir.), Jules Hardouin-Mansart, Paris, Le Passage, 2017, p. 205-213.
"Un ingénieur des Ponts révolutionnaire ? Les projets d'Armand-Bernardin Lefebvre pour la ville de Caen", dans Hélène Rousteau-Chambon et Yann Lignereux (dir.), Nantes révolutionnaire, ruptures et continuités (1770-1830), Actes du colloque tenu à Nantes du 19 au 21 novembre 2015, à paraître.


Julien DESHAYES : Construction d'hôtels particuliers et mutations urbaines dans le Valognes des XVIIe et XVIIIe siècles
Considérée par Toustain de Billy comme "la cour du Cotentin", la ville "la plus polie, la plus spirituelle de la Basse-Normandie", Valognes se caractérise à l'époque moderne par une impressionnante concentration de demeures nobles urbaines. Le phénomène avait déjà pris à la fin du règne de Louis XIV une si grande ampleur que les officiers municipaux se plaignaient auprès de l'Intendant que le bourg soit "composé en la meilleur et la plus grande partie de noblesse originaire du lieu et autres qui s'y sont tenus", qu'il "en vient encore tous les jours de la campagne pour y demeurer". Paradoxalement, cet afflux de nobles exemptés devait en effet, en grevant ses finances, freiner la ville dans la conduite du grand projet de place royale dont elle caressait l'ambition. C'est au final par d'autres procédés, moins programmatiques et davantage opportunistes, que Valognes parvint au cours des XVIIe et XVIIIe siècles à effectuer une lente mais profonde mutation urbaine.

Julien Deshayes est historien de l'art de formation, directeur du Pays d'art et d'histoire du Clos du Cotentin, chercheur associé du Craham UMR 6273, Université de Caen Normandie.
Publications
"Identification des matériaux et étude du bâti, l'exemple du Clos du Cotentin", In Situ, n°6, Février 2006.
"L’hôtel-Dieu de Valognes", dans Hôtels-Dieu et pèlerins sur les chemins du Mont-Saint-Michel, Actes des 3e rencontres historiques d'Ardevon, 8 mai 2006, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel, Vire, 2008, p. 109-124.
"Valognes, une ville et ses hôtels particuliers", VMF, Vol. 232, Mai 2010, p.42-47.
"Les Legendre, une dynastie d'architectes valognais au siècle des Lumières", Val'Auna, revue historique sur Valognes et ses alentours, Vol. 22, Premier semestre 2013, p. 2-9.
"Les Veuves et la construction d'hôtels particuliers à Valognes sous l'Ancien Régime", dans Les Femmes en Normandie, Actes du congrès de la Fédération des sociétés historiques et archéologiques de Normandie tenu à Bellême en octobre 2013, Rouen, 2014, p. 111-118.

Vincent DROGUET : Antoine-Mathieu Le Carpentier et la Normandie
La carrière d'Antoine-Mathieu Le Carpentier (Rouen, 1709 - Paris, 1773) s'est presque entièrement déroulée à Paris. Employé par Jacques V. Gabriel sur le chantier de reconstruction du bâtiment de la Chambre des Comptes dans les années 1738-1740, il travaillera pendant trente-cinq ans, à la suite de cette première expérience, dans la capitale et terminera son parcours comme membre de l'Académie d'architecture et architecte du prince de Condé au Palais-Bourbon. S'il sut séduire une clientèle de gens de finances proches du pouvoir, pour laquelle il édifia ou remania des hôtels dans le contexte parisien, Le Carpentier maintint également, pendant une grande partie de sa vie professionnelle, des liens étroits et parfois tendus avec sa province natale, la Normandie. À travers certaines de ses commandes normandes — dont la plus prestigieuse aurait dû être celle du nouvel Hôtel de ville de Rouen — on peut percevoir le réseau d'amitiés et d'appuis qu'il avait su entretenir et conserver dans sa ville d'origine. Mais c'est aussi tout un entourage professionnel ou social qui se révèle, à y bien regarder, déterminé par les origines de l'architecte et par son attachement pour ses "compatriotes". Alors que Le Carpentier déclare fièrement avoir été "l'architecte de sa propre fortune", manifestant ainsi sa volonté de s'affirmer comme un self made man arrivé au sommet de son état par son seul talent, il n'est sans doute pas inutile de tenter d'apprécier, chez ce parisien d'adoption, l'étendue et l'importance des réseaux de solidarité et d'influence liés à son origine normande, dans le contexte d'une France de Louis XV où le rapport entre le pouvoir central et les provinces se révèle de plus en plus problématique, voire ouvertement conflictuel.

Vincent Droguet, conservateur général du patrimoine, est directeur du patrimoine et des collections du château de Fontainebleau.
Publication
Vincent Droguet, "Antoine-Mathieu Le Carpentier, un architecte en sympathie avec les sculpteurs", dans Guilhem Scherf (dir.), Augustin Pajou et ses contemporains, Paris, 1999, p. 191-222.

Claire ÉTIENNE-STEINER : Le Havre, ville royale
Sous l'égide de ses gouverneurs, Le Havre est dominé au XVIIe siècle par le Militaire et la Marine : le cardinal de Richelieu commande en 1628 une citadelle, le quartier Militaire, tandis que Colbert réquisitionne en 1663 le Bassin du Roi pour créer l'arsenal de la Marine. La porte Richelieu et son pendant, la tour François Ier, sont alors les seuls édifices monumentaux de la ville. La Municipalité ne se lance en effet dans aucune grande entreprise architecturale et, si elle érige en 1684 une statue de Louis XIV sur la place d'Armes, elle ne lui donne aucun cadre ordonnancé. Au XVIIIe siècle, en revanche, le développement des échanges favorise la construction d'établissements classiques voués au Commerce, au détriment de la Marine, tandis que les négociants se font construire des hôtels adaptés à l'usage de "maisons de commerce", ainsi que des "maisons de plaisance" sur la Côte d'Ingouville. À la suite des ingénieurs sollicités par les gouverneurs, Bruand ou Gabriel, des architectes parisiens dont Pâris et Moreau-Desproux travaillent au Havre et l'hôtel du gouverneur, construit en 1752, se réfère au modèle des hôtels de la capitale. Due à des artisans locaux, la majorité de la construction présente toutefois un caractère plus modeste. La Municipalité prend donc le parti de la dissimuler derrière des décors lors des visites de Louis XV puis de Louis XVI venu constater l'avancement des travaux du port. La décision d'agrandir Le Havre en 1786 scelle la victoire du Commerce : la Neuve ville est construite d'après le plan néoclassique de l'ingénieur Lamandé sur le quartier Miliaire et autour du nouveau bassin du Commerce. Mais Louis XVI refuse le projet de place royale et les troubles de la Révolution et de l'Empire reportent l'exécution du plan Lamandé, achevé seulement en 1840.

Docteur en histoire de l'art, conservateur général honoraire du patrimoine, Claire Étienne-Steiner a contribué de 1971 à 2015 à l'inventaire du patrimoine de Normandie, aux services de l'Inventaire général du Patrimoine culturel de Haute et Basse-Normandie. Elle a participé au colloque de Cerisy : L'architecture de la Renaissance en Normandie, organisé en 1998 par Bernard Beck et Isabelle Letteron ("Le Havre, ville neuve de la Renaissance ?") et en a co-dirigé la publication en 2004 (Presses universitaires de Caen). De 1991 à 2005, elle a réalisé l'inventaire du Patrimoine de l'agglomération du Havre et participé au comité scientifique pour l'inscription du centre reconstruit du Havre au patrimoine mondial de l'humanité qui a été obtenue en 2005.
Publications dans le cadre des collections de l'Inventaire général
Itinéraires du Patrimoine sur Harfleur (la ville et l'église), Sainte-Adresse et le Nice havrais, le port et le centre reconstruit du Havre, édités par Connaissance du Patrimoine de Haute-Normandie (CPHN), 1992-1995.
Indicateurs du Patrimoine : Le Havre, ville, port et agglomération, CPHN, 1999.
Images du Patrimoine : Le Havre, Auguste Perret et la Reconstruction, CPHN, 1999.
Cahiers du Patrimoine : Le Havre, un port des villes neuves, édité par MONUM', 2005.
Collection "Patrimoine et territoires : Sainte-Adresse et le Nice havrais" (avec Christine d’Aboville), édité par la Région Haute-Normandie, 2010.
Collection "Cahiers du Patrimoine : Le Havre 1517-2017, la demeure urbaine", édité par Lieux Dits, 2017.
Ouvrages diffusés par les éditions Lieux Dits.

Nicolas FAUCHERRE : Vauban et la Normandie
Province frontière hautement stratégique car faisant directement face à l'Angleterre, la Normandie est l'objet à la fin du règne de Louis XIV d'attaques incessantes des flottes anglo-hollandaises : Cherbourg en 1692, La Hougue en 1692 et 1694, Le Havre en 1694. En 1689, il projette un grand port de guerre dans la rade de la Hougue aux dépens de Cherbourg. Une série de redoutes sont alors construites sur la côte orientale du Cotentin dite "côte de la Hougue". Jusqu'en 1694 et la construction des deux tours de la Hougue, la défense du littoral bas-normand repose essentiellement sur des fortifications passagères de campagne : retranchements et palissades, redoutes et batteries côtières. En 1686, 1694 et 1699, Vauban se rend sur place pour projeter la défense des ports de Dieppe, Honfleur, Carentan, La Hougue, Cherbourg, Granville et même du Mont Saint-Michel. Benjamin de Combes, ingénieur et marin, est nommé directeur des fortifications de Normandie en 1693 ; il met en place tout au long des côtes un réseau de corps de garde en dur (pierre) ou en bois.

Nicolas Faucherre est professeur d'archéologie et d'histoire de l'art du Moyen Âge à l'université d'Aix-Marseille. Membre du laboratoire d'archéologie médiévale et moderne en Méditerranée (UMR 7298 du CNRS). Après un doctorat sous la direction de Léon Pressouyre sur les premières citadelles royales françaises dans la transition à l'artillerie à poudre, il s'est spécialisé dans la fortification médiévale et classique, tant en France qu'en Méditerranée orientale, où il a dirigé plusieurs missions archéologiques sur des forteresses du Proche-Orient (Ani, Apamée de l'Oronte, Saône, Beaufort, Césarée), puis désormais en Inde et en Iran. Il assure également des missions d'expertise internationale pour ICOMOS et l'UNESCO.

Christine GOUZI : De Versailles à Mondaye : les modèles du décor de l'abbaye de Mondaye à la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle
Au XVIIe siècle comme au XVIIIe siècle, le grand décor conventuel normand emprunte souvent aux modèles parisiens religieux ou profanes. La proximité de Paris avec la Normandie, la circulation des peintres et des architectes expliquent en partie cet état de fait. L'abbaye de Mondaye n'échappe pas à cette règle, mais se présente comme un exemple particulier, notamment à cause de la présence d'un des membres de la famille Restout dans le monastère : l'architecte et décorateur Eustache Restout (1655-1743), beau-frère du peintre du roi Jean Jouvenet (1644-1717), établi à Paris dès 1661. Le décor de Mondaye est ainsi tributaire des grands exemples parisiens et versaillais, mais ces derniers sont toujours réinterprétés pour servir les normes de l'architecture prémontrée de la fin du XVIIe siècle.

Bibliographie
L'Architecture des Prémontrés : mélanges offerts au R.P. François Petit, Actes du Xe colloque du Centre d'études et de recherches prémontrées, 1984, Mondaye, Calvados, Amiens, CERP, 1985.
Jean Pelcoq, L'Abbaye de Mondaye, Caen, Imprimerie Colas, 1938 (2e édition).
Christine Gouzi, Jean Restout (1692-1768), peintre d'histoire à Paris, Paris, Arthena, 2000, 512 p.
Dominique-Marie Dauzet, Martine Plouvier (dir.), Actes du colloque international L'ordre de Prémontré au XVIIIe siècle, Centre d'Études et de Recherches prémontrées (CERP) [Caen et Mondaye, 20-22 septembre 2001], Berne, Peter Lang, 2011.
Christine Gouzi, "Une firme artistique dans la France de l'Ancien Régime : l'atelier d'Eustache Restout à l'abbaye de Mondaye", Actes du colloque international L'ordre de Prémontré au XVIIIe siècle, Centre d'Études et de Recherches prémontrées (CERP) [Caen et Mondaye, 20-22 septembre 2001], Berne, Peter Lang, 2011, p. 225-244.

Alain HUGON : La Normandie et la monarchie française : regards croisés sur les relations de la Province avec l'Ile de France (XVIIe-XVIIIe s.)
Les deux derniers siècles de l'Ancien Régime introduisent des changements dans les relations qu'entretiennent les autorités monarchiques et la province de Normandie. Avec l'achèvement du découpage des généralités, l'introduction et la structuration des intendances et des subdélégations, et les derniers soulèvements d'ampleur au milieu du XVIIe siècle, la réorganisation des structures administratives tout au long des 150 années qui suivent accompagne de profonds bouleversements économiques, sociaux et culturels dans la province. Ils ne sont pas sans conséquence sur l'histoire sociale et architecturale du bâti, de quelque nature qu'ils soient. Par cette communication, il s'agit de pointer la diversité et la nature des relations entre la Normandie et le centre du pouvoir politique.

Alain Hugon est professeur d'histoire moderne à l'université de Caen Normandie.
Publications
Naples insurgée. 1647-1648. De l'événement à la mémoire, PUR, Rennes, 2011, 408p. [trad. espagnole : La insurrección de Nápoles 1647-1648. La construcción del acontecimiento, Prensas de la Universidad de Zaragoza, Saragosse, 2014].
Philippe IV – Le siècle de Vélasquez, Payot, Paris, 2014, 500p. [trad. espagnole : Felipe IV y la España de su tiempo. El siglo de Velázquez, Barcelone, Crítica, 2015, 438p].
Éditions en collaboration avec
G. DÉSIRÉ DIT GOSSET, B. GARNIER, L. MAZIANE, L. RIDEL, Des galères méditerranéennes aux rivages normands. Recueil d'études en hommage à André Zysberg, Cahiers des Annales de Normandie, n°36, Caen, 2011, 568p.
A. BOLTANSKI (dir.), Les Noblesses normandes (XVIe-XIXe siècle), Colloque de Cerisy, PUR, Rennes, 2011.
S. HAFFEMAYER, Y. SORDET, C. VELLET (dir.), Images et révoltes dans le livre et l'estampe (XIV-XVIIIe), Catalogue de l'exposition Images et révoltes dans le livre et l'estampe XIVe-XVIIIe s., Bibliothèque Mazarine, 14 décembre 2016 - 17 mars 2017, Paris, Éditions des Cendres-Mazarine, 2016.

Yves LESCROART : Les hôtels particuliers de Rouen : entre diffusion des modèles parisiens et créations originales
Parlementaires et négociants ont édifié dans la ville de Rouen à l'époque classique de nombreux hôtels, dont une partie importante a été épargnée par les destructions de la Seconde Guerre mondiale. Dans le prolongement des recherches menées notamment par les chercheurs rouennais sous la direction d'Olivier Chaline sur l'histoire de cet habitat dans la topographie urbaine de Rouen, il convient d'approfondir ce qui appartient aux traditions architecturales locales et aux apports des modèles parisiens déclinés sous des formes renouvelées.

Yves Lescroart a été Conservateur des Monuments historiques de Normandie de 1976 à 2001, puis Inspecteur général des Monuments historiques en Alsace, Franche-Comté, Nord-Pas-de-Calais, puis Centre, Basse-Normandie et Champagne-Ardenne de 2001 à 2010. Il consacre une large part de ses travaux personnels au patrimoine normand.
Publications
"L'Hôtel du Haut-Doyenné à Lisieux", Monographie collective, 1985.
"Le château de Bénouville", Monographie collective, 1986.
"Le manoir en Pays d'Auge, évolution architecturale des logis de bois du XVe au XVIIIe siècle", Société royale des Antiquaires de Londres, 2002.
"La Place Stanislas et l'Hôtel de Ville de Nancy", Revue Monumental, 2005.

Viviane MANASE : La reconstruction de Dieppe après 1694 : entre idéal urbain et réalités
En 1694, la ville de Dieppe est presque entièrement détruite suite au bombardement perpétré par la flotte anglo-hollandaise (guerre de la Ligue d'Augsbourg). À l'initiative de Vauban, l'architecte Antoine De Ventabren reconstruit la cité, imposant aux habitants l'un des premiers règlements d'urbanisme français, avec de strictes servitudes constructives et décoratives. À une période où émerge un nouveau concept de ville, la reconstruction de Dieppe offre l'opportunité de tester certains principes d'urbanisme et d'organisation de l'habitat. Si la ville est pratiquement achevée vers 1720, l'exigence de façades uniformes avec entresol n'est plus de mise à partir de 1752, au profit d'un étage carré habitable, beaucoup plus en adéquation avec les réels besoins de la population. L'utopie de la ville idéale voulue par Vauban, avec ses rues identiques bordées par des façades rythmées par des séries d'arcades régulières, a dû céder le pas devant l'usage et les réalités quotidiennes des habitants.

Viviane Manase est Conservateur du Patrimoine — Inventaire du Patrimoine culturel - Région Normandie.
Publication
La reconstruction de Dieppe après la "grande bombarderie" de 1694, dans Actes du 3e Congrès Francophone d’Histoire de la Construction, Nantes, 21, 22 et 23 juin 2017, Paris, Picard (à paraître).

Claude MIGNOT : Balleroy et les échos normands d'un château de François Mansart
Le château de Balleroy bâti au sud-ouest de Bayeux sur les dessins de François Mansart entre 1631 et 1637 présente une composition pyramidante impressionnante, qui perfectionne le dessin proposé trois ans plus tôt pour le château du Plessis-Belleville près de Paris. Mansart en développe encore l'orchestration paysagère dans les années 1650. Cette réussite soutenue par le renom de Mansart a-t-elle eu des échos dans la province, ou les similitudes que l'on croit observer sont-elles seulement des analogies superficielles ? Tel sera l'objet de cette communication.

Claude Mignot a consacré de nombreuses études à l'architecture française au siècle de Louis XIII, notamment à Mansart.
Publications
François Mansart, le génie de l'architecture (dir avec Jean-Pierre Babelon), Gallimard, 1998.
François Mansart, un architecte artiste au temps de Louis XIII et de Louis XIV (avec Étienne Faisant et Joëlle Barreau), Le Passage, 2016.

Sophie POIRIER-HAUDEBERT : Jacques Basché, ingénieur-géographe des Ponts-et-Chaussées et architecte en Normandie
Originaire des environs de Chartres puis formé à l'école des Ponts-et-Chaussées, Jacques Basché (1728-1786) est envoyé en 1755 comme ingénieur géographe dans la généralité de Caen. Pourtant, en Normandie, il va surtout mener une carrière d'architecte qu'il terminera sous le titre d'architecte de Monsieur. Travaux de restauration, aménagements extérieurs ou constructions de châteaux, plusieurs chantiers de la seconde moitié du XVIIIe siècle portent sa signature. Le palais épiscopal de Coutances et le château de Boucéel à Vergoncey témoignent de l'influence, sur les premières réalisations de cet architecte, du modèle des maisons de plaisance diffusé par Jacques-François Blondel.

Bibliographie
"Jacques Basché, "géographe" des Ponts-et-Chaussés et architecte en Normandie", La revue de l'Avranchin et du Pays de Granville, n°386, mars 2001.
"Les maisons de plaisance dans la Manche aux siècles des Lumières 1710-1760", Revue de la Manche, Fasc. 173, janvier 2002.
"Les façades des châteaux du XVIIIe siècle dans le département de la Manche. La façade, un instrument de valorisation sociale", dans Construire, reconstruction, aménager en château en Normandie, Annales de Normandie, 2004.

Jeanne POTTIER : L'influence des Lumières sur les jardins normands du XVIIIe siècle au travers des cas de Thury-Harcourt et de Canon
Cette communication s'attachera à présenter deux exemples insignes des jardins pittoresques réalisés en Normandie au XVIIIe siècle, ceux aménagés autour des châteaux de Thury-Harcourt et de Canon (Calvados). Ces deux réalisations ont en effet l'intérêt d'être documentées, pour la première, par un traité sur l'art des jardins rédigé par le duc François-Henri d'Harcourt (1726-1802) et, pour la seconde, par d'abondantes sources encore conservées au château. Ces archives attestent que, tout comme le duc d'Harcourt, Jean-Baptiste Jacques Elie de Beaumont (1732-1786), seigneur de Canon, dirigea les moindres détails de l'élaboration de son jardin, depuis Paris, grâce à la correspondance qu'il entretenait avec ses mandataires locaux. Les deux domaines étaient aussi liés par un approvisionnement de plantes exotiques que les pépinières d'Harcourt envoyaient alors à Canon. Les deux châtelains normands, ayant de nombreuses similitudes par leurs activités et leurs goûts, adoptèrent la mode des jardins irréguliers, qui commençait alors à se répandre en France. En réaction au style classique du Grand Siècle, ces deux parcs sont les réceptacles des réflexions du XVIIIe, alors siècle des Lumières et de la sensibilité rousseauiste.

Jeanne Pottier est titulaire d'un Master 1 en Histoire, obtenu à l'université de Caen Normandie avec un mémoire sur les jardins des châteaux de Canon et de Thury-Harcourt préparé sous la direction de M. le professeur Alain Hugon.


SOUTIENS :

• Office universitaire d'études normandes (OUEN) | Université de Caen Normandie
• Direction régionale des Affaires culturelles Normandie (DRAC)
• Région Normandie
• Ville de Caen

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


REENACTMENT / RECONSTITUTION : REFAIRE OU DÉJOUER L'HISTOIRE ?


DU SAMEDI 22 SEPTEMBRE (19 H) AU SAMEDI 29 SEPTEMBRE (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



ARGUMENT :

La ferveur pour l'histoire s'étend aujourd'hui largement au-delà des cercles initiés et paroles consacrées. Elle prend notamment la forme de reconstitutions grandeur nature, en temps réel, d'événements à caractère historique : batailles, festivités, rites religieux ou civiques, ambassades, processions, repas, spectacles ou même modes de vie… En marge du discours scientifique (qui pourtant les nourrit) et surtout du discours institutionnel (dont pourtant elles s'inspirent), les initiatives de ces "reconstitueurs" ou performeurs attestent d'un rapport de réappropriation, voire de détournement, où les publics s'emparent de l'Histoire pour vivre une expérience sensible ou sensorielle, participative et immersive.

Rejouer l'histoire n'est pas un geste comme un autre, puisqu'à la faveur de la reconstitution, le temps se redéploie en cristallisant de nouveaux enjeux, entre commémoration, marchandisation, expérimentation et subversion. Ce que l'anglais nomme reenactment peine à trouver un équivalent en français, la traduction même du mot posant problème : remise en acte, réactivation, recréation, reconstitution, restitution…

L'objectif de ce colloque consiste à définir cet acte complexe et à cartographier ces pratiques diverses de reconstitution historique d'hier et d'aujourd'hui, depuis les exploitations mémorielles et récréatives jusqu'aux dispositifs scientifiques et artistiques, en passant par les avatars numériques, entre survivance du passé et acte de création imaginaire.

Largement ouvert aux expérimentations concrètes, il articulera ateliers, conférences, débats, tables rondes et projections autour de plusieurs thématiques structurantes. Une première séquence de travail permettra d'abord de distinguer usages anciens et pratiques contemporaines ; une seconde séquence interrogera les enjeux de production et de diffusion de cette "fabrique" d'histoires ; une troisième séquence étudiera les usages sociaux du Reenactment en fonction de leurs objectifs et implications, afin de mettre en évidence des points de tension entre différentes formes de médiation de l'Histoire.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Samedi 22 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Dimanche 23 septembre
PERFORMANCE ET HISTOIRE
Matin
Estelle DOUDET & Martial POIRSON : Cadrage, définition, périodisation, typologie
Guy SPIELMANN : Re(con)stitution, Reenactment, reconstruction, revival : enjeux et défis épistémologiques d'une démarche paradoxale

Après-midi
Atelier
Sur les costumes d'époque, théâtre, opéra, cinéma (avec exposition de costumes mannequinés), par Mickael BOUFFARD

Atelier récurrent
Guy SPIELMANN [avec la Compagnie Sapasousakas et les participants au colloque volontaires] : Mise en scène d'une parade de société (Collé ou Carmontelle) [avec restitution le dernier après-midi]

Soirée
Projection-Débat
Benjamin Lazar, Le Bourgeois Gentilhomme / Jean-Marie Villégier, Atys | Commentaires de Guy SPIELMANN


Lundi 24 septembre
RITES CIVIQUES ET RELIGIEUX D'HIER ET D'AUJOURD'HUI
Matin
Mémoires autochtones et histoires locales, table ronde avec :
Isabel YAYA McKENZIE : Ce que l'histoire fait au rituel. Les représentations de la capture du dernier Inca dans les Andes péruviennes
Mathieu VIAU-COURVILLE : Post-mémoire, Embodiment et Reenactment au Musée : continuités et reconstructions symboliques [intervention établie avec Karen WORCMAN]

Après-midi
Mémoires officielles et histoires instituées, table ronde avec :
Pascal BRIOIST : Les spectacles d'histoire de Léonard de Vinci à la cour de François Ier
Isabelle BARBÉRIS : Figures votantes : rejouer les bifurcations de l'histoire ou de la fable

Atelier récurrent
Guy SPIELMANN

Soirée
Atelier
Le self-défense des suffragettes, par Daniel JAQUET


Mardi 25 septembre
RECONSTITUTIONS HISTORIQUES : USAGES POPULAIRES ET SPONTANÉS
Matin
Captations mémorielles, table ronde avec :
Romain JOBEZ : Batailles sans guerre. Reconstitution de conflits sur les scènes allemandes et françaises (XIXe-XXe siècles)
Tamara KONDRATIEVA : Bolchevicks et Jacobins, une captation d'héritage ?

Après-midi
Exploitations mémorielles, table ronde avec :
Audrey TUAILLON DEMÉSY : L'histoire vivante médiévale : les tendances
Pauline BORD : Concilier Recherche et Reconstitution à destination du grand public. Le défi d'Histoire Retrouvée
Frédérique TROUSLARD : Une pédagogie du passé : l'action des associations

Antoine de BAECQUE : Rêver et refaire un festival : Cannes 1939, l'événement qui n'eut pas lieu. Uchronie, histoire fiction, événement avorté

Soirée
Atelier
Recherches et recréations des cosmétiques du début du XVIIIe siècle. Pour une approche de la médiation par les sens, par Frédérique TROUSLARD


Mercredi 26 septembre
LA FABRIQUE DES HISTOIRES : USAGES SAVANTS ET HISTORIOGRAPHIQUES
Matin
Atelier
La reconstitution scientifique des arts martiaux et de l'équitation médiévale et renaissante, par Daniel JAQUET

Après-midi
Dispositifs optiques, sonores, olfactifs, tactiles, gustatifs, table ronde avec :
Isabelle PARESYS : La Renaissance au cinéma : la question du costume
Aurélie MOUTON-REZZOUK : Voir, entendre, penser comme… Dispositifs d'échange symbolique et muséographie

Dispositifs immersifs et cultures numériques : protocoles ludiques et pédagogiques, table ronde avec :
Isabelle BACKOUCHE : De l'histoire à l'immersion sonore : l'expérience de Gens de la Seine
Jeffrey M. LEICHMAN : La Foire aux reenactments : problématiques de la restitution d'un théâtre du dix-huitième siècle par le biais du jeu vidéo
Thomas FACCHINI : Histoire et jeux vidéo : quand la guerre devient un jeu

Soirée
Projection-Débat
Peter Watkins, Culloden | Commentaires d'Antoine de BAECQUE


Jeudi 27 septembre
USAGES ARTISTIQUES ET CULTURELS
Matin
Dispositifs immersifs et cultures numériques : protocoles ludiques et pédagogiques (suite), table ronde avec :
Sophie RAUX : La restitution numérique du pont Notre-Dame, quels enjeux pour l'histoire des marchés artistiques ?
Patrick FRAYSSE : Rejouer le Moyen Âge avec les nouveaux dispositifs de médiation dits immersifs ou augmentés : entre renouvellement des représentations et performances documentaires

Après-midi
Anne BÉNICHOU : Disputer son rôle dans l'histoire : le reenactment dans les pratiques et les institutions de l'art contemporain [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Atelier
Reprise : "usure" et "renaissance" de l'œuvre performative, conférence-performance de Besnik HAXHILLARI & Flutura PREKA (The Two Gullivers)


Vendredi 28 septembre
USAGES ARTISTIQUES ET CULTURELS
Matin
Fictions d'histoire et archives vivantes, table ronde avec :
Estelle DOUDET : Histoires par personnages : les spectacles mémoriels dans la France médiévale
Martial POIRSON : Performances post-coloniales : entre déconstruction et remotivation des stéréotypes coloniaux

Estelle DOUDET & Martial POIRSON : Synthèse-conclusive, débats, restitutions, échanges

Après-midi
Atelier récurrent
Spectacle avec les participants du colloque volontaires. Parade de société et théâtre au château, suivi d'un débat animé par Guy SPIELMANN


Samedi 29 septembre
PASSAGE À L'ACTE
Matin
"HORS LES MURS" — AU MONT SAINT-MICHEL
• Accueil à l'entrée du site
• Visite proposée par Xavier BAILLY (Administrateur de l'abbaye du Mont-Saint-Michel)
Faire vivre un lien, l'histoire en actes, table ronde animée par Xavier BAILLY, avec François JEANNEAU (Architecte en chef des monuments historiques)
• Débat

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Isabelle BACKOUCHE : De l'histoire à l'immersion sonore : l'expérience de Gens de la Seine
La Ville de Paris a entrepris depuis plusieurs années de faire des bords de Seine un lieu de vie pour les Parisiens. Si ces nouveaux usages des rives sont propres au XXIe siècle, ils renvoient toutefois à l'histoire du fleuve. Pendant plusieurs siècles, il a été au cœur de la vie des Parisiens dans toute leur diversité. Vaste supermarché et gigantesque blanchisserie, lieu d'habitation comme place commerciale, la Seine était aussi un lieu de détente où il faisait bon se promener l'été et se distraire. Gens de la Seine est un parcours sonore dans lequel des personnages qui ont vécu et travaillé sur le fleuve content leur expérience aux Parisiens et aux touristes qui inscrivent leurs pas dans ceux des habitants de la capitale au XVIIIe siècle. Cette manière inédite de raconter l'histoire de Paris allie plaisir de l'expérience d'écoute, incarnation du passé le plus quotidien et respect d'une haute qualité scientifique. Elle a été conçue comme un projet citoyen : restituer aux chercheurs l'initiative de la production d'un savoir disponible pour le plus grand nombre.

Isabelle Backouche est directrice d'études à l'EHESS (CRH). Historienne, ses travaux portent sur l'histoire urbaine, en articulant transformations sociales et matérielles de la ville. Ses récentes enquêtes portent sur le terrain parisien, notamment sur les motivations de l'aménagement sous Vichy de l'îlot insalubre n°16 au sud du Marais (Paris transformé. Le Marais 1900-1980 : de l'îlot insalubre au secteur sauvegardé, Créaphis, 2016). Aujourd'hui, elle travaille sur le vaste transfert d'appartements des familles juives sous l'occupation dans la capitale (en savoir plus) et sur la Zone autour de Paris.
Publications
La Trace du fleuve. La Seine et Paris, 1750-1850, Éditions de l'EHESS, 2000 [rééd. 2016].
Aménager la ville. Les centres urbains français entre conservation et rénovation (de 1943 à nos jours), Armand Colin, 2013.

Isabelle BARBÉRIS : Figures votantes : rejouer les bifurcations de l'histoire ou de la fable
De Robert Hossein jusqu'à Yan Duyvendak, la mise en scène, et en action, d'un public votant joue la carte du re-examen de l'histoire (les procès rejoués par Hossein) ou bien de l'historicisation de la fable dramatique (Faust, Hamlet). Le monde parallèle du théâtre y concurrence de manière ambivalente l'histoire, en jouissant de son statut duplique de "fiction réelle". Le reenactment s'inscrit dans la tradition de la réécriture, mais avec l'agentivité spécifique de la scène, qui a un pied dans la fiction et l'autre dans la "non-fiction" (Frédéric Pouillaude). Ces remises en jeu sont également éclairantes des idéologies démocratiques qui se "rejouent", cette fois-ci de manière plus inconsciente, sur le terrain de l'art vivant.

Anne BÉNICHOU : Disputer son rôle dans l'histoire : le reenactment dans les pratiques et les institutions de l'art contemporain
À partir de la performance Two Undiscovered Amerindians Visit the West (1992-1994) de Coco Fusco et Guillermo Gòmez-Peña, du film qui en a été réalisé par Fusco et Paula Heredia, The Couple in the Cage (1993) et de l'exposition Re.Act Feminism 2. A Performing Archive (2011-2013), cette communication abordera la portée mémorielle et politique des reenactments en art contemporain. À travers eux, les artistes, les spectateurs et les professionnels des institutions muséales renégocient les représentations et les récits historiques, l'assignation des places que chacun y occupe, et la distribution des responsabilités et des pouvoirs dans leur élaboration, selon une dialectique complexe de l'archive et du vivant, du direct et du médiatisé, de la normativité et de l'agentivité (ou capacité d'agir). Quels sont les impacts de ces expériences sur les communautés et les institutions impliquées ? Participent-elles d'une mutation des rôles de l'art et des musées ?

Anne Bénichou est professeure d'histoire et de théorie de l'art contemporain et d'études muséales à l'université du Québec à Montréal. Ses recherches actuelles sur les nouvelles formes de transmission des œuvres éphémères et performatives et sur le reenactment ont donné lieu à l'ouvrage collectif Recréer/Scripter. Mémoires et transmissions des œuvres performatives et chorégraphiques contemporaines (Dijon, Les Presses du Réel, 2015), au numéro thématique "Refaire/Redoing" (Intermédialités. Histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques, n°28-29, 2017), ainsi qu'à des articles dans Performance Research, Ligeia, Thema, Ciel Variable.

Pauline BORD : Concilier Recherche et Reconstitution à destination du grand public. Le défi d'Histoire Retrouvée
Créé officiellement en janvier 2017, la société Histoire Retrouvée s'est fixée comme but de reconstituer des événements historiques en respectant les arts et les techniques de l'époque choisie. Avec des lieux de prestige comme les châteaux de Fontainebleau, Rambouillet ou encore Breteuil, cette société assure la documentation historique, la scénographie d'événements reconstitués de même que leur mise en œuvre. Elle commercialise également des reproductions d'objets ou de broderies historiques à destination du reconstituteur. Cette communication analysera ce style d'événementiel ainsi que les démarches de travail utilisées.
Site internet de l'entreprise où sont présentées les différentes manifestations et les reproductions en vente : lhistoireretrouvee.com.

Doctorante à l'université de Lille 3, laboratoire IRHIS, Pauline Bord achève une thèse sur Jean Bâtard d'Orléans, sous la direction de Bertrand Schnerb. Pratiquant la Reconstitution depuis six ans, elle organise en 2015 la fête costumée du Retour de l'Hermione, et les Journées Louis XV en 2016. Elle crée, avec M. Hervé Serrurier, la société Histoire Retrouvée en janvier 2017. Elle en assure la présidence.

Estelle DOUDET & Martial POIRSON : Cadrage, définition, périodisation, typologie
Cette introduction générale propose un cadrage théorique de ce qu'il est convenu d'appeler reenactment (définitions, typologie, problématiques), à partir de la cartographie des initiatives contemporaines en France comme à l'étranger et d'un état des recherches sur le sujet, notamment dans le monde anglo-saxon. Elle cherche à remettre en perspective historique les formes de reconstitution, afin d'isoler les phénomènes de concordance et de discordance des temps avec les pratiques actuelles. Elle proposera une typologie des formes de reenactment, en le distinguant de formes connexes, telles que revival, réitération, reconstitution, restitution ou encore réactivation…

Estelle DOUDET : Histoires par personnages : les spectacles mémoriels dans la France médiévale
Le Moyen Âge joue aujourd'hui un rôle central dans les spectacles d'histoire, où il est souvent représenté comme le temps d'émergence des identités locales et nationales. Mais rejouer les grands moments du passé, réinterpréter l'histoire récente grâce au spectacle est aussi, et peut-être surtout, une pratique médiévale, attestée par la vogue du tournoi-jeu de rôle parmi la chevalerie européenne comme par les mystères à partir desquels les croyants ont réinvesti l'histoire chrétienne. Cette contribution propose d'observer le développement exponentiel du "rejeu" mémoriel entre 1450 et 1530, en particulier dans les villes voisines du royaume de France, des Pays-Bas méridionaux aux rives du Léman. À travers les histoires romaines grâce auxquelles les habitants de Lille pensent leur identité civique au miroir des héros antiques, les spectacles qui performent des sièges célèbres, comme celui d'Orléans remporté par Jeanne d'Arc, et les fêtes qui célèbrent régulièrement l'alliance des cités suisses, sont questionnés les enjeux esthétiques et sociaux de la performance d'histoire au seuil de la modernité et esquissée une histoire longue du reenactment en français.

Professeur de langue et de littérature française du Moyen Âge à l'université Grenoble Alpes et membre junior de l'Institut Universitaire de France, Estelle Doudet est spécialiste de la communication publique dans les régions de langue française au seuil de la modernité. Elle a consacré plusieurs livres à l'histoire des spectacles aux XIVe-XVIe siècles, dont Moralités et jeux moraux, le théâtre allégorique en français (Garnier, 2018). Elle s'intéresse en particulier aux enjeux des représentations de l'actualité et de l'histoire par le biais de la performance.

Thomas FACCHINI : Histoire et jeux vidéo : quand la guerre devient un jeu
Depuis une vingtaine d'années, de nombreuses sciences sociales se sont intéressés à ce nouveau média culturel de masse que sont les jeux vidéo. La guerre, quelles que soit les époques et les conflits, occupe une place prégnante dans les productions vidéoludiques. Il faut questionner le processus de "mise en jeu" de la guerre, c'est-à-dire les diverses façons dont les créateurs de jeu (professionnels ou amateurs) s'approprient un conflit et comment ils synthétisent un fait historique dans un espace vidéoludique selon les attentes des joueurs. Cela amène à étudier le rapport du jeu aux diverses temporalités (contexte historique évoqué et simulé par le jeu, temps d'une partie de jeu) et les multiples dilatations temporelles qui en découlent. Si les joueurs peuvent être sensibles à une représentation historique, ils sont aussi à la recherche d'une temporalité particulière.

Publication
"Guerres et jeux vidéo : représentations et enjeux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale", Amnis, 15 | 2016 [en ligne].

Patrick FRAYSSE : Rejouer le Moyen Âge avec les nouveaux dispositifs de médiation dits immersifs ou augmentés : entre renouvellement des représentations et performances documentaires
La visite théâtralisée des monuments, les ateliers de reconstitutions vivantes de l'histoire ou les jeux d'évasion à thématique historique sont aujourd'hui des formes de traduction du passé par une interprétation libre. Le spectacle historique offre une appréhension exaltée ou magnifiée du Moyen Âge qui permet d'atteindre l'histoire, le passé à travers des activités, une narration, des jeux. On a donc recours à d'autres types de discours que scientifique, à savoir mythologique et de divertissement. Notre propos est d'analyser ces moments où l'industrie du tourisme détourne le monument et son histoire en essayant de capter des signifiés de médiévalité. Le Moyen Âge est souvent résumé dans ces dispositifs en une image générique qui propose des décors éphémères, des costumes, un scénario, des personnages qui naviguent entre fiction et histoire afin d'augmenter la réalité des vestiges que les visiteurs peuvent voir et de nourrir les imaginaires. Cette réflexion sera fondée sur le personnage médiéval le plus documenté : Jeanne d'Arc, à partir d'un lieu privilégié : Rouen et ses 3 lieux d'accueil du public : l'historial Jeanne d'Arc dans le palais épiscopal derrière la cathédrale, le spectacle son et lumière touristique appelé Panorama XXL et la Tour Jeanne d'Arc qui accueille un jeu d'évasion. Dans chacun de ses lieux, les visiteurs sont invités à rejouer l'histoire en s'immergeant dans le décor d'un événement de la vie de Jeanne d'Arc (Historial et Panorama) ou dans une ambiance médiévalisante (le donjon). Nous pourrons nous demander quels choix sont opérés par ces acteurs de la médiation-spectacle pour communiquer le patrimoine médiéval. Quels stéréotypes du Moyen Âge sont véhiculés, de manière consciente ou pas ? Quel Moyen Âge est reconstruit ? Nous nous proposons d'apporter des éléments de réponse à partir de l'observation de dispositifs de médiation et de l'analyse de discours recueillis auprès d'acteurs du tourisme. Nous essaierons de rendre saillants les points de rencontres et les éventuels phénomènes d'écart, appréhendés à réception, entre histoire et fiction.

Patrick Fraysse est maître de conférences HDR en Sciences de l'Information et de la Communication, Université de Toulouse - IUT Paul Sabatier (Département Information Communication), EA 827, Laboratoire d'études et de recherches en sciences sociales (LERASS), Équipe Médiations en information et communication spécialisées (MICS).
Références bibliographiques
Amalvi Christian, 2002, Le Goût du Moyen-Âge, Paris, Boutique de l'Histoire.
Ferré Vincent (dir.), 2010, Médiévalisme, modernité du Moyen Âge, Paris, L'Harmattan.
Fraysse Patrick, Barthet Laure, 2018 (à paraitre), "Muret 2013, reconstitution d’une bataille médiévale méridionale oubliée", Revue Interrogations, n°26.
Fraysse Patrick, 2017, "Les mises en scène du Moyen Âge dans les fêtes populaires médiévales", Communication et Langages, n°191, p. 29-50.
Fraysse Patrick, 2012, "Illustrer Jeanne d'Arc dans le Midi : circulation des signes johanniques et échos toulousains', in Amalvi Christian & Deramond Julie (dir.), Jeanne d'Arc entre la terre et le ciel du Midi, Regards méridionaux sur la bonne Lorraine, Actes du colloque de Montpellier (10 et 11 avril 2012), Paris, Michel Houdiard Éditeur, p. 232-243.
Tuaillon Demésy Audrey, 2014, "L'histoire vivante médiévale : pour une ethnographie du "passé contemporain"", Ethnologie française, Vol. 44, n°4, octobre-décembre, p. 725-736.

Romain JOBEZ : Batailles sans guerre. Reconstitution de conflits sur les scènes allemandes et françaises (XIXe-XXe siècles)
La croissante popularité du reenactement dans les salles de spectacle européennes pose la question du rapport du théâtre à l'histoire et de la valeur heuristique de cette pratique scénique. Nous chercherons à y répondre en considérant son archéologie à partir d'études de cas situées aux confins des arts circassiens et du théâtre : L'Histoire d'un drapeau, drame militaire d'Adolphe d'Ennery (1811-1899) présenté au Cirque Olympique à Paris en 1865, et Europa in Flammen (L'Europe en flammes), spectacle du cirque Sarrasini joué pendant la Première Guerre Mondiale. En douze tableaux, d'Ennery reconstitue la geste napoléonienne à travers ses grandes batailles, comme par exemple la prise du pont d'Arcole ou Waterloo. Le cirque Sarrasini, pour sa part, présente au public allemand sous forme d'attraction les armes les plus modernes utilisées dans le conflit mondial. Ces deux spectacles censés exalter les vertus du patriotisme permettent de traiter de la question de la représentation de la guerre, entre écriture scénique de l'histoire et mise en spectacle de l'actualité.

Romain Jobez, maître de conférences HDR en études théâtrales à l'université de Poitiers, est professeur associé à l'université de Bochum. Ses recherches portent sur le théâtre allemand et sur l'histoire des spectacles.
Dernières publications
(Avec Christina Schmidt) "Du "théâtre post-migratoire" à la société théâtrale ouverte : l'exemple du Maxim-Gorki-Theater", Alternatives théâtrales, n°133, 2017, p. 24-26.
"Répertoire, mise en scène et avenir proche du théâtre allemand", Théâtre/Public, n°225, 2017, p. 23-31.
"La rose brisée : Charlotte Ackermann, vedette mort-née du théâtre allemand des Lumières", in Le Sacre de l'acteur, Florence Filippi et alii (dir.), Paris, 2017, p. 223-232.

Tamara KONDRATIEVA : Bolchevicks et Jacobins, une captation d'héritage ?
Avant 1917, la Russie était loin d'être le seul pays où l'on se référait à la Révolution française pour résister à l'oppression. Après 1917 en revanche, la situation en Russie a cela d'extraordinaire, que l'imaginaire issu de la Révolution française obtient ici une fonction dans la vie réelle, un poids politique et social inconnus ailleurs. Un exemple de reenactement apparaît alors. Lénine, bien que prévenu des impossibilités historiques par la Révolution française, sait aussi l'utiliser. En s'engageant dans la Nouvelle politique économique en 1921, il pense ouvrir des possibilités nouvelles par l'auto-thermidorisation. Staline, convaincu qu'il ne peut pas contourner les impossibilités de l'Histoire incarnées dans l'expérience française, met fin à la NEP pour éviter Thermidor. Cette intervention autour des enjeux de Thermidor en Russie propose de réfléchir sur la dimension performative des analogies historiques.

Tamara Kondratieva, professeur émérite des Universités et membre associé du Centre d'études des mondes russe, caucasien et centre-européen (cercec/ehess/cnrs).
Publications
Bolcheviks et Jacobins. Itinéraire des analogies, 2e édition, Paris, Les Belles Lettres, 2017.
"La fin des révolutions : Raskolnikov et Robespierre", Cahiers du Monde russe, 58/1-2, 2017.
"1917, la révolution à la française ou à la russe ?", in L'idée russe face aux idées occidentales (à paraître).
"La Révolution française et la révolution d'Octobre dans le discours historiographique", à paraître en russe dans les Actes du colloque "100 ans de la Grande révolution russe" (Moscou, 9-11 octobre 2017).

Jeffrey M. LEICHMAN : La Foire aux reenactments : problématiques de la restitution d'un théâtre du dix-huitième siècle par le biais du jeu vidéo
VESPACE (Virtual Early modern Spectacles and Public, Active and Collaborative Environment) est une collaboration internationale de chercheurs en histoire du théâtre, littérature et préservation numérique du patrimoine, qui renouvelle la reconstitution des systèmes culturels disparus par le biais du jeu vidéo. L'objet de notre travail est le théâtre de la Foire Saint-Germain pendant la régence de Philippe d'Orléans (1715-1722), dont l'importance a été sous-estimée dans l'Ancien Régime. Nous sommes confrontés à plusieurs objets de reconstitution, allant des bâtiments et espaces intérieurs aux spectacles représentés, en passant par les interactions des spectateurs entre eux et avec la scène. Afin d'arriver à une recréation efficace d'un public d'antan, et de contraindre les joueurs à évoluer selon les règles de comportement de l'époque, une modélisation du monde sensible et social du théâtre de la Foire s'avère nécessaire et pleine d'écueils. En misant sur des interfaces corporelles et émotives que permettent les technologies de la réalité virtuelle, ce projet donne lieu à des produits de recherche inhabituels : ici, le jeu représente notre argument, qui se joue au lieu de se lire. La "lectrice" est plongée au sein d'une expérience affective et sensorielle rythmée par le déroulement du divertissement théâtral. En même temps, elle participe à la recherche, chaque campagne ajoutant des données sur l'efficacité des théories de reconstruction que représentent les environnements visuel, sonore, et social du jeu. Ce paradigme représente un départ important dans l'organisation des recherches en sciences humaines et dans la collaboration avec les chercheurs en informatique. Le projet VESPACE soulève des questions urgentes quant à la fiabilité des représentations, et appelle à une conceptualisation prenant en compte non seulement le désir d'attirer et de retenir l'attention des joueurs, mais aussi les exigences de rigueur scientifique de la recherche. Le "London Charter for the computer-based visualization of cultural heritage" souligne l'importance des normes internationales dans la reconstitution informatique du patrimoine historique et le danger des représentations de plus en plus convaincantes sur le plan sensoriel, qui risquent de passer pour "la réalité" chez les utilisateurs naïfs. Nous appelons à fonder un design "en profondeur" (deep design) qui permette à l'utilisateur d'accéder aux métadonnées, recherches, et théories alternatives qui sont autant de cautions visant à restaurer la posture critique du spectateur-participant au théâtre de la Foire du XVIIIe siècle.

Aurélie MOUTON-REZZOUK : Voir, entendre, penser comme… Dispositifs d'échange symbolique au musée
Nous nous proposons, à partir d'un ensemble d'études de cas (en particulier les expositions Dans la peau d'un soldat, de la Rome antique à nos jours, Musée de l'Armée, Paris, 12 octobre 2017 - 28 janvier 2018, et Corps Rebelles, Musée des Confluences, Lyon, 13 septembre 2016 - 5 mars 2017) de réfléchir à ce qu'impliquent les dispositifs muséographiques "participatifs" qui proposent au visiteur de prendre la place de, d'adopter la posture de, d'endosser les frusques de, d'entrer dans la peau d'un autre (le soldat, le danseur, le peintre, le modèle, le badaud, le scientifique…) — fut-ce de façon sommaire, très brève, ou métaphorique. En dehors de l'hypothèse qui est faite d'une facilitation et d'une intensification de l'apprentissage et de l'appropriation des "savoirs" sur le plan cognitif, il convient en effet d'interroger plus avant les présupposés et les enjeux de ces formes institutionnalisées du jeu de rôles, tant au regard des missions des institutions muséales que sur le plan symbolique, anthropologique et politique. Qu'est-ce qui se "joue", se "change", ou s'"échange" ? Pour quoi faire ? À quel prix ?

Aurélie Mouton-Rezzouk est maître de conférences en Études Théâtrales à l'Institut d'Études Théâtrales de l'université Sorbonne-Nouvelle Paris 3, et membre de l'Institut de Recherches en Études Théâtrales. Ses recherches portent tant sur les Arts du Spectacle — lieux et institutions, publics, patrimoines — que sur les musées et expositions qui leur sont consacrés, et qui ont fait l'objet de sa thèse (Exposer le théâtre, 2013) — et, plus largement, sur ces territoires communs au musée, à l'exposition, aux arts du spectacle, à la performance, et à la littérature. Elle co-anime avec François Mairesse et Flore Garcin-Marrou le programme de recherche "Ces lieux où l'on pense. Scène, Musée Bibliothèque".
Dernières publications
"L'opéra baroque sur la scène muséale, ou l'opéra autrement", en collaboration avec Julie Deramond, Culture et Musées, n°29, juin 2017.
"Remédiation. Les arts du spectacle dans l'exposition, un art de la manipulation", dans Corps/esprit/objet : Réinventons nos collections, Dominique Dewind et Nicole Leclercq (dir.), TLA, Performing arts resources #32, New York, 2016.
"Exposer le théâtre ?", Bernadette Dufrêne, Jérôme Glicenstein (dir.), Histoires d'Expositions, Paris, Hermann, 2016.
Le musée par la scène, avec Pauline Chevalier et Daniel Urrutiaguer, à paraître aux éditions Seconde Époque.

Isabelle PARESYS : La Renaissance au cinéma : la question du costume
Si l'on considère la production cinématographique française, ni le costume historique, ni même la représentation de la Renaissance sur les écrans n'ont spécialement attiré les chercheurs. Or les costumes, comme les décors, sont des artefacts visuels indispensables à la localisation de l'action dans un temps historique donné. Ils provoquent chez le spectateur un sentiment d'altérité et de distance temporelles, que le spectateur ait ou non une culture des modes anciennes. La communication abordera la façon dont le cinéma français costume la Renaissance au regard des représentations que l'on a de cette période et spécifiquement comment le costume l'habille pour l'écran.

Isabelle Paresys est maîtresse de conférences en histoire au département Culture de l'université de Lille, laboratoire IRHiS-UDL/CNRS. Ses travaux portent sur l'histoire culturelle des vêtements et de la mode à la Renaissance et à l'époque moderne ainsi que sur le costume historique au cinéma (pro.univ-lille.fr/isabelle-paresys/).
Publications
Paresys Isabelle, "Avec ou sans fraise. La Renaissance fait son cinéma", in La Renaissance en Europe dans sa diversité. Tome 3 : Circulation des hommes, des idées et des biens, héritages, Actes du Congrès international organisé à Nancy (10-14 juin 2013), dir. par Michel Deshaies, Lioudmila Chvedova, Stanislaw Fiszer et Marie-Sol Ortola, Nancy, Université de Lorraine, 2015, p. 439-454.
Paresys Isabelle, "De l'habit au costume : L'image du vêtement comme marqueur de temporalité", in À perte de vue. Les nouveaux paradigmes du visuel, éd. par Sophie Raux et Daniel Dubuisson, Dijon, Presses du Réel, 2015, p. 195-208.
Paresys Isabelle, "Corps, apparences vestimentaires et identités en France à la Renaissance", Apparence(s), 4 | 2012 [en ligne].
Boucher Shazia, Anne-Claire-Laronde et Isabelle Paresys (éd.), Plein les Yeux ! Le spectacle de la mode / A Feast for the Eyes : Spectacular Fashions, Milano, Silvana Editoriale SPA, 2012.
Paresys Isabelle et Natacha Coquery (éd.), Se vêtir à la cour en Europe (1400-1815), Villeneuve d'Ascq, Centre de recherche du château de Versailles, Institut de recherches historiques du Septentrion et CEGES Université de Lille 3 (collection "Europe du Nord-Ouest"), 2011.

Martial POIRSON : Performances post-coloniales : entre déconstruction et remotivation des stéréotypes coloniaux
La polémique autour de l'installation–performance Exhibit B du sud-africain Brett Bailey à Paris en 2014 a mis en évidence, non seulement la fracture coloniale dans l'ordre de la représentation et le système d'emplois typés sur lequel repose encore aujourd'hui le théâtre occidental, mais encore les effets de réception malencontreux de spectacles cherchant à faire revivre la situation d'emprise coloniale. Cette contribution a un triple objectif : interroger la vocation heuristique de protocoles de reconstitution de spectacles exotiques (Slide Show, Freak Show, Ethnic Show, zoos humains, exhibitions), afin de mettre en évidence l'efficacité performative de stratégies destinées à faire éprouver les mécanismes d'exploitation des corps et de dépossession des récits ; identifier les effets pervers de ces dispositifs critiques susceptibles de remotiver les stéréotypes ethniques qu'ils sont supposés dénoncer ; jauger de tels gestes artistiques de réparation symbolique à l'aune de leurs potentialités émancipatrices.

Martial Poirson est professeur d'histoire culturelle, de littérature et d'études théâtrales à l'université Paris 8 et visiting professor en Cultural Studies à New York University. Il a coordonné plus d'une trentaine d'ouvrages et de revues sur le théâtre, la littérature, le cinéma, les musées, l'économie politique et les cultures populaires. Il est également commissaire d'exposition et dramaturge.
Publications
Spectacle et économie à l'âge classique, Classiques Garnier, 2011.
Les Audiences de Thalie, Classiques Garnier, 2013.
Économie du spectacle, Puf, 2013 (avec I. Barbéris).
Politique de la représentation, Champion, 2014.
Théâtre en temps de crise (à paraître en 2018).

Sophie RAUX : La restitution numérique du pont Notre-Dame, quels enjeux pour l'histoire des marchés artistiques ?
Sous l'Ancien Régime, le pont Notre-Dame à Paris était surmonté de deux rangées de maisons délimitant une rue pavée, bordée de boutiques, abritant une soixantaine de marchands pour la plupart liés au commerce d'art et de luxe. À certains moments de son histoire, il a réuni d'importantes concentrations de marchands de tableaux. Parmi ceux-ci, s'est distingué dans la première moitié du XVIIIe siècle Edme-François Gersaint, pour qui Jean-Antoine Watteau peignit, en 1720, la fameuse Enseigne de Gersaint. L'intervention rendra compte des résultats d'une équipe de recherche interdisciplinaire ayant eu pour but de faire progresser l'étude de ce tableau singulier dans son environnement urbain par le recours aux technologies numériques. Immersive et interactive, cette restitution en images de synthèse permet de mieux saisir la dimension spectaculaire et provocatrice de cette enseigne devenue l'une des grandes icônes de l'histoire de l'art.

Sophie Raux est professeur d'histoire de l'art à l'université de Lyon et est responsable de l'axe "Art, Images, Sociétés" au sein du Laboratoire de Recherche Historiques Rhône Alpes (UMR 5190). Elle prépare actuellement la publication d'un ouvrage collectif consacré à la restitution du pont Notre-Dame.
Publication
Lotteries, Art Markets, and Visual Culture in the Low Countries, 15th-17th c., Brill, 2018.
Co-direction d'ouvrges
Moving Pictures. Intra European Trade in Images 16th-18th c., Brepols, 2014.
À perte de vue, les nouveaux Paradigmes du visuel, Presses du réel, 2015.

Frédérique TROUSLARD : Une pédagogie du passé : l'action des associations
Les associations relevant de la pratique de la reconstitution occupent une place singulière dans le large champ de la reconstitution. Le modèle associatif permet un grande diversité d'objets, d'organisations et de pratiques. De la recherche, à l'expérimentation et à la médiation, toutes les pratiques reposent sur la coopération des membres de l'association dans le cadre défini par ses statuts. La prise en compte d'une approche sociologique du modèle associatif dans le champ de la reconstitution permet d'éclairer des pratiques hors du champ académique. Leur adhésion à des valeurs, leur connaissances et savoir-faire déterminent les différents modes de médiation proposés tant au sein de l'association que vers leurs publics. Déambulations, ateliers pratiques, conférences, expositions, démonstrations, roleplay… quels acteurs et modèles pour quels publics ?

Frédérique Trouslard a été pendant 6 années présidente de l'association Le ministère des modes dont elle est actuellement membre du conseil d'administration. De formation supérieure en histoire des arts, elle a accompagné la mise en place et anime les ateliers pédagogiques pour les membres de l'association. Elle élabore et coordonne des projets de médiation pour le grand public en partenariat avec des structures muséales ou culturelles. En 2017, elle a créé HISTOR, une structure de conseil et de formation spécialisée en histoire de la mode. Elle accompagne la réalisation de leurs costumes des bénévoles dans le cadre de reconstitutions historiques. Elle anime des ateliers pour le grand public et les adultes (mode et parfums au XVIIIe siècle). Elle a une approche pratique de la reconstitution historique : histoire des techniques, costume, cosmétique et cuisine.

Audrey TUAILLON DEMÉSY : L'histoire vivante médiévale : les tendances
L'histoire vivante (qui englobe la reconstitution historique et les Arts martiaux historiques européens) est une activité de loisir contemporaine qui donne à voir des réactivations du passé dans le présent, sous l'angle de pratiques corporelles. Il s'agit, ici, de s'intéresser à l'histoire vivante médiévale sur le territoire français, à l'aide d'une approche ethnographique réalisée entre 2009 et 2017. Plus spécifiquement, la question se pose de savoir comment les re-créations d'objets enclenchent une immersion dans le passé. Les vêtements, mais aussi les armes, facilitent le passage d'un monde (contemporain) à un autre (historique). En outre, ces re-créations (matérielles et techniques) sont aussi des outils donnant lieu à un sentiment d'appartenance à une communauté créée par les pratiquants d'histoire vivante, organisant des savoir-faire et induisant des savoir-être. Suivant cette logique, la corporéité en jeu permet de comprendre comment l'apparence, la présentation de soi, mais aussi l'usage fait de son corps en situation de mise en action de l'Histoire, font partie d'un système qui produit un dépaysement temporel et organise l'activité. Au-delà, ces recréations du passé interrogent l'imaginaire en jeu dans ces loisirs. Si l'accent est mis sur la rigueur historique et les expérimentations réalisées, l'imaginaire de la conformité à l'histoire demeure un élément central pour comprendre les pratiques contemporaines d'histoire vivante.
Bibliographie indicative
Chaize Pierre-Alexandre, 2013, "Des mots aux gestes : le rôle du texte et du vocabulaire dans l'expérimentation historique", Revue STAPS, Vol. 101, pp. 103-118.
Fournier Laurent Sébastien, 2008, Le "petit patrimoine" des Européens, Paris, L'Harmattan.
Gapps Stephen, 2002, Performing the Past : a Cultural History of Historical Reenactements, Thèse de Doctorat en Philosophie, Sydney, Université de Sydney.
Jaquet Daniel, 2016, "Entre jeux de mains et jeux de mot : faire l'expérience ou expérimenter les gestes d'après les textes techniques. Reproduire ou répliquer des objets…", Revue suisse d'histoire / Itinera, Vol. 39, pp. 11-18.
Jenkins Henry, 2013, La Culture de la convergence : des médias au transmédia, trad. fr., Paris, Armand Colin [2006].
Schwint Didier, 2002, Le Savoir artisan. L'efficacité de la mètis, Paris, L'Harmattan.

Audrey Tuaillon Demésy, docteure en sociologie, est maître de conférences en STAPS à l'université de Franche-Comté. Ses travaux, selon une approche socio-ethnographique, portent sur les mondes imaginaires mis en vie et les activités ludiques "alternatives", situées entre subculture et monde social (reconstitution historique, quidditch, etc.).
Publications
Tuaillon Demésy Audrey (2013), La re-création du passé : enjeux identitaires et mémoriels, Besançon, PUFC.
Tuaillon Demésy Audrey (2014), "L'histoire vivante médiévale : pour une ethnographie du "passé contemporain"", Ethnologie française, Vol. 44, n°4, pp. 725-736.
Tuaillon Demésy Audrey (2017), "Le quidditch moldu. De l'imaginaire à la réalité", Questions de communication, Vol. 31, pp. 393-413.
Tuaillon Demésy Audrey (2017), "La cuisine des reconstitutions historiques : réinventer l'alimentation du passé", Anthropologie et société, Vol. 41, n°3, à paraître.

Mathieu VIAU-COURVILLE : Post-mémoire, Embodiment et Reenactment au Musée : continuités et reconstructions symboliques [intervention établie avec Karen WORCMAN]
Quelles relations les musées entretiennent-ils avec les formes de mémoire culturelle fondées sur la réactivation et la réinterprétation de la mémoire individuelle et collective ? En s'appuyant sur les concepts de post-mémoire (M. Hirsch) et de construction sociale du trauma culturel (J. Alexander), nous présentons ici deux expositions récentes, au Québec et à São Paulo, qui s'écartent de la perspective historique traditionnelle au profit des expériences vécues. Comment les musées peuvent-ils soutenir les collectivités dans leurs efforts pour faire face aux souffrances sociales ? Par ailleurs, si l'on conçoit l'espace d'exposition comme davantage qu'un simple dispositif de commémoration, comment les expositions peuvent-elles renforcer l'engagement des collectivités et promouvoir la reconstruction sociale ? Nous tenterons de répondre à ces questions en tenant les concepts d'embodiment et de reenactment comme constitutifs du travail collectif de mémoire. Seront plus précisément examinées les notions de post-mémoire, soit la relation d'une génération à la précédente lorsque cette dernière a été témoin d'un trauma culturel et collectif, et celle de la construction sociale du trauma culturel. Nous viserons à illustrer l'utilité de ces cadres conceptuels à l'heure où les musées sont appelés à réconcilier les liens intergénérationnels et, ce faisant, à réaffirmer leur rôle et leur engagement dans la société contemporaine.

Mathieu Viau-Courville est coordonnateur de recherche à l'université du Luxembourg. Il était auparavant chargé de recherche au Musée de la civilisation, Québec. Ses publications récentes en muséologie et patrimoine incluent des articles dans Museum International, Museum and Society, Pasajes de pensamiento contemporáneo et Revista d'etnologia de Catalunya ainsi que dans le récent collectif Patrimoine et identités locales, L'Harmattan. Il est membre du conseil de rédaction de la revue Museum International publiée par le Conseil international des Musées (ICOM).

Karen Worcman est fondatrice et directrice du Museu da Pessoa, São Paulo, premier musée numérique du Brésil fondé en 1991. Historienne et chercheure rattachée au groupe Diversitas de l'université de São Paulo, elle est l'auteure, avec Joanne Garde-Hansen, de l'ouvrage Social Memory Tecnhology : Theory, Practice, Action (Routledge, 2016). Elle est membre (Fellow) des regroupements Ashoka et Wellbeing.org.

Isabel YAYA McKENZIE : Ce que l'histoire fait au rituel. Les représentations de la capture du dernier Inca dans les Andes péruviennes
Chaque année, au cours des festivités votives de Santa Rosa de Lima, le village de Chiquían (Pérou) est le théâtre d'une représentation tendue. Dans les rues, pendant de longues heures, les hommes et les femmes qui ont la charge, à tour de rôle, de la célébration, mettent en scène la capture du dernier souverain Inca par les troupes de Francisco Pizarro (1532). À l'instar de plusieurs communautés dispersées des hauts plateaux andins, Chiquían perpétue la représentation de cette confrontation historique dans un cadre ritualisé. Ces collectivités, pour beaucoup éloignées des espaces formels de production du savoir, façonnent ainsi leur propre trame narrative de l'invasion espagnole. Au delà de la question de l'origine de ce topos, cette conférence propose d'interroger les constructions vernaculaires de l'histoire à partir d'une ethnographie réalisée en 2017. Il s'agira de mettre en lumière les modalités de transmission de cette mémoire historique, de dégager les affects que suscite sa mise en acte, et d'éclairer les enjeux locaux qui gouvernent le choix des acteurs sociaux dans leur formulation du passé.

Historienne, Isabel Yaya McKenzie est pensionnaire de la Fondation Thiers, chargée de recherche temporaire du CNRS depuis 2016. Rattachée au Laboratoire d'anthropologie sociale, ses recherches proposent une anthropologie historique du politique dans les Andes. Ses publications portent sur la production, les usages et les enjeux du savoir historique, les dispositifs hégémoniques et l'articulation entre organisation sociale et logiques d'action.


ATELIERS :

Recherches et recréations des cosmétiques du début du XVIIIe siècle. Pour une approche de la médiation par les sens, par Frédérique TROUSLARD

Le développement d'outils numériques prend une part importante dans les actions de médiation scientifiques et culturelles. Ces approches privilégient dans un environnement virtuel la vue et l'ouïe. Mais quelle place pour une approche concrète et sensorielle ? De la recherche, à l'expérimentation et à la médiation, je vous présenterai la démarche, le matériel, les cosmétiques recréés dans le cadre d'un projet autour des cosmétiques parfumés d'après Le Parfumeur françois, qui enseigne toutes les manières de tirer les odeurs des fleurs et de faire toutes sortes de compositions de parfums… par le Sr Barbe, parfumeur (Lyon, 1693).

Frédérique Trouslard a été pendant six années présidente de l'association Le ministère des modes dont elle est actuellement membre du conseil d'administration. De formation supérieure en histoire des arts, elle a accompagné la mise en place et anime les ateliers pédagogiques pour les membres de l'association. Elle élabore et coordonne des projets de médiation pour le grand public en partenariat avec des structures muséales ou culturelles. En 2017 elle a créé HISTOR, une structure de conseil et de formation spécialisée en histoire de la mode. Elle accompagne la réalisation de leurs costumes des bénévoles dans le cadre de reconstitutions historiques. Elle anime des ateliers pour le grand public et les adultes (mode et parfums au XVIIIe siècle). Elle a une approche pratique de la reconstitution historique : histoire des techniques, costume, cosmétique et cuisine.


Reprise : "usure" et "renaissance" de l'œuvre performative, conférence-performance de Besnik HAXHILLARI & Flutura PREKA (The Two Gullivers)

Inspiré directement de l'œuvre de Marina Abramovic, ainsi que de notre expérience de la reprise de son œuvre pour laquelle nous possédons la permission légale de neuf de ses performances, nous allons parler de l'"usure" et de la "renaissance" de l'œuvre performative et de son rapport avec le théâtre. Il s'agit d'une réflexion théorique et pratique, sur les effets que le temps produit sur la performance, le temps qui efface certains traits et en accentue d'autres. À travers des opérations de répétitions, de reprises et de renouvellements, nous voulons découvrir et mettre en évidence le noyau de l'œuvre performative qui résisterait au temps et à l'oubli. Pour appuyer notre réflexion, nous allons parler de notre re-enactment de Nightsea-Crossing de Marina Abramovic & Ulay ainsi que de la reprise de notre propre performance Transparent Travel (2004-2018). Tout au long de notre communication, il y aura des démonstrations de reprises d'actions performatives pour et avec le public présent.

Nés en Albanie, Besnik Haxhillari & Flutura Preka (The Two Gullivers), ont étudié les arts visuels à Tirana, Lausanne, Berlin et à Montréal (PhD à UQÀM). Depuis 1998 ils travaillent en duo sous le nom d'artiste The Two Gullivers. Ils ont présenté leur travail performatif à la Biennale de Venise (1999), à Hamburger Bahnhof Berlin (2000), à la Biennale de Pékin (2005), à VIVA Art Action (2006, 2010) à Montréal, à la Galerie Leonard & Bina Ellen, Montréal (2013) et au Musée national des beaux-arts du Québec (2016). Ils ont fait partie de : Installation Art in the New Millenium (2003), East Art Map (2006), Marina Abramovic : The Artist is Present (2010).

Besnik Haxhillari est professeur au Département de philosophie et des arts à Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Il s'intéresse au processus de création et à la génétique de l'art de la performance à travers le dessin préparatoire.

Flutura Preka est artiste-chercheure, membre du groupe de recherche URAV à UQTR. Ses recherches portent sur les enjeux de re-enactment en performance et en art contemporain.


BIBLIOGRAPHIE :

• MIRC Sébastien (dir.), Les cahiers du jeu vidéo : La guerre, Vol. 1, Châtillon, Édition Pix'n Love, 2008.
• NEITZEL Sönke & WELZER Harald, Soldats : combattre, tuer, mourir, Procès-verbaux de récits de soldats allemands, Paris, Gallimard, 2013 [2011].
• RUFAT Samuel & TER MINASSIAN Hovig, Les jeux vidéo comme objet de recherche, Paris, Questions théoriques, 2012.


SOUTIENS :

• EA 1573 "Scènes du monde, création, savoirs critiques" (Labex Arts H2H) | Université de Paris 8
• UMR 5316 "Litt&Arts", composante Imaginaire et Socio-Anthopologie | Université Grenoble Alpes
• Institut universitaire de France
• Abbaye du Mont-Saint-Michel

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


LE TRAVAIL EN MOUVEMENT

ORGANISATIONS, FRONTIÈRES, RECONNAISSANCES


DU JEUDI 13 SEPTEMBRE (19 H) AU JEUDI 20 SEPTEMBRE (17 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Émilie BOURDU-SZWEDEK, Michel LALLEMENT, Pierre VELTZ, Thierry WEIL


ARGUMENT :

Depuis quelques années, les indices d'une vaste recomposition du travail n'ont cessé de se multiplier. Outre la révolution numérique dont on commence à percevoir et à anticiper les nombreux effets, il faut compter avec de nouvelles formes de gestion des activités productives qui en appellent à toujours plus d'engagement au travail, de responsabilités sociales, de collaborations horizontales… À l'image des transformations qui affectent les lieux comme les temps des pratiques professionnelles, ce sont par ailleurs les frontières même du travail qui sont aujourd'hui en train de bouger.

Le colloque rassemblera dirigeants d'entreprise, directeurs des ressources humaines, syndicalistes, universitaires, acteurs publics ainsi que toutes celles et ceux intéressés par le thème du travail et de ses transformations autour de trois interrogations : 1) Quelles sont les nouvelles pratiques productives et les nouvelles formes d'organisation du travail ? 2) Comment se transforment les frontières du travail ? 3) Quelles sont les implications de ces changements pour les modes de reconnaissance au travail, du travail et par le travail ?

Pour aborder toutes ces questions, le programme sera établi sur la base de communications ou de tables rondes suivies de débats, d'ateliers et de discussions autour de témoignages et de représentations du travail, par exemple cinématographiques. Les participants pourront proposer des thèmes d'atelier et décideront le premier jour à quel atelier ils souhaitent contribuer. Sont également prévues des visites d'entreprises locales illustrant des formes intéressantes d'agencement de collectifs de travail.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Jeudi 13 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Vendredi 14 septembre
Matin
LES MOTS ET LES CHIFFRES DU TRAVAIL — QUI SONT LES "TRAVAILLEURS" AUJOURD'HUI ?
Michel LALLEMENT : Le travail et ses normes
Maryse SALLES : Langages au travail : quelques enjeux
Serge VOLKOFF : Les parcours professionnels dans le "paysage" des conditions de travail et de leurs changements : approche par trois études quantitatives

QUEL TRAVAIL POUR LA SOCIÉTÉ DEMAIN ?
Louise GAXIE : Animation d'une réflexion en petits groupes pour élaborer collectivement une carte mentale autour de la thématique du travail

Après-midi & Soirée
Suite du travail sur la carte mentale et restitution des groupes

Michèle SEBAG : Qualité de la vie au travail et santé économique des entreprises : étude des relations causales

Propositions de thèmes d'atelier
Sophie BERNARD : Travail et plateformes numériques
Jean-Yves BOULIN : Le futur du temps de travail ou le temps de travail du futur ?
Olivier CARLAT : Mesure du travail : une opportunité pour le dialogue social
Isabelle MAGNE & Dimitri PLEPLÉ : Philosophie de l'entreprise libérée : observations et questionnements
Jean-Michel SAUSSOIS : Représentation du travail au cinéma

Bourse aux ateliers (chacun choisit ceux auxquels il veut participer) et première séance d'atelier


Samedi 15 septembre
Matin
LES NOUVELLES FORMES DU TRAVAIL : AUTONOMIE, RESPONSABILISATION, PARTICIPATION
Yves CLOT : Responsabilisation, autonomie, participation [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Jean-Yves BONNEFOND : Instituer le dialogue sur la qualité du travail : un enjeu de performance et de santé. L'exemple du dispositif DQT à l'usine Renault de Flins
Bertrand BALLARIN : La responsabilisation appliquée à l'entreprise Michelin

Après-midi
Séance de posters des doctorants

LES NOUVELLES FORMES DU TRAVAIL : INDIVIDUALISATION ET COOPÉRATION DANS LE TRAVAIL À L'ÈRE DU NUMÉRIQUE
Luca PALTRINIERI & Muriel PRÉVOT-CARPENTIER : Individualisation et coopération dans les entreprises de plateformes
Isabelle BERREBI-HOFFMANN : Intelligence artificielle et modes d'organisation du travail : enjeux, expérimentations, individuation
Flore BARCELLINI : Industrie du futur et robotique collaborative. Quelle place du travail et de ses transformations ?

Soirée
DU REVENU UNIVERSEL À L'ACCOMPAGNEMENT UNIVERSEL ?
Table ronde animée par Danielle KAISERGRUBER, avec Jean-Baptiste de FOUCAULD (Le revenu d'existence, planche de salut ou remède empoisonné de la société du travail ?) et Yannick VANDERBORGHT


Dimanche 16 septembre
Matin
LES EXPÉRIMENTATIONS LOCALES DANS LE DOMAINE DE L'EMPLOI, DE LA FORMATION ET DU TRAVAIL
Pierre MÉHAIGNERIE : Peut-on, par des politiques locales, agir pour surmonter nos faiblesses nationales : chômage, dépenses publiques, formation professionnelle, simplifications administratives… Comment ? Exemple de Vitré Communauté
Hervé RENAULT : Premiers retours sur l'expérimentation "Territoires zéro chômeur" dans le Calvados (ATIPIC Emplois Nouvelle Génération)
Jean-Marie BERGÈRE : Plaine Commune, Castres, Bassin minier, trois expérimentations soutenues par la Fondation de France

Après-midi
TRANSFORMATIONS DU TRAVAIL ET TERRITOIRE
Table ronde animée par Danielle KAISERGRUBER, avec Olivier BOUBA-OLGA (Dynamiques territoriales, éloge de la diversité), Frédéric REY (Les recompositions territoriales des régulations du travail) et Hervé DEFALVARD (Économie sociale et solidaire dans les territoires)

Soirée
Ateliers thématiques


Lundi 17 septembre
Matin
COMMENT FORMER AUX COMPÉTENCES REQUISES PAR LE TRAVAIL DEMAIN ?
Pierre FALZON : Développer les compétences d'arbitrage
Jean-Luc MOLINS : Quelle formation à l'ère numérique ?
Vivien ROUSSEL : "Le faire" dans la formation : l'exemple de fablabs d'insertion à Gonesse et à Montreuil

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
LES RÉCITS ET LES REPRÉSENTATIONS DU TRAVAIL
Jean-Michel SAUSSOIS : La figure du travail au cinéma


Mardi 18 septembre
Matin
QUELS CADRES JURIDIQUES POUR LES NOUVELLES FORMES DE TRAVAIL ?
Table ronde animée par Yves VEYRIER, avec Xavier BEAUDONNET (Les apports possibles de la négociation collective), Josépha DIRRINGER (Les transformations du droit social dans une économie numérique), Bénédicte RAVACHE et Valérie VAN GOETHEM

Après-midi
"HORS LES MURS"
Visites de la Coopérative d'Activité et d'Emploi Crescendo (Antenne de Saint-Lô), de l'Entreprise Donaldson (Domjean) ou de La p'tite Coop (Lingreville)

Soirée
LES RÉCITS ET LES REPRÉSENTATIONS DU TRAVAIL
Laurence DECRÉAU : Le bonheur au travail dans le roman contemporain


Mercredi 19 septembre
Matin
LES FRONTIÈRES DE L'ENTREPRISE : L'ENTREPRISE ÉTENDUE ET SA RESPONSABILITÉ
Mathilde FRAPARD : Les accords d'entreprise transnationaux : un modèle de régulation sociale en évolution

Le dialogue social international, table ronde animée par Guillaume DELAUTRE, avec Mathilde FRAPARD, Kostas PAPADAKIS, Denis PENNEL et Bernard THIBAULT

Après-midi
Ateliers thématiques (suite)


Jeudi 20 septembre
Matin
Restitutions des ateliers thématiques
Synthèse du colloque par les doctorants et jeunes chercheurs : Gabriel BOUDARD, Louise FAUVARQUE-GOBIN, Xiao HUANG, Isabelle MAGNE et Louise ROBLIN
Discussion générale

Après-midi
Tables rondes avec les cadres du Conseil départemental de la Manche — Animation : Sylvain ALLEMAND & Christine BACHELEZ
1) Nouvelles technologies, nouveaux usages, avec Philippe BOBLET, Cédric DOLET, Agnès JUGÉ et Jean-Baptiste de MAISTRE
2) Métiers de demain, formation et insertion, avec Perrine COURBARON, Émilie DESPLANCHES, Éric DUJARDIN et Christophe GELAND

DÉPARTS


PRESSE / MÉDIAS :

• "Qualité de vie des salariés et santé économique des entreprises, quelle relation ?", entretien avec Michèle SEBAG réalisé par Sylvain ALLEMAND [en ligne sur le site de L'EPA Paris-Saclay].


INTERVIEWS RÉALISÉES PAR LA FABRIQUE DE L'INDUSTRIE :


SOUTIENS :

• Bureau International du Travail (BIT)
• Fabrique de l'Industrie
• Fondation Gabriel Péri
• Fondation de l'Académie des technologies
• Veolia
• Chaire "Futurs de l'industrie, du travail et de l'innovation" | Mines-Paristech


PARTENARIAT :

• Association nationale des DRH (ANDRH)

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


L'USAGE DES AMBIANCES
UNE ÉPREUVE SENSIBLE DES SITUATIONS


DU MARDI 4 SEPTEMBRE (19 H) AU MARDI 11 SEPTEMBRE (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Didier TALLAGRAND, Jean-Paul THIBAUD, Nicolas TIXIER

Colloque à l'initiative de l'Unité de recherche de l'ESAAA et de l'équipe CRESSON (UMR AAU)


ARGUMENT :

Les ambiances et les atmosphères sensibles se prêtent à une grande diversité d'usages, que ce soit dans le domaine de l'art, de l'urbain ou des sciences sociales. Comment les ambiances contribuent-elles à mettre les situations ordinaires à l'épreuve du sensible ? En quoi ouvrent-elles de nouvelles pistes en matière de pratique artistique, d'expérimentation méthodologique ou d'exploration théorique ? Qu'en est-il d'une socio-esthétique située, attentive aux percepts et aux affects qui imprègnent nos milieux de vie et infusent les sensibilités contemporaines ?

De telles questions traverseront le colloque selon une triple exigence : d'une part, une attention particulière sera portée aux échanges, apports réciproques et questionnements communs entre le monde de l'art et celui des sciences sociales ; d'autre part, il s'agira d'initier une rencontre, d'ouvrir un dialogue inédit avec la pensée anglo-saxonne en la matière, mettant en résonance et en discussion l'approche des ambiances et celle des atmosphères ; enfin, l'usage des ambiances sera passé aussi bien au filtre des enquêtes et des théories qu'à celui des pratiques effectives et des expériences situées. Les journées seront organisées de manière à alterner activité réflexive et expérimentations concrètes, à mettre en partage des expériences autant qu'à mettre en débat des arguments.

D'une certaine manière, l'usage des ambiances conduit à expérimenter une nouvelle forme de colloque, entre discussion scientifique et expérimentation artistique. Amorcée par une virgule matinale produite par des doctorants, chaque journée alternera des communications suivies de débats, interventions et tables rondes avec des propositions esthétiques produites par des jeunes artistes pour se conclure en soirée par de petites formes performatives.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mardi 4 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Mercredi 5 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Maïlys TOUSSAINT : Chronique du quotidien à la Villeneuve de Grenoble

L'USAGE DES AMBIANCES
Didier TALLAGRAND, Jean-Paul THIBAUD & Nicolas TIXIER : Introduction
Gonçalo M. TAVARES : Lieux, corps, littérature | conférence-lecture – Traduction : Joana TEULE

Moment sensible | Présentation
Projection de Paris Port d'André Sauvage (1928), avec une composition sonore originale de Giuseppe GAVAZZA

Après-midi
QUELLES FORMES DE LA SENSIBILITÉ MODERNE ? | Animation : Céline BONICCO-DONATO
Nia PERIVOLAROPOULOU : Des ambiances urbaines au cinéma
Philippe SIMAY : La ville-pharmakon : vers une thérapeutique des ambiances urbaines [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Moment sensible | Présentation
Léo BAUDY

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Alexandre COSTANZO : Benjamin | lecture


Jeudi 6 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Vanessa STASSI : Récit auto-ethnographique d'une métamorphose urbaine, le cas de la Petite Ceinture de Paris

AMÉNAGISTE DE L'AMBIANCE
Laurent DEVISME : Vertige de l'usage

Moment sensible | Présentation
Florence SCHMITT

Après-midi
PASSAGES DU SENSIBLE | Présentation — Animation : Pascal AMPHOUX
Pierre LAFON : De l'expérience de la vacuité et de l'éphémère dans la pratique de l'architecture
Alexander RÖMER : "Faire ensemble" (ou bien le passage de l'action éphémère au temps long du projet)
Jean STERN : L'instant sur place

Moment sensible | Présentation
Dorian DEGOUTTE

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Stephen LOYE : Le "\vɛʁ\noir" | projection


Vendredi 7 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Gwendoline L'HER : Les mesureurs de la ville. Récit d'une balade collective de cartographie de la pollution de l'air à Rennes

QUEL DEVENIR DE LA SENSIBILITÉ CONTEMPORAINE ? — Animation : Anne BOSSÉ
François J. BONNET : Monde-Signe et Monde-Gouffre
Marc BREVIGLIERI : Soulèvement

Moment sensible | Présentation
Quentin LAZZARESCHI

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Hommage à Jean-Yves PETITEAU avec la présentation de Dockers à Nantes. L'expérience des itinéraires (esaaa éditions, Ensa Nantes, 2018). En présence de Bernard RENOUX


Samedi 8 septembre
JOURNÉE ANGLOPHONE — Traduction : Sophie PROVOST
Matin
Virgule matinale | Présentation
Ryma HADBI : Chronique d'une vie dans une cité des années 30

AMBIANCES VS ATMOSPHERES ? — Animation : Ola SÖDERSTRÖM
Olivier LABUSSIÈRE : Ambiance, an introductory experience to our ordinary environment
Derek McCORMACK : Atmospheres and the elemental

Moment sensible | Présentation
Joana TEULE

Après-midi
SOME MODES OF EXISTENCE OF ATMOSPHERES (QUELQUES MODES D'EXISTENCE DES AMBIANCES) — Animation : Damien MASSON
Friedlind RIEDEL : Moods and Modes. Thinking Atmosphere through Music
Izabela WIECZOREK : Atmospheres in formation : affective thresholds, immersive fields and active boundaries

Author (Derek McCORMACK) Meet critics (Rainer KAZIG & Gretchen SCHILLER)

Moment sensible | Présentation
Hedi Ali MESTIRI

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Julien CLAUSS & Giuseppe GAVAZZA | création sonore


Dimanche 9 septembre
JOURNÉE ANGLOPHONE — Traduction : Sophie PROVOST
Matin
Virgule matinale | Présentation
Sarah VAN HOLLEBEKE : La ville sous tensions. Repenser l'observation des divisions de l'urbain

WHAT DO YOU MEAN BY AFFECT ? (QU'ENTENDEZ-VOUS PAR AFFECT ? — Animation : Niels ALBERTSEN
Paul SIMPSON : The Ambiguity of Affect
Tonino GRIFFERO : What an atmospheric feeling can do ? Emotional games and critical distance

Moment sensible | Présentation
Jérémy LANCHON & Marion RAIMBAULT (Collectif La Meute)

Après-midi
HOW TO SENSITIZE INTERIOR SPACE ? (SENSIBILISER L'ESPACE INTÉRIEUR ?) — Animation : Bruno QUEYSANNE
Marc WINZ : Ambiances urbaines and atmospheres in research on the city-psychosis nexus
Emmanuel DOUTRIAUX : Affordances de l’ambiance / Architectures du commun

Dialogue : Jean-François AUGOYARD et Jean-Pierre PÉNEAU

Moment sensible | Présentation
Diane AUBRUN

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Naïm AÏT-SIDHOUM : Une fiction dans le parc | projection


Lundi 10 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Juste PECIULYTE : On interior atmospheric staging. Design example

DES FORMES SECONDES — Animation : Naïm AÏT-SIDHOUM
Conversation avec Pierre-Damien HUYGHE [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Moment sensible | Présentation
Ophélie CARPENTIER

Après-midi
DES AMBIANCES DE PENSÉE | Présentation — Animation : David ZERBIB
Pauline NADRIGNY : Écouter, penser : Thoreau, Ives et l'ambiance de la forêt
Noëlle BATT : Plasticité conceptuelle. Des vertus du flou, du vague, du mal délimité ou de l'indéterminé pour l'exercice de la pensée
Thierry MOUILLÉ : L'ambiant rotatif, en oui bémol et non dièse

Moment sensible | Présentation
Laura POUPPEVILLE

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Jean-Marc CHAPOULIE : Re:re-Méditerranée | projection

The Party


Mardi 11 septembre
Matin
CLÔTURE : L'USAGE DES AMBIANCES
Restitution performée du Workshop "Design & espace"
Restitution dialoguée artistes / jeunes chercheurs
Quels dialogues entre art et ambiance ?, débat avec Marc BREVIGLIERI, Bruno QUEYSANNE, Joana TEULE et David ZERBIB

Après-midi
DÉPARTS


PRESSE / MÉDIAS :

• "Retours du colloque à Cerisy", par Maïlys TOUSSAINT [en ligne sur le blog Ambiances architecturales & urbaines du laboratoire CRESSON (UMR Ambiances Architectures Urbanités) | 30 octobre 2018].


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Niels ALBERTSEN
Niels Albertsen, social scientist (origin political science), professor emeritus at the Aarhus School of Architecture, Denmark. Research into urban and social theory, architectural and design theory, the sociology of the architectural profession, the sociology and philosophy of art. Head of the Department of Landscape and Urbanism (2003-2011), Co-director of the Centre for Strategic Urban Research (2004-2015).
Publication
"Atmosphere : Power, Critique, Politics. A conceptual analysis" in Nicolas Rémy & Nicolas Tixier (eds.), Ambiances, tomorrow, Volos, 2016.

Pascal AMPHOUX
Architecte et géographe. Professeur à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes. Activité indépendante de praticien et de consultant sur de nombreux projets architecturaux, urbains et/ou environnementaux (Bureau CONTREPOINT, Projets urbains, Lausanne). Chercheur au Centre de Recherches sur l'Espace Sonore et l'Environnement Urbain (CRESSON, École d'Architecture de Grenoble, UMR CNRS). Expert auprès de diverses institutions suisses, françaises ou européennes et notamment membre du conseil scientifique "Passages" à l'Institut pour la Ville en Mouvement (VEDECOM, Paris). Auteur de nombreux ouvrages et publications scientifiques portant sur l'environnement sonore et urbain, et de façon plus spécifique, sur les rapports entre la pratique du projet, l'esthétique paysagère et les méthodes des sciences sociales.

Jean-François AUGOYARD
Jean-François Augoyard est Directeur de recherche CNRS honoraire. Avec une formation en philosophie, sociologie, urbanisme et musicologie, il enseigne d'abord à l'Éducation Nationale puis entreprend une carrière de chercheur et d'universitaire. Ses travaux principaux portent sur les pratiques quotidiennes (marche, écoute), l'action artistique et l'expérience esthétique en milieu urbain. Fondateur du Centre de Recherche sur l'Espace sonore (1980) il a été co-fondateur, en 1992, du laboratoire "Ambiances architecturales et urbaines" et d'une formation doctorale sur le même thème. Outre quatre ouvrages (dont deux traduits en anglais et italien), il a publié de nombreux chapitres, articles et communications. Professeur ou conférencier invité en Europe, Chine, Amérique du Nord et du Sud, il a enseigné régulièrement dans tous les cycles universitaires à Vincennes, Paris X, Grenoble (Université des SHS et ENSAG).

Noëlle BATT : Plasticité conceptuelle. Des vertus du flou, du vague, du mal délimité ou de l'indéterminé pour l'exercice de la pensée
À partir du théorème de von Fœrster, présenté par Henri Atlan et Benny Shanon et qui énonce la nécessité d'un certain degré d'indétermination pour un bon fonctionnement des systèmes complexes, on argumentera, comme l'ont fait Peirce, Wittgenstein, Ingarden, Marcuse, Iser ou Lofti Zadeh, sur le fait qu'un certain degré d'indétermination conceptuelle peut être bénéfique à l'exercice de la pensée. C'est le cas, par exemple, quand il s'agit de penser l'articulation de systèmes qui semblent à première vue incompatibles. C'est ainsi qu'ont procédé Mireille Delmas-Marty et Jean-François Coste pour traiter de l'articulation des Droits de l'Homme et des différents systèmes juridiques nationaux, ou encore le peintre Francis Bacon lorsqu'il entreprend d'expliquer comment il brouille la logique de la représentation convenue en traçant des marques au hasard, "une sorte de diagramme" dont sortira finalement le tableau ; de même quand le logicien Charles Sanders Peirce conçoit l'idée d'états intermédiaires ou naissants qui forment une continuité entre la détermination et l'indétermination ; sans oublier l'usage fait par Deleuze et Guattari, à différents moments de leur parcours philosophique, du concept de "zone d'indiscernabilité", qu'il s'agisse de penser une "linguistique chromatique" (dans Mille Plateaux) ou la nature de la sensation dans l'œuvre d'art (dans Qu'est-ce que la philosophie ?).

Noëlle Batt est professeur émérite de littérature américaine et de théorie de la littérature à l'université Paris VIII. Elle a dirigé de 1984 à 2013 le Centre de Recherche sur la Littérature et la Cognition, et la revue TLE (Théorie, Littérature, Épistémologie) publiée par les Presses universitaires de Vincennes. Elle a publié de très nombreux articles de théorie et de critique littéraire, particulièrement dans le domaine des rapports transdisciplinaires entre littérature, sciences et philosophie (philosophie deleuzienne en particulier). Elle est intervenue en janvier 2018 dans le colloque : "Quand la forme devient substance. Puissance des gestes, intuition diagrammatique et phénoménologie de l'espace", sur le thème : "La dimension diagrammatique de l'écriture littéraire : un formalisme dynamique inscrit dans la sensorialité du langage".
Publications
"Penser par le diagramme" (dir.), TLE, n°22, 2004.
"Kairos, Mâ, Corn… Le langage artistique ou l'art de la jointure ouverte", La Relation, Paris, Michel Houdiard Éditeur, 2008.
"Composition, composition…", dans "Jeux et Enjeux du texte", TRANSATLANTICA, mai 2014 [en ligne].

Céline BONICCO-DONATO
Céline Bonicco-Donato, philosophe, est maître-assistante en sciences humaines et sociales à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble. Chercheuse au CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architectures, Urbanités). Elle développe une approche politique des ambiances urbaines dans les sociétés néo-libérales afin de cerner l'une des modalités contemporaines de l'esthétisation du politique.
Dernier ouvrage
Une archéologie de l'interaction, Paris, Vrin, 2016.

François J. BONNET : Monde-Signe et Monde-Gouffre
L'enjeu de cette communication est d'exposer les deux pôles antagonistes de l'expérience sensible du monde. L'un de ces pôles rayonne autour de la détermination pan-signifiante du monde en tant que monde construit, le second, au contraire, signale le sensible tapi sous le seuil : l'infra-sensible. De l'un à l'autre de ces pôles, se déploient, en dégradé, tous les devenirs de l'expérience sensible, de l'expérience panique à la perception surcodée anesthésiée.

François J. Bonnet, né en 1981, membre du Groupe de Recherches Musicales de l'Institut National de l'Audiovisuel (Ina GRM) depuis 2007, en est le responsable depuis 2018. Théoricien, il est également compositeur, plasticien et producteur sur France Musique de l'émission L'Expérimentale.
Publications
Les mots et les sons. Un archipel sonore, L'éclat, 2012.
L'infra-monde, MF édition, 2015.
Après la mort, L'éclat, 2017.

Anne BOSSÉ
Anne Bossé, architecte et géographe, enseignante à l'école nationale supérieure d'architecture de Paris Malaquais et membre de l'UMR CNRS AAU équipe CRENAU. Ses travaux interrogent les espaces du public, entre dimension matérielle et dimension politique, et les hybridations architecturales et urbaines liées aux processus migratoires.
cv.archives-ouvertes.fr/anne-bosse

Marc BREVIGLIERI : Soulèvement
Qu'est-ce que le trait naissant d'un souffle insurrectionnel ? Comment un regard posé sur la respiration, comme relation primordiale au monde, vient-il mettre en perspective un espace infra et proto-politique de partage, autant qu'une amplitude existentielle ? Comment les composantes climatiques de l'espace commun (turbulences, pulsations cosmiques, ennuagements atmosphériques, fusion symbiotique, etc.), qui parfois plongent leurs racines dans le sol de la colère, éveillent-elles des champs affectifs venant menacer l'ordre établi et prédisposent-elles à des gestes ascensionnels et extensionnels, des soulèvements ? Mais notre communication ira plus loin : quel rapport l'espace urbain occidental contemporain entretient-il avec le soulèvement ? Et poser une telle question permettra sans doute d'interroger certaines propriétés phénoménologiques et certaines dimensions épistémiques sur lesquelles repose cet espace, de méditer ses perspectives normalisatrices sur la qualité de vie, ses manières d'évaluer cette dernière, son axe de fondation ethnocentrique, son modèle politique et moral implicite, ses limites d'inclusivité et pour finir son univers existentiel spécifique.

Marc Breviglieri est professeur à la Haute École Spécialisée de Suisse Occidentale (HETS-Genève) et chercheur au Centre de recherche Ambiances Architectures Urbanités (CNRS). Ses thèmes de recherche touchent aux configurations et aux aménagements variés de l'habitation humaine, aux apprentissages de la vie commune, aux dimensions liant corps et espace et enfin aux questions d'ordre affectif, éthique et politique posées par l'expérience du soin. Il développe une sociologie d'inspiration phénoménologique nourrie par l'ouverture de perspectives méthodologiques liées à l'image (photographie-vidéo).
ies-geneve.academia.edu/MarcBreviglieri

Laurent DEVISME
Laurent Devisme est professeur des ENSA dans le champ SHS. Il enseigne plus particulièrement les études urbaines à l'ENSA Nantes. Chercheur rattaché à l'UMR AAU, ses travaux de recherche relèvent principalement d'une approche ethnographique de la fabrique urbaine. Il est également impliqué dans la discussion des théories urbaines contemporaines et dans les approches visant à cerner l'expressivité urbaine.
Publications récentes
L'architecture et l'urbanisme au miroir des formations (codirection avec Claude Cohen), Cahiers RAMAU, n°9, Éditions de la Villette, 2018.
"Ressorts et ressources d'une sociologie de l'expérience urbaine", in Sociologie et Sociétés, Vol. XLV, n°2, Automne 2013, pp 21-44.

Emmanuel DOUTRIAUX : Affordances de l'ambiance / Architectures du commun
Dans le prolongement d'un travail de recherche sur les Conditions d'air des architectures du contemporain (doctorat 2015), seront examinées les libéralités (potentielles) des ambiances, en ce que, à l'abri de couverts d'une certaine dimension, elles peuvent mettre en jeu l'exercice de communs d'une certaine nature.

Emmanuel Doutriaux est architecte, enseignant (Ensa Paris Val de Seine) et chercheur (Evcau). Son domaine de recherche est celui des ambiances, comprises comme situations construites (atmosphères et enveloppes) potentialisant des perceptions sensibles, des relations et des actions interindividuelles qui relèvent du commun. Auteur d'environnements domestiques et collectifs (foyers de travailleurs, refuges pour sans-abris), il participe aussi à la conception d'expositions d'art et d'architecture, et à des œuvres scéniques. Contributeur à des ouvrages de théorie et de critique, à des revues spécialisées et à des médias généralistes, il co-anime le groupe informel de recherche "Polygonale", comprenant architectes et artistes, enseignants et chercheurs.

Tonino GRIFFERO : What an atmospheric feeling can do ? Emotional games and critical distance
Atmosphere is an intersubjective and holistic feeling, more a spatial state of the world than a very private psychic state. For this reason, it is mine not because I possess it, but because it concerns me and often deeply involves me. Since it precedes analysis and influences the situation of the perceiver, resisting in some cases (the prototypical ones) any conscious attempt at projective adaptation or epistemic correction, it gives life to involuntary felt-bodily processes and, also as an outstanding example of quasi-thing, authoritatively modulates the predimensional space whose presence we feel. However, we need to better understand what kind of power and specific authority an atmosphere has, what its role in a pathic aesthetics, whether every practice generating atmospheres should be regarded as a manipulative one, and finally whether acquiring a better atmospheric "competence" (both as producers and perceivers) we can really learn how not to be grossly manipulated by these vague but very strong feelings.

Tonino Griffero is Full Professor of Aesthetics at the University of Rome "Tor Vergata" and editor, among others, of the book series "Atmospheric Spaces" (Mimesis International, Milan).
Full bibliography
2021.dottoratostoriaefilosofia.lettere.uniroma2.it/tonino-griffero/
atmosphericspaces.files.wordpress.com/2017/11/a-i-word.pdf
Most recent books
Atmospheres. Aesthetics of Emotional Spaces, Routledge, London-New York, 2014.
Il pensiero dei sensi. Atmosfere ed estetica patica, Guerini, Milan, 2016.
Quasi-Things. The Paradigm of Atmospheres, Suny, Albany, N.Y. 2017.

Pierre-Damien HUYGHE : Des formes secondes
Je discuterai l'idée que les ambiances sont nécessairement des résultats. Quelques-unes au moins relèvent d'architectures inachevées, voire, en un certain sens, manquantes. Et peuvent être, en conséquence, formées en second temps par des opérations qui ne sont pas architecturales au sens le plus habituel du terme, mais qui le sont cependant si l'on veut bien admettre que : 1) tout ce qui peut être fait en second n'est pas inévitablement secondaire, 2) le donner forme a pu être au moins un temps défini, par Sullivan par exemple, comme "l'expression" même de l'architecture ou comme l'affaire d'une architecture qui ne serait pas seulement "élémentaire". Parmi ces opérations, paradoxalement peut-être, il y a le cinéma, une façon en tout cas de passer à une sorte d'espace-temps supplémentaire. J'en donnerai quelques exemples. Parmi les enjeux de toute cette réflexion : une critique de la notion de non-lieu.

Pierre-Damien Huyghe, professeur à l'université Paris 1-Panthéon-Sorbonne, est l'auteur d'une quinzaine d'ouvrages, tous de philosophie de l'art et des techniques.
pierredamienhuyghe.fr
Publications
Modernes sans modernité, Lignes, 2009.
Le cinéma avant après, De l'incidence, 2012.
Art et industrie, Ré-édition Circé, 2015.
À quoi tient le design, De l'incidence, 2014.
Contre-temps, B 42, 2017.

Rainer KAZIG
Rainer Kazig, géographie humaine de formation, est chargé de recherche CNRS au sein de l'UMR Ambiances Architectures Urbanités, équipe CRESSON à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble. Ses recherches portent actuellement sur des ambiances et l'esthétique ordinaire.
Publication
Kazig, R. ; Masson, D. ; Thomas, R. (2017), "Atmospheres and Mobility. An Introduction", in Mobile Culture Studies. The Journal, 2017 (3), pp. 7-20.

Olivier LABUSSIÈRE : Ambiance, an introductory experience to our ordinary environment
This intervention considers the notion of urban ambience and attempts to characterise its generative dimension separately from the growing social demand for conditioned atmospheres (supermarkets, subways, etc.). Following the work of Gilles Deleuze, this paper revises the idea of perception as an activity of knowledge and focuses on it as an aesthetic experience. This is a process that utilises the notions of measure and rhythm. Ordinary perception would consist of a process of adjusting our knowledge to our lived environment, a case in which the measure is major and the rhythm is minor — or a classic process of recognition. Perception is also a fruitful field for aesthetic experiences, lived in daily situations in which the rhythm would become major and the measure minor. Our assumption is that Venice’s ambiences, as Proust describes them, can be traced to this outburst of the synthesis of perception : Measure fails to build an object, rhythm falls into a proliferative perceptual experience, and imagination no longer serves the purpose of comprehension but instead produces a very expressive space-time without any concept. The chapter builds on these notions (measure, rhythm) to discuss the idea of ambience as an introductory experience to our ordinary environment.

Olivier Labussière is a researcher in Geography at the French National Scientific Research Centre (CNRS). He is a member of the Pacte Social Sciences Research Centre (Grenoble, France) where he leads the interdisciplinary "Environments" research group. His research interests lie in the area of political ecology and geography of energy resources. He is developing an experimental workshop on visual media and documentary film.
Publication
Energy Transition. A sociotechnical inquiry, Palgrave, 2018 (in coll. with A. Nadaï).

Pierre LAFON : De l'expérience de la vacuité et de l'éphémère dans la pratique de l'architecture
Les pratiques du paysage de l'architecture et dans une certaine mesure certaines tendances de l'art contemporain, font aujourd'hui largement appel à des approches dites conceptuelles. Ces approches fondées sur une surévaluation de notre pensée discursive sollicitent notamment notre cerveau gauche qui génère l'illusion d'une séparation de notre être avec le monde où nous vivons. Dans ce contexte comment pouvons nous envisager une pratique dans la prise en compte de l'inséparabilité de l'être et de l'univers et la prise en compte de notions fondamentales comme la vacuité, l'interdépendance et l'impermanence des phénomènes ? Nous examinerons alors différentes modalités pour une approche expérimentale, factuelles et holistique de notre pratique, au delà de la pensée et dans l'activation d'un rapport au présent dans un monde vécu comme impermanence. Avec l'expérience que toute observation modifie ce qui est observé, nous pouvons nous interroger sur des notions d'inséparabilité et de synchronicité entre sujet et objet. L'architecture sera ici considérée comme l'une des formes les plus évoluée de l'art de la vacuité, susceptible de générer une "esthétique vivante" de l'éphémère.

Après une formation à l'École des beaux arts de Paris (Peinture et sculpture), Pierre Lafon est diplômé architecte DPLG à l'Unité pédagogique d'architecture n°6 en 1977. Professeur à l'école d'art de Rennes entre 1987 et 2017 il enseigne la scénographie et l'environnement dans une approche phénoménologique et holistique. L'agence d'architecture "Les ateliers Pierre Lafon" (anciennement sarl LDLV), se consacre à des recherches et des actions dans les domaines trans-disciplinaire du paysage, des infrastructures et de l'architecture. Entre 2009 et 2016 l'agence développe un important programme de transformation d'un site industriel en centre ville à Ningbo, province de Zeeiang en Chine. Différentes recherches et actions environnementales se manifestent par la mise en place d'installations in-situ et de prototypes (par exemple : installations "l'eau dans l'eau" en 2001 (mission art et infrastructure, CDDEC), installation "Relâche" en 2009 (théâtre le Quai à Angers). Il s'agit notamment aujourd'hui dans le contexte du programme "Floating Islands in Floating Landscape" de développer des centres d'essais pour l'épuration des eaux terrestres de l'échelle lacustre à un questionnement plus global des bassins versant.

Damien MASSON
Damien Masson est maître de conférences en urbanisme à l'université de Cergy-Pontoise. Ses champs d'enseignement concernent principalement les sciences sociales, les approches méthodologiques, la cartographie et les SIG qualitatifs. Son activité de recherche concerne d'une part, l'expérience vécue des trajets ordinaires en transports collectifs. D'autre part, ses travaux portent sur la question des effets des dispositifs (matériels, humains, discursifs) de surveillance et de sécurités sur l'expérience ordinaire des espaces urbains. Ils visent à fonder une critique sensible de la sécurisation ordinaire et extraordinaire des espaces urbains, et pour cela articulent différentes théories des ambiances et atmosphères (francophone, anglophone et germanophone) à la géographie des affects, et à la géographie culturelle. L'enjeu théorique sous jacent tient en l'articulation de la critique sociale, culturelle et politique des espaces urbains à une critique sensible. Ce faisant, l'enjeu pratique associé vise en la démonstration du potentiel politique de la notion d'ambiance.

Derek McCORMACK : Atmospheres and the elemental
This intervention will consider the relation between ideas of atmosphere and different versions of the elemental. In the first version, the elements refer to the meteorological worlds inhabited by different forms of life. In a second version, they refer to the physico-chemical arrangement of matter. Finally, in a third version, the elemental refers to a series of ontological propositions about what constitutes the world. The intervention will consider how these different version of the elemental are implicated in efforts to think with atmosphere in both affective and meteorological terms.

Derek McCormack is Professor of Cultural Geography at the University of Oxford. He has written about non-representational theories, atmospheres and, more recently, the elemental.
Publications
Refrains For Moving Bodies : Experience and Experiment in Affective Spaces, Duke University Press, 2013.
Atmospheric Things : On the Allure of Elemental Envelopment, Duke University Press, 2018.

Thierry MOUILLÉ : L'ambiant rotatif, en oui bémol et non dièse
Ça tourne : "On voulut graver les désirs humains dans l'esprit des dieux au moyen du rythme, après que l'on eut remarqué qu'un homme retient mieux dans sa mémoire un vers qu'une phrase en prose ; par le tic-tac rythmique on pensait aussi se faire entendre à de plus grandes distances ; la prière rythmique semblait s'approcher davantage de l'oreille des dieux." (Friedrich Nietzsche, La naissance de la tragédie).
À l'invitation de la session "ambiances de pensée", je me suis demandé comment articuler cette proposition à une courte histoire de la rotation, de la boule à facettes à Copernic, du 33 tours aux 72000 tours/minute d'un disque dur. C'est donc un exposé de rotations dont il s'agira, ni conférence, ni performance, juste une maquette d'exposition, en circonférence, l'ambiance du travail en train de se faire.

Thierry Mouillé est artiste et professeur à l'école supérieure d'art de TALM-Tours, il dirige le laboratoire des intuitions, unité de recherche en art (laboratoiredesintuitions.esaaa.fr). Il a notamment publié la série des Intuitive notebooks (Éditions de l'ESAAA, 2014-2016). Il développe depuis 1988 une œuvre pluridimensionnelle sous le terme générique de "La Fondation Mouvante".

Pauline NADRIGNY : Écouter, penser : Thoreau, Ives et l'ambiance de la forêt
"Where do we find ourselves ?" : où nous trouvons-nous ? — la question est posée par Emerson dans son essai "Experience". Gageons qu'une réponse très concrète peut lui être donnée à cette époque : dans les bois et leur ambiance sonore. Lieu concret d'expérience, la forêt, de Concord au Maine, est le lieu où s'enracine une pensée, celle de Thoreau, et une musique, celle de Charles Ives. Lieu non pas abstrait (comme la forêt labyrinthique de Descartes), mais ambiance sonore concrète que la philosophie et la musique américaines cherchent à figurer, en y agissant et en se mettant à l'écoute : "où nous nous trouvons penser".

Pauline Nadrigny est philosophe, spécialisée en esthétique et maître de conférences à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (PhiCo/CEPA), membre du LIA CRNR (Centre de recherche franco-allemand sur les nouveaux réalismes). Ses recherches portent sur les musiques contemporaines et expérimentales, abordées sous divers aspects : relation entre pensée musicale et philosophie, mutations de l'écoute et de ses pratiques, paysage sonore et écologie acoustique.
Publications
Musique et Philosophie au XXe siècle : Entendre et faire entendre, Classiques Garnier, Coll. "Philosophie contemporaine", 2015.
Avec Catherine Guesde, The Most Beautiful Ugly Sound in the World : à l'écoute de la noise, Musica falsa, Coll. "Répercussions", 2018.

Jean-Pierre PÉNEAU
Jean-Pierre Péneau est architecte, docteur en histoire des sciences et des techniques, professeur honoraire des écoles d'architecture. Il est actuellement professeur-visiteur à l'école d'architecture de l'université de Carthage et responsable d'une équipe de recherche sur les ambiances. Il a mis au jour — en collaboration avec ses collègues du CERMA à Nantes, puis — à partir de 1992 en association avec les chercheurs du CRESSON de Grenoble — les premiers éléments d'une théorie des ambiances architecturales et urbaines, ainsi que les instruments opératoires, assurant le lien entre ces avancées théoriques et les activités de conception du projet. Il a en particulier exploré les modalités de la référenciation en matière d'ambiances.

Nia PERIVOLAROPOULOU : Des ambiances urbaines au cinéma
Des études récentes consacrées aux atmosphères filmiques abordent différents aspects du phénomène, de l'ambiance d'une salle du cinéma à l'atmosphère immanente d'un film. L'analyse des procédés cinématographiques à l'œuvre dans la production d'une atmosphère particulière y occupe une place centrale. Toutefois, l'ambiance des paysages, notamment des paysages urbains, au cinéma n'est pas que l'effet des procédés cinématographiques utilisés. J'aborderai la question du rapport entre l'ambiance d'une ville et celle émanant de son image filmique en repartant de l'œuvre de Siegfried Kracauer, où la grande ville et le cinéma sont pensés comme des éléments constitutifs d'une sensibilité moderne.

Nia Perivolaropoulou, a enseigné à l'université de Essen (Allemagne), où elle a été responsable des études cinématographiques dans le département de littérature. Ses recherches portent sur la théorie et l'esthétique du cinéma et ses rapports avec l'histoire et la mémoire. Spécialiste de Siegfried Kracauer, elle a notamment édité Les Employés. Aperçus de l'Allemagne nouvelle (1929) (2012) et avec Ph. Despoix L'Histoire. Des avant-dernières choses (2006), Théorie du film. La rédemption de la réalité matérielle (2010). Dernière publication : L'atelier cinématographique de Siegfried Kracauer (De l'incidence éditeur, 2018).

Sophie PROVOST
Traductrice de formation spécialisée en traductologie, Sophie Provost a suivi une formation trilingue à la Faculté de Traduction et d'Interprétation de l'université de Genève, Suisse. Après avoir validé sa maîtrise théorique en 2016, elle a pu mettre à profit ses compétences linguistiques au service du Parlement européen, ainsi que de nombreuses organisations internationales dans le cadre de missions bénévoles. Elle est aujourd'hui traductrice pour le Laboratoire Ambiances Architectures Urbanités (UMR CNRS 1963), où elle travaille en français et en anglais.

Professional translator specialised in translation studies, Sophie Provost graduated from the Faculty of Translation and Interpreting, University of Geneva, Switzerland. After defending her Master’s thesis in 2016, she applied her language skills to her work at the European Parliament, as well as for many international organisations, for whom she worked as a volunteer. She is now translator for the Laboratoire Ambiances Architectures Urbanités (UMR CNRS 1963), where she works both in French and in English.

Bruno QUEYSANNE
Bruno Queysanne est né à Casablanca en 1941. Après des études de philosophie à la Sorbonne au début des années 60, il devient, sur la recommandation de Louis Althusser, collaborateur de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, de Janvier 1965 à Juillet 1967. En septembre 1967, il est nommé assistant de sociologie au Groupe C de la section architecture de l'ENS Beaux-Arts de Paris. Il participe activement au mouvement de Mai 68 et à la refondation de l'enseignement de l'architecture qui s'en suivra. En septembre 1970, il rejoint l'École d'Architecture de Grenoble, où il enseignera philosophie et histoire de l'architecture jusqu'à sa retraite en 2006. Depuis, il est enseignant invité à Casablanca, Marrakech ou Bogota. Il étudie l'architecture de la première Renaissance italienne, celle du Baroque en Bohême et au Piémont, ou celle des débuts de la Modernité de Loos et de Le Corbusier. Il s'intéresse aux villes "nouvelles", comme Pienza, Ferrara, San Francisco, Los Angeles, Casablanca ou Chandigarh. Outre les œuvres bâties, il étudie les textes théoriques, dans leurs diverses traductions, de Vitruve, Alberti, Vittone ou Semper. Il rencontre les "ambiances" dans sa traduction des "Prolégomènes à une psychologie de l'architecture" d'Heinrich Wölfflin, avec la notion de stimmung. Dans son étude du Mémorial Walter Benjamin de Dani Karavan à Portbou, il recourt aux notions d'unheimlichkeit et d'inconfort existentiel qui lui semblent qualifier cette œuvre remarquable.

Bernard RENOUX
Bernard Renoux est photographe. En 1983, il entre au service photographique de l'Inventaire Général du Patrimoine des Pays de la Loire à la Direction des Affaires Culturelles. Simultanément, il devient le photographe de la Revue 303 arts, recherches, créations dès sa création en 1984 jusqu'en 2014 où il entre au comité de rédaction. Il devient indépendant en 2000 et prend le statut d'artiste auteur, répond à des commandes des musées, FRAC, architectes, institutions culturelles et collectivités, qui se traduisent par de nombreuses publications de livres, catalogues et des expositions. Dans son travail, sa préférence va à l'exploration des rapports qu'entretient l'homme à son environnement et à sa propre image.

Friedlind RIEDEL : Moods and Modes. Thinking Atmosphere through Music
"Atmosphere" refers to a feeling, mood or Stimmung that fundamentally exceeds an individual person and instead pertains to the overall situation in which individuals find themselves. Atmosphere thus challenges a notion of feelings as merely the private inner states of a cognisant subject and instead affords an understanding of them as collective, extended, and situational. In this sense atmosphere can be considered a mereological concept : it prompts us to ask not only about the relational web of bodies with each other, but about the ways in which each body is part of and related to an overarching situational whole, one seemingly homogeneous rhythm or hue. Atmospheres can thus be described as a mode in which a group of individual bodies comes to exist as a felt-collective. This paper will investigate the structural affinity between musical modes and atmospheric moods to further explore the ways in which atmosphere operates as a medium that brings something into appearance which can neither simply be deduced from or reduced to the present bodies nor pinpointed to a source. Drawing on examples from religious music making in Myanmar I will explore how music as atmosphere can render dawning futures or repressed memories abundantly present, but also bring persons and things into appearance that are otherwise absent or ulterior.

Friedlind Riedel is a doctoral fellow at the Competence Centre for Media-Anthropology at Bauhaus University Weimar. As a musicologist and anthropologist, her interests lie with cultural histories of listening in Southeast Asia and with the peculiar relationship between music and mood. She has conducted extensive research on rituals in Myanmar and is currently working on a book that enquires into music and listening at the threshold of the human.

Alexander RÖMER : "Faire ensemble" (ou bien le passage de l'action éphémère au temps long du projet)
Nos projets sont des moments d'articulation entre deux temps : on les a pensés dans le long terme mais l'intervention, en soi, reste temporaire. Elle est conçue comme la "modalité de passage" d'un projet dans le long terme. Mais pourquoi mettre une telle énergie pour des productions temporaires, voire même éphémères ? La réponse est immédiate : le projet souvent n'est pas réalisable si on l'envisage sur le mode de la permanence — non seulement d'un point de vue administratif, mais aussi et surtout du point de vue de la dynamique du projet. Une action temporaire permet d'initier "une énergie du moment", quelque chose qui devient autonome et qui se prolonge dans le temps long… On peut passer un été tous ensemble sur un site, on invente une narration, on "fait ensemble", une communauté se crée… Nous avons ainsi réussi plusieurs "projets", qui ne se sont jamais arrêtés, mais d'autres ont échoué ! L'exposé commencera par le récit de quelques faillites (pour révéler le risque à prendre), pour ensuite parler des réussites, avec deux témoignages : l'un dans lequel les matériaux sont réutilisés à maintes reprises, l'autre dans lequel le lieu a repris vie. Dans les deux cas, on construit une situation, que l'on partage avec d'autres, les autres se l'approprient et ensuite, ils le poursuivent ! Littéralement le projet passe.

Alexander Römer est architecte et charpentier. Initiateur du réseau construclab (constructlab.net) et membre du ex-collectif EXYZT, deux laboratoires de recherche-action, d'expérimentations constructives et de création interdisciplinaire, il développe dans une dynamique collective une pratique du design et de l'architecture temporaire et participative. Ses projets lient conception et fabrication. Ils initient des collaborations avec les communautés locales et mettent en valeur les savoir-faire collectifs autant qu'individuels. Il envisage l'architecture et le design comme des médiums d'intervention sociale capables de mettre en place des espaces de dynamiques d'échanges.

Gretchen SCHILLER
Gretchen Schiller est chorégraphe et professeur à l'université de Grenoble Alpes. Elle mène ses recherches au sein de l'UMR LITT&ARTS 5316. Elle est responsable du Parcours Arts de la scène du Master Création Artistique de l'université Grenoble Alpes, directrice de Arts in the Alps ainsi que de la SFRCréation et lauréat du projet IDEX Performance lab depuis 2018.

Philippe SIMAY : La ville-pharmakon : vers une thérapeutique des ambiances urbaines
En s'interrogeant sur la dimension thérapeutique et capacitaire des ambiances urbaines, à partir des analyses de Walter Benjamin et Siegfried Kracauer sur le concept de "distraction" et les formes empruntées par la culture de masse, il s'agira de poser les bases d'une conception pharmacologique de la ville, conçue à la fois comme poison et comme remède. On questionnera la façon dont les ambiances permettent aux citadins de s'acclimater à un environnement complexe, parfois perçu comme chaotique ou traumatique, mais aussi de développer de nouvelles compétences en mobilisant des ressources générées par la métropole elle-même.

Philippe Simay est maître-assistant à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Paris-Belleville et co-directeur de la revue Métropolitiques. Il a coécrit Moholy-Nagy et le pont transbordeur de Marseille (Ophrys, 2013) et a dirigé Capitales de la modernité. Walter Benjamin et la ville (Éditions de L'Éclat), Le choc des métropoles : Simmel, Kracauer, Benjamin (avec Stéphane Füzesséry, Éditions de l'Éclat, 2008) et Droit de cité (Éd. PUF/Ciph, 2009).

Paul SIMPSON : The Ambiguity of Affect
What do you mean by affect ? Considering this question from within the context of recent research in Anglophone human geography on affect there is not necessary a single, agreed upon, stable definition of affect. While in broad terms affect is understood to relate to the body, sensation, and relationality, a variety of traditions co-exist, compete, compare, and critique in the aftermath of the "affective turn". In this presentation, I explore a range of these different understandings of affect and draw out a series of tensions that exist within them. This includes reflection on the relationships between affect, feeling, and emotion ; affect's autonomy or subjective tethering ; and, affect's social and biological organizations.

Paul Simpson is an Associate Professor of Human Geography in the School of Geography, Earth and Environmental Sciences, at the University of Plymouth. His research focuses on the social and cultural geographies of every day, artistic, and mobile practices and explores the complex situatedness of such practices in the environments in which they take place.

Ola SÖDERSTRÖM
Ola Söderström est professeur de géographie sociale et culturelle à l'université de Neuchâtel, Suisse. Ses travaux portent sur la culturelle matérielle des villes, le visuel en urbanisme et, plus récemment, sur le développement urbain dans les villes des Suds et les relations entre vie urbaine et psychose. Les dimensions affectives et émotionnelles de l'urbain saisies par les concepts d'atmosphère et d'ambiance sont particulièrement importantes pour son travail sur le rapport entre urbanité et schizophrénie.

Jean STERN : L'instant sur place
Dans la vocation de l'art à faire urbanité, il y a revendication à l'interagir avec le territoire. Cette artialisation (Alain Roger) conduit-elle au risque de dénaturation dans la projection du même, soit un labyrinthe, une entropie ; ou bien promet-elle un ambitieux partage de paysages ? En s'interrogeant sur quelques interventions in situ inscrites dans la cité ou le paysage, il s'agira d'y repérer les outils de perception que constituent la désorientation, le franchissement, le retournement, le décalage, la mise en déséquilibre du visiteur (un passeur entre urbain et terrain, suivant le nom programmatique de la revue fondée par Sébastien Marot) comme moyens sensibles qui engagent une lecture du site et/ou de l'œuvre, et invitent à construire un récit à plusieurs voix. À ce récit, le visiteur assignera une composante sensorielle (haptique, auditive) ou cognitive (historique / géographique / sociale) sur le mode de la distraction, en passant, d'un instant à l'autre.

Artiste et professeur à la HEAD - Genève jusqu'en 2013 où il a dirigé ALPes, programme postgrade orienté sur l'art dans la ville, et où il a animé le projet de recherche Gestes nomades (IRAD, HES-So). Ces deux activités sont documentées dans l'ouvrage sans le socle (2015, HEAD - Genève / art&fiction, Lausanne) codirigé avec Ivonne Manfrini. Comme artiste, Jean Stern développe une pratique de l'in situ qui aborde la question de la composante narrative de l'œuvre, dans un partage de récits et de parcours avec le public, et vise à une transformation discrète de l'espace qui l'accueille, qu'il s'agisse d'un espace public (Bains des Pâquis, Genève, 2015 ; EPFL, Lausanne, 2011-14) ou d'un espace paysager (Parc du Haut-Jura, 2012).

Didier TALLAGRAND
Didier Tallagrand est artiste. Il enseigne à l'École Supérieure d'Art Annecy Alpes depuis 2002. Il a fondé le master Design & espace en 2008 qu'il coordonne depuis. Il est président du centre d'art contemporain Angle à Saint-Paul-Trois-Châteaux. Ses travaux portent sur la question de l'art dans l'espace public où il déploie des actions et des formes en lien avec le paysage et les acteurs des territoires. Il interroge les statuts de l'image par le récit. Dernière exposition : Les dormantes (Maison Victor Hugo, Paris, 2015). Ses recherches actuelles portent sur la question des avant-pays dans les bassins versants de trois fleuves méditerranéens.

Gonçalo M. TAVARES
Gonçalo M. Tavares est né en 1970. Il est professeur à Lisbonne. Considéré comme l'un des plus grands noms de la littérature portugaise contemporaine, il reçoit les éloges d'auteurs célèbres comme Eduardo Lourenço, José Saramago, Enrique Vila-Matas, ou Bernardo Carvalho. Ses œuvres sont traduites dans une cinquantaine de pays.
Publications en français
Une jeune fille perdue dans le siècle à la recherche de son père, Éditions Viviane Hamy, 2018.
Matteo a perdu son emploi, Éditions Viviane Hamy, 2016.
Un homme : Klaus Klump & La Machine de Joseph Walser, Éditions Viviane Hamy, 2014.
Un voyage en Inde, Éditions Viviane Hamy, 2012.
Apprendre à prier à l'ère de la technique, Éditions Viviane Hamy, 2010.
Jérusalem, Éditions Viviane Hamy, 2008.
La série d'ouvrages Les habitants du quartier "O Bairro", Éditions Viviane Hamy, 2002-2010.

Jean-Paul THIBAUD
Jean-Paul Thibaud, sociologue, est directeur de recherche au CNRS. Il est chercheur au CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architectures, Urbanités). Son domaine de recherche porte sur la théorie des ambiances urbaines, la perception ordinaire en milieu urbain, la culture et l'ethnographie sensible des espaces publics, l'anthropologie du sonore, les méthodes d'investigation in situ. En 2008 Jean-Paul Thibaud a fondé le Réseau International Ambiances.
Publication récente
En quête d'ambiances. Éprouver la ville en passant, Genève, MétisPresses, 2015.

Nicolas TIXIER
Nicolas Tixier est architecte. Professeur à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble, il enseigne aussi à l'École Supérieure d'Art Annecy Alpes et à l'Institut d'Urbanisme et de Géographie Alpine de Grenoble. Chercheur au CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architectures, Urbanités), il mène parallèlement une activité de projet au sein du collectif BazarUrbain. Depuis 2018 il est directeur du Cresson et directeur adjoint de l'UMR AAU. Ses travaux actuels portent sur le transect urbain comme pratique de terrain, technique de représentation et posture de projet.
Publications récentes
Ambiances, tomorrow (en co-dir. avec Nicolas Rémy), Actes du 3e congrès international sur les ambiances, Volos, 2016.
Traversées urbaines, villes et films en regard, Genève, MétisPresses, 2015.

Izabela WIECZOREK : Atmospheres in formation : affective thresholds, immersive fields and active boundaries
Through analysis of the production and experience of spaces, and their theoretical contextualisation, the aim is to explore how the concept of atmosphere has been formed in an architectural trajectory inscribed within the history of the interior. Notions of "comfort", "mood", "theatricality", and "character" are only some of the atmospheric cognates that define this trajectory, revealing atmosphere's somewhat confusing yet inspiring plurality. A plurality that renders space, from which atmosphere emerges, as a relational and immersive field in which both body and environment are understood as integrative and generative forces extended in a fluid spatial substance of affective power. The paper argues that considering space as such an affective field carries a new material logic. It calls for approaching matter as a performative and generative becoming that defines sensory thresholds and active boundaries, conjuring up a notion of involvement, stirring imagination, beckoning our sensorium and inciting responsive patterns of behaviour.

Dr Izabela Wieczorek is an architect, researcher and educator. She has taught and lectured widely and is currently a Lecturer in Architecture at the University of Reading. Her research is situated at the nexus of academia and practice and explores relational, sensorial, performative, affective and ecological aspects of Architecture. From 2003 to 2017, Izabela was a co-director of Gálvez + Wieczorek arquitectura whose work has been awarded prizes as well as published and exhibited internationally. In 2017 she set up Atmospheric Architecture Agency — a research-based experimental practice that focuses on the atmospheric dimension of architecture and its implications for critical and collaborative design practices as well architectural alternative pedagogies.

Marc WINZ : Ambiances urbaines and atmospheres in research on the city-psychosis nexus
Ambiances urbaines and atmospheres can be approached from a double perspective in relation to the question of urban mental health ; on the one hand ambiances and atmospheres can be understood as the object of investigation, and on the other as a theoretical and analytical framework. In this presentation I first explore what and why we can learn more about urban ambiances when working with people diagnosed with psychosis. In the second part, I discuss ambiances urbaines and affective atmospheres as fertile concepts for studying how people living with a diagnostic of psychosis experience urban environments, and how the city relates to their mental state.

Marc Winz is a PhD candidate and a teaching assistant at the Institute of Geography of the University of Neuchâtel, Switzerland. Working under the supervision of Ola Söderström, Marc is conducting a doctoral research on the relationship between urban spaces and psychosis. He is interested in the way people diagnosed with schizophrenia experience urban environments, and how the city relates to their mental state.
Publication
Marc Winz, "An atmospheric approach to the city-psychosis nexus. Perspectives for researching embodied urban experiences of people diagnosed with schizophrenia", Ambiances, Varia [online].

David ZERBIB
David Zerbib coordonne l'Unité de Recherche de l'École Supérieure d'Art d'Annecy Alpes (ESAAA). Il est également maître d'enseignement en Philosophie de l'art à la HEAD (Haute École d'Art de Design de Genève). Rattaché au Centre de Philosophie contemporaine de la Sorbonne (PhiCo/CEPA : Culture Esthétique et Philosophie de l'Art) de l'université de Paris 1, ses recherches portent sur les principes d'une théorie esthétique contemporaine, à travers en particulier la question de la performance et du format. Il a co-édité Performance Studies in Motion, International perspectives and practices (Londres, Éditions Bloomsbury, 2014) et a dirigé la publication de In octavo. Des formats de l'art (Presses du réel/ESAAA, 2015).


VIRGULES MATINALES :

Des doctorants travaillant sur les ambiances introduisent chaque matinée par un témoignage de terrain, une expérience de recherche.

Ryma HADBI
Ryma Hadbi, urbaniste, est doctorante à l'École d'Architecture de Grenoble et membre de l'équipe CRESSON (UMR Ambiances, Architectures, Urbanités 1563 – Université Grenoble Alpes). Son travail porte sur l'attachement des habitants dans les cités ouvrières des années 1920-1930 (cités de l'Abbaye, la Capuche et Jean Macé à Grenoble) afin de déterminer ce qui y fait patrimoine et de penser leurs mutations. Ce projet de recherche se définit par l'immersion in situ pour produire le(s) récit(s) de ces lieux. La démarche méthodologique développée permet de récolter les mémoires individuelle et collective, les pratiques, les usages et les ambiances qui caractérisent ces cités.

Gwendoline L'HER
Gwendoline L’Her est doctorante en Études Urbaine à l'ENSA Nantes et à l'École Centrale de Nantes sous la direction de Daniel Siret et Myriam Servières. Membre de l'équipe Crenau de l'UMR Ambiances Architectures Urbanités, son travail porte sur l'émergence des dispositifs de description collective des villes au sein de l'action publique urbaine : métrologies, inventaires, relevés. Elle s'intéresse notamment à l'étude des interactions lors des balades collectives organisées dans le cadre des ateliers.

Juste PECIULYTE
Juste Peciulyte est doctorante en design à l'Académie des Beaux Arts de Vilnius (Lituanie), chercheuse associée à l'ArcInTexETN, programme de recherche artistique (Marie Skłodowska-Curie Research). Entre les disciplines d'architecture, de design d'interaction et design textile. Son travail de "recherche avec design" s'intéresse à la technicité paradoxale de atmospheric staging, en tant que technique de design d'espace. Malgré la forte association de atmospheric staging avec la mise en scène des commodités, cette technique visuelle s'avère également être inhérente à l'exploration et la découverte des nouvelles expressions spatiales. Pour révéler cette dimension performative du atmospheric staging, Juste explore des formats hybrides de workshop — performance. Le but étant de proposer de nouvelles définitions de techniques de modélisation d'espace performatifs dans le champ, dit, des représentations architecturales.

Vanessa STASSI
Vanessa Stassi est architecte-urbaniste, enseignante à l'École Spéciale d'Architecture ainsi que doctorante en urbanisme au sein du laboratoire CRESSON / UMR AAU 1563 CNRS (Ambiances Architectures Urbanités) sous la direction de Jean-Paul Thibaud et en co-direction avec Stéphane Bonzani du laboratoire GERPHAU (Philosophie, Architecture, Urbain). Son doctorat porte sur la part opérationnelle des ambiances (dimensions physiques et perceptions sensibles des usagers) dans le cadre du processus participatif d'aménagement de la Petite Ceinture de Paris (2015-2018).

Maïlys TOUSSAINT
Maïlys Toussaint, urbaniste, est doctorante au laboratoire CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architecture, Urbanité) à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble. Ses recherches s'intéressent aux ambiances de la rénovation urbaine dans le quartier de la Villeneuve de Grenoble, et portent sur les habitudes et la vie quotidienne de ses habitants. Ces recherches l'amènent à se questionner sur les méthodes d'enquête et de restitution à mobiliser, comme la mise en récit d'expériences sensibles et la reconduction photographique de lieux urbains en transformation.
Publication récente
Maïlys Toussaint, "La méthode des itinéraires, entre récits de vie et ambiances urbaines. Saisir et partager des ambiances", Nicolas Rémy & Nicolas Tixier (dir.), Ambiances, tomorrow. Proceedings of 3rd International Congress on Ambiances, Septembre 2016, Volos, Greece, International Network Ambiances, University of Thessaly, vol. 1, pp. 399-404. 2016.

Sarah VAN HOLLEBEKE
Sarah Van Hollebeke est doctorante en sociologie à l'UCLouvain (CriDIS, groupe de recherche Metrolab) et en urbanisme à l'ENSA Grenoble (UMR AAU-CRESSON). Depuis 2014, elle enquête sur les relations entre politiques de rénovation urbaine et sciences sociales à Bruxelles. Elle s'intéresse aux instruments de connaissance, de représentation et de communication mis en place en vue de planifier et projeter le développement de la ville. Elle s'intéresse aussi de manière spécifique aux supports (cartes, statistiques, diaporama, etc.) qui donnent des appuis à des discours sur la coexistence des populations en ville. Elle réalise une ethnographie des rassemblements publics visant à co-produire des connaissances sur l'urbain ou à communiquer un "diagnostic" dans le cadre de projets urbains. Elle est co-auteur, avec Mathieu Berger, d'un article intitulé "Bruxelles sous tensions. Quelques pistes pour une conceptualisation des formes et enjeux de la mixité sociale" (ouvrage collectif publié aux Presses universitaires de Louvain).


MOMENTS SENSIBLES :

De jeunes créateurs rendent compte par de productions artistiques d'un lieu, d'une situation, d'une ambiance.

Diane AUBRUN
Diane Aubrun est diplômée en 2016 d'un DNSEP Design & Espace à l'ESAAA,. Elle vit et travaille à Paris. Elle aime utiliser l'outil caméra pour provoquer la rencontre et documenter des pratiques pouvant se rattacher au champ cinématographique. Elle s'interroge aussi sur sa pratique cinéphile en côtoyant la Cinémathèque et autres ciné-clubs. Elle aime y observer le moment de la projection, comme un moment unique, lié directement à celui du tournage où l'image est créée.

Léo BAUDY : Une manière de filmer
Installée dans les combles du château, la caméra offre une perspective axonométrique rêvée sur une ville de Haute-Savoie. À hauteur du pavé, elle s'abandonne ensuite à la mise en scène réglée d'ouvriers des travaux publics d'une ville au Brésil. Sans rentrer dans l'action, elle bénéficie d'une place de choix pour témoigner d'un braquage raté quelques minutes plus tôt dans une ville nord américaine. Ailleurs, la caméra distingue une rotation sur le paysage avoisinant et marque plusieurs temps longs pendant le panoramique, comme pour nous accompagner dans la découverte du territoire.
Notre attention portée aux choses simples — qui occupent l'espace du cadre et l'espace sonore — construit comme un paysage sensible. Les événements que l'on choisit de retenir et/ou ceux qui nous arrivent comme des accidents, associés à d'autres, s'articulent ensemble, s'harmonisent, se repoussent.
Il y a là une existence.

Léo Baudy vit et travaille à Clermont-Ferrand. Sa pratique du terrain se pense à la fois comme territoire de recherches et décor de fictions. Les gestes sont avant tout cinématographiques. Peut-être que c'est l'exécution qui compte. Le souci de fabriquer du récit par l'agencement de postures, le plaisir de l'agencement, et les poésies traversées. Les situations rencontrées sont l'objet de questionnements autour de la notion des ambiances et de la matérialité de l'événement. Ou comment approcher un terrain et décrire les phénomènes observés ?

Dorian DEGOUTTE : Projection de vidéos
Cette intervention prendra la forme d'une projection de films. Dorian Degoutte montrera plusieurs vidéos dont sa plus récente "Photo de Famille" et expliquera sa démarche de travail. Ce dernier film, tourné à Annecy avant de déménager en région centre, raconte la mise en scène d'une photo de groupe avec les habitants de son immeuble. Il s'inscrit dans une logique de travail "in situe" qui s'adapte au contexte et aux contraintes de création (économie, acteurs-habitants, matériel, etc.) et s'intéresse à la place de l'art dans notre quotidien.
Liées aux mêmes problématiques, les autres vidéos projetées ont été réalisées lors de voyages ou résidences d'artistes, dans la ville de Tétouan au Maroc, sur une plage au Sénégal, où encore dans une station de sports d'hiver en Haute-Savoie.
Photo de famille (titre provisoire, montage de la vidéo en cours)
Vidéo HD - 4:3 - 15' - Annecy - 2017/2018
Le Grand Vide
Vidéo HD - 16:9 - 17' - Centre d'Art de Flaine - 2016
Crêpas!
Vidéo HD - 16:9 - 6' - Tétouan Maroc - 2013
Le monument de la plage (titre provisoire, montage de la vidéo en cours)
Vidéo HD - 16:9 - 9' - Cap Skirring Sénégal - 2017

Dorian Degoutte est un artiste plasticien et réalisateur. Sa pratique de la vidéo, développée à l'École d'Art d'Annecy dans le département "design & espace", cherche à s'adapter aux différents contextes d'interventions (résidences d'artiste en milieu rural ou urbain, espaces publics ou privés, ou encore lors d'ateliers de création à destination des scolaires). Il travaille régulièrement avec l'Association Villeneuve la Série à Grenoble et s'est récemment installé dans le Berry pour construire un projet vidéo sur plusieurs années à Vierzon.
Son profil viméo : https://vimeo.com/doriandegoutte
Publication
49,9 Mégawatts, Éditions L'Erre de Rien, Lille, Carnet de voyage d'un tour de France des Centrales nucléaires en mobylette, 2013.

Jérémy LANCHON & Marion RAIMBAULT (Collectif La Meute) : Bons Baisers de Saint-Étienne, 2017. Présentation et discussion autour du projet
Nombreuses au début du XXe siècle, les maisons d'édition de cartes postales ont peu à peu disparu du département de la Loire, laissant derrière elles des centaines de clichés d'époque qui figent encore la ville de Saint-Étienne et sa région dans son passé industriel. Les éditeurs de vues jouent un rôle important dans le développement de l'image d'un territoire. En investissant financièrement dans des campagnes photographiques, d'impression et de diffusion, ils parient en quelque sorte sur le devenir des villes, leur développement touristique et façonnent un point de vue, une couleur locale... Dans l'utopie de relancer l'attractivité de la ville, le Collectif La Meute a parcouru le département de la Loire avec pour but d'identifier et de photographier les sites à caractère touristique. Ces clichés, édités selon les règles de la carte postale, ont été présentés et mis en vente pendant la biennale internationale du design 2017 sous la forme d'une vraie-fausse boutique souvenirs, laissant ainsi la ville de Saint-Étienne imaginer une nouvelle perspective : celle du tourisme de villégiature.

Fondé en 2015, le Collectif La Meute évolue surtout sous la forme de résidences artistiques dans lesquelles il met en place des protocoles d'immersion, des dispositifs, des événements, des interventions artistiques, créant des décalages qui perturbent ou incitent à changer de regard et l'usage d'un lieu. Le Collectif La Meute, livre ainsi des propositions singulières, engagées et situées, mettant en jeu des pratiques locales, des situations économiques, politiques et esthétiques. Son travail, souvent ludique et parfois festif est centré sur les questions de paysage, d'aménagement du territoire, d'intervention urbaine et d'architecture.
En savoir plus : https://issuu.com/collectiflameute

Quentin LAZZARESCHI : Art et manières, contextuel, contingent
Les manières d'être artiste, d'incarner l'artiste et de se définir comme tel ?
Aussi, la manière de faire : envisager des formes liées à des postures, des attitudes.
Situer la pratique pour l'élargir, proposer des formes qui s'éloignent des logiques de création.
La position plutôt que la production ? La production qui mène à la position ?
Adopter des démarches in situ, contextuelles.
Faire en fonction d'espaces, d'ambiances, d'environnements, de temporalités.
Proposer d'être artiste de manière contingente.
Le rôle de l'écriture et du récit dans ces expériences ?

Quentin Lazzareschi est diplômé de l'ESAAA en spécialité Art / Bachelor et Design & Espace / Master. Ses travaux portent principalement sur des questions de visibilité, de considérations, les décalages conventionnels, d'objets, d'actions, intégrant ou non le champ de l'art. Ses recherches actuelles visent au développement d'une plateforme en ligne qui permettrait de référencer "ce que les musées ne montrent pas" : collections non exposées, non choix, œuvres invisibles en général.
Ouvrage collectif
DIMANCHE [en ligne].

Hedi Ali MESTIRI
Hedi Ali Mestiri vit à Paris, il est designer et étudiant en recherche à l'ENS Paris-Saclay. Fraîchement diplômé d'un Master à l'ESAAA option Design & Espace, sa pratique du design démarre par la vidéo pour aboutir à des objets et/ou à un film. Son travail d'écriture de recherche est concerné par le statut et l'usage de l'image en mouvement dans le design. Ses questionnements actuels sont autour du rapport entre l'image et le volume dans la capture photographique médical.

Florence SCHMITT
Florence Schmitt vit et travaille à Lyon. Diplômée de l'ESAAA Annecy, DNSEP Design & Espace 2017 (schmittflorence.wixsite.com/portfolio).
"Oscillant entre espace d'exposition et espace scénique, d'une pratique plastique sculpturale et d'installations à un travail scénographique, j'en reviens souvent à la notion de Représentation et de ses nombreuses définitions associées. Je m'approprie des formes, des objets, des histoires principalement issus d’usages collectifs, publics. Je les mets en scène, je les nuance et leur donne un second sens de lecture afin de les montrer encore "plus vrai" peut-être, plus vivant. J'utilise souvent des moyens pauvres pour refaire la "grande image" et m'interroger sur le tragique de la vie (avec une pointe d'humour) : ce que l'on voit ou non et qui constitue ce qui nous entoure."

Joana TEULE
Présentation de plusieurs travaux plastiques et vidéos, qui s'inscrivent dans une démarche d'exploration des territoires au travers des activités des personnes qui l'habitent.

Joana Teule est une jeune artiste, xylograveuse au Brésil ; pêcheuse à la mouche en Haute-Savoie ; navigatrice sur le lac d'Annecy ; ouvrière agricole-hackiste en Provence ; ancienne Barista chez Starbuckscoffe. Participation à un ouvrage collectif : Dimanche, 2017.


PETITES FORMES PERFORMATIVES :

Présentation courte d'un travail de recherche et de production artistique.

Naïm AÏT-SIDHOUM : Une fiction dans le parc
Durant l'été 2018 une équipe de tournage prend place dans le parc Jean Verlhac, dessiné en 1968 par Michel Corajoud au cœur du quartier de la Villeneuve, grand ensemble situé au sud de Grenoble. Le parc est comme une miniature de nature avec ses collines, ses plaines, ses forêts et même un lac. Ce lieu est propice à la projection, il est comme un décor, inaccessible aux voitures, idéal pour tourner. Le parc Jean Verlhac fait de la Villeneuve une Cinecitta. L'équipe de tournage (technicien et acteurs) y reconstitue un récit historique, celui de Kunta Kinté, jeune africain arraché à ses terres en 1767 par les colons anglais pour être vendu comme esclave aux États-Unis.

Naïm Aït-Sidhoum est cinéaste. Il met en œuvre ses projets de films dans le quartier de la Villeneuve, grand ensemble construit à Grenoble à la fin des années 60. Ses films mettent en scène les habitants du quartier qui deviennent, le temps des tournages, des acteurs de fiction. En 2014 il produit "Guy Moquet", film sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes et nominé au César du court-métrage en 2016. En 2017, il produit et réalise "Africa", grand prix au Festival Cinébanlieue et diffusé sur France 2 en 2018.

Jean-Marc CHAPOULIE : Re:re-Méditerranée
Re:re-Méditerranée est un film de la Méditerranée d'aujourd'hui dont les images proviennent de webcams installées sur le pourtour du bassin méditerranéen, au bord des plages, par les offices de tourisme, les associations de surfeurs, de météorologie, ou par des particuliers comme une version 2.0 de la perception. C'est une aventure sur le pourtour de la Méditerranée qui prend corps à travers un échange entre deux amis, l'écrivain Nathalie Quintane et le réalisateur Jean-Marc Chapoulie, parcourant tous deux la Méditerranée, immobiles depuis leur écran d'ordinateur. C'est un voyage sur une mer de paroles, qui frappent les images pour mettre en lumière une part des incohérences avec lesquelles nous vivons.

Jean-Marc Chapoulie est artiste. Cinéaste, performeur et essayiste, il tente de définir ce qui pourrait être défini comme du cinéma d'aujourd'hui.

Julien CLAUSS
En 1917, Éric Satie compose des pièces d'ameublement destinées à être jouées sous les bavardages.
En 1930, les ondes radio couvrent le globe et les auditeurs font l'expérience de l'écoute acousmatique.
En 1950, les musiques électroacoustique et électroniques naissent dans des studios de radios.
Puis le vinyle, la K7 et les radio FM accélèrent l'accès aux musiques exotiques ; des producteurs re-mixent le catalogue musical mondial en une "ambient music" qui s'étend du minimalisme aux musiques bruitistes.
Julien Clauss proposera deux situations d'écoutes inspirées de cette histoire.

Julien Clauss, plasticien, vit dans les Hautes-Alpes. Il a étudié le piano à l'Institut Suzuki de Strasbourg. Après un cursus universitaire en mécanique des fluides et thermodynamique, il étudie l'acoustique au CNAM à Paris, puis assiste Pierre Henry de 2001 à 2007 lors de ses concerts. Depuis 2001, il réalise des pièces sonores, des sculptures, des installations, des performances et des dispositifs radiophoniques.
En savoir plus : documentsdartistes.org/artistes/clauss/repro.html

Alexandre COSTANZO : Benjamin
Il appartient à Walter Benjamin d'avoir constitué, tout au long de son œuvre, un immense catalogue de gestes, d'attitudes, de postures, de perceptions et de situations qu'il recueillait dans les rues, dans des livres ou dans ses souvenirs pour les envisager comme des "images de pensée". Ce sont ces objets que je voudrais ressaisir en les associant à ceux que nous proposent Franz Kafka, Pier Paolo Pasolini ou Rosa Luxemburg et qui, ainsi mis ensembles, posent le problème du monde émancipé.

Alexandre Costanzo est philosophe, il vit à Paris et enseigne à l'École supérieure d'art Annecy Alpes. Cofondateur de la revue Failles, il est aussi membre du comité de direction de la revue de(s)générations. Il achève une thèse sous la direction d'Alain Badiou et a notamment publié plusieurs essais consacrés à la question de l'émancipation.

Giuseppe GAVAZZA
Toucher le son peut être traduit en espagnol "tocar el sonido" qui (re)traduit en français devient jouer le son, en anglais peut être "to play the sound", en allemand "den Klang zu spielen" ; mais en italien on ne joue / play / spielen pas et tocar el sonido devient "suonare il suono"…
Un instrument de musique est un objet sonore mais est-ce qu'un "objet sonore" est un instrument de musique ? Il vaudrait le demander à Pierre Schaeffer…
Les instruments musicaux (acoustiques) sont des objets matériaux mais est-ce que le son est tangible ? Est qu'on peut toucher / jouer un "objet sonore" ?
Si le langage a créé le monde, on peut comprendre pourquoi le monde est aussi splendidement compliqué ... au revoir au monde du langage.
Encore.
J’ai plus de questions que de réponses et vous demande d'imaginer une expérience multi-sensorielle pour toucher / jouer sons et objets, entre sons réels et artificiels, objets physiques et modèles physiques.

Giuseppe Gavazza, (1957, compositeur) vit et travaille à Turin et Grenoble. Après un diplôme à l'université de Turin, il est diplômé du Conservatoire de Milan en Composition et en Musique Électronique. Il a collaboré avec : CSC-Université de Padua, LIM-Université de Milan, Expérimental Studio SWF-Freiburg, l'IRCAM-Paris. Il mène une activité de recherche (PhD) au sein du laboratoire ACROE-ICA à Grenoble avec, comme sujet, l'utilisation du logiciel de synthèse par modèle physique GENESIS pour la création musicale et, depuis 1991, il est professeur de composition au Conservatoire de Cuneo, Italie. Ses compositions — récompensées dans des concours internationaux comme Irino Tokyo, Bucchi Roma, Ensemblia Monchengladbach, Briccialdi Terni, ICONS, Novara — sont exécutées et diffusées en Italie et à l'étranger. Elles sont éditées par BMG Ariola Ricordi et Edipan, enregistrées sur CD (Datum, 2E2M, DDT, Happy New Ears, Nuova Era) et jouées par importants musiciens. Il collabore habituellement avec des chorégraphes, plasticiennes, peintres, architectes, vidéoartistes, metteurs en scène de théâtre et cinéma, écrivains. Il a travaillé dans l'organisation et la promotion de la musique et de l'art contemporain. Il a obtenu des résidences d'artiste à la Fondation Château de La Napoule, USF Kulturhuset Bergen, Bogliasco Foundation, La vie des formes, Chalon-sur-Saone, Asilo Bianco, Ameno, META, Black Mountain College, USA.

Stephen LOYE : Le "\vɛʁ\noir"
Projection d'un extrait du film le "\vɛʁ\noir". Une enquête, chassé-croisé entre un anthropologue et un cinéaste, sur les lieux de la catastrophe aérienne du 24 mars 2015 dans les Alpes de Haute-Provence. À travers des archives, des témoignages et un travail cinématographique lié à la question du paysage, le film devient une recherche archéologique au sein des imaginaires de la mort et de sa représentation.

Stephen Loye mène un travail centré sur le cinéma et les problématiques qui découlent de ce medium. Issu des écoles d'art, il continue à pratiquer le dessin, la performance, la vidéo et l'installation. Il travaille souvent en binôme avec un anthropologue et des écrivains (Patrick Romieu, Nathalie Quintane et Théo Robine-Langlois).


WORKSHOP "DESIGN & ESPACE" :

Des étudiants en master Design & espace questionnent le CCIC, ses lieux, ses atmosphères et ses débats : Louis ANDREWS, Jérémie NICOLAS, Adeline OFFRET, Margaux PINTO, Sonia REYNOSO ALVARADO, Marine RIEUNIER, Anita SANCHEZ, Lana STEILER, Xu YAN, Xiyuan ZHANG.


BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE SUR LES AMBIANCES ET LES ATMOSPHÈRES :

• Ben Anderson, "Affective atmospheres", in Emotion Space and Society, 2009, pp. 77-81.
• Jean-François Augoyard, "L'environnement sensible et les ambiances architecturales", in L'espace Géographique, n°4, 1995, pp. 302-318.
• Mikkel Bille, Peter Bjerregaard, Tim Flohr Sørensen, "Staging atmospheres : Materiality, culture, and the texture of the in-between", in Emotion, Space and Society, 2014, pp. 1-8.
• Gernot Böhme, The Aesthetics of Atmospheres, New York, Routledge, 2017.
• Tonino Griffero, Atmospheres : Aesthetics of Emotional Spaces, New York, Routledge, 2017.
• Tim Ingold, "The atmosphere", in Chiasmi International, n°14, 2012, pp. 75-87.
• Yves Michaud, L'art à l'état gazeux, Paris, Stock, 2003.
• Timothy Morton, Ecology without Nature, Cambridge, Harvard University Press, 2007.
• Nicolas Rémy, Nicolas Tixier (dir.), Ambiances, demain | Ambiances, tomorrow | Ατμόσφαιρες, Αύριο, Actes du 3e Congrès international sur les ambiances, Volos, Grèce, Éd. Réseau International Ambiance – Université de Thessalie, Département d'architecture, septembre 2016, 1016 p., 2 volumes.
• Hermann Schmitz, "Atmospheric Spaces", in Ambiances [en ligne].
• Peter Sloterdijk, Sphères III. Écumes, Paris, Maren Sell Éditeurs, 2005.
• Jean-Paul Thibaud, En quête d'ambiances, Genève, MétisPresses, 2015.


SOUTIENS :

• École Supérieure d'Art Annecy Alpes
• École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble
• Laboratoire Ambiances Architectures Urbanités (UMR CNRS 1563)
• Direction Générale de la Création Artistique
• Direction Générale du Patrimoine / BRAUP
• Réseau International Ambiances

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


NOUVEAUX ENJEUX PROSPECTIFS DES TERRITOIRES
ET CO-CONSTRUCTION DES STRATÉGIES


DU MERCREDI 29 AOÛT (19 H) AU DIMANCHE 2 SEPTEMBRE (14 H) 2018

[ colloque de 4 jours ]



DIRECTION :

Isabelle LAUDIER, Lucie RENOU


ARGUMENT :

Dans un contexte de mutations économiques, écologiques, sociétales d'une part, d'évolutions institutionnelles et de gouvernance locale d'autre part, la notion de territoire — et ce qui fait territoire — est remise en question.

Qu'est-ce qui fait territoire en ce début de XXIe siècle, comment identifier et caractériser les dynamiques à l'œuvre, et sur quelles bases construire les perspectives futures ? Comment les collectivités définissent-elles des visions stratégiques et pour quelles politiques ? Si les mutations en cours nous invitent à repenser la notion de territoire, il importe de dépasser une définition qui le considère seulement comme entité politico-administrative afin de mieux prendre en compte l'ensemble des mouvements qui le traversent et d'y intégrer davantage le rôle de la société civile et des transformations économiques et sociales actuelles. Enfin, comment co-construire des stratégies de territoires, proposant un cadre pour l'action publique et ouvrant des perspectives à l'ensemble des acteurs ?

La Caisse des dépôts, en tant qu'acteur du développement des territoires, engage des réflexions sur ces sujets dans un objectif de lutte contre les disparités territoriales. Le colloque s'appuiera sur la notion de mutation territoriale qui réinterroge les modalités d'actions des acteurs locaux, publics ou privés, et impose la nécessité de co-construire les stratégies.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 29 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Jeudi 30 août
LA DIVERSITÉ DES CONFIGURATIONS TERRITORIALES À L'HEURE DES TRANSITIONS
Matin
Caractérisation des territoires et enjeux de prospective actuels — Modérateur : Philippe FRÉMEAUX
Olivier BOUBA-OLGA : Comprendre les dynamiques territoriales, une entrée par les processus [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Nadine LEVRATTO & Denis CARRÉ : La diversité des trajectoires de développement des territoires : acteurs et systèmes
Stéphane CORDOBES : La prospective comme processus de réagencement sociospatial

Après-midi
Ateliers en parallèles : Les écosystèmes territoriaux à l'heure des transitions écologique et numérique
1) Transition écologique et territoires — Modérateur : Louis HENRY
Laetitia VERHAEGHE : Appréhender les nouvelles relations villes-campagnes en France : éclairage d'une étude de cas
Alice HERBELIN : Écologie territoriale et territoires traversés : application à la moyenne vallée du Rhône
Gilles LEPESANT : La transition énergétique comme levier du développement territorial
Benoit LEGUET : Les stratégies "climat" des territoires

2) Transition numérique et territoires — Modératrice : Vanessa CORDOBA
Antoine COURMONT : Qu'est-ce que le numérique fait aux territoires ?
Fanny LOPEZ & Cécile DIGUET : Territoires numériques et transition énergétique : quelles infrastructures ?
Gilles JEANNOT : Numérique et transformation de la gestion des villes [en collaboration avec Steve Bernardin, David Guéranger et Alexandre Mathieu-Fritz]


Vendredi 31 août
QUELS LEVIERS D'ACTION ÉCONOMIQUE LOCALE ?
Matin
Quatre exemples de leviers d'action économique locale — Modérateur : Julien GARNIER
Matthieu LEPRINCE : Simplifier les péréquations financières ?
Nicolas GILLIO & Sylvie DUVILLARD : L'action foncière et le maintien des activités productives dans les territoires des métropoles
Amandine TOUSSAINT & Julien MOULARD : Les zones d'activités économiques, ces espaces mal identifiés et pourtant leviers de développement économique et urbain
Gwénaël DORÉ : Clusters, économie de proximité et circuits courts [en collaboration avec Xavier Roy et Frédéric Wallet]

Après-midi
Table ronde d'acteurs de Normandie, enjeux et outils de la prospective territoriale — Modérateur : Philippe FRÉMEAUX
Jean-Philippe BRIAND (directeur-adjoint de l'Aucame - Agence d’urbanisme de Caen Normandie Métropole)
Sophie GAUGAIN (vice-présidente de la Région Normandie, en charge du développement économique et du soutien aux entreprises) : L'intelligence territoriale en Normandie
Robert BLAIZEAU (directeur général adjoint des services – Ville de Saint-Lô)
Fabrice JEANNE (directeur général des services du département de la Manche)
Florence MAS (directrice régionale de la Caisse des dépôts en Normandie)

"Les zones d'activités économiques, des espaces à dévoiler", exposition organisée par le Collectif Point Virgule, suivi d'un cocktail et de la remise du "prix Cerisy"


Samedi 1er septembre
VERS LA CO-CONSTRUCTION DES STRATÉGIES TERRITORIALES
Matin
Partager des visions de territoires, les ressorts de la coopération — Modératrice : Isabelle LAUDIER
Jean DEBRIE & Simon D'HÉNIN : Prospective et projet de territoires : quels dispositifs et méthodologies interdisciplinaires ?
Jean-Jacques TERRIN : Coproduction d'une vision partagée du territoire dans les villes moyennes
Patrice VUIDEL & Christian DU TERTRE : L'économie de la fonctionnalité et de la coopération : un nouveau modèle économique, levier d'un nouveau modèle de développement des territoires
Anne et Patrick BEAUVILLARD : Développer la maturité coopérative du territoire

Après-midi
Coproduire l'action locale avec des acteurs hétérogènes — Modérateur : Michel-François DELANNOY
Pauline GABILLET : Le Schéma directeur des énergies de la Métropole de Lyon, vers une politique énergétique métropolitaine solide et partagée
Bernard LEMOULT : Territoires en transition énergétique et sociétale : l'enjeu du "faire ensemble"
Frédéric GILLI : De la concertation à la co-construction : le grand public comme catalyseur de l'action locale
Hervé DEFALVARD : L'ESS à l'âge du translocalisme des communs


Dimanche 2 septembre
Matin
Conclusions du colloque, avec Franck CHAIGNEAU, Marc-Olivier PADIS, Lucie RENOU, Philippe SERIZIER et Michel SUDARSKIS

Après-midi
DÉPARTS


EXPOSITION :

"Les zones d'activités économiques, des espaces à dévoiler", organisée par le Collectif Point Virgule

Point Virgule, collectif à la croisée des disciplines liées à la ville, propose de mettre en place une exposition le temps du colloque. Il s'agit d'explorer de nouveaux supports de représentation des espaces productifs propices à nourrir les débats de Cerisy sur les nouveaux enjeux prospectifs des territoires. Souvent dépréciées, les zones d'activités économiques sont aujourd'hui des objets urbains mal identifiés et peu investis par les projets artistiques. Au travers de contributions sensibles et prospectives, il s'agira de poser un regard nouveau sur ces espaces, d'illustrer leur empreinte sur l'urbain et le paysage, sans occulter leur rôle dans les systèmes économiques locaux. Nous proposerons ainsi de croiser les regards de chercheurs, de praticiens, d'amateurs et d'usagers afin de contribuer à une compréhension et une définition de ce qu'est "l'objet ZAE" aujourd'hui.


SOUTIENS :

• Institut CDC pour la Recherche | Caisse des Dépôts
• Banque des Territoires | Caisse des Dépôts