Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


LA NATURE, LEVIER DE TRANSFORMATION ÉCOLOGIQUE :
DE LA SENSIBILITÉ À L'ADAPTATION DES TERRITOIRES


DU MERCREDI 1er OCTOBRE (19 H) AU DIMANCHE 5 OCTOBRE (14 H) 2025

[ colloque de 4 jours ]



ARGUMENT :

Alors que le backlash sur les questions écologiques ne cesse de se développer, nous nous interrogerons sur les moyens de renforcer la prise de conscience du dérèglement climatique et d'accélérer les transformations à mettre en œuvre. Quels sont les leviers de la transformation écologique ? Parmi ceux-ci, le rôle de la nature dans ces bifurcations nous paraît central : la nature pour compenser nos activités, pour s'adapter au changement climatique, pour réconcilier économie et limites planétaires, pour assurer une meilleure santé… Mais au-delà, nous posons plus fondamentalement la question de la relation à la nature, du point de vue de la sensibilité, de la proximité, du bien-être qu'elle procure, car il nous semble que c'est là que la nature peut être au cœur de la transition.

Mêlant interventions, prises de paroles et partages d'expériences, ce colloque a pour ambition de mettre la nature au cœur des réflexions.


MOTS-CLÉS :

Agriculture, Aménagement, Backlash, Bien-être, Bifurcation, Biodiversité, Climat, Communs, Compensation, Comptabilité, Droits de la nature, Écologie, Économie, Écosystèmes, Finance durable, Nature, Paysages, Redirection, Renaturation, Résilience, Ressources, Risques, Ruralité, Santé globale, Sensible, Sols, Territoires, Trames vertes et bleues, Transition, Valeur de la nature, ZAN


CALENDRIER PROVISOIRE (12/06/2025) :

Mercredi 1er octobre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Jeudi 2 octobre
Matin
INTRODUCTION SUR LA PLACE DE LA NATURE ET DES PAYSAGES
Lucile SCHMID : La place de la nature, sensibilité, bien-être, relation à la nature
Vincent PIVETEAU : La relation homme-nature peut-elle être revisitée par le paysage

Capsule
Lucie BRICE MANSENCAL : L'impact des espaces naturels sur le bien-être des Français : une approche statistique

Après-midi
DROITS DE LA NATURE ET ADAPTATION DES TERRITOIRES
Dominique BOURG : La nature et la règle
Caroline LEJEUNE : Projet de recherche autour des droits de la nature ; observations de territoires

Capsules
Thomas FABRE : La lagune de Mar Menor : une première expérience des droits de la nature en Europe
Frantz GAULT : Expérimentation Norsys, la nature représentée dans un conseil d'administration

Soirée
Yoan BRAZY : Ooonehealth, une seule santé, plusieurs mondes [exposition commentée]


Vendredi 3 octobre
Matin
LA NATURE POUR S'ADAPTER FACE AUX RISQUES
Nicolas IMBERT : Renaturation et réponses aux défis urbains (chaleur, biodiversité)
François BAFOIL : La nature pour lutter contre les inondations, action des CEN (réméandrer, adapter les cultures, rendre à la nature)
Cécile de COINCY : Expérience de la Société Forestière
Régis LEYMARIE : Illustration en Normandie

Après-midi
OUTILS DE GOUVERNANCE DES RESSOURCES
Véra VIDAL : Gestion des ressources par les communs
Clément FEGER : La comptabilité écosystèmes centrée
Jean-Michel BEACCO : Enjeux des ressources et de la nature dans la finance

Capsules
Caroline VIGO COGUETO : Comptabilité pour la gestion des écosystèmes. Le cas d'étude de la gestion partagée d'un marais en Camargue [visioconférence]
Nathalie LHAYANI & Marguerite CULOT : Réflexions sur la contribution des institutions financières à la préservation des écosystèmes


Samedi 4 octobre
Matin
BIODIVERSITÉ, COMPENSATION ET ZAN
Damien LEJAS : Biodiversité, renaturation pour la compensation
Gwenael BOIDIN : Objectif ZAN, enjeux d'aménagement pour réintroduire la nature
Alexia ANDREADAKIS : Prise en compte de la compensation dans les territoires

Capsule
Jérémy ERRE & Olivier CRÉPIN : Biodiversité et transport

Après-midi
SANTÉ ENVIRONNEMENTALE
Zoé RAIMBAULT : Restaurer les fonctions écologiques des sols
Cyrille COBERT : Patrimonialiser en commun la biodiversité pour mieux la prendre en charge ensemble dans les territoires ruraux
Suzanne GORGE : Transition agricole et alimentaire, l'enjeu du bio

Capsule
Henri CHAPOUTHIER : Prise en compte des sols dans les opérations immobilières

Fin d'après-midi et/ou soirée
Jean-Jacques TERRIN : Une carte sensible du parc du point de vue de la relation au paysage et à la nature, carte à créer in situ


Dimanche 5 octobre
Matin
Restitution des grands témoins, avec Barbara BLIN-BARROIS, Géraud GUIBERT, Viviane HAMON, Nicolas HOSSARD et Alexandre MONNIN

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Isabelle LAUDIER
Isabelle Laudier est diplômée de l'École Nationale des Ponts et Chaussées, de l'Institut d'Études Politiques de Paris et du DEA "Monnaie et financement" de l'université de Paris Nanterre. Elle a occupé diverses fonctions en lien avec la recherche en économie au CEPII, au Cabinet du Ministre de l'Industrie et du Commerce Extérieur (1991-1993), et à la Caisse des Dépôts, au sein de la Direction Générale et de la Direction de la Stratégie. Isabelle Laudier a créé et dirige actuellement l'Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts, rattaché au pôle Communication corporate. Elle participe par ailleurs à des jurys de prix de recherche (Prix CDC-USH sur l'habitat social, APERAU). Isabelle Laudier est également membre du Conseil scientifique de l'École Nationale des Ponts et Chaussées.

Diane de MARESCHAL
Diane de Mareschal est diplômée de la Faculté de Paris I Panthéon-Sorbonne, elle est responsable des enjeux territoriaux à l'Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts qui soutient des projets portés par des équipes de recherche, en lien avec ses priorités stratégiques et notamment dans le champ du développement territorial. Elle a travaillé pendant plusieurs années dans différentes structures de l'économie sociale et solidaire (ESS) dédiées à l'émergence de projets de création d'entreprise puis à la Caisse des Dépôts en tant que chargée d'investissement en ESS et de partenariats avec des associations d'élus.


Barbara BLIN-BARROIS
Barbara Blin-Barrois est chercheure indépendante en coopération territoriale (Association Couleur Forêt/La Coop des Communs). Elle s'intéresse à la mise en mouvement multi-acteurs par les communs, particulièrement aux rôles tiers dans les transformations écologiques et sociales. Elle a successivement dirigé la Scic ôkhra (Provence), puis soutenu l'émergence de méthodes multipartenariales (Avise, CG Scop&Scic, Labo de l'ESS). Elle contribue désormais à des travaux de prospective et de méthodes socio-écologiques, particulièrement en espaces naturels ou forestiers (Forêts Méditerranéennes, IRG Gustave Eiffel, projets ANR, …).
Dernières publications
"Territoires en métamorphose vers l'intérêt Commun", Revue Nationale des Territoires Forestiers, n°74, p. 5-14, Février 2025 et n°72, p.9-13, Mars 2023.

Gwenael BOIDIN
Gwenael Boidin est responsable de l'agence Citadia Grand-Ouest. Il accompagne, depuis plus de dix ans, les collectivités territoriales dans l'élaboration de leur projet de territoire et la définition de leurs stratégies de développement. À la croisée de l'aménagement, de l'action publique locale et des transitions écologiques, il intervient aux côtés des élus et des services pour construire des projets partagés, porteurs de sens et ancrés dans les réalités locales. Son approche vise à faire de chaque territoire — rural, périurbain ou en mutation — un espace de projet capable de répondre aux enjeux contemporains : attractivité, résilience, solidarité, sobriété. Spécialisé dans la mise en œuvre de stratégies foncières et de démarches de sobriété foncière, il travaille à repositionner l'urbanisme comme un levier au service des projets de territoire, en conciliant développement et préservation, usages et transitions.

Dominique BOURG
Dominique Bourg est philosophe, professeur honoraire (Université de Lausanne) ; Professeur invité par l'EDDEC (UdM, Polytechnique et HEC Montréal, janvier-février 2017) ; titulaire de la Chaire Cardinal Mercier à l'Université Catholique de Louvain (année 2023-2024) ; Membre de l'Académie Royale du Maroc depuis novembre 2023. Il dirige aux Puf les séries : "L'écologie en questions" et "Les Classiques de l'écologie". Il a notamment participé à la CFDD, à la Commission Coppens, au CNDD, au Grenelle de l'environnement et aux conseils scientifiques de l'Ademe (2004-2006), de la FNH (1998-2018, Paris), de la Fondation Zoein (Genève, depuis 2018-2025).
Dernier ouvrage paru : Dévastation. La question du mal aujourd'hui, Puf, 2024.

Lucie BRICE MANSENCAL
Directrice d'études et de recherche au sein du Pôle "Société" du CRÉDOC, diplômée de Sciences Po Paris, Lucie Brice Mansencal s'est spécialisée dans l'évolution des modes de vie de la population française. Elle s'est notamment intéressée aux opinions et pratiques de la population en matière d'environnement. À ce titre, elle a contribué aux travaux de recherche du CRÉDOC sur l'évolution des modes de vie des ménages à la suite de leur installation dans un quartier "durable", sur les mécanismes d'adoption de pratiques alternatives à l'accumulation des objets ou encore sur les pratiques d'achat et vente d'objets d'occasion. Pour l'Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts, elle a également étudié l'impact de la présence d'espaces naturels sur les opinions de la population.

Cyrille COBERT
Aujourd'hui ingénieur AgroParisTech, Cyrille Cobert s'est très rapidement intéressé à l'approche patrimoniale, enseignée en particulier dans la dominante d'approfondissement SPES (Science politique, écologie, stratégies) qu'il a suivie. Dans le cadre de cette approche sont mises en place des démarches d'intervention stratégique visant à faciliter l'action commune dans des territoires autour de sujets complexes et multi-acteurs parfois conflictuels. Généralement, la première étape de ces démarches est un audit patrimonial, qui vise à recueillir l'expertise et le point de vue des acteurs et à les mobiliser sur une question posée par un commanditaire dans un territoire. Cyrille Cobert a pris part à plusieurs audits patrimoniaux, et s'est engagé dans une thèse sur les modalités d'actions pour la biodiversité par les acteurs du monde rural, dans laquelle il mène des audits patrimoniaux, à l'échelle nationale puis dans plusieurs territoires contrastés, et mobilise les différents concepts de l'approche patrimoniale.

Clément FEGER
Clément Feger est titulaire d'une HDR en Sciences de gestion, il est maître de conférences à AgroParisTech et chercheur au laboratoire MRM (Université de Montpellier) et chercheur associé au CIRED. Il est également co-directeur de la Chaire Comptabilité Écologique et expert à l'IPBES, auteur principal dans le cadre du rapport "Entreprises et Biodiversité". Ses recherches portent sur le développement théorique et pratique des approches de "comptabilité écosystème-centrées", qui consistent à équiper les interventions stratégiques des organisations dans la mise en gestion collective des écosystèmes sur les territoires. Il travaille également sur les modèles d'affaires durables en matière de biodiversité et sur l'analyse de la gouvernance des outils de conservation. Il privilégie les méthodes de recherche-intervention en entreprise, auprès d'ONG environnementales ou d'acteurs publics Il enseigne à AgroParisTech et dans d'autres établissements la comptabilité de la biodiversité et des écosystèmes, l'analyse stratégique de la gestion de l'environnement, ainsi que les sciences sociales appliquées et l'analyse sur le terrain des problèmes de protection de la biodiversité en France et à l'étranger (Guyane, Indonésie, etc.).

Suzanne GORGE
Suzanne Gorge a débuté son parcours à l'Institut Pasteur, avant de rejoindre le Centre Français des Fonds et Fondations, où elle a exercé les fonctions de secrétaire générale de 2010 à 2017. En 2018, elle intègre le think tank Terra Nova, au sein duquel elle pilote plusieurs groupes de travail, avec un engagement particulier sur les questions d'agriculture, d'alimentation et d'emploi. Elle est l'autrice ou coautrice d'une dizaine de rapports publiés par Terra Nova, parmi lesquels "Le bio en baisse : simple ralentissement ou véritable décrochage ?", "Les nouveaux visages de l'agriculture", "Les applications de notation, un ingrédient de poids sur le chemin de la transition alimentaire ?". En 2024, elle est nommée directrice générale adjointe de Terra Nova. Elle vient de publier un essai sur le rapport des jeunes au travail, Les jeunes et le travail : un faux procès, aux éditions Les Petits matins.

Nicolas HOSSARD
Nicolas Hossard est sociologue et historien indépendant. Depuis une quinzaine d'années, il travaille sur les relations entre l'humain et les milieux naturels. Il a été rapporteur des séminaires "Économie de la sobriété" de l'Institut CDC pour la Recherche et "étonnant rapporteur" du colloque de Cerisy-la-Salle sur le même thème en 2023. Il organise par ailleurs des expéditions de dépollution plastique en kayak sur les affluents de l'Adour, à proximité duquel il vit depuis 2017.

Damien LEJAS
Damien Lejas est naturaliste. Il a suivi un parcours d'études dédié aux sciences de l'écologie. Son expertise sur la flore et les habitats lui confère une spécialisation indispensable pour les enjeux de restauration écologique. Fort d'une expérience de plus de 20 ans, en bureau d'études, il s'est notamment spécialisé sur le volet réglementaire et la séquence ERC dans le cadre de projets d'aménagement ainsi que sur l'élaboration de plans de gestion et restauration des milieux naturels. En 2023, il rejoint CDC Biodiversité en tant que chef de projet au sein du nouveau bureau Ouest de l'agence centrale. Il intervient en tant que conseiller auprès des collectivités et des privés sur les enjeux de la biodiversité et de l'eau. Il assure le pilotage des études et des chantiers de restauration écologique, principalement sur le sujet de la compensation.

Alexandre MONNIN
Alexandre Monnin est philosophe, enseignant-chercheur. Il a travaillé sur la philosophie du Web avant de co-initier le courant de la redirection écologique. Directeur scientifique du POPSU Transition de la métropole Nice Côte d'Azur, il pilote actuellement un projet porté par l'association Imaginarium-S (réunissant plusieurs co-financements, notamment de l'Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts et Consignations). Il a co-fondé et dirigé le Master of Science "Strategy & Design for the Anthropocene", porté conjointement avec Strate École de Design à Lyon entre 2020 et 2024. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages, dont Héritage et fermeture. Une écologie du démantèlement (Éditions Divergences, 2021, avec Emmanuel Bonnet et Diego Landivar) et, seul, de Politiser le renoncement (Éditions Divergences, 2023).

Vincent PIVETEAU
Vincent Piveteau est ingénieur général des ponts, des eaux et des forêts au conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux. Membre du collectif "paysages de l'après-pétrole", il a eu des responsabilités au sein des administrations centrales et déconcentrées en charge de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Il a dirigé de 2011 à 2021 l'école nationale supérieure de paysage de Versailles, et a, à ce titre, participé à l'organisation de plusieurs éditions des décades de Cerisy sur le jardin et le paysage.

Lucile SCHMID
Lucile Schmid est Administratrice de l'État au Ministère de l'économie et des finances. Co-fondatrice d'un cercle de réflexions sur les enjeux écologiques, elle y est responsable des relations avec le monde universitaire. Haut-fonctionnaire de formation, elle est attachée à la vision d'institutions ouvertes sur la société, vision qu'elle a développée dans différents travaux et ouvrages. Membre du comité de rédaction de la revue Esprit depuis 1996, ses réflexions portent sur l'état de nos démocraties et elle y organise régulièrement des rencontres. Depuis l'automne 2023, elle effectue une mission au sein du mouvement Emmaüs pour y travailler à l'articulation des enjeux sociaux et écologiques.

Jean-Jacques TERRIN
Architecte et urbaniste, docteur en architecture, professeur émérite des écoles d'architecture, Jean-Jacques Terrin a exercé une activité libérale d'architecte (1972-1999). Il a été directeur du département Génie urbain de l'université de Compiègne (1998-2003), enseignant chercheur à l'École d’architecture de Versailles (2003-2012), chercheur associé au Lab'urba (Université Gustave Eiffel), professeur associé à l'université de Montréal (2011-2022) et à l'université polytechnique de Tirana (2011-2014). Ses recherches et ses publications sont orientées sur l'évolution des processus de conception et sur les enjeux urbains contemporains. Ses activités dans le cadre de projets européens lui assurent une bonne connaissance des villes européennes. Il a récemment été commissaire de l'exposition "Mondes souterrains, 20.000 lieux sous la terre" au Louvre Lens.

Caroline VIGO COGUETO
Biologiste de formation (Université de São Paulo), Caroline Vigo Cogueto est titulaire d'un master en gestion de l'environnement obtenu à AgroParisTech Montpellier et poursuit actuellement un doctorat à l'université Sorbonne Paris Nord, en partenariat avec la Chaire Comptabilité Écologique. Ses travaux de recherche portent sur la comptabilité écosystème-centrée. Son expérience professionnelle diversifiée dans les secteurs public, associatif et du conseil privé lui a offert une exposition multidisciplinaire, nourrissant une vision intégrée et une conviction quant à la nécessité d'articuler les sciences sociales et les sciences de la conservation pour faire face aux crises environnementales contemporaines. À travers ses recherches doctorales, elle explore comment les systèmes d'information et de gestion peuvent appuyer les acteurs stratégiques et les organisations collectives dans la planification, le suivi et l'évaluation de leurs actions en vue de générer des impacts environnementaux et sociaux positifs.


BIBLIOGRAPHIE :

Les communs de proximité. Origines, caractérisation, perspectives, Nicole Alix, Benjamin Coriat & Justine Loizeau, Éditions science et bien commun, 2024.
• "L'écologie populaire circonscrite à la périphérie urbaine ? Au-delà des marges de l'environnementalisme", Caroline Lejeune, Espaces et Sociétés, 2023, n°188, p. 171-177.
Leçons des limites planétaires, Dominique Bourg, Actes Sud, septembre 2025.
Voix de la terre. Douze portraits, Dominique Bourg, PUF, 2024.
Primauté du vivant, Dominique Bourg & Sophie Swaton, PUF, 2021.
Vers une démocratie écologique, le citoyen, le savant, le politique, Dominique Bourg, Paris, PUF, 2010.
Cahier n°1 – Chaire Transition foncière - Restaurer les fonctions des sols ? Approches scientifiques et perspectives interdisciplinaires, Direction scientifique : Mathieu Delorme, Youssef Diab, Coordination : Zoé Raimbault, Claire Bach, 2024.
Facilitations stratégiques, Refonder l'action en commun dans les organisations et les territoires, Première édition, Hervé Brédif, Ambroise de Montbel, Presses universitaires du Septentrion, 2019.
Repanser la planète, Nicolas Imbert, CHUM éditions, 2024.
Les promesses du paysage, Dialoguer, bifurquer, réenchanter, Vincent Piveteau, p. 14-17, DARD/DARD, 2024.
• "Innovations comptables pour la biodiversité et les écosystèmes : une typologie axée sur l'exigence de résultat environnemental", C. Feger, L. Mermet, Accounting-Auditing-Control, 27 (1), p. 13-50, 2021.
Politiser le renoncement, Alexandre Monnin, Divergences, 2023.
Le grand malentendu climatique : on a encore le temps, il est déjà trop tard, Géraud Guibert, Éditions de l'Aube, "Monde en cours", 2023.
Onehealth, Sinonvirgule, 2024.
La redirection écologique des entreprises, Jérôme Cuny, Sinonvirgule, Jeanne Baverey, Margot Boitel, Raphaëlle Garnier, Dunod, 2025.
Proximité à la nature – une source de bien-être, CREDOC, Institut pour la recherche, 2024.
• "Organisations alternatives des citoyennetés", Barbara Blin-Barrois, À bord de la Recherche Partenariale, sous la direction de Beji-Bécheur A. & Bonnemaizon A., p. 23-45, EMS Éditions/In Quarto, 2024.
Les promesses du paysage : dialoguer, bifurquer, réenchanter, V. Piveteau (coord.), Dard-dard, #11, Éditions de l'attribut, 2024.
Le travail sans fin ? Réalités du travail et transformations sociales, Co-direction : Isabelle Laudier, Thierry Ménissier, Revue Cités, n°8, Presses Universitaires de France, 2001.
Territoires et identités en mutation, Co-direction : Catherine Gorgeon, Isabelle Laudier, L'Harmattan – Sciences Humaines et Sociales, 2009.
Politiques de développement territorial intégré : les circuits courts, Collectif : Christophe Blavot, Pascal Hardy, Frank Hovorka, Isabelle Laudier, Philippe Serizier, Julien Woessner, Rapport Institut pour la Recherche de la Caisse des Dépôts et Programme LEED de l'OCDE, 2013.
• "Contribution Territoire et durabilité (point de vue 2)", Isabelle Laudier, in Dictionnaire de la pensée écologique, sous la direction de Dominique Bourg et Alain Papaux, Presses Universitaires de France, 2015.
Le financement des territoires, Co-direction : Isabelle Laudier, André Torre, Revue d'Économie Financière, n°132, mars 2019.
• Prospective et co-construction des territoires au XXIe siècle, Co-direction : Isabelle Laudier, Lucie Renou, Colloques de Cerisy, Éditions Hermann, 2020.
• "Quels liens entre recherche et expériences concrètes dans les territoires ?", Isabelle Laudier, in Aménagement économique des territoires, Théories et pratiques, sous la direction de Jean Alduy, Vincent Gollain et Fabien Nadou, Publication CNER, 2021.
L'Urbanisme informel, au-delà du droit à la ville, Wagner I. & Terrin J.-J., Presse des Ponts, 2023, 227 p.


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


LA PROXIMITÉ COMME PROJET


DU MARDI 23 SEPTEMBRE (19 H) AU DIMANCHE 28 SEPTEMBRE (14 H) 2025

[ colloque de 5 jours ]


© Céline Gaille (Forum Vies Mobiles)


ARGUMENT :

Face à la mise en cause des récits qui portent la globalisation et la métropolisation, face aux crises écologiques, face à l'essoufflement de la démocratie représentative, on observe actuellement un regain des discours en faveur de la proximité et des pratiques qui s'en réclament. Ces journées à Cerisy discuteront des expériences actuelles promouvant diverses formes de relocalisation tant des échanges (circuits courts, réindustrialisation, agriculture urbaine, mobilités lentes…) que des espaces politiques (communautés locales, municipalisme, biorégionalisme…). Ces expériences sont porteuses de valeurs et d'idéaux divers, parfois contradictoires.

L'objectif de ce colloque sera d'identifier le sens et la portée transformatrice des initiatives fondées sur la proximité, en montrant leurs apports mais aussi leurs limites. Deux tensions feront l'objet d'une attention particulière : la première entre la relocalisation des espaces de vie et l'idéal classique d'émancipation ; et la seconde entre la fragmentation des initiatives locales et le caractère global des crises.


MOTS-CLÉS :

Agriculture urbaine, Biorégionalisme, Circuits courts, Communautés locales, Mobilités lentes, Municipalisme, Proximité, Relocalisation, Rural/Urbain, Villes/Campagnes


CALENDRIER PROVISOIRE (15/07/2025) :

Mardi 23 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Mercredi 24 septembre
Matin
DISCUSSION INTRODUCTIVE
Questionnements du Forum vies mobiles, avec Tom DUBOIS et Sylvie LANDRIÈVE
La proximité en débats, avec Éric CHARMES et Max ROUSSEAU

Après-midi
ENJEUX ÉCOLOGIQUES
Métabolismes urbains et enjeux de la proximité, avec Sabine BARLES
Le métabolisme des métropoles est-il soluble dans les biorégions ? Réflexions à partir du cas de l'Ile-de-France, avec Agnès SINAÏ
La banlieue pavillonnaire comme lieu de la décroissance urbaine ?, avec Éric CHARMES et Maxime MARIE

Soirée
Autour de l'exposition "Taking the Country's side / Prendre la clé des champs", avec Sébastien MAROT


Jeudi 25 septembre
LE VILLAGE COMME SOLUTION ?
Matin
Se libérer au village ? Émancipation et relocalisation des attaches au monde, avec Anaïs COLLET, David FRATI et Colin GIRAUD

Après-midi
"HORS LES MURS" — À SAINT-SAUVEUR-VILLAGES
Visite de Saint-Sauveur-Villages, organisée par Thibault CHABROLLE et Florence THOMAS (élue chargée de l'environnement et démarches participatives)

Balade sur la côte normande


Vendredi 26 septembre
JUSQU'OÙ LE LOCALISME ?
Matin
Se préparer au retour forcé à la vie en proximité : effondrisme et survivalisme, avec Nathan GABORIT, Madeleine SALLUSTIO, Cyprien TASSET et Jérôme TOURNADRE

Après-midi
Mobilités domicile travail : inégalités et stratifications sociales, avec Aurore FLIPO, Maxime GUINEPAIN et Arnaud LE MARCHAND

Voisinage et quartier comme ressources pour les classes populaires, avec Hélène BALAZARD, Benjamin DUBERTRAND [visioconférence] et Gaspard LION


Samedi 27 septembre
LA POLITISATION DE LA PROXIMITÉ
Matin
Accès aux services et aux équipements publics dans les territoires en déclin, avec Maryame AMAROUCHE [visioconférence], Aurélie DELAGE et Nora NAFAA

Après-midi
DÉTENTE ou Visite de la fête du pain à Saint-Sauveur-Villages

Le retour de la commune ? Proximité et démocratie, avec Vincent BÉAL et Max ROUSSEAU

Soirée
Autour d'un documentaire d'Hélène Desplanques sur les cahiers de doléance, avec Fabrice DALONGEVILLE


Dimanche 28 septembre
CLÔTURE
Matin
Synthèse, par Éric CHARMES, Tom DUBOIS, Sylvie LANDRIÈVE et Max ROUSSEAU

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Éric CHARMES
Éric Charmes est directeur de recherche à l'ENTPE (Vaulx-en-Velin) et membre de l'UMR EVS. Spécialisé dans les études urbaines, l'urbanisme et l'aménagement, il travaille sur les espaces à la fois ruraux et urbains en périphérie des villes et des métropoles. Il a notamment publié Métropoles et éloignement résidentiel (Autrement, 2021) ; La Revanche des villages (Seuil, 2019), Quitter Paris ? Les classes moyennes entre centres et périphéries (avec Stéphanie Vermeersch, Lydie Launay & Marie-Hélène Bacqué, Créaphis, 2019) ; The Middle Classes and the City. A Study of Paris and London (avec Marie-Hélène Bacqué, Gary Bridge & al., Palgrave, 2015) et La Ville émiettée. Essai sur la clubbisation de la vie urbaine (Presses universitaires de France, 2011).

Tom DUBOIS
Tom Dubois est responsable de la valorisation des recherches, de la communication et des relations publiques du Forum Vies Mobiles. Il est diplômé d'un master en urbanisme et aménagement du territoire (Institut d'urbanisme de Paris / École des Ponts Paris Tech) et également titulaire d'un master spécialisé en communication (Sciences Po Paris).
Publication
Pour en finir avec la vitesse, L'Aube, 2021.

Sylvie LANDRIÈVE
Sylvie Landriève dirige le Forum Vies Mobiles. Auparavant, elle a monté et piloté des projets immobiliers et d'aménagement urbain privés et publics (BNP Real Estate, SNCF). Avec une formation en sciences humaines (Sorbonne et Sciences-Po Paris) et en recherche en management (Mines, Nanterre et ESCP), elle s'intéresse à l'évaluation des politiques publiques et à l'implication des citoyens dans leur élaboration.
Publications
L'Immobilier. Une passion française, Demopolis, 2016.
Pour en finir avec la vitesse, L'Aube, 2021.

Max ROUSSEAU
Max Rousseau est titulaire de la Chaire de professeur junior "L'urbain hors des métropoles" à l'école de l'aménagement durable des territoires (ENTPE). Ses travaux questionnent notamment les mutations des territoires délaissés (villes en déclin, campagnes en déprise, etc.) ainsi que les contradictions de l'urbanisation planétaire.
Derniers ouvrages parus
Plus vite que le cœur d'un mortel. Désurbanisation et résistances dans l'Amérique abandonnée, Grevis, 2021 (avec V. Béal).
Déclin urbain. La France dans une perspective internationale, Éditions du Croquant, 2021 (avec V. Béal et N. Cauchi-Duval, dir.).
Gentrifications. Views from Europe, Berghahn, Oxford et New-York, 2022 (avec M. Chabrol et al.).


BIBLIOGRAPHIE :

• Balazard, H. (2015), Agir en démocratie, Éditions de l'Atelier.
• Barles, S. (2009), "Urban metabolism of Paris and its region", Journal of Industrial Ecology, 13(6).
• Béal, V., Maisetti, N., Pinson, G. & Rousseau, M. (2023), "When Bookchin faces Bourdieu : French 'weak' municipalism, legitimation crisis and zombie political parties", Urban Studies.
• Charmes, E. (2019), La revanche des villages, Seuil.
• Collet, A., Delage, A. & Rousseau, M. (2023), Mobilités résidentielles post-Covid. Dynamiques sociales et enjeux locaux dans cinq territoires ruraux (Rapport pour le PUCA et le Réseau Rural Français).
• Darly, S. (2018), "La terre pavillonnaire, un paysage fertile oublié", in J.-M. Léger & B. Mariolle (Eds.), Densifier/dédensifier. Penser les campagnes urbaines, Éditions Parenthèses.
• Dubois, T., Gay, C., Kaufmann, V. & Landriève, S. (2021), Pour en finir avec la vitesse : Plaidoyer pour la vie en proximité, L'Aube.
• Flipo, A., Ortar, N. & Sallustio, M. (2023), "Can the transition to sustainable mobility be fair in rural areas ? A stakeholder approach to mobility justice", Transport Policy, 139.
• Frati, D. (2024), Les réfractaires du désert : Rejet du travail et appropriation de l'espace dans le désert d'Arizona, Presses de l'Université de Nanterre.
• Gaborit, N. (2022), De l'effondrement aux ruptures de la normalité: Le continuum des préparations survivalistes en France, Sociétés Politiques Comparées.
• Giraud, C. (2016), La vie homosexuelle à l'écart de la visibilité urbaine : Ethnographie d'une minorité sexuelle masculine dans la Drôme, Tracés. Revue de sciences humaines, 30.
• Guinepain, M. (2024), Auto, boulot, marmots, dodo ? Une géographie sociale de l'organisation spatio-temporelle des journées de travail et des mobilités du quotidien (Thèse de doctorat, Université Paris-Cité).
• Jeanpierre, L. (2019), In Girum. Les leçons politiques des ronds-points, La Découverte.
• Le Marchand, A. (2022), "Temporary mobilities and neo-nomadism", in G. Devron & V. Kaufmann (Eds.), Mobility and Geographical Scales, ISTE Éditions.
• Lion, G. (2024), Vivre au camping. Un mal-logement des classes populaires, Éditions du Seuil.
• Marot, S. (2023), Prendre la clé des champs, WildProject.
• MacKinnon, D., Amarouche, M., Nafaa, N. & al. (2025), Policies 'for' and 'with' 'left behind places', Beyond Left Behind Places Project 04/25, Centre for Urban and Regional Development Studies (CURDS), Newcastle University, UK.
• Rousseau, M. & Béal, V. (2021), Plus vite que le cœur d'un mortel, Grevis.
• Sallustio, M. (2022), À la recherche de l'écologie temporelle. Vivre des temps libérés dans les collectifs néo-paysans autogérés, Presses Universitaires de Rennes.
• Sallustio, M. & Dubertrand, B. (2024), "Légitimer sa place en milieu rural : Dynamiques de pouvoir et identités dans les installations néo-rurales en Ariège et dans le Massif central", Ethnologie française, 54(2).
• Sinaï, A., Carton, H., Stevens, R. & Servigne, P. (2015), Petit traité de résilience locale, Charles Léopold Mayer.
• Tasset, C. (2022), "L'effondrement et ses usagers : Éclectisme et réception d'une vulgarisation hétérodoxe en écologie scientifique", Zilsel, 10.
• Tendance Floue, Nicolas Mathieu, Forum Vies Mobiles (2022), Les vies qu'on mène, Le Bec en l'air.
• Tournadre, J. (2025), "Refusal as a critique of the order of things : Bifurcations and utopian longings in contemporary rural France", European Societies.


SOUTIEN :

Forum Vies Mobiles


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


LE RAIL DE VILLE ET LE RAIL DES CHAMPS

ATTACHEMENT POPULAIRE, AMBIVALENCES CONTEMPORAINES, URGENCE ÉCOLOGIQUE


DU LUNDI 8 SEPTEMBRE (19 H) AU DIMANCHE 14 SEPTEMBRE (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]



DIRECTION :

Francis BEAUCIRE, Cécile HOCHARD, Arnaud PASSALACQUA


ARGUMENT :

Dès les années 1820, le rail s'est inscrit dans nos paysages et s'est attaché à nos vies. Il a ouvert l'horizon, tissé des échanges et tenu un rôle économique central. S'est ainsi noué un lien profond entre la société et ses chemins de fer, fondé sur un imaginaire, alimenté par les arts autant que les discours politiques et horizons techniques. Au fil du temps, avec la concurrence de la voiture et la déconstruction du maillage familier de son réseau, le fossé s'est creusé entre les pratiques et les représentations du rail, suffisamment fortes pour justifier l'attention que lui porte, peut-être au-delà du raisonnable, le politique autant que l'opinion. Preuve que l'attachement reste de nature culturelle, au-delà des usages ?

En tirant le fil de l'attachement et de la crise écologique, ce colloque invitera ainsi à interroger la capacité du chemin de fer à se réinventer. Saura-t-il nous surprendre pour redevenir un mode de déplacement populaire en mesure de tenir sa promesse de plaisir, de liberté et de démocratisation du voyage, engagé à réduire les fractures territoriales tout en incarnant la valeur écologique ? Peut-il surmonter son handicap, le temps long des projets face à l'urgence écologique ? Dans ce jeu, l'attachement est-il un moteur de renouveau ou ancre-t-il définitivement le chemin de fer dans la nostalgie d'une époque révolue ?


MOTS-CLÉS :

Attachement, Chemin de fer, Crise écologique, Histoire, Innovation, Mobilité, Transports urbains


CALENDRIER PROVISOIRE (19/07/2025) :

Lundi 8 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants
Présentation de la vigie, par Jean LEBRUN
Présentation de l'exposition proposée par Georges RIBEILL : "Affiches, publicités, presse corporative… Images en miroir du monde ferroviaire" (visite libre tout au long du colloque)


Mardi 9 septembre
CE QUI ATTACHE CHEMIN DE FER ET SOCIÉTÉ
Cette première journée explore les différents liens qui attachent le chemin de fer à la société, que ce soit par des pratiques et discours explicites ou par des formes plus implicites qui révèlent la relation plus ou moins distante entre une société très automobilisée et un système ferroviaire ancien. Comment évolue l’imaginaire populaire du chemin de fer ? Quel rôle y tiennent aujourd’hui les innovations régulièrement lancées ?
Matin
Francis BEAUCIRE, Cécile HOCHARD & Arnaud PASSALACQUA : Ouverture du colloque
Francis BEAUCIRE : Le chemin de fer, un symbole d'attachement populaire : retour aux origines
Nancy GIRARD & Martine BARTOLOMEI : L'attachement populaire aux chemins de fer : quelles manifestations ?

Après-midi
La passion du rail, table ronde animée par Francis BEAUCIRE, avec Yohann MILAN, Patricia ROCHÈS et Baptiste ROUX

Georges RIBEILL : À l'épreuve d'une mondialisation rampante des circulations, le Rail dans le système des transports français (XIXe-XXIe siècles) | Réactions de Francis BEAUCIRE

Soirée
Cabinet de curiosités ferroviaires, animé par Baptiste ROUX


Mercredi 10 septembre
"HORS-LES-MURS" — TRACES ET TRAMES : SUR LE TERRAIN, LA NORMANDIE PAR LE RAIL
Une journée buissonnière dans le train touristique du Cotentin (Carteret—Portbail) avec conférences et arrêts à des points d'intérêt. Trains touristiques et opérateurs de proximité : au croisement de l'intérêt patrimonial et de l'utilité sociale aux échelles de l'économie locale.
Matin & Après-midi
• Archéologie ferroviaire le long des voies désaffectées (patrimoine bâti, lecture de paysage…) (Véronique VESTON)
• Quelques interventions, sur des thématiques normandes :
- La ligne Le Havre – Paris (Christian CHEVANDIER, Paul SMITH)
- Les chemins de fer dans la Manche (Philippe VENTÉJOL)
- L'écologisation des chemins de fer touristiques (Arthur ÉMILE)


Jeudi 11 septembre
LIGNES ET LIEUX. A-T-ON ENCORE DES RAISONS DE S'ATTACHER AU RAIL ?
De même que la France, le ferroviaire présente des visages multiples, mais il investit certains territoires bien plus que d'autres et répond aux attentes de certains groupes sociaux bien plus que d'autres. Dans un pays qui vit de multiples tensions, entre les centres urbains, le périurbain et les bourgs et la campagne, mais aussi du fait des inégalités sociales qui s'accroissent, le train peut-il être un élément de la nécessaire remise en cohérence du pays ? En d'autres termes, à quelles conditions l'attachement au rail peut-il être le ferment d'un attachement plus global, entre groupes sociaux, entre territoires, etc. ?
Matin
Des lignes | Animateur : Jean LEBRUN
Peut-on faire tenir les métropoles par le train ?, table ronde avec Pierre-Henri ÉMANGARD et Pierre HELWIG

Petites lignes et vitalité des espaces moins denses, table ronde avec Pierre-Henri ÉMANGARD, Noé RAYNAUD et Margot WALCK

Après-midi
Des lieux : la gare entre patrimoine, fonctionnalité et design
Laurent COUDROY DE LILLE : La gare, lieu de mémoire

Gares et quartiers de gare, table ronde avec Adrien DUVAL, Stéphanie SAUGET et Alexandrina STRIFFLING

Design et mise en spectacle du rail urbain, table ronde animée par Anne JARRIGEON, avec Pierre-Emmanuel BÉCHERAND (SGP), Yo KAMINAGAI (RATP) et Nils LE BOT (Arep)

Soirée
Soirée littéraire animée par Martine BARTOLOMEI


Vendredi 12 septembre
ÉCOLOGIE : LE RAIL MIS AU DÉFI
L'urgence écologique pèse sur l'enjeu des mobilités. Les processus en cours illustrent une nouvelle bataille modale entre un train dont la victoire est annoncée et ses concurrents directs qui résistent et se renouvellent également, comme l'illustre l'automobile électrique. Rien n'est linéaire dans ce paysage, qui voit se succéder des dynamiques contraires. Comment faire tenir l'impératif d'un changement des pratiques et les coûts attendus comme élevés d'une mobilité plus vertueuse ? Loin des discours dominants, n'assiste-t-on pas à une panne de l'innovation et de l'imagination ?
Matin
Flux et infrastructures, fret et personnes : quelle condition mobile ?
Nathalie ROSEAU : Les paysages du rail : entre attachement et émancipation

L'innovation ne passerait-elle pas par un décloisonnement modal ?, table ronde animée par Étienne FAUGIER, avec Laurent EISENMAN, Mathieu RABAUD et Mariane THÉBERT

Après-midi
Nouvelles pratiques et renouveau populaire
Patricia PÉRENNES & Philippe POINSOT : Peut-on réconcilier les Françaises et les Français avec le train par le tarif ?
Louis BALDASSERONI & Pierre ZEMBRI : Territorialisations du fret ferroviaire : potentialités économiques et nuisances écologiques

Soirée
Autour de Bob Dylan et le train (musique commentée), animée par Paul SMITH


Samedi 13 septembre
LE RAIL, UNE PASSION POLITIQUE SOUS LE REGARD DE L'OPINION
Élues et élus ont pris l'habitude de confier au chemin de fer de ville comme des champs un rôle qui dépasse bien souvent ses pourtant assez larges épaules. En jouant sur l'attachement qu'il suscite, il s'agit de fonder un projet politique et de territoire sur une infrastructure et des services réputés faire échos aux valeurs républicaines françaises. Pourtant, le rail s'inscrit dans un temps long qui dépasse bien souvent les mandats et bien des surprises surgissent des innovations annoncées. Entre débats et études de cas, cette journée interroge la place qu'occupe ou que devrait occuper la rationalité dans l'attachement collectivement porté au rail.
Matin
Rail de ville, rail des champs : quand on aime, on ne compte pas ?
Luc PICOT : Premier cas d'école : la ligne Épinal-Saint Dié et le tunnel de Vanémont
Julie PERRIN & Vincent TOURNIÉ : Deuxième cas d'école : le Grand Paris Express

Après-midi
Politiques du ferroviaire dans un monde incertain
Le ferroviaire et la décision politique : rationalité économique et écologique ou projet social et territorial ?, table ronde avec Maxime HURÉ et Arnaud PASSALACQUA

Mathieu FLONNEAU : Contrepoint. Un autre attachement mis au défi social et écologique : l'automobile

Soirée
Animée par Sylvère AÏT AMOUR


Dimanche 14 septembre
ET MAINTENANT ?
Matin
Restitution, par Armelle CHITRIT
Rapport d’étonnement, dialogue entre la vigie, Jean LEBRUN et les doctorantes et doctorants

Après-midi
DÉPARTS


BIBLIOGRAPHIE :

• Baldasseroni (L.), Faugier (E.) & Pelgrims (C.) (dir.), Histoire des transports et des mobilités en France, XIXe-XXIe siècles, Paris, Armand Colin, 2022.
• Jarrigeon (A.) & Roseau (N.), Condition mobile. Ressorts de l’imaginaire, Gollion, Infolio | Édition, 2024.
• "Le chemin de fer : deux siècles d'enjeux environnementaux", Revue d'histoire des chemins de fer, 2022.
• Schievelbusch (W.), Histoire des voyages en train, Paris, Éditions Le Promeneur, 1990.


SOUTIENS :

• Association Rails & Histoire
• Association Passé-Présent-Mobilité (P2M)
• Laboratoire de l'action collective urbaine (Lab'Urba)


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


HARTMUT ROSA : ACCÉLÉRATION, RÉSONANCE, ÉNERGIES SOCIALES


DU SAMEDI 30 AOÛT (19 H) AU VENDREDI 5 SEPTEMBRE (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]


"Berg und Luft, synthetisch" ("Montagne et air, synthétique")
© Paul Klee (1930)


DIRECTION :

Corine PELLUCHON, Dietmar WETZEL

En présence de Hartmut ROSA


ARGUMENT :

Ce colloque, qui se tient en présence de Hartmut Rosa, commence par faire le point sur les sources de sa pensée, à savoir la Théorie critique et l'œuvre de Charles Taylor. Il s'agit de souligner la manière dont H. Rosa a renouvelé les analyses de la première génération de l'École de Francfort en pensant l'aliénation comme accélération. Tout en se présentant comme un sociologue, H. Rosa s'interroge de manière originale sur l'impact des structures sociales sur le psychisme et les manières d'être, comme on le voit dans Resonanz, opérant ainsi une sorte de greffe de la phénoménologie sur la sociologie.

Ce colloque, qui rassemble des chercheurs internationaux connaissant bien son œuvre, accueille aussi des praticiens utilisant ses concepts dans des domaines comme l'éducation, le travail et l'art. Enfin, une attention particulière est portée aux recherches en cours de H. Rosa sur l'énergie sociale. Ces échanges avec et autour de Hartmut Rosa visent à souligner la fécondité de son approche, qui inspire d'autres penseurs et praticiens, mais aussi à discuter certaines positions de l'auteur en l'invitant à répondre aux interrogations que son œuvre soulève.


MOTS-CLÉS :

Accélération, Aliénation, Démocratie, Écologie, Énergie sociale, Pédagogie, Résonance, Rosa (Hartmut), Théorie critique


CALENDRIER PROVISOIRE (05/06/2025) :

Samedi 30 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Dimanche 31 août
L'ALIÉNATION COMME ACCÉLÉRATION ET LA CRITIQUE DE LA MODERNITÉ
Matin
Corine PELLUCHON & Dietmar WETZEL : Introduction

Hartmut Rosa et la Théorie Critique
Frédéric VANDENBERGHE : Le projet romantique d'une herméneutique critique de la modernité
Olivier VOIROL : Théorie critique et résonance

Après-midi
Inspirations
Simon SUSEN : La théorie critique comme sociologie des relations au monde
Maximilien PRIEBE : La subjectivité face aux apories modernes : réévaluer la théorie de l'accélération sociale via le prisme du surmenage cognitif


Lundi 1er septembre
LA RÉSONANCE COMME REMÈDE ?
Matin
Corine PELLUCHON : Résonance et démocratie
Klaas HUIZING : Heavy metal : la situation clé

Après-midi
Inspirations
Bettina HOLLSTEIN : La résonance et l'engagement bénévole pour le développement durable
Christophe FRICKER : Pouvons-nous rendre nos étudiants heureux ? Une pédagogie "résonante" entre la bureaucratie universitaire et la salle d'apprentissage

Soirée
Concert du jazz club de Normandie, par Kikala I. TRAORÉ alias Jéricho (pianiste), Frédérick LEMARCHAND (contrebasse) et Pascal VIGIER (batterie) | présentation


Mardi 2 septembre
L'ÉNERGIE SOCIALE
Matin
Hartmut ROSA : D'où vient la force motrice ? Vers une théorie de l'énergie sociale circulante

Après-midi
DÉTENTE


Mercredi 3 septembre
HARTMUT ROSA EN DÉBAT (I)
Matin
Charles TAYLOR : La relation entre les connexions cosmiques et la résonance
Dietmar WETZEL : Énergies sociales et émotionnelles : une extension du concept de résonance

Après-midi
Inspirations
Jürgen OBERSCHMIDT : Concept - idée - métaphore - phénomène. Découvrir la résonance dans les pratiques musicales
Arthur BUENO : Résonance et révolution
Charlie RENARD : La philosophie avec les enfants : un laboratoire pour la résonance
Nathanaël WALLENHORST : Résistance, résonance

Soirée
Heavy Metal, spectacle de Sophie BOUREL & Silvia LENZI [Compagnie La Minutieuse] | Présentation


Jeudi 4 septembre
HARTMUT ROSA EN DÉBAT (II)
Matin
Niklaus SCHEFER : À la recherche de la résonance transculturelle
Paul D'AMBROSIO : La résonance comme retour. Discussions sur l'ancrage de la théorie de Rosa et son concept d'authenticité

Après-midi
Inspirations
Rosa Marie KELLER : Décrypter le paradoxe de la résonance en temps de crise politique
Jan SONNTAG : Résonance et démence [visioconférence]

Applications
Accélération, résonance, énergies sociales. Quels usages opérationnels ?, table ronde animée par Sylvain ALLEMAND, avec Nicolas ESCACH, Luc GWIAZDZINSKI, Edith HEURGON et Vincent PETITET


Vendredi 5 septembre
Matin
Synthèse des doctorants, avec Thomas FABRE, Philippe MESLY et Mathieu THÉPIN

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Corine PELLUCHON : Résonance et démocratie
L'un des legs de la première génération de la Théorie critique, qui a vécu l'avènement du nazisme, est de s'interroger sur les causes qui expliquent que les individus soient perméables aux solutions autoritaires et totalitaires du politique. Mais aucun des théoriciens de l'École de Francfort ne s'est borné à établir un diagnostic. Ils ont tous cherché des remèdes à la déshumanisation de la société afin de lutter contre les risques de liquidation de la civilisation qui témoignent des contradictions de la modernité, de son incapacité à créer les conditions du projet d'émancipation individuelle et collective qu'elle promettait. Ainsi, le diagnostic établi par Hartmut Rosa dans Accélération permet d'analyser les formes nouvelles que revêt l'aliénation dans la modernité tardive. Identifiant les pathologies de la société qui s'ensuivent de la perte de sens consécutive à l'accélération (technologique, du changement social et des rythmes de vie), il imagine des contrepoids à la fragmentation de la société et à la désynchronisation entre l'économie et la politique. Ces phénomènes érodent le désir de vivre-ensemble et génèrent des frustrations liées au sentiment d'impuissance et à une colère à l'endroit des représentants politiques accusés de ne pas répondre aux problèmes sociaux (de manière suffisamment rapide et efficace). Autrement dit, le diagnostic porté par H. Rosa sur le malaise social tel qu'il est vécu de nos jours signifie que la démocratie est exposée à des risques majeurs, y compris en Europe. C'est pour remédier à cette situation que H. Rosa, opérant une greffe de la phénoménologie sur la sociologie mais travaillant toujours à l'intersection entre les structures de la subjectivité et les structures sociales et économiques, propose sa théorie de la résonance. Tout en soulignant la pertinence et la fécondité de cette théorie quand on se place à un niveau local ou qu'on l'applique au travail, à la médecine ou à la pédagogie, nous soulèverons les problèmes que suscite l'idée d'une démocratie résonante. S'il est fondamental de concevoir une énergie sociale qui rassemble les êtres, au lieu d'exacerber leurs divisions, l'objection classique faite à Hartmut Rosa, à savoir que la résonance pensée à l'échelle d'un peuple et même l'idée d'une énergie sociale ayant une vertu dynamogénique (pour parler comme Durkheim) pourraient être récupérées par les mouvements nationalistes, a du sens. Ce questionnement, qui ouvrira sur un dialogue avec Hartmut Rosa, sera l'occasion de rappeler ses sources et de mettre au jour certains aspects de la sensibilité du sociologue, en soulignant notamment le rôle que joue le romantisme dans son œuvre. Nous ferons quelques propositions attestant une sensibilité différente, marquée par la prise en compte de la destructivité humaine et par la nécessité d'offrir des ressources individuelles et collectives permettant d'éduquer à la démocratie en considérant l'ambivalence de l'humain.

Corine Pelluchon est professeure à l'université Gustave Eiffel. Spécialiste de philosophie morale et politique et d'éthique appliquée (médicale, animale et environnementale), elle est l'auteure d'une vingtaine d'ouvrages, traduits pour la plupart dans plusieurs langues. Tout en s'inscrivant dans l'héritage des Lumières et de la phénoménologie, elle développe une philosophie de la corporéité qui insiste sur notre vulnérabilité et notre dépendance à l'égard de la nature et des autres vivants et en montre les implications sur le plan éthique, juridique et politique. Elle a reçu, en Allemagne, le Prix Günther Anders de la pensée critique pour l'ensemble de ses travaux en 2020 et, en 2025, le prix Leopold Lucas, décerné par l'université de Tübingen.
Derniers ouvrages parus
Les Lumières à l'âge du vivant, Seuil, 2021, 2022.
L'espérance, ou la traversée de l'impossible, Rivages, 2023.
L'être et la mer. Pour un existentialisme écologique, PUF, 2024.
La démocratie sans emprise ou la puissance du féminin, Rivages, 2025.

Dietmar WETZEL : Énergies sociales et émotionnelles : une extension du concept de résonance
La sociologie des énergies sociales et émotionnelles examine les forces affectives et émotionnelles qui animent les relations sociales. Inspirée des travaux de Gabriel Tarde, Henri Bergson, Gilles Deleuze et Hartmut Rosa, elle met en lumière la manière dont les interactions humaines génèrent des énergies collectives. Tarde montre que l'imitation d'affects et d'émotions alimente ces dynamiques, tandis que Bergson explique leur origine en insistant sur l'élan vital, qui désigne une force créative et transformative. Deleuze souligne, quant à lui, l'intensité des affects qui circulent dans des réseaux rhizomatiques, transformant constamment les relations sociales. Rosa, enfin, relie ces processus aux défis contemporains, où la résonance devient une réponse à l'aliénation. Cette approche montre comment les affects et les émotions façonnent et transforment les sociétés modernes, ce que nous illustrerons par des exemples concrets.

Dietmar J. Wetzel est Professeur de Sciences Sociales et Directeur du Département de Pédagogie depuis 2019 à la MSH Medical School de Hambourg. Il est chargé de cours à l'université de Bâle et à la ZHAW de Winterthur.
Publications
Affektregister der Gegenwart - soziologisch-philosophische Reflexionen, Wiesbaden, Springer VS, 2025.
Handbuch Sozialwissenschaftliche Resonanzforschung (Co-éditeur), Wiesbaden, Springer VS, 2025.


Arthur BUENO : Résonance et révolution
La relation entre résonance et révolution est loin d'être évidente. La théorie de Hartmut Rosa élargit la critique marxienne du capitalisme tout en visant à transformer les conditions de la modernité par une révolution simultanée et concertée au niveau politique, économique et culturel. Cependant, sa théorie de la résonance invite également à une certaine prudence à l'égard des aspects fondamentaux des approches marxistes de l'émancipation sociale. En effet, l'accent que Rosa place sur la réceptivité et l'indisponibilité des relations résonantes au monde contraste avec l'importance accordée, dans les théories révolutionnaires, à l'action et au contrôle. De plus, la résonance démocratique, en tant que mode de stabilisation "adaptatif", s'oppose à l'antagonisme qui est associé aux relations au monde "répulsives" et qui joue un rôle crucial dans la conception marxiste du changement social. Ainsi, une lutte pour la résonance pourrait sembler contradictoire : les moyens mobilisés (action, conflictualité) risquent de compromettre les finalités poursuivies (réceptivité, indisponibilité et adaptation). Pourtant, je défendrai l'idée selon laquelle le concept de résonance est politiquement compatible avec les luttes pour une transformation de la société et même qu'il leur est intrinsèquement lié. En revisitant l'analyse de Georg Lukács sur la conscience révolutionnaire à travers le prisme de la théorie de H. Rosa, il devient possible de montrer que les relations résonantes au monde émergent des luttes collectives contre l'aliénation.

Arthur Bueno est maître de conférences à l'université de Passau, affilié à l'université Goethe de Francfort et à l'université de São Paulo. Ses recherches portent sur la théorie sociale et la théorie critique. Il examine les déterminants sociaux et les implications politiques des formes de subjectivité. Il est vice-président de la Georg Simmel Gesellschaft et président du comité RC35 de l'Association internationale de sociologie.
Publications
Bueno, A., "Doing Away with the Spectre of Regression : Adorno and the Paradox of Authoritarianism", Critical Horizons : A Journal of Philosophy and Social Theory (à paraître).
Bueno, A., "The End (and Persistence) of Subjectivity : Lukács with Adorno, Adorno with Lukács", Distinktion : Journal of Social Theory, vol. 25, n°3, 2024, p. 435-454.
Bueno, A., Teixeira, M. et Strecker, D. (éds.), De-Centering Global Sociology : The Peripheral Turn in Social Theory and Research, Londres, Routledge, 2022.
Rosa, H., Henning, C. et Bueno, A. (éds.), Critical Theory and New Materialisms, Londres, Routledge, 2021.

Paul D'AMBROSIO : La résonance comme retour. Discussions sur l'ancrage de la théorie de Rosa et son concept d'authenticité [Resonance as Returning : Engaging with Hartmut Rosa Beyond Authenticity]
Hartmut Rosa plaisante souvent, quand il parle en anglais, en disant qu'il aime utiliser les "trois A" dans son travail. Par exemple, il utilise les termes "available" (disponible), "attainable" (réalisable) et "accessible" (accessible) comme thèmes centraux de sa théorie de l'accélération. Ces A caractérisent la société contemporaine. Sa solution introduit un R, à savoir la résonance. Cependant, il s'appuie sur un fondement philosophique d'authenticité ("authenticity"). Ainsi, un autre mot commençant par A a envahi l'espace où les R devraient dominer. Que se passe-t-il si on met les A de côté et que l'on remplace la résonance basée sur l'authenticité ("authenticity-based resonance") par une résonance basée sur le retour ("returning-based resonance") ? Tel est l'objectif que je poursuis ici en montrant que H. Rosa a a sous-estimé l'importance des profils et qu'il s'appuie surtout sur une théorie de l'authenticité pour comprendre les individus. De même, si, dans sa théorie de la résonance, H. Rosa indique que la première étape est "l'affection", c'est-à-dire que quelque chose qui "nous touche de l'extérieur", il indique que la deuxième étape est la réponse du sujet (auto-efficacité, puis le fait qu'il fasse entendre sa "propre voix"), tandis que la troisième étape implique la transformation significative de la personne. Or cette description soulève des problèmes qui ont trait à l'authenticité. En présentant une approche inspirée de la pensée taoïste classique, je présenterai une théorie différente de la résonance, basée sur la reconnaissance de notre interconnexion avec le tout.

Paul J. D'Ambrosio enseigne la philosophie chinoise à East China Normal University à Shanghai, China, où il est aussi directeur du ECNU's English-language MA et du programme doctoral et chair du centre interculturel. Il est l'auteur avec Hans-Georg Moeller de You and Your Profile (Columbia University Press, 2021), Genuine Pretending (CUP 2017) et éditeur avec Michael Sandel de Encountering China : Michael Sandel and Chinese Philosophy (Harvard University Press, 2018).

Christophe FRICKER : Pouvons-nous rendre nos étudiants heureux ? Une pédagogie "résonante" entre la bureaucratie universitaire et la salle d'apprentissage
La pédagogie de la résonance est l'application aux salles de cours de la théorie du même nom. Elle pose que l'apprentissage est à la fois plus agréable et plus efficace dans le cadre de relations résonantes. Or, puisque la résonance ne saurait être manufacturée, ni les professeurs, ni les élèves, ni surtout les administrations d'université ne peuvent avoir la certitude que les objectifs visés seront effectivement réalisés. Dans cette intervention, je proposerai tout d'abord un tour d'horizon d'initiatives d'universités actuelles cherchant à donner l'impression, problématique, que le succès dans les études peut être garanti. J'analyserai les moyens que les pédagogues, que ce soit à l'échelle individuelle et quelle que soit leur place dans la hiérarchie, ont d'affirmer leur agentivité et d'accéder par là à l'auto-efficacité, qui est le préalable de la résonance. Dans un second temps, j'examinerai si celle-ci a davantage de chances d'advenir si l'on cesse de traiter, à l'instar de nombreuses institutions d'aujourd'hui, élèves et personnels universitaires comme deux corps disjoints. J'envisagerai les perspectives prometteuses offertes par la co-conception et prendrai l'exemple de l'évaluation, qui est un aspect de l'éducation supérieure particulièrement conflictuel et souvent démoralisant pour les personnes impliquées. Enfin, en m'appuyant sur des données empiriques et quantitatives, je défendrai l'idée selon laquelle la résonance trouve ses catalyseurs moins dans les politiques institutionnelles ou dans l'expression d'une "voix étudiante" que chez les enseignants eux-mêmes.

Christophe Fricker est professeur associé en allemand et en traduction à l'université de Bristol, Fellow de la Higher Education Academy et Associate du Bristol Institute for Learning and Teaching. Il formule des recommandations méthodologiques en pédagogie de la résonance à destination des universités. Il enseigne aux côtés d'Hartmut Rosa dans le cadre d'écoles d'été de la Deutsche SchülerAkademie depuis 2014 et il est le traducteur en anglais de certains de ses essais parmi les plus influents.

Bettina HOLLSTEIN : La résonance et l'engagement bénévole pour le développement durable
Le développement durable est une nécessité que les nations du monde ont bien compris. Le programme 2030 pour le développement durable avec ses 17 objectifs (SDG) a été signé par 193 nations en 2015 et, depuis les années 1970, les scientifiques ne cessent d'alerter sur les problèmes écologiques, sociaux et économiques qui sont directement liés à notre façon de vivre dans le monde moderne pris dans une accélération globale. Pour Hartmut Rosa, l'accélération concerne le développement technique et économique, les changements sociaux et les rythmes de vie, c'est-à-dire qu'il touche aussi le niveau individuel, ce qui génère stress et dépression. Cependant, comprendre la nécessité de changer notre façon de vivre dans le sens d'un développement durable ne suffit pas à nous motiver à agir en ce sens. La théorie de la résonance de Hartmut Rosa peut nous aider à résoudre ce problème. Je parlerai des moments de résonance que des personnes éprouvent quand elles s'engagent bénévolement pour des projets qui leur sont chers ; elles se sentent appelées à agir et répondent à cet appel. La résonance change les personnes qui en font l'expérience. Mais comme elle reste imprévisible et ne peut pas être commandée, on peut se demander quel est son impact réel sur le plan écologique. M'appuyant sur des observations empiriques, je me demanderai si une expérience de résonance peut changer les habitudes individuelles et comment. Je confronterai la théorie de H. Rosa avec celle de John Dewey pour réfléchir à la relation entre le fait d'apprendre et la transformation de soi.

Bettina Hollstein est professeure à l'université d'Erfurt et responsable du management du Max-Weber-Kolleg. Elle travaille sur l'éthique économique et s'intéresse en particulier à la théorie pragmatiste de l'action, qu'elle étudie en réfléchissant notamment au bénévolat et au développement durable.
Publications
Hollstein, B., Rosa, H., Rüpke, J. (éds.), "Weltbeziehung". The Study of our Relationship to the World, Frankfurt/New York, Campus 2023.
"Learning by Doing' in Higher Education. Empirical Insights into Education for Sustainable Development", in RIAEE, Araraquara v, 19, n. esp. 1, 2024. p. 1-26 (with João Tziminadis and Pia Schrage).

Klaas HUIZING : Heavy metal : la situation clé
La théologie s'inspire volontiers d'autres disciplines — traditionnellement de la philosophie et désormais de la psychologie, de la sociologie, de la politologie, de la littérature, des sciences de l'image, etc. — pour penser le phénomène religieux. Actuellement, le sociologue Hartmut Rosa compte parmi les auteurs les plus appréciés en théologie. Dans son opus magnum Resonanz, il place (encore) la religion primo loco sur l'axe vertical de résonance. Je voudrais plaider ici pour un changement de regard. Ce n'est pas le livre Resonanz, ni l'ouvrage Demokratie braucht Religion qui me sert ici de référence, mais l'ouvrage que Rosa a écrit avec son cœur : When Monsters roar and angels sing. Une petite sociologie du heavy metal. Dans ce livre, Rosa travaille sur les notions de sacré sans nommer explicitement Rudolf Otto. Le heavy metal devient un modèle idéal de "peak experiences" qui interrompent la réification, et fait un pied de nez à l'industrie culturelle. À partir de là, il faudra se demander quel est le rapport entre ces expériences extraordinaires et les autres expériences de résonance. Dans le monisme normatif de Rosa, n'y a-t-il pas une gradation entre les petites transformations et la grande transformation qui crée une orientation plus fondamentale propice à la vie ?

Klaas Huizing, théologien nééerlandais, romancier, professeur et docteur, occupe la chaire de théologie systématique et d'éthique à l'université de Würzburg. Il est membre, en tant qu'écrivain, du PEN Club.
Dernières publications
Scham und Ehre. Eine theologische Ethik, Gütersloh, 2022.
Lebenslehre. Eine Theologie für das 21. Jahrhundert, Gütersloh, 2025.
Das Testament der Kühe, Roman, Tübingen, 2020.

Rosa Marie KELLER : Décrypter le paradoxe de la résonance en temps de crise politique
Les démocraties du XXIe siècle sont confrontées à des contraintes croissantes alimentées par de multiples crises économiques, écologiques et géopolitiques, et elles se heurtent au désenchantement du public à l'égard de la politique et à la montée en puissance des partis nationalistes. Il importe d'examiner les réponses adéquates à ces crises et de s'interroger sur les ingrédients majeurs qui peuvent rendre les démocraties résilientes. En m'inspirant des concepts d'aliénation et de résonance propres à Hartmut Rosa, je présenterai les résultats d'une recherche empirique à méthodes multiples qui explore la démocratie allemande en s'appuyant sur les représentations sociales. Il s'agira de discuter les résultats qui soulignent le rôle que joue la polyphasie cognitive dans la résilience démocratique. La polyphasie cognitive conceptualise un état dans lequel un individu conserve et utilise plusieurs systèmes de connaissances pour donner un sens à un objet social donné. Les résultats des recherches empiriques montrent que la résilience démocratique est plus forte chez les individus qui ont simultanément des représentations aliénées et résonnantes de la démocratie sans avoir besoin de tomber dans l'un ou l'autre camp. Au contraire, les individus aliénés et indifférents dont les représentations affichent des logiques de dissonance cognitive tombent dans un certain désenchantement et se coupent de la démocratie. L'objectif est d'examiner les implications potentielles de ces résultats à la fois sur le plan pratique (éducation démocratique, activisme et valeurs) et sur le plan théorique, en remettant en question conceptuellement la dichotomie des concepts d'aliénation et de résonance de Hartmut Rosa. Il convient de prendre au sérieux les implications du "paradoxe de la résonance", où les individus les plus résonnants par rapport à la démocratie sont peut-être ceux qui ont des représentations polyphasiques, englobant simultanément la résonance et l'aliénation, ce qui fait de la capacité de polyphasie cognitive une caractéristique majeure de la résilience démocratique au XXIe siècle.

Rosa Marie Keller est Doctorante à l'université Friedrich-Schiller-Universität Jena (sous la direction de H. Rosa) et à l'Institute of Sociology & London School of Economics and Political Science, Department of Psychological and Behavioural Science.

Jürgen OBERSCHMIDT : Concept - idée - métaphore - phénomène. Découvrir la résonance dans les pratiques musicales
À la question de savoir ce qu'est en fait un chef d'orchestre, Sergiu Celibidache a répondu un jour : "Derrière tout chef d'orchestre se dissimule un dictateur qui se contente, fort heureusement, de la musique". Nous nous retrouvons face à cette dualité diriger/se laisser guider dès les premiers stades de l'apprentissage de la musique. En effet, dans les cours de violon, par exemple, on nous enseigne la tenue de l'archet et nous apprenons comment phraser un thème puis produire différents timbres : "On attend souvent de l'apprenti qu'il intériorise la leçon du maître par osmose, pour ainsi dire. Le maître montre comment réussir quelque chose et l'apprenti doit trouver où est la clé" (Richard Sennet). Ainsi, le chef d'orchestre, tel un artisan, façonne le son collectif, guidant chaque instrumentiste vers une interprétation commune. Il s'agit avant tout de créer une harmonie finale. Quelles conséquences faut-il tirer de telles conceptions de la pratique musicale pour l'enseignement de la musique ? Comme Andreas Gruschka l'a dit en parlant du topos de la "froideur bourgeoise", entraîner les enfants en les dressant reflète une éthique de l'apprentissage qui est "comme le résultat de pressions sociales reproductives" profondément ancrées dans notre système éducatif. Or, si nous voulons répondre par la musique et l'enseignement de la musique aux discours sociaux et politiques qui s'imposent à nous, nous pourrions nous inspirer de Daniel Barenboïm, pour qui la pratique et la réception de la musique sont liées à des procédés de mise en accord et à tout un ensemble de représentations individuelles : "La partition d'une grande œuvre contient de nombreuses "solutions"". Ainsi, les auditeurs et les musiciens prennent part à un événement de résonance.

Jürgen Oberschmidt est professeur de musique et de didactique à l'université pédagogique de Heidelberg. Après des études à l'université de Musique, Théâtre et Médias de Hanovre, il a travaillé comme professeur de musique et d'allemand dans une école secondaire de Rhénanie du Nord-Westphalie et comme professeur de formation à l'université de Kassel. Il est président de la Société internationale Leo Kestenberg, du New Music Network Baden-Württemberg et président de l'Association fédérale pour l'éducation musicale (BMU).
Publications
Oberschmidt, Jürgen (2024), "Plädoyer für eine Rückkehr des Staunens. Gedanken über Musikunterricht in einer verwunderungsfreien Schule", in Heiner Gembris, Bianca Maria Herbst, Sebastian Herbst & Kristin Sander-Steinert (Hg.), Musik erleben - erforschen - vermitteln. Begegnungen mit Thomas Krettenauer, Münster, LIT., p. 89-107.
Oberschmidt, Jürgen (2023), "Resonanz. Musikpädagogische Überlegungen zu einem vielstimmig-schillernden Begriff", in Georg Biegholdt, Martina Benz, Jürgen Oberschmidt (Hg.), Resonanz. Tagungsband zum 5. Bundeskongress Musikunterricht in Mannheim, Mainz, Schott, p. 6-19.
Oberschmidt, Jürgen (2022), "Musik(-unterricht) zwischen Divertimento und Etüde. Über das Spannungsverhältnis zwischen fremdgesteuertem Anpassungsdruck, musikimmanenten Steigerungsstrategien und kontemplativen Zugängen", in Andrea Ellmeier u. Doris Ingrisch (Hg.), Muße, Musen und das Müssen. Wissen und Geschlecht in Musik - Theater – Film, Wien, Köln, Böhlau Verlag, p. 103-123.

Maximilien PRIEBE : La subjectivité face aux apories modernes : réévaluer la théorie de l'accélération sociale via le prisme du surmenage cognitif
Il s'agit d'examiner la théorie de l'accélération sociale de Hartmut Rosa qui est majeure pour comprendre une aporie centrale de la modernité, à savoir la nécessité paradoxale de ne pouvoir se stabiliser que "dynamiquement", c'est-à-dire de ne pouvoir garantir l'ordre que par une logique d'augmentation continue. Dans ce contexte, une dichotomie conceptuelle sera remise en question : celle de "l'accélération" et de "l'aliénation". Pour Rosa, ces deux concepts sont complémentaires dans la mesure où chaque accélération sociale comporte des risques d'aliénation que seul un rapport résonant au monde peut surmonter. Je propose de prendre du recul par rapport à cette constellation de concepts pour m'interroger sur ce qu'il advient de l'approche explicative de Rosa quand on remplace la ligne théorique de l'aliénation — de Marx, de Weber et de Taylor — par des présupposés plus orientés vers les sciences culturelles, en éclairant, par exemple, sa sociologie par l'héritage de Georg Simmel. Ainsi, l'accent sera mis sur cette décompensation de la subjectivité — que Simmel décrit comme "tragédie de la culture" — qui consiste en un surmenage avant tout cognitif du sujet face à un débordement dû à la complexité du monde. On ne peut déduire que dans un deuxième temps que cette forme de déracinement spirituel est une aliénation généralisée. De cette manière, envisager une "sociologie du rapport au monde", non seulement à travers des relations corporelles, affectives et existentielles, mais aussi dans ses dimensions épistémiques et cognitives, pourrait permettre, par un recours critique à l'appareil conceptuel de Rosa, de trouver de nouvelles réponses aux problèmes auxquels font face les individus dans les "sociétés du savoir" contemporaines (surcharge informationnelle, difficultés d'orientation ou perte des connaissances générales).

Maximilian Priebe est doctorant à la chaire de sociologie générale et théorique de l'université d'Iéna, sous la direction de Hartmut Rosa. Il a obtenu un master en histoire et théorie politique de l'université de Cambridge ainsi qu'un master en philosophie sociale de l'EHESS, Paris. Dans ce cadre, il s'est notamment intéressé aux réactions philosophiques aux problèmes de la division du travail. Son projet de recherche porte sur le surmenage du sujet moderne.
Publications
"Edgar Morin – Kosmologe der Komplexität. Porträt eines transdisziplinären Intellektuellen", Kulturwissenschaftliche Zeitschrift (2023), 96–123.
"Lire ou voir ? Ernst Cassirer et Hans Blumenberg sur la pensée et l'image", Revue d'Allemagne et des pays de langue allemande, 56 (2024), 225-242.
"The "Science" of Political Economy – A Victory for Common Sense ?", Journal of Contextual Economics – Schmollers Jahrbuch (2024).

Charlie RENARD : La philosophie avec les enfants : un laboratoire pour la résonance
Harmut Rosa est depuis 2019 le parrain de la Chaire Unesco sur la philosophie avec les enfants. La volonté de démocratiser la philosophie dès le plus jeune âge s'inscrit dans des préoccupations à la fois éthiques (reconnaissance de l'enfant comme sujet) et politiques (offrir de espaces d'émancipation, d'esprit critique et d'ouverture d'esprit pour toutes et tous sans discrimination d'âge, de sexe ou de classe sociale). H. Rosa soutient la thèse que notre modernité tardive est caractérisée par une pression constante, soumettant les individus, adultes et enfants confondus, à un rythme effréné. Ils font désormais face au monde sans pouvoir l'habiter et parvenir à se l'approprier. Ce sentiment d'avoir en permanence à se hâter ("dépêche-toi" serait la phrase la plus entendue par les enfants au quotidien), à être constamment débordé, l'intériorisation des valeurs de compétition, de performance et d'individualisme génèrent une angoisse, une culpabilité diffuse et un sentiment de perte de sens. On n'a plus prise sur son existence et sur la marche du monde, ce qui entraîne un "déficit de résonance" allant jusqu'à mettre en péril le modèle démocratique (tout va trop vite, tout se confond, se délite, s'inverse, le vrai/le faux, le juste/l'injuste). Les ateliers de philosophie avec les enfants et les adolescents — en leur offrant des oasis de pensée et de décélération qui les amènent à prendre le temps de rentrer en résonance avec eux-mêmes, avec les autres, avec les œuvres et avec le monde — sont un des leviers pour reprendre part au processus d'émancipation. Ces pratiques visent à répondre aux crises politiques contemporaines en luttant contre le relativisme des opinions et le dogmatisme des idéologies. Dans cette communication, je montrerai comment les ateliers de philosophie avec les enfants nous montrent ce que devrait être l'école et l'éducation au quotidien dans une perspective démocratique et humaniste : "une école philosophique" qui résonne avec toutes les préoccupations traversant l'œuvre et la pensée d'Hartmut Rosa.

Hartmut ROSA : D'où vient la force motrice ? Vers une théorie de l'énergie sociale circulante
La conférence part de l'observation que la société moderne tardive souffre d'une double crise liée à l’énergie. En effet, elle a besoin de toujours plus de ressources physiques et d'énergie (fossile, solaire et nucléaire) pour maintenir sa structure institutionnelle. Ce faisant, elle épuise la planète et aggrave le réchauffement climatique. Bien plus, il semble qu'il y ait également un épuisement politique, qui réside dans le fait que, malgré une intensification des querelles politiques, un changement social véritable devient de plus en plus improbable. D'un autre côté, la société exige des individus qu'ils dépensent de plus en plus d'énergie psychique : la croissance, l'accélération et l'augmentation constante de l'innovation, qui sont structurellement indispensables, ne sont possibles que si les sujets cherchent sans cesse à augmenter leur performance. Ainsi, on assiste de plus en plus à une sorte d'épuisement psychique qui génère dépression et burn-out. Il est évident que quelque chose ne va pas dans l'équilibre énergétique de la société moderne, tant d'un point de vue structurel que culturel : elle doit en faire toujours plus pour se maintenir et semble disposer de toujours moins d'énergie. Malheureusement, il n'existe pas encore un concept d'énergie propre aux sciences sociales : lorsqu'il est question d'énergie, il s'agit soit d'énergie physique, soit d'idées ésotériques. L'objectif de cette contribution est de développer, à la suite d'Émile Durkheim et de Randall Collins, un concept d'énergie sociale circulante. Celle-ci ne doit pas être comprise comme une agrégation d'énergies motrices individuelles, mais elle naît de l'interaction et dans l'interaction. Elle se multiplie en quelque sorte elle-même : elle ne peut pas être modélisée selon le schéma input-output, mais constitue une puissance dynamique collective d'un type particulier. Ce n'est qu'en comprenant celle-ci que nous pouvons analyser les conditions dans lesquelles les acteurs sociaux, les mouvements et les sociétés peuvent déployer de l'énergie.

Hartmut Rosa (1965) est professeur de sociologie générale et théorique à l'université Friedrich-Schiller de Iéna depuis 2005 et directeur du Max-Weber-Kolleg à l'université d'Erfurt depuis 2013. Il est également directeur du domaine de recherche spécial de la DFG "Strukturwandel des Eigentums" (Changement structurel dans la propriété), qui a commencé ses travaux en 2021. Il a également été professeur invité à la New School for Social Research à New York et à la FMSH/EHESS à Paris. De plus, il était éditeur de revue Time & Society et maintenant il co-édite Berliner Journal für Soziologie. En 2023, il a reçu le prix Leibniz, le prix scientifique allemand le plus prestigieux. Il a notamment publié Accélération (2005), Résonance (2016) et Rendre le monde indisponible (2018).

Niklaus SCHEFER : À la recherche de la résonance transculturelle
Le terme "résonance" est un concept relativement moderne. Son utilisation métaphorique s'est rapidement imposée dans les sciences sociales et humaines. Hartmut Rosa a montré que les sociétés modernes avaient besoin de résonance, héritage du romantisme, pour sortir de l'aliénation. Dans ma contribution au sein des disciplines de la philosophie et de la sinologie, je m'intéresse à la façon dont ces termes sont perçus dans d'autres cultures et j'analyse les concepts chinois qui décrivent ce phénomène esthétique et social. Les caractères spécifiques pour "résonance" sont 韵 (韻) yùn ou 气韵 (氣韻) qìyùn. Issus de la théorie classique de l'art, ils signifient la résonance qu'une œuvre d'art réussie est capable de déclencher. Le terme est établi dès le Ve siècle et s'applique à toute l'histoire de l'art d'Asie de l'Est. Mon étude se concentre sur la relation entre la résonance, le romantisme et certains aspects d'un "proto-modernisme". Cela est illustré par des exemples de la peinture de paysage chinoise de la dynastie Song, qui témoigne des évolutions révélatrices d'une conception résonnante de l'art. Ces illustrations visent à montrer que, dans un contexte culturel différent, les ingrédients de ce que nous comprenons par romantisme et par réaction au rationalisme et aux Lumières (c'est-à-dire à un mouvement proto-moderne), sont apparus au moins 800 ans plus tôt et se sont imposés dans la théorie de l'esthétique. Ainsi, il me semble que la relation entre les phénomènes que Rosa décrit en analysant des sociétés des XXe et XXIe siècles dans les pays occidentaux est également valable pour d'autres cultures et d'autres époques. J'essaie d'en tirer des conclusions transculturelles.

Niklaus Schefer est professeur de philosophie, psychologie, sociologie et du chinois au lycée de Thoune (Suisse). Il est également membre de la direction de l'école et travaille sur des thèmes philosophiques, transculturels et pédagogiques.
Publications
Schefer, N. (2020), "Enlightenment and Freedom in a Confucian Way", in Reichenbach R. Kwak, D.-J., Confucian Perspectives on Learning and Self-Transformation, Springer.
Schefer, N. (2024), "Umwandlungen und Einsichten, Episoden aus der Geschichte unserer Bildungsinstitution(en) anlässlich des Jubiläums "100 Jahre Hauptgebäude Seefeld" mit drei Einsichten für die Zukunft" [en ligne].
Schefer, N. (2021), "Maturity and Modernity in East and West (The Philosophical Concept of 萬物一體 (wanwu yiti) and its Educational and Political Relevance)", published in academia.edu.

Jan SONNTAG : Résonance et démence
Au cours des dernières années, l'image publique et professionnelle de la démence s'est formée de manière complexe, discutée par de nombreuses disciplines — pas seulement la médecine. La forte incidence des phénomènes démentiels dans les populations vieillissantes des pays industrialisés est un énorme défi pour les sociétés concernées. La perte de la mémoire et de la capacité de penser est particulièrement éprouvante car l'humain est souvent associé à ces compétences : cogito ergo sum. Nous pouvons même parler à ce sujet d'une société hypercognitive. Cela conduit à une approche purement déficitaire de la démence. Pourtant, il existe d'autres approches axées sur les ressources et ces perspectives anthropologiques et phénoménologiques montrent que la cognition intacte n'est pas la condition sine qua non de la qualité de la vie. Dans ma spécialité, la musicothérapie, j'ai pu développer au cours des dernières années un traitement centré sur l'expérience et sur la création d'atmosphères. Je définis la catégorie centrale de l'atmosphère thérapeutique comme un espace de résonance qui permet de se sentir à l'aise en communauté malgré des troubles cognitifs importants. Avec Hartmut Rosa, je comprends la démence comme un rapport au monde qui devient silencieux. J'expliquerai cela et soulignerai l'importance que peut avoir la rencontre thérapeutique en tant qu'espace de réponse.

Jan Sonntag est musicothérapeute diplômé et professeur de musicothérapie à la MSH Medical School de Hambourg. Il a suivi des études de musicothérapie à la Fachhochschule de Heidelberg. Depuis 1999, il est praticien, chercheur, conseiller et enseignant spécialisé dans la démence. En 2013, il obtient un Doctorat à l'École supérieure de musique et de théâtre de Hambourg.
Publications
Sonntag, J. (2016), "Atmosphere – an Aesthetic Concept in Music Therapy with Dementia", Nordic Journal of Music Therapy, 25/3, 216-228.
Sonntag, J. (2024), Demenz und Atmosphäre. Musiktherapie als ästhetische Arbeit. 3. Auflage, Frankfurt, Mabuse.
Sonntag, J., Goditsch, M. J., Storf, M. (2023), "Soziologische Resonanztheorie und ihre Relevanz für die Musiktherapie", Musiktherapeutische Umschau 44/4, 323-335.

Simon SUSEN : La théorie critique comme sociologie des relations au monde [Critical Theory as a Sociology of World-Relations ?]
Il s'agit d'examiner le concept de résonance de Hartmut Rosa. À cette fin, l'analyse est divisée en quatre parties. La première partie élucide ce concept en insistant sur la manière dont Rosa distingue les "axes de résonance" horizontaux, diagonaux et verticaux et en montrant leur rôle dans la construction de différentes relations au monde. La deuxième partie est centrée sur l'aliénation : dans quelle mesure est-elle un élément central des formes de vie modernes et de la condition humaine ? La troisième partie aborde la dialectique de la résonance et de l'aliénation. Je défends l'hypothèse selon laquelle elles sont antithétiques et soutiens que leur étude approfondie fournit des paramètres normatifs permettant de distinguer la "bonne vie" de la "mauvaise vie". La dernière partie examine la tentative de Rosa de défendre son esquisse d'une théorie sociologique de la résonance contre les objections soulevées par ses détracteurs. Cela comprend une évaluation point par point de son plaidoyer pour une sociologie des relations au monde axée sur la résonance. Enfin, je montre qu'en dépit des problèmes qu'elle peut soulever, l'approche de Rosa représente l'un des développements les plus prometteurs de la théorie critique du XXIe siècle.

Simon Susen est professeur de sociologie à l'université de Londres depuis 2011. Il a obtenu son doctorat de l'université de Cambridge en 2007. Il est professeur associé à l'université Andrés Bello in Santiago, Chile , membre associé du Bauman Institute et, avec Bryan S. Turner, éditeur du Journal of Classical Sociology.
Publications
Humanity and Uncontrollability : Reflections on Hartmut Rosa's Critical Theory, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 324 pp. (2024).
"Twenty-Five Theses on the Task of the Translator : With, against, and beyond Walter Benjamin", Revista Portuguesa de Filosofia, 80 (1–2), pp. 197–270 (2024).
"The Interpretation of Cultures : Geertz Is Still in Town", Sociologica – International Journal for Sociological Debate, 18 (1), pp. 25–63 (2023).
"A New Structural Transformation of the Public Sphere ? With, against, and beyond Habermas", Society, 60 (6), pp. 842–867 (2023).
"Towards an Ontology of Contemporary Reality ?", Theory, Culture & Society, 40 (7–8), pp. 33–55 (2023).
"Lessons from Reckwitz and Rosa : Towards a Constructive Dialogue between Critical Analytics and Critical Theory", Social Epistemology, 37 (5), pp. 545–591 (2023).

Charles TAYLOR : La relation entre les connexions cosmiques et la résonance
Cette intervention sera une tentative pour démontrer la manière dont le concept de "résonance" que propose Hartmut Rosa est indispensable lorsque l'on essaie de décrire certaines expériences qui nous inspirent, qu'elles soient spirituelles, éthiques ou provoquées par la nature.

Publications
Taylor, C., Les sources du moi : La formation de l'identité moderne, Paris, Seuil / Boréal, 1998.
Taylor, C., Multiculturalisme : Différence et démocratie, Aubier, 1993.
Taylor, C., L'âge séculier (trad. de l'anglais), Paris, Seuil / Boréal, 2011.
Taylor, C., Cosmic Connections. Poetry in the Age of Disenchantment, Harvard University Press, 2024.

Frédéric VANDENBERGHE : Le projet romantique d'une herméneutique critique de la modernité
L'École de Francfort est désormais une tradition centenaire. Devenu célèbre grâce à ses livres sur l'accélération et la résonance, Hartmut Rosa est le représentant le plus connu de la quatrième génération de la Théorie critique. Pour bien comprendre d'où il vient et où il va, il faut toutefois resituer sa pensée dans la tradition d'une herméneutique critique de la modernité qui s'inspire, dès sa thèse de doctorat jusqu'à ses réflexions plus récentes sur l'énergie physique, sociale et cosmique, de la philosophie sociale de Charles Taylor. La question centrale qui anime son œuvre est la même que celle de Wilhelm Dilthey, Max Weber et Charles Taylor : Quel type d'humanité produit la modernité ? Peut-on imaginer une autre modernité, une autre humanité et une autre relation au monde que celles héritées des philosophes des Lumières qui cherchent à dominer et à contrôler le monde ? Le pari de Rosa est qu'une réactivation du programme philosophique du romantisme est possible et donc que nous pouvons promouvoir une relation au monde qui ne se caractérise plus par l'aliénation et la réification qui conduisent l'humanité vers des crises multiples.

Frédéric Vandenberghe est professeur de sociologie à l'université fédérale de Rio de Janeiro et collaborateur associé au centre de recherche "Zukunfte der Nachhaltigkeit" à l'université de Hambourg.
https://frederic.vdb.brainwaves.be/
Dernières publications
Caillé, A. & Vandenberghe, F. (2021), Towards a New Classic Sociology. A Proposal and a Debate, London, Routledge.
Vandenberghe, F. (2024), Teoria social reconstrutiva. Vol. 1 : A sociologia como filosofia moral, Rio de Janeiro, Ateliê de humanidades.
Vandenberghe, F. (2025), "Moral Maps, Time Structures and World-Relations", in Rosa, H., Time and World, Cambridge, Polity Press.

Olivier VOIROL : Théorie critique et résonance
Née dans la première partie XXe siècle, la théorie critique est un courant de la philosophie et de la théorie sociale dont l'histoire mouvementée a traversé celle du siècle, à ses différents moments. Elle reste active et vivante à l'heure actuelle. S'il est insuffisant de rabattre ce courant de pensée sur ses figures fondatrices telles que Max Horkheimer, Herbert Marcuse et Theodor W. Adorno, il l'est tout autant de le restreindre à ses représentants tardifs, tels que Jürgen Habermas, Axel Honneth ou encore Nancy Fraser. La théorie critique gagne à être envisagée dans sa pluralité théorique autant que dans son unité épistémologique. La question de son actualité se repose sans cesse — en particulier à l'heure actuelle.
Hartmut Rosa inscrit ses travaux dans le sillage de cette tradition de pensée, ce qu'il a explicité à plusieurs reprises à partir des discussions faisant suite à Accélération (2005), et dans son opuscule Aliénation et accélération (2011). Rosa retient de cette tradition de pensée une conception immanente de la critique, à quoi s'ajoute une sensibilité aux aspects "négatifs" du social, ainsi qu'une attention aux thèmes (adorniens) de la domination de la nature et du "non-identique", réinterprétés en termes d'"indisponibilité" au sein de la théorie de la résonance.
Grâce à son concept de "monde", la théorie de la résonance apporte une dimension manquante jusque-là dans la théorie critique — et écartée par sa version intersubjectiviste. La théorie de la résonance offre en outre des éléments de réponse à certains enjeux sociaux et politiques clés du temps présent. En reconnaissant cet apport, j'entends montrer qu'une théorie critique articulée aux concepts de résonance et de monde fait face au double enjeu de penser une approche non-dominatrice de la raison et de l'agir politique.

Enseignant en sciences sociales et politiques à l'université de Lausanne, chargé de cours à l'université de Paris-Cité, Olivier Voirol a mené pendant vingt ans ses recherches à l'Institut für Sozialforschung de Francfort sur le Main, en étudiant l'histoire et l'actualité de la théorie critique, en particulier sous l'angle des questions de l'autoritarisme et des mutations de l'espace public. Il est responsable depuis 2008 de la collection "théorie critique" aux éditions de La Découverte, qui a traduit les travaux de Rosa et les a introduits dans l'espace francophone.

Nathanaël WALLENHORST : Résistance, résonance
Comment éviter l'écueil où le néolibéralisme nous a conduits ? Pour parer aux logiques d'accélération et de croissance, qu'il identifie comme étant à l'origine de l'aliénation contemporaine, le sociologue Hartmut Rosa a dessiné une voie magistrale : un rapport au monde renouvelé. À rebours de l'instrumentalisation que nous impose la société moderne, il nous invite à une relation vivante, responsive. En un mot, à la "résonance", seule en mesure de nous sortir de l'ornière sans violence. Mais ce concept est-il assez puissant pour penser une nécessaire transformation ? La résonance est subversive, mais un renouvellement en profondeur peut-il faire l'économie de la rupture ? Comment éduquer les générations futures à un nouveau rapport au monde ? Comment se former pour transformer ? Faut-il entrer en résonance ou en résistance ?

Nathanaël Wallenhorst est docteur en sciences de l'éducation, sciences de l'environnement et science politique. Il est professeur à la faculté d'éducation de l'université catholique de l'Ouest dont il est le doyen. Il travaille sur les incidences politiques, éducatives et anthropologiques de l'entrée dans l'Anthropocène et dirige actuellement une Encyclopedia of the Anthropocene – Pluriversal Perspectives (avec Wulf, Springer Nature). Il est membre de l'Anthropocene Working Group (AWG) et dirige le réseau international de recherche "Education in the Anthropocene" pour Wera, l'association mondiale de la recherche en sciences de l'éducation.
Derniers ouvrages
Qui sauvera la planète ? Les technocrates, les démocrates ou les autocrates…, Actes Sud, 2022.
Penser l'éducation à l'époque de l'Anthropocène (avec Hétier), Le Bord de l'eau, 2023.
A critical theory for the Anthropocene, Springer-Nature, 2023.
Contenir l'emballement bioclimatique, Actes Sud, 2025.
2049. Ce que le climat peut faire à l'Europe, Le Seuil, septembre 2025.


Accélération, résonance, énergies sociales. Quels usages opérationnels ?, table ronde animée par Sylvain ALLEMAND, avec Nicolas ESCACH, Luc GWIAZDZINSKI, Edith HEURGON et Vincent PETITET

Luc GWIAZDZINSKI
L'intervention proposera une mise en dialogue des concepts d'"accélération", de "résonance", d'"énergie sociale" avec des dynamiques collectives observées sur les territoires : appropriations politiques, festives, ludiques et créatives des espaces publics (Rond-point des gilets jaunes, Zad, guérilla jardinière…), politiques temporelles territorialisées (bureau des temps, Slow Cita), urbanisme événementiel et temporel, territoires apprenants, tiers-lieux (…). Nous examinerons ce que les concepts d'accélération, de résonance et d'énergies sociales peuvent apporter à la compréhension de phénomènes observés depuis la fin des années 90 et à l'analyse des stratégies d'adaptation développées par les individus, les collectifs et les pouvoirs publics notamment à l’échelle locale.

Luc Gwiazdzinski est géographe. Professeur à l'École nationale supérieure d'architecture de Toulouse et chercheur au LRA. Ses travaux portent notamment sur les temporalités, la chronotopie, les rythmes, les appropriations créatives, festives et politiques et les dispositifs apprenants.
Dernières publications
Graff C., Gwiazdzinski L., 2024, Flux et rythmes à l'épreuve des territoires, Rhuthmos.
Gwiazdzinski L. et al., 2024, Les nouvelles proximités, FYP.
Cholat F., Gwiazdzinski L., 2020, Territoires apprenants, Elya.
Gwiazdzinski et al., 2020, Manifeste pour une politique des rythmes, EPFL Éditions.
Floris B., Gwiazdzinski L., 2019, Sur la vague jaune. L'utopie d'un rond-point, Elya.
Gwiazdzinski L., 2015 (dir.), L'hybridation des mondes, Elya.


Concert du jazz club de Normandie, par Kikala I. TRAORÉ alias Jéricho (pianiste), Frédérick LEMARCHAND (contrebasse) et Pascal VIGIER (batterie)
Dans un contexte marqué par la complexité et l'accélération, il convient de repenser nos modèles en faisant des pas de côté. L'Art a toute sa place dans cette démarche, de par sa capacité à improviser en composant avec l'incertain, l'impromptu, à amorcer un dialogue avec les chercheurs et théoriciens.
Le pianiste Frank J. Barrett en témoigne à sa façon ; également professeur de management, il érige la résonance (ou le flux) comme un élément à même de nous orienter dans le contexte chaotique dans lequel nous sommes.
À ses côtés et ceux de Frédérik Lemarchand (contrebassiste, par ailleurs sociologue), de Pascal Vigier (batteur) et de Jéricho (pianiste), proposera des K-Notes, des moments où il partagera des retours d'expérience d'organisations en situation de crise, entre des morceaux d'improvisation musicale. Une manière de faire entrer en résonance, des sciences (celles de la gestion et du management) avec une forme d'expression artistique.
En savoir plus : https://jazzclubdenormandie.fr/

Heavy Metal, spectacle de Sophie BOUREL & Silvia LENZI [Compagnie La Minutieuse]
Accélération et rapport au temps, résonance et rapport au monde, mise à disposition garantie et indisponibilité foncière de la résonance. En texte et en musique classique et métal, Silvia Lenzi et Sophie Bourel dialoguent et explorent la pensée d'Hartmut Rosa. Toutes deux membres de La Minutieuse, elles sont déjà intervenues à Cerisy, en 2022 lors du colloque Édouard Glissant, la relation mondiale et à l'été 2023 pour celui intitulé L'Europe : héritages, défis et perspectives.

Violoncelliste, Silvia Lenzi s'empare de la diversité des rôles que son instrument propose pour assouvir sa curiosité et son envie de partage. Elle privilégie les projets interdisciplinaires originaux, et riches de sens. Des créations qui l'amènent à interroger la relation entre texte et musique.

Sophie Bourel est actrice, elle crée depuis quelques années ses propres spectacles en relation avec poètes et artistes pluri-disciplinaires. Passionnée d'archives et de poésie, elle invente des dispositifs qui évoluent au gré de ses recherches et des commandes artistiques qui lui sont faites.


BIBLIOGRAPHIE :

Ouvrages de Hartmut Rosa

• Rosa, H. (1998), Identität und kulturelle Praxis : Politische Philosophie nach Charles Taylor, Frankfurt am Main/New York, Campus (Dissertation, Humboldt-Universität zu Berlin, 1997).
• Rosa, H. (2010), Accélération : une critique sociale du temps (Traduction de l'allemand), Paris, La Découverte (Publication originale : Beschleunigung. Die Veränderung der Zeitstrukturen in der Moderne, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 2005).
• Rosa, H. (2011), Weltbeziehungen im Zeitalter der Beschleunigung : Umrisse einer neuen Gesellschaftskritik, Berlin, Suhrkamp.
• Rosa, H. (2012), Aliénation et accélération : vers une théorie critique de la modernité tardive (Traduction de l'anglais), Paris, La Découverte (Publication originale : Alienation and Acceleration. Towards a Critical Theory of Late-Modern Temporality, Aarhus, Aarhus University Press, 2010).
• Rosa, H. (2018a), Résonance : une sociologie de la relation au monde, Mesnil-sur-l'Estrée, La Découverte - Nouvelle édition (édition de poche), Paris, La Découverte, 2021.
• Rosa, H. (2018b), Remède à l'accélération : impressions d'un voyage en Chine et autres textes sur la résonance, Paris, Philosophie magazine.
• Rosa, H. (2020), Rendre le monde indisponible, Paris, La Découverte (Publication originale : Unverfügbarkeit, Berlin, Suhrkamp, 2018).
• Rosa, H. (2022a), Pédagogie de la résonance : Entretiens avec Wolfgang Endres, Paris, Le Pommier.
• Rosa, H. (2022b), Accélérons la Résonance. Entretiens avec Nathanaël Wallenhorst, Paris, Le Pommier.
• Rosa, H. (2023), Pourquoi la démocratie a besoin de la religion : À propos d'une relation de résonance singulière, Paris, La Découverte (Publication originale : Warum unsere Demokratie die Religion braucht, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 2022).
• Rosa, H. (2024), No fear of the dark : une sociologie du heavy metal, Paris, La Découverte (Publication originale : When Monsters Roar and Angels Sing. Eine kleine Soziologie des Heavy Metal, Stuttgart, Kohlhammer, 2023).


Autres ouvrages

• Adorno, T. W., Horkheimer M. (1974), Dialectique de la Raison (trad. Éliane Kaufholz-Messmer), Paris, Gallimard (Publication originale : Dialektik der Aufklärung, 1944).
• Adorno, T. W. (2003), Minima moralia. Réflexions sur la vie mutilée (trad. É. Kaufholz, J.-R. Ladmira), Paris, Payot (Publication originale : Minima Moralia. Reflexionen aus dem beschädigten Leben, Berlin/Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1951).
• Adorno, T. W. et al. (2017), Études sur la personnalité autoritaire (trad. H. Frappat), Paris, Allia (Publication originale : The Authoritarian Personality, New York, Harper and Brothers, 1950).
• Adorno, T. W. (2003), Dialectique négative (groupe de trad. Du Collège de philosophie), Paris, Payot (Publication originale : Negative Dialektik, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1966.
• Horkheimer, M. (2009), Théorie critique. Essais (trad. Groupe de traduction du Collège de philosophie), Paris, Payot (Publication originale : Traditionelle und Kritische Theorie. Fünf Aufsätze, Frankfurt am Main, S. Fischer, 1992 [1937]).
• Habermas, J. (1978), L'espace public : Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot (Publication originale : Strukturwandel der Öffentlichkeit, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1962).
• Habermas, J. (1987), Théorie de l'agir communicationnel, 2 t., Paris, Fayard (Publication originale : Theorie des kommunikativen Handelns. Zwei Bände, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1981).
• Habermas, J. (1998), Le discours philosophique de la modernité (trad. C. Bouchindhomme et R. Rochlitz), Paris, Gallimard (Publication originale : Der philosophische Diskurs der Moderne. Zwölf Vorlesungen, Frankfurt am Main, Suhrkamp, 1985).
• Honneth, A. (2000), La Lutte pour la reconnaissance (trad. Pierre Rusch), Paris, Le Cerf, 2000 (Publication originale : Kampf um Anerkennung, Frankfurt/Main, Suhrkamp).
• Honneth, A. (2020), La Reconnaissance : Histoire européenne d'une idée (trad. Julia Christ et Pierre Rusch), Gallimard, coll. "NRF Essais".
• Horkheimer, M. (2013), Eclipse of reason, Londres, Bloomsbury (Publication originale : Eclipse of reason, Oxford, Oxford University Press, 1947).
• Taylor, C. (1979), Hegel and Modern Society, Cambridge University Press (Hegel et la société moderne, Paris, Le Cerf, 1998).
• Taylor, C. (1989), Sources of the Self : The Making of the Modern Identity, Harvard University Press (Les sources du moi : La formation de l'identité moderne, Paris, Seuil / Boréal, 1998).
• Taylor, C. (1992), Multiculturalism : Examining the Politics of Recognition, Princeton University Press (Multiculturalisme : Différence et démocratie, Aubier, 1993).
• Taylor, C. (2007), A Secular Age, Belknat Harvard, Récompensé par le prix Templeton, 2007 (L'âge séculier (trad. de l'anglais), Paris, Seuil / Boréal, 2011).
• Taylor, C. (2020), Reconstructing Democracy. How Citizens Are Building from the Groud Up, With Patrizia Nanz, Madeleine Beaubien Taylor, Cambridge, Massachusetts, Harvard University Press.


Littérature secondaire

• Durand-Gasselin, J.-M. (2023), La Théorie critique, Paris, La Découverte.
Les Convivialistes (2020), Résistance, résonance ; changer le monde avec Hartmut Rosa, Paris, Le Pommier.
• Revue Réseaux (2022), Résonance et communication, Numéro 235.
• Pelluchon, C. (2021), Les Lumières à l'âge du vivant, Paris, Seuil.
• Susen, S. (2024), Humanity and Uncontrollability : Reflections on Hartmut Rosa's Critical Theory, London, Palgrave Macmillan.
• Wetzel, D. J. et al. (Éds.) (2025), Handbuch Resonanz, Wiesbaden, Springer VS.


SOUTIENS :

Friedrich-Schiller-Universität Jena
• Laboratoire Interdisciplinaire d'étude du Politique Hannah Arendt (LIPHA - EA 7373) | Université Gustave Eiffel
MSH Medical School Hamburg
Veolia


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


JOCELYN BENOIST : RENDRE JUSTICE AU RÉEL


DU VENDREDI 22 AOÛT (19 H) AU JEUDI 28 AOÛT (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]



DIRECTION :

Benoît BERTHELIER, Étienne BIMBENET, Pauline NADRIGNY, David ZAPERO

En présence de Jocelyn BENOIST


ARGUMENT :

Dans le paysage intellectuel contemporain, l'œuvre de Jocelyn Benoist constitue une voix singulière et, à plusieurs égards, dissonante. Si cette œuvre se réclame du réalisme, elle ne propose pas de doctrine réaliste : elle ne tâche pas de répertorier le réel dans une ontologie. C'est un autre sens que Jocelyn Benoist a donné au motif réaliste. Dans ses travaux, le réalisme est d'abord la tentative de mettre en évidence l'enracinement de notre pensée et de notre agir dans un réel que la réflexion philosophique a eu tendance à obscurcir. Ainsi, bien qu'il soit l'un des acteurs les plus éminents du renouveau contemporain du réalisme, Jocelyn Benoist développe une position singulière, celle d'un réalisme contextuel qui entend "rendre justice au réel" — à ce réel dans lequel nous sommes inévitablement mais qui nous échappe si facilement lorsque nous tentons de le saisir conceptuellement.

À travers une œuvre généreuse, qui s'est nourrie d'un échange avec — et eu des effets importants sur — diverses disciplines (psychanalyse, sociologie, sciences juridiques, mathématiques, arts, histoire, géographie…), Jocelyn Benoist est aujourd'hui l'un des penseurs les plus influents de la scène philosophique contemporaine. Il a su inspirer de nombreux chercheurs, aussi bien en métaphysique et en philosophie du langage que dans les champs de l'éthique, de la philosophie politique, de l'épistémologie ou de l'esthétique, et hors de la philosophie. Ce colloque souhaite réunir autour de cette pensée des chercheurs et chercheuses de ces différents sites afin d'explorer les multiples faces de son œuvre, en alternant interventions, tables rondes et événements artistiques.


MOTS-CLÉS :

Benoist (Jocelyn), Contextualisme, Critique, Langage, Métaphysique, Ordinaire, Phénoménologie, Philosophie, Réalisme, Sensible


CALENDRIER PROVISOIRE (15/07/2025) :

Vendredi 22 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Samedi 23 août
Matin
Benoît BERTHELIER, Étienne BIMBENET, Pauline NADRIGNY & David ZAPERO : Introduction

DU PHÉNOMÈNE À LA RÉALITÉ
Inga RÖMER : Le "flirt" avec la métaphysique
Véronique DECAIX : Aphantasia. Sur la mémoire sonore

Après-midi
Élise MARROU : La face non-intentionnelle de la vie du sujet
Pierre-Jean RENAUDIE : Les métamorphoses du sensible : l'intériorisation de la voix
Daniel RODRIGUEZ-NAVAS : Réalisme et grammaire

Soirée
Autour du livre Les limites de l'intentionnalité (Paris, Vrin, 2005), table ronde animée par Étienne BIMBENET et Mathias GIREL


Dimanche 24 août
LE RÉALISME EN CONTEXTE
Matin
Raoul MOATI : De quel goût sont les layer-cakes sardes ?
Sofia MIGUENS : Jocelyn Benoist on Varieties of Contextualism

Après-midi
Catherine LARRÈRE : "Rendre justice aux choses" : le cas de l'environnement
Yiyang BAI : Entre le réel et la fiction : une approche réaliste du problème de la fiction
Charles TRAVIS : Two Puzzles

Soirée
Autour du livre Concepts (Paris, Vrin, collection "Moments philosophiques", 2017), table ronde animée par David ZAPERO


Lundi 25 août
ÉCHOS RÉALISTES
Matin
Markus GABRIEL : L'existence précède-t-elle l'essence ?
Benoît BERTHELIER : De l'immaculée connaissance : sur l'idée d'un "réalisme nietzschéen"

Après-midi
Maurizio FERRARIS : Le réalisme de Jocelyn
Ekaterina ODÉ : Le partage du réel : médiations, machines, technologies
Matthieu CONTOU : Pensée et responsabilité. Sur les implications morales du réalisme de Jocelyn Benoist

Soirée
Autour du film Spirited Away de Hayao Miyazaki, animée par Élise DOMENACH


Mardi 26 août
BRUITS DU SENSIBLE
Matin
Alexis ANNE-BRAUN : L'art embarqué
Pauline NADRIGNY : Narcisse et Écho, de l'esthétique à la poétique

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
Concert au piano de Fériel KADDOUR


Mercredi 27 août
Matin
INTERDISCIPLINARITÉS
Lionel NACCACHE : Neuro-réalisme, un projet irréaliste, réaliste ou surréaliste ?
Thierry PAUL : Comment le quantique peut-il impacter la philosophie ? Quant≠Kant

Après-midi
Régis PONSARD : Apprendre à penser la pluralité des dimensions du réel. Sur quelques apports fondamentaux de l'œuvre de Jocelyn Benoist à une future "science du droit" digne de ce nom
Jing XIE : Après le constructivisme, quel réalisme politique ? L'ontologie sociale de Jocelyn Benoist


Jeudi 28 août
Matin
"Jocelyn Benoist à la question", avec un groupe de doctorants : Charles BODON, Vera NAPOLITANO, Björn PUHR, Cristina STOIANOVICI

Autour du dernier livre de Jocelyn Benoist : Sans anesthésie, La réalité des apparences (Vrin, collection "Moments Philosophiques", 2024), table ronde animée par Danielle COHEN-LEVINAS et Élise DOMENACH

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Benoît BERTHELIER : De l'immaculée connaissance : sur l'idée d'un "réalisme nietzschéen"
Dans la "Coda nietzschéenne" de Sans anesthésie (2024), le rejet de la logique de l'apparence et de la vérité au profit du concept de réalité est porté au crédit de Nietzsche, de sorte qu'il y aurait non seulement un "paradoxal réalisme de Nietzsche" mais également place pour "un réalisme nietzschéen". Revenant pour la cinquième fois en trente ans sur la fameuse "fable du monde vrai" du Crépuscule des idoles, J. Benoist introduit une inflexion notable. Alors qu'il avait semble-t-il toujours nettement séparé l'analyse de Nietzsche de sa propre analyse réaliste, les voilà tout à coup réunies. Alors que dans Logique du phénomène (2016) et "D'un sensible à l'autre" (2021), l'argument allait de Nietzsche à la critique de la phénoménologie, voilà que la fin de la phénoménologie nous reconduit à Nietzsche. L'exigence réaliste, telle que la conçoit Jocelyn Benoist, serait-elle au fond une exigence nietzschéenne, et si oui, en quel sens ? Il s'agira donc pour nous d'explorer, à la lumière de Nietzsche, un réalisme qui peut s'entendre comme une philosophie de l'affirmation de la réalité (évoquant discrètement l'éternel retour) et comme une philosophie de la justice.

Benoît Berthelier est agrégé de philosophie, ATER à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il prépare actuellement une thèse de doctorat intitulée "Wittgenstein / Nietzsche : les maladies du non-sens" sous la direction de Jocelyn Benoist. Il est l'auteur de Le Sens de la terre. Penser l'écologie avec Nietzsche (Seuil, 2023).

Matthieu CONTOU : Pensée et responsabilité. Sur les implications morales du réalisme de Jocelyn Benoist
Dans les quelques textes de philosophie morale qu'il a publiés depuis 2005, Jocelyn Benoist laisse assez souvent entendre que la discussion de la notion de "réalisme moral" est tout particulièrement porteuse pour l'intelligence du réalisme en général. Mieux, il y affirme même parfois que le réalisme est comme tel aussi une question de morale. Pourquoi ? C'est ce que cette intervention s'efforcera de déterminer en s'attachant plus spécialement au rôle que la notion de "responsabilité" joue dans le type de réalisme qu'il défend.

Professeur agrégé de philosophie et docteur de l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Matthieu Contou enseigne au lycée Romain Rolland à Ivry-sur-Seine.

Véronique DECAIX : Aphantasia. Sur la mémoire sonore
Dans Le Bruit du sensible, Jocelyn Benoist invite le philosophe sondant le sensible à puiser son inspiration aux "deux sources extérieures de la philosophie" : la psychologie et l'art. Au long de ses différents ouvrages, un thème se trouve toujours repris : le dialogue constant de sa pensée avec la musique. C'est ce programme que nous voudrions revisiter par la question de la mémoire sonore. En effet, la mémoire est une capacité représentationnelle par excellence, qu'en est-il de la mémoire musicale ? Que reste-il de la matérialité du son, et de sa résonance, après la représentation ?

Véronique Decaix est maîtresse de conférences en philosophie médiévale à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Avec Jocelyn Benoist, elle a dirigé le volume Licornes. Celles qui existent et celles qui n'existent pas (Paris, Vendémiaire, 2021).

Inga RÖMER : Le "flirt" avec la métaphysique
Dans l'avant-propos de son livre Élements de philosophie réaliste, Jocelyn Benoist écrit que son essai "flirte avec la métaphysique". Jusqu'où va ce "flirt" et que signifie-t-il ? La conférence abordera cette question en se consacrant à quatre chapitres du livre Von der Phänomenologie zum Realismus que Jocelyn Benoist a publié en 2022, après l'avoir rédigé directement en langue allemande. Dans ces réflexions, le philosophe refuse d'abord une certaine métaphysique, mais s'approprie ensuite un autre sens de la métaphysique. Est-ce enfin une "conquête" de la métaphysique ? Et si cela est le cas, en quel sens ?

Inga Römer est Professeur des Universités à l'Albert-Ludwigs-Universität Freiburg où elle occupe la Chaire pour l'herméneutique et la phénoménologie, après avoir enseigné à Wuppertal, Grenoble, Würzburg et Sorbonne Université. Ses champs de de recherche sont la phénoménologie allemande et française, l'herméneutique et les recherches kantiennes. Elle s'intéresse à des questions du temps, du soi, de l'éthique et de la métaphysique.


BIBLIOGRAPHIE :

Les limites de l'intentionnalité. Recherches phénoménologiques et analytiques, Vrin, collection "Problèmes & controverses", février 2005.
Sens et sensibilité. L'intentionnalité en contexte, Les éditions du Cerf, collection "Passages", février 2009.
Concepts. Introduction à l'analyse, Les éditions du Cerf, collection "Passages", septembre 2010.
Éléments de philosophie réaliste. Réflexions sur ce que l'on a, Vrin, collection "Moments philosophiques", mai 2011.
Le Bruit du sensible, Les éditions du Cerf, collection "Passages", 2013.
Logique du phénomène, Hermann, collection "Le bel aujourd'hui", 2016.
L'adresse du réel, Vrin, collection "Moments philosophiques", 2017.
• Jocelyn Benoist (éd.), Réalismes anciens et nouveaux, Vrin, collection "Problèmes & controverses", 2018.
Revue Critique, n°862, "Jocelyn Benoist : le réalisme à l'état vif", 2019.
Towards a Contextual Realism, Harvard University Press, 2021.
Von der Phänomenologie zum Realismus. Die Grenzen des Sinns, Mohr Siebeck, collection "Reality and Hermeneutics", 2022.


SOUTIENS :

• Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne (ISJPS, UMR 8103) | Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
• International Research Project (IRP) | Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
• Institut universitaire de France (IUF)
Archives Husserl de Paris (UMR 8547) | Centre national de la recherche scientifique (CNRS)
Centre Cavaillès | République des savoirs


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


AVEC HABIB TENGOUR,
PENSER LES ESPACES LITTÉRAIRES ET ANTHROPOLOGIQUES


DU MERCREDI 13 AOÛT (19 H) AU MARDI 19 AOÛT (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]



DIRECTION :

Farida AÏT FERROUKH, Stéphane BAQUEY, Regina KEIL-SAGAWE, Hervé SANSON

En présence de Habib TENGOUR


ARGUMENT :

En une séquence historique qui s'ouvre avec la fin des années 1960, l'œuvre et la trajectoire de Habib Tengour, né en 1947, se situent dans un espace de transferts et de traversées, entre ancrage algérien et déplacement vers la littérature mondiale. Elles s'inscrivent aussi bien dans le contexte socioculturel multilingue maghrébin que dans des espaces littéraires arabes, européens, méditerranéens… Elles associent, en partant d'une énonciation poétique, une grande variation dans l'usage des genres littéraires à une recherche anthropologique et sociologique. La multiplicité des aspects de cette œuvre est comparable à d'autres, durant la même période, qui ont, elles aussi, associé à la littérature une réflexivité étayée sur les sciences humaines et sociales ou sur l'histoire et la critique culturelles, telles celles du Marocain Abdelkébir Khatibi (1938-2009), de l'Algérien Nabile Farès (1940-2016) et du Tunisien Abdelwahab Meddeb (1946-2014). Le colloque envisagera l'exemplarité des écrits de Habib Tengour pour repenser, avec une génération d'écrivains, l'étude des littératures maghrébines dans leurs contextes anthropologiques, sociologiques, culturels, historiques, écologiques, ainsi que dans leurs modalités d'appartenance à une pluralité d'espaces littéraires. Il rassemblera des poètes et des acteurs culturels pour faire résonner aujourd'hui l'action de poésie de Habib Tengour, au Maghreb et au-delà.


MOTS-CLÉS :

Anthropologie, Espaces, Ethnopoétique, Génération post-indépendances, Littérature, Maghreb, Modernités, Poésie, Sciences humaines, Sciences sociales, Tengour (Habib), Traduction


CALENDRIER PROVISOIRE (20/05/2025) :

Mercredi 13 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants, ainsi que du Foyer de création et d'échanges


Jeudi 14 août
Matin
OUVERTURES
Naget KHADDA : Le texte tengourien : un positionnement dé-colonial
Anne ROCHE : Tengour, avec Farès et Meddeb : une convergence de recherches et d'écriture

Après-midi
L'ESPACE LITTÉRAIRE MAGHRÉBIN (I)
Wolfgang ASHOLT : Le Soufialisme d'Habib Tengour ou que reste-t-il du Surréalisme ?
Joyce SEBAG : Habib Tengour, une poésie politique ?

Poèmes en berbère, arabe, français autour de Kateb Yacine, introduction et lecture par Farida AÏT FERROUKH

Soirée
Lecture, avec Habib TENGOUR


Vendredi 15 août
Matin
L'ESPACE LITTÉRAIRE MAGHRÉBIN (II)
Susan SLYOMOVICS : Diwan ifrikiya, la Geste hilalienne, et l'écriture orale

La poésie mondiale depuis Alger, la collection "Poèmes du monde", table ronde animée par Hervé SANSON, avec Karim CHIKH (Éditions APIC, éditeur de la collection) et Habib TENGOUR (directeur de la collection)

Après-midi
EXTENSION DES ESPACES LITTÉRAIRES (I)
Christina OIKONOMOPOULOU : Aspects de la réception du théâtre grec antique dans l'œuvre dramatique de Habib Tengour
Juliane TAUCHNITZ : Littératures migrantes d'Octavio Paz à Habib Tengour

Soirée
Lecture en plusieurs langues de poèmes et de leur traduction parus dans la collection "Poèmes du monde", par Mia LECOMTE (italien), Issa MAKHLOUF (arabe) et Cécile OUMHANI (français)


Samedi 16 août
Matin
EXTENSION DES ESPACES LITTÉRAIRES (II)
Amina DJENANE : Penser l'espace sans frontières. Ou du nomadisme citadin postmoderne chez Habib Tengour

Traduire la poésie, table ronde animée par Regina KEIL-SAGAWE, avec Mia LECOMTE, Issa MAKHLOUF, Cécile OUMHANI et Cole SWENSEN

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
La Conférence des oiseaux, par Armelle CHITRIT [dans le cadre du Foyer de création et d'échanges]


Dimanche 17 août
Matin
DEVENIR DES ESPACES ANTHROPOLOGIQUES (I)
Abderrahmane MOUSSAOUI : La question de l'appartenance. Entre le poétique et l'anthropologique. Habib Tengour le poète des "récits d'origines"
Stéphane BAQUEY : Appartenance écouménale et écritures de la déliaison : conjonctions entre recherches anthropologiques et invention poétique chez Abdelkébir Khatibi, Nabile Farès, Abdelwahab Meddeb et Habib Tengour

Après-midi
DEVENIR DES ESPACES ANTHROPOLOGIQUES (II)
Ibtissem CHACHOU : Mise en mots de la mémoire de la ville de Mostaganem à travers l'œuvre de Habib Tengour
Gaëlle DE L'ESTOILE : Habib Tengour : le mythe et la déception

ATELIER D'ÉCRITURE (I) : entre écriture de création et carnet de terrain, à l'initiative des chercheurs, poètes ou acteurs culturels et associant les doctorants présents au foyer de Cerisy

Soirée
Conversation des lointains, entretien et lectures, animée par Stéphane BAQUEY, avec Golan HAJI et Cole SWENSEN


Lundi 18 août
Matin
TRAJECTOIRES, DÉBATS (I)
Mourad YELLES : Ulysse et le Maître de l'Heure. Éléments pour une poétique du sacré dans l'œuvre de Habib Tengour [visioconférence]
Vincent BONTEMS : L'Odyssée de Habib Tengour, le point de vue d'Orphée

Après-midi
TRAJECTOIRES, DÉBATS (II)
Khalid ZEKRI : Une lecture de Dans le soulèvement : la maghrébine condition
Khalid LYAMLAHY : Habib Tengour et les poètes marocains : dialogues, affinités et traces littéraires

ATELIER D'ÉCRITURE (II) : entre écriture de création et carnet de terrain, à l'initiative des chercheurs, poètes ou acteurs culturels et associant les doctorants présents au foyer de Cerisy

Soirée
Lectures poétiques accompagnées au piano, par Laure CAMBAU et Mia LECOMTE


Mardi 19 août
Matin
CONCLUSIONS
Retour sur les ATELIERS D'ÉCRITURES
Rapports d'étonnement des doctorants et jeunes chercheurs
Habib TENGOUR "à la question" : discussion ouverte

Après-midi
DÉPARTS


PRESSE / MÉDIAS :

• "Colloques de Cerisy : L'œuvre poétique de Habib Tengour à l'honneur", entretien avec Hervé SANSON réalisé par Faris LOUNIS [en ligne sur le site ActuaLitté (15/07/2025) et le blog Le Club de Mediapart (17/07/2025)]


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Farida AÏT FERROUKH
Farida Aït Ferroukh est maître de conférences à l'INALCO (Alliance Sorbonne) où elle enseigne les "Littératures maghrébines". Rattachée au LACNAD (Langues et Cultures du Nord de l'Afrique et de la Diaspora), ses recherches portent sur l'Algérie et la diaspora en anthropologie et en littérature (Nabile Farès, Kateb Yacine, Mouloud Feraoun, Taos Amrouche) ou en ethnolittérature. Elle est notamment l'auteure de Kateb Yacine et Debza au coeur du Printemps berbère, Alger, Koukou éditions, 2023.

Stéphane BAQUEY : Appartenance écouménale et écritures de la déliaison : conjonctions entre recherches anthropologiques et invention poétique chez Abdelkébir Khatibi, Nabile Farès, Abdelwahab Meddeb et Habib Tengour
A. Khatibi, N. Farès, A. Meddeb et H. Tengour ont pris acte des critiques adressées au "roman ethnographique" maghrébin (A. Khatibi, 1968). Ils ont fondé leur écriture sur une poétique non réaliste de la déliaison, expérimentant dans l'invention littéraire, après Kateb Yacine, la transformation des liens d'appartenance tribaux, nationaux, religieux. Parallèlement, ils étudiaient ces mêmes liens dans leurs recherches anthropologiques, sociologiques ou dans leurs essais de critique culturelle. L'enjeu est celui de la brisure des écoumènes (A. Berque, 2000) ; la perspective, celle d'une anthropologie de la liminarité (M. Agier, 2013). Le propos partira d'une relecture des travaux de Jacques Berque, fondateurs pour une anthropologie de l'espace maghrébin, en particulier quand J. Berque considère les différents paliers de la pratique collective à partir de la base naturelle (J. Berque, 1978). Et l'accent sera mis sur l'essai de H. Tengour, "Rupture et transmission dans l'oralité en Algérie ou éloge du lien pendant la cassure" (Quel avenir pour l'anthropologie en Algérie ?, CRASC, 2002), où Tengour répond à un article d'A. Meddeb, dans le contexte post-"décennie noire" en Algérie. Pour les quatre auteurs, seront privilégiées des œuvres ou des séquences d'œuvres littéraires qui échappent à la représentation romanesque (Gontard, 1981 ; Chikhi, 1996 ; Bonn, 2016), voire à la diction autobiographique (Roche, 2019), et qui se fragmentent et tendent au poème (Raybaud, 1976, 1982, 1990) : La Mémoire tatouée et Lutteur de classe à la manière taoïste (1971, 1976) de A. Khatibi, la trilogie La Découverte du Nouveau Monde (1972, 1974, 1976) de N. Farès, Talismano et Phantasia (1979-1987, 1986) de A. Meddeb et les longs poèmes fragmentaires plusieurs fois réécrits par H. Tengour : L'Ancêtre cinéphile, La Sandale d'Empédocle, Traverser, Retraite — les plus anciens remontant aux années 1980.

Stéphane Baquey est maître de conférences à Aix-Marseille Université, membre CIELAM. Ses domaines de recherche sont la poésie française, les poésies des mondes arabes, la diction des lieux dans une perspective écopoétique, les constructions d'un espace littéraire méditerranéen.

Regina KEIL-SAGAWE
Regina Keil-Sagawe a enseigné les littératures maghrébines de langue française et leur traduction à l'université de Heidelberg. Ses recherches portent sur les problèmes de traduction/réception du texte maghrébin dans une perspective interculturelle. Elle a traduit nombre d'auteurs du Maghreb en allemand, parmi eux Habib Tengour, Mohammed Dib, Yasmina Khadra, Azouz Begag, Driss Chraïbi, Albert Memmi, Cécile Oumhani, Boualem Sansal. Elle a co-dirigé, avec Hervé Sanson, l'ouvrage Les portes du poème. Hommage à Habib Tengour, Alger, Apic 2022.

Hervé SANSON
Enseignant-chercheur à l'université de Mannheim, Hervé Sanson est spécialiste des littératures maghrébines de langue française, il est membre associé à Thalim (La Sorbonne nouvelle-Paris III) et à l'Item (CNRS). Il a travaillé notamment sur les œuvres d'Albert Memmi, d'Assia Djebar, de Habib Tengour, ou de Mohammed Dib, sur lequel il a soutenu une thèse de doctorat nouveau régime.


Wolfgang ASHOLT : Le Soufialisme d'Habib Tengour ou que reste-t-il du Surréalisme ?
Dans les recherches sur le surreálisme, la perspective globale devient de plus en plus importante, comme en témoignent la grande exposition "Surrealism Beyond Borders" (Metropolitan/Tate, 2021/22) ou le livre d'Andrea Gremels, Die Weltkünste des Surrealismus. Netzwerke und Perspektiven aus dem globalen Süden (2022), mais où le surréalisme maghrébin n'est pas mentionné. Cet élargissement nécessaire des recherches sur un surréalisme mondialisé pose pourtant la question de ce qu'il reste du projet initial du surréalisme. En prenant le "manifeste" d'Habib Tengour, qui ne revendique pas ce genre, "Le Surréalisme maghrébin, Le Surréalisme au Maghreb, Le Maghreb surréaliste, Les surréalistes maghrébins, Surréalité maghrébine, La Révolution surréaliste au Maghreb, Maghreb surréaliste presse service, Le Surréalisme au service, etc." (1981), les nombreuses déclinaisons du Surréalisme maghrébin indiquent déjà au moins autant de surréalismes, comme point de départ, je propose une lecture de ce "manifeste" et des œuvres de Tengour qui se situent dans ce contexte, pour voir non seulement ce qui y reste du mouvement (historique) de référence et de son manifeste fondateur mais aussi quel projet Tengour présente avec le "soufialisme" et de quelle manière, celui-ci représente un mouvement "beyond borders" qui fait (encore) partie de l'avant-garde littéraire et artistique.

Wolfgang Asholt est Professeur émérite de l'université d'Osnabrück (depuis 2011), Professeur honoraire à l'université Humboldt de Berlin (2013-2023), co-éditeur de la revue Lendemains (2000-2012), membre de comités de revues (par ex. Revue d'histoire littéraire de la France), recherches sur la littérature du XIXe, les avant-gardes, la littérature contemporaine, la littérature du Maghreb (Assia Djebar). Il est également membre du Conseil d'administration de l'Association des Amis de Pontigny-Cerisy.
Dernières publications
Alexander Kluge. Cartographie d'une œuvre plurielle, Colloque de Cerisy, Hermann, 2022 (co-éditeur).
Das lange Leben der Avantgarde. Eine Theoriegeschichte, Wallstein, 2024.

Vincent BONTEMS : L'Odyssée de Habib Tengour, le point de vue d'Orphée
L'œuvre poétique, narrative et anthropo-sociologique de Habib Tengour s'inscrit principalement dans l'espace méditerranéen, à travers le dialogue de ces deux rives, et dans la temporalité de l'exil et du retour (impossible) comme rythme profond de l'existence. Nombreux sont ceux qui ont souligné le rôle archétypal de la figure d'Ulysse pour en éclairer l'unité personnelle. En nous appuyant sur la brève définition du "complexe d'Orphée" proposée par Gaston Bachelard dans la Psychanalyse du feu, en tant que complexe positif de la psyché parvenant à convertir en beauté sa souffrance, et sur le parallèle ainsi souligné avec le "complexe de Prométhée" comme "désobéissance adroite", nous pointerons quelques aspects saillants de l'œuvre d'un ami et d'un maître, sans aucune prétention à résumer le sens de sa traversée de la langue française et de l'humaine condition.

Vincent Bontems est Philosophe des sciences et des techniques, directeur de recherche au CEA, professeur à l'université Paris-Saclay, co-directeur du master 2 "Management de la Technologie et de l'Innovation" et directeur de la collection "L'Âne d'or" aux éditions Les Belles Lettres. Spécialiste de Gaston Bachelard et de Gilbert Simondon, son dernier livre s'intitule Au nom de l'innovation. Finalités et modalités de la recherche au XXIe siècle (2023, Les Belles Lettres). Au siècle dernier, il a écrit et publié de la poésie et des nouvelles, notamment en tant qu'éditeur du fanzine Orphée et les Assassins, ayant eu l'honneur d'accueillir Habib Tengour dans ses pages.

Laure CAMBAU
Laure Cambau est poète, pianiste et auteur de contes pour enfants ainsi que de paroles de chansons. Elle a publié 10 recueils de poésie traduits dans plusieurs langues dont, en 2015, La fille peinte en bleu (Caractères/Écrits des Forges) et Ma peau ne protège que vous (Le Castor Astral) ; elle a reçu le Prix Poncetton de la SGDL pour Lettres au voyou céleste (L'Amandier, 2010), le Prix Vénus Khoury-Ghata pour Le Manteau rapiécé, un voyage au fil du souffle (Unicité, 2018), et le prix Léon Paul Fargue pour Grand Motel du Biotope (Apic, Alger, 2022). En 2023 est sorti Les yeux de la mouche (Castor Astral). Laure Cambau fait partie de la Compagnia delle Poete (Mia Lecomte) et a sorti, en tant que pianiste, un disque de musique romantique, avec hautbois (Laurent Hacquard).

Ibtissem CHACHOU : Mise en mots de la mémoire de la ville de Mostaganem à travers l'œuvre de Habib Tengour
À travers cette contribution, je souhaite mettre l'accent sur la mise en mots de Mostaganem, la ville natale de Habib Tengour, et ce par le biais des repères linguistique, toponymique, patronymique, ethnonymique et autres qui jalonnent ses écrits. Ces repères se présentent comme autant de marqueurs spatiaux dont les dimensions anthropologiques et hagiographiques sous-tendent la trame narrative des récits à l'instar des Gens de Mosta et Le Maître de l'heure. En effet, l'écriture de la mémoire et de l'histoire transite à travers le prisme de ces marqueurs qui ré/ancrent l'auteur et le lecteur dans le vieux Mostaganem de son enfance et plus précisément dans le quartier central de Tidjdit (Benchehida, 2003) mais également dans la saga des Béni Zeroual du bas Chéliff. Une "topologie de la sainteté" (Maarouf, 1997) s'y voit également traversée par la figure de l'ancêtre éponyme par qui le récit des origines arrive et se déroule, un récit où la fiction se met au service de l'Histoire mouvementée du Maghreb central du XVIe siècle. La mise en discours de soi et du lieu transite par différents registres discursifs dont les chants de la transcendance qui rythment la place du marché de Tidjditt, le quartier de l'enfance et la plage de Sidi el Medjdoub (l'illuminé) où se meuvent diseurs et troubadours. Dans l'œuvre de Tengour, la ville de Mostaganem se donne ainsi à lire comme un espace culturel (Calvet, 1994) et un espace-temps anthropologique.

Ibtissem Chachou est Professeure de sciences du langage à l'université de Mostaganem, chercheure associée au CRASC à Oran. Elle a publié des articles sur le contact des langues dans le domaine médiatique, le statut des langues en Algérie et la question des urbanités sociolangagières au Maghreb. Elle est notamment l'auteure de La Situation sociolinguistique en Algérie : pratiques plurilingues et variétés à l'œuvre (L'Harmattan, 2013), de Sociolinguistique du Maghreb (Hibr, 2018), et a édité avec M. Stambouli le collectif Pour un plurilinguisme algérien intégré (Riveneuve éditions, 2016).

Karim CHIKH
Karim Chikh est directeur des éditions Apic à Alger, qu'il a fondées en 2003 avec son épouse Samia Zennadi. La maison d'édition comporte un vaste catalogue, constitué de romans, de poésie, d'essais, et promeut l'ancrage africain de la culture algérienne, en participant par exemple en 2013 au salon du livre de Yaoundé (Cameroun). Elle accueille depuis 2018 la collection "Poèmes du Monde" dirigée par Habib Tengour.

Armelle CHITRIT
Armelle Chitrit bénéficie d'une résidence d'écriture de Normandie Livre & Lecture. Participant au Foyer de création et d'échanges "LIRE AVEC LES OISEAUX", la poétesse proposera avec les colloques Jean COCTEAU et Habib TENGOUR, une LECTURE d'après des dessins de Cocteau et une ADAPTATION de La Conférence des oiseaux, conte persan de Farid al-Din Attar (1177), dont la lecture mise en scène par Karina Cherès-Kolb, marionnettiste plasticienne, est prévue le 16 août sur une composition sonore incluant certainement les volatiles.

Gaëlle DE L'ESTOILE : Habib Tengour : le mythe et la déception
Notre communication propose de considérer la place du mythe dans l'œuvre d'Habib Tengour, et de cerner sa signification. C'est sur le sens qu'il convient de donner au mot mythe dans un contexte postcolonial que débute notre analyse. Si le mythe peut être défini comme récit fondateur chez certains prédécesseurs — on pense au fondateur Keblout ou au retour des Beni Hilal chez Kateb Yacine —, chez Tengour le mythe n'est pas tant un récit fondateur qu'une mystification. À cet égard, la différence de traitement de l'épisode des Lotophages, chez Kateb Yacine et chez Habib Tengour est révélatrice d'une évolution du recours au mythe dans l'Algérie pré puis post-coloniale. Habib Tengour, écrivain de la génération post-indépendance, détourne le mythe et son rôle fondateur pour en révéler le potentiel mystificateur et déceptif, comme le révèle cette interrogation du berger au faux Ulysse dans Gens de Mosta : "Mais dis-moi, n'es-tu pas en quête d'un Abdelmoumen ?". Cette question révèle la vanité de cette quête de fondation — quête romantique qui représente une fuite de la réalité, comme l'atteste la dernière phrase de L'Épreuve de l'arc : "Suffocant, on demande asile au mythe le plus proche…". À partir de l'analyse de trois œuvres de Tengour : Tapapakitaques, la poésie-île (1976), L'Épreuve de l'arc (1990) et Gens de Mosta (1997), nous nous proposons d'étudier le travail de dégradation burlesque du mythe. En effet, dans Tapapakitaques, Ulysse devient "un romantique attardé dans Ithaque retrouvé" ; son "impotente sérénité" est critiquée dans L'Épreuve de l'arc ; le chapitre "Les Lotophages" dans Gens de Mosta consiste, selon Denise Brahimi, en une "mise en question virulente de l'univers mythique que le poète s'est donné et qui apparaît comme relevant d'une ignorance de la réalité". Ce travail de dégradation du mythe peut être comparé à celui qu'esquisse Kateb Yacine dans Le Polygone Étoilé (1966) et qu'entreprend Tahar Djaout dans l'Invention du désert (1987).

Gaëlle de L'Estoille est agrégée de Lettres Modernes et doctorante à l'université de la Sorbonne Nouvelle, Paris 3. Sa thèse, dirigée par Catherine Brun, porte sur "Les contributions de la littérature à la mobilisation et à la résurgence des imaginaires nationaux au Maghreb durant la période des indépendances (1950-1980)".

Amina DJENANE : Penser l'espace sans frontières. Ou du nomadisme citadin postmoderne chez Habib Tengour
La plupart des écrivains algériens, quand ils représentent l'espace natal, se limitent à ses frontières, et ce pour mieux exprimer ses caractéristiques et dégager son "âme" la plus profonde. À l'exemple de Mohamed Dib, qui consacre La grande maison à sa ville natale Tlemcen, ou de Mouloud Feraoun, qui décrit en profondeur, dans ses romans, sa Kabylie d'enfance sans évoquer un autre lieu en parallèle. Ou encore de Kateb Yacine, qui représente dans son chef-d'œuvre Nedjma principalement Constantine, laquelle y figure comme un espace second, qui recoupe celui de la tribu des Keblout. Chez Habib Tengour, l'espace se distingue par sa forme complexe, résultant principalement d'une reconfiguration des frontières géographiques. Cela se manifeste, par exemple, à travers le surgissement de "l'ombre portée" de la campagne jusqu'au cœur des villes, ou encore à travers l'omniprésence de l'ailleurs (et donc de l'exil) qui occupe une place très importante dans l'imaginaire de l'auteur. Notre proposition tente donc de repenser la représentation de l'espace chez Habib Tengour à la lumière des interrogations suivantes : comment Habib Tengour redessine-t-il les frontières de ses espaces littéraires ? Quelles sont les stratégies d'écriture auxquelles il fait appel ? Quelles significations peuvent-elles avoir dans l'univers intérieur de l'auteur de Tapapakitaques et Gens de Mosta ? Pour tenter de répondre à ces questions, nous ferons principalement appel à l'approche de la géocritique en centrant notre analyse sur les interactions de l'espace humain réel avec son écho littéraire dans quelques textes de Habib Tengour.

Amina Djenane est maître de conférences à l'université Frères Mentouri Constantine 1. Elle est titulaire d'un Doctorat en littérature sur "la poétique du référent chez Habib Tengour". Plusieurs publications scientifiques : un chapitre dans l'ouvrage collectif Les Portes du poème, Hommage à Habib Tengour, en plus des articles scientifiques dont le plus récent est : "La Symbolique anthroponymique des figures féminines dans l'œuvre de Habib Tengour" (publié en juin 2024, revue Multilingual).

Golan HAJI
Golan Haji est poète, essayiste et traducteur kurde-syrien, né en 1977 à Amouda. Il a étudié la médecine à Damas. Il a publié, en arabe, nombre de recueils de poésie, dont le premier, Il appela dans les ténèbres (2004), avait obtenu, en 2006, le Prix Mohammad al-Maghout, suivi par Il y a quelqu'un qui voit en toi un monstre (2008), Le pèse-douleur (2016), Les tireurs sportifs (2018), Arbre dont j'ignore le nom (2020), Le mot refusé (2023), Les lettres du fer (2023). En exil depuis 2012, il vit actuellement à Saint Denis, en région parisienne. Il a publié, aux Éditions APIC (Alger, 2024), dans la collection "Poèmes du monde", un recueil en bilingue, Avant ce silence (trad. de l'arabe par Nathalie Bontemps et Marilyn Hacker). Il a traduit, de l'anglais, Alberto Manguel, Robert-Louis Stevenson ou Mark Strand, et du français, près de 40 recueils poétiques.

Naget KHADDA : Le texte tengourien : un positionnement dé-colonial
La littérature algérienne de langue française est née, on le sait, de la conjoncture coloniale et s'est inscrite dans le vaste champ qu'on nomma "francophonie". Cette littérature peut-elle échapper à ses conditions d'émergence qui en font un sous-produit de la littérature française ? C'est le défi que l'écriture tengourienne s'est employée à relever. En fait, dès ses débuts, estampillée ethnographique par la critique, cette littérature a cherché à s'émanciper de sa matrice pour accéder à une autonomie pouvant la qualifier comme membre à part entière des différentes littératures nationales. Mais c'est surtout après l'accession à l'indépendance politique que des écrivains comme Nabile Farès, par exemple, ont ouvertement œuvré à concrétiser ce décrochement. L'écriture de Habib Tengour s'installe d'emblée dans un espace ouvert, cherchant à y occuper un point de retrait qui soit un point de départ. Dès lors, sa quête esthétique, nourrie à sa réflexion anthropologique, exhume un projet transnational de citoyen du monde. Je me propose de revisiter les étapes de la constitution de cette littérature qui ont donné naissance à un tel projet ; parcours en tant que voyage selon la métaphore de prédilection mise en œuvre par le poète pour circonscrire sa propre quête.

Naget Khadda est Professeure émérite de langue et littérature françaises (Universités d'Alger, de Paris VIII et de Montpellier III), elle est spécialiste des grands auteurs qui, dans les années 1950, ont donné ses lettres de noblesse à la littérature de langue française en Algérie, notamment de Mohammed Dib (Dib, cette intempestive voix recluse, Edisud, 2003) dont l'œuvre constitue une sorte de concentré de cette littérature et offre, de ce fait, une vision aiguë des enjeux culturels qui s'y disputent et se reflètent jusque dans les écrits de la génération suivante, dont Habib Tengour, Nabile Farès et d'autres. Elle s'intéresse aussi aux arts plastiques pour avoir accompagné la réflexion et la création de son mari, Mohammed Khadda, un des pionniers de la peinture moderne en Algérie.

Mia LECOMTE
Mia Lecomte est poétesse et écrivaine italo-française basée en Suisse. Sa production littéraire, traduite dans de nombreuses langues, a été publiée en Italie et à l'étranger dans des collections personnelles ainsi que dans nombreuses revues et anthologies. Son recueil Là où tu as ton corps (2004-2016) figure dans la collection "Poèmes du monde" (Alger, Apic 2021) dirigée par Habib Tengour. Traductrice, elle est connue comme critique et éditrice dans le domaine de la littérature transnationale, en particulier de la poésie. Elle fait partie du comité de rédaction de plusieurs revues et magazines italiens et internationaux, par ex. de la revue de poésie comparée Semicerchio. Elle est la fondatrice de l'ensemble de théâtre poétique Compagnia delle poete ainsi que, en 2017, de l'agence littéraire transnationale Linguafranca.

Khalid LYAMLAHY : Habib Tengour et les poètes marocains : dialogues, affinités et traces littéraires
Habib Tengour partage avec les poètes marocains de la génération Souffles des affinités littéraires dont les échos traversent son œuvre protéiforme. Comme Mohammed Khaïr-Eddine, dont il salue la parole fulgurante dans son "Manifeste du surréalisme maghrébin", Tengour est sensible à la capacité du langage poétique à dire l'expérience de l'errance et à traduire les pulsations du réel. Comme Abdelkébir Khatibi, qu'il reconnaît pour son travail fondamental sur le bilinguisme et son approche innovante de l'essai et de l'autobiographie, Tengour porte une attention particulière à la rencontre des cultures, au regard sociologique et au dépassement des frontières géographiques et génériques. Comme Abdellatif Laâbi, qui lui dédie un poème issu de son recueil La poésie est invincible, Tengour a pratiqué la traduction et effectué des incursions remarquables dans l'écriture théâtrale. En analysant les affinités entre Tengour et les poètes marocains ainsi que les traces d'écriture et les réseaux de transmission dans leur sillage, cette communication a pour objectif de définir les contours d'une poétique maghrébine basée sur l'appropriation d'une mémoire partagée et l'inscription d'un élan dialogique et émancipateur dans les variations de la matière littéraire.

Khalid Lyamlahy est Maître de conférences en littératures francophones à l'université de Chicago, écrivain et critique littéraire, il a codirigé l'ouvrage collectif Abdelkébir Khatibi : Postcolonialism, Transnationalism, and Culture in the Maghreb and Beyond (Liverpool University Press, 2020). Ses travaux ont été publiés dans plusieurs revues académiques dont PMLA, Research in African Literatures, The Journal of North African Studies et Expressions maghrébines. Il est également l'auteur de deux romans publiés aux éditions Présence Africaine, Un roman étranger (2017) et Évocation d'un mémorial à Venise (2023, prix Éthiophile et mention spéciale du Prix des Cinq Continents de la Francophonie).

Issa MAKHLOUF
Issa Makhlouf est écrivain et poète, né au Liban, il réside à Paris. Docteur en anthropologie sociale et culturelle (Paris IV - Sorbonne), il a publié plusieurs ouvrages en arabe et en français, et a traduit également des auteurs français et latino-américains. Il était directeur de l'Information à Radio Orient à Paris, et aussi conseiller spécial des affaires culturelles à l'ONU / New York, session 2006-2007.
Publications
Beyrouth ou la fascination de la mort, Paris, 1988.
La solitude de l'or, Beyrouth, 1992, APIC, en bilingue, traduit de l'arabe par Jamal Eddine Bencheikh et Esma Hind Tengour, 2018.
Egarements, traduit de l'arabe par Jamel Eddine Bencheikh et accompagné de six gravures d'Assadour, Paris, 1993.
Rêves d'Orient. Borges aux confins des Mille et Une Nuits, Beyrouth, 1996.
Mirages, traduit par Nabil El Azan, Paris, 2004.
Lettre aux deux sœurs, traduit par Abdellatif Laâbi, Paris, 2008.
Une ville dans le ciel, traduit par Philippe Vigreux, Paris, 2014 - Prix Max Jacob 2009.

Abderrahmane MOUSSAOUI : La question de l'appartenance. Entre le poétique et l'anthropologique. Habib Tengour le poète des "récits d'origines"
La présence récurrente de la généalogie dans l'œuvre de Habib Tengour est emblématique d'une quête renouvelée et ininterrompue de l'origine. Partant du présent, à la recherche d'un passé matriciel, l'auteur évoque/invoque l'étrange et l'onirique pour apprivoiser le familier et le réel. Il convoque le lointain pour domestiquer le proche et recourt au passé pour se réconcilier l'actuel. Il porte son regard vers les confins les plus éloignés de la mémoire pour tenter de répondre aux injonctions du présent. Fables, récits hagiographiques et autres manaqib-s l'aident à tisser le lien et établir le sens. Une sorte d'anthropologie de l'errance se profile alors à travers une ethnologie du local mise à l'épreuve de l'universel. En partant notamment de son roman Le Maître de l'heure et de quelques-uns de ses textes académiques ; et en nous appuyant sur la littérature anthropologique de manière générale, nous essaierons de "lire par-dessus l'épaule" (C. Geertz) de Habib Tengour comment se reformule le lien identitaire par l'invocation d'instances afin de cautériser les blessures de l'appartenance dans une société algérienne en mal d'identification. Dans l'esprit de l'anthropologie interprétative développée par Clifford Geertz, nous nous intéresserons au sens et au vécu de la culture par ceux qui y sont insérés et la reproduisent, quelquefois, par devers eux-même. Nous mobiliserons la catégorie "récit d'origine" chère au regretté Pierre Bonte (Récits d'origine : contribution à la connaissance du passé ouest-saharien (Mauritanie, Maroc, Sahara occidental, Algérie et Mali), Paris, Karthala, 2016) pour tenter de saisir comment, tour à tour, l'anthropologue et le poète s'évertuent, à retisser obstinément la même toile effilochée et ensevelie sous les terrains mouvants d'un présent précaire et continument menacé.

Abderrahmane Moussaoui est Professeur émérite d'anthropologie à l'université Lyon 2 et chercheur au LADEC, il a également enseigné aux universités d'Oran et de Provence.
Publications
Espace et sacré au Sahara algérien, CNRS, 2002.
De la Violence en Algérie. Les lois du Chaos, Actes Sud, 2006.
Les Oasis au fil de l'eau – De la foggara au Pivot, Éditions de l'Étrave, 2019.
J.-R. Henry et A. Moussaoui (éd), L'Église et les chrétiens d'Algérie ‎indépendante, Karthala, 2019.
Algérie, une longue marche – Hirak, mémoire(s) et histoire, Hémisphères Éditions et Maisonneuve & Larose, 2023.

Christina OIKONOMOPOULOU : Aspects de la réception du théâtre grec antique dans l'œuvre dramatique de Habib Tengour
Si on considère que l'œuvre poétique de Habib Tengour est souvent traversée par Ulysse, ce personnage célèbre de la mythologie, de l'histoire et des lettres helléniques, on repère parallèlement dans son œuvre théâtrale une réserve considérable d'éléments esthétiques, structuraux, thématiques et idéologiques qui font écho au théâtre grec antique. Nous nous proposons ainsi d'examiner le cadre et les horizons de la réception du théâtre grec antique dans l'ensemble de la production dramaturgique tengourienne. Pour donner un avant-goût de notre intervention, nous présentons ici quelques pistes de recherche :
- La question des genres : quels sont les genres du théâtre grec antique auxquels Habib Tengour a recours pour tisser ses propres pièces de théâtre ? Reste-t-il fidèle à leurs schémas de base, ou bien opte-t-il pour une actualisation de leur identité ?
- La question de structure : quelle est l'utilité de l'intégration du chœur et du coryphée chez Habib Tengour dramaturge ? S'agit-il d'un élément scénique et dramatique dont la fortune reste figée tout au long de sa production théâtrale ?
- La question des thèmes : par quels moyens et dans quel but Habib Tengour remanie-t-il dans ses pièces de théâtre la question du destin et du tragique, axes fondamentaux de l'idéologie de la dramaturgie hellénique ? Comment est-ce qu'il les met en connexion avec son système écopoétique, avec l'historicité algérienne, ainsi qu'avec la question de l'errance et du nomadisme, sujets par excellence de son art poétique ?
Dans ce cadre, nous ambitionnons de démontrer que la réception du théâtre grec antique acquiert dans l'œuvre théâtrale de Habib Tengour les dimensions d'une véritable déterritorialisation — au sens du terme établi par Deleuze et Guattari — de l'identité, de la forme et du contenu de la dramaturgie hellénique, et de leur reterritorialisation dans l'espace géographique, culturel et historique algérien, source principale, sinon unique, de l'imaginaire dramatique de l'auteur.

Christina Oikonomopoulou est Enseignante-Chercheuse au Département d'Études théâtrales de l'université du Péloponnèse (2003), spécialisée dans les écritures théâtrales-monde d'expression française (colloques, articles, contributions à des volumes collectifs).
Publications
Écritures théâtrales-monde d'expression française, Tome II : "Maghreb" (sous presse).
L'identité kaléidoscopique de l'écriture théâtrale de Habib Tengour (2025).
Écritures théâtrales-monde d'expression française, Tome I : "Europe" (2022).
Cours de Culture et de Terminologie théâtrales françaises (2022).

Cécile OUMHANI
Cécile Oumhani est poète et romancière, ex-maître de conférences à l'université Paris XII, s'intéressant aux littératures féminines et postcoloniales, elle a grandi entre l'anglais et le français. Son écriture aime à investir des lieux et des cultures autres. Les liens qu'elle a noués avec la Tunisie ont nourri plusieurs de ses livres. Parmi ses recueils de poèmes : Marcher loin sous les nuages (2018) aux éditions APIC, Mémoires inconnues (2019), La ronde des nuages (2022) chez La Tête à l'Envers. Parmi ses romans : Tunisian Yankee (2016), Les tigres ne mangent pas les étoiles (2024), chez Élyzad. Elle vient de publier un essai autobiographique, Ma mère et la peinture / Meine Mutter und die Malerei à Berlin, en bilingue (Bübül 2024, traduction allemande par Tanja Langer), et des nouvelles écrites dans l'anglais de sa mère, Like Birds in the Sky, à Delhi (Red River 2024). Elle est membre du Parlement des écrivaines francophones.

Anne ROCHE : Tengour, avec Farès et Meddeb : une convergence de recherches et d'écriture
Moins recherche d'influences que mise en évidence de communautés de trajectoires et de projets, on propose ici de mettre en relation les noms de Nabile Farès et d'Abdelwahab Meddeb avec celui de Habib Tengour. Nabile Farès, depuis ses premiers travaux d'ethnologue en accompagnement de Camille Lacoste-Dujardin, sa thèse sur l'Ogresse, jusqu'à ses dernières publications confiées à la jeune maison d'édition algérienne Koukou, basée à Tizi-Ouzou, a toujours œuvré au confluent de la recherche anthropologique, ce qui a irrigué sa production littéraire. Abdelwahab Meddeb quant à lui, descendant d'une famille de lettrés, fait converger ce qu'on peut appeler "l'orientalisme savant", les traditions poétiques arabes et occidentales, avec les chocs de la modernité. Or, les substrats anthropologiques de l'œuvre de Tengour, malgré les spécificités de chacun des trois auteurs, autorisent un rapprochement, qui tentera d'articuler leurs visées communes et la différenciation notamment scripturale.

Anne Roche est Professeur émérite à l'université d'Aix-Marseille (AMU), a publié une vingtaine d'ouvrages de théorie littéraire, critique littéraire et fiction (théâtre, romans). Ses recherches portent notamment sur les ateliers d'écriture, qu'elle a introduits à l'université d'Aix en 1968 après un séjour aux États-Unis, sur la littérature francophone, et sur les écrivains de l'extrême-contemporain. Prix de l'essai européen Walter Benjamin en 2018 pour son ouvrage Exercices sur le tracé des ombres - Walter Benjamin (Éditions chemin de ronde, 2010), Algérie, écritures de l'autre (Éditions Casbah à Alger, puis Kimé, 2019).

Joyce SEBAG : Habib Tengour, une poésie politique ?
Sous le vocable générique de poésie, nous aborderons le travail d'Habib Tengour à partir d'une approche sensible de la lecture de son œuvre. Émotion du lecteur, fluidité du style, perception de l’espace, humanité des relations, envahissement de la mémoire. Le politique qui sature son propos transparaît à travers l'évocation de personnages aux dimensions mythiques mais aussi tellement ordinaires. La mémoire des lieux est l'occasion d'évoquer une histoire qui le hante tout au long de ses écrits. Elle l'inscrit dans une culture arabo-musulmane qui se conjugue avec une interrogation sur l'universalisme. Ambivalence dont il se nourrit pour élaborer son œuvre pétrie de l'histoire présente. Sollicitation permanente d'Homère dont les mythes imprègnent son regard sur l’actualité. Il fait vivre intensément la sociologie, l'ethnologie, l'anthropologie. En cela son analyse des sociétés à travers ses personnages est une invitation à la critique de celles-ci autant qu'une interrogation sur ses points de vue… Face à l'étendue de l'œuvre d'Habib, je n'aborderai que quelques-unes d'entre elles : Le poisson de Moïse, Le vieux de la montagne, Sultan Galiev

Joyce Sebag est Professeur émérite de Sociologie à l'université Évry Paris-Saclay. Elle a séjourné à l'Île Maurice où elle s'est intéressée aux cultures et aux religions venues du continent indien, avant d'enseigner la Sociologie à Constantine et à Alger. En 1998, elle a fondé à l'université d'Évry le Master "Image et Société" et le doctorat en "Sociologie filmique" qui permettent de développer une écriture cinématographique de la sociologie. Elle a publié, avec Jean-Pierre Durand, Sociologie Filmique, Théories et Pratiques aux Éditions CNRS (2020). Cet ouvrage a été édité en anglais par Palgrave. Les traductions au Mexique, au Brésil et en Corée du Sud sont en cours.

Susan SLYOMOVICS : Diwan ifrikiya, la Geste hilalienne, et l'écriture orale
D'après Habib Tengour, la place consacrée à l'oralité dans l'anthologie Diwan ifrikiya (Joris et Tengour, 2013) s'explique par le fait qu'"écriture" et "voix" se recoupent : "c'est la voix qui porte le texte, elle le module et l'anime pour en partager le plaisir". Par ailleurs, trois sections sur les traditions orales sont insérées dans leur University of California Book of North African Literature dont deux sont tirées des traductions françaises de la Geste hilalienne versions tunisiennes. Dans cet exposé, j'examine les problèmes de la transposition de la performance orale en texte écrit illustrés par des textes transcrits et des versions imprimées de la Geste hilalienne. En m'appuyant sur les méthodes de la théorie et pratique de l'ethnopoétique (ethnopoetics), je souhaite analyser la façon dont certains facteurs linguistiques et culturels influencent la présentation d'une performance récitée et chantée.

Susan Slyomovics est Distinguished Professor dans les deux départements d'Anthropologie et de Langues et cultures du Proche-Orient à l'University of California Los Angeles.
Publications
Race, Place, Trace : Essays in Honour of Patrick Wolfe, édité avec Lorenzo Veracini (2022).
"L'inévitable prison", Année du Maghreb, édité avec Marc André (2019).
How to Accept German Reparations (2014).
The Performance of Human Rights in Morocco (2005).
The Object of Memory : Arab and Jew Narrate the Palestinian Village (1998).
The Merchant of Art : An Egyptian Hilali Oral Epic Poet in Performance (1987).

Cole SWENSEN
Cole Swensen est l'autrice de vingt recueils de poésie, dont dix ont été traduits en français. Son dernier volume, And And And (Shearsman Books, 2023), a été finaliste du prix Griffin. Ancienne boursière Guggenheim, elle a remporté l'Iowa Poetry Prize, le SF State Poetry Center Book Award et le National Poetry Series, et a été finaliste du National Book Award et du Los Angeles Times Book Award. Également traductrice, entre autres de Habib Tengour, elle a remporté le prix PEN USA de traduction, le prix national de traduction ALTA 2024 et le prix de traduction Stephen Mitchell 2025. Elle partage son temps entre Paris et San Francisco. Son prochain recueil, Art in Time, paraîtra en 2025 dans la collection "Poètes du monde", traduit par Habib Tengour lui-même.

Juliane TAUCHNITZ : Littératures migrantes d'Octavio Paz à Habib Tengour
Dans son recueil d'essais Dans le soulèvement (2012), Habib Tengour cite différents auteurs qui ont exercé une influence déterminante sur son œuvre dont, en plus des écrivains maghrébins, James Joyce, Benjamin Péret — et Octavio Paz. Bien qu'à part cette petite mention de l'auteur mexicain, l'impact du dernier sur les textes de Tengour ne paraisse pas évident dans un premier temps, il y a des ressemblances et des rencontres conceptuelles considérables qui relient les deux. C'est pourquoi je propose une lecture croisée entre les textes littéraires et essayistes d'Habib Tengour et d'Octavio Paz pour analyser non seulement comment leur pensée part des points de vue similaires, mais surtout pour rendre visible comment ils développent une poétique (littérairement et théoriquement) qui est en mouvement incessant, qui flotte et fait de leur littérature une littérature "migrante".

Juliane Tauchnitz est Professeure contractuelle à l'université de Wuppertal, elle focalise sa recherche sur les phénomènes de créolité, d'hybridité et de métissage dans les littératures francophones et hispanophones. Sa thèse portait sur La Créolité dans le contexte du discours international et postcolonial du métissage et de l'hybridité. De la mangrove au rhizome (L'Harmattan, 2014), sa thèse d'état sur Konstruktion eines werdenden Kulturraums in hispano-marokkanischer Literatur (Vervuert, sous presse). Elle était co-directrice, avec Alfonso de Toro, du centre de recherche francophone de l'université de Leipzig, ainsi que des collections "Passagen" (Olms) et "Transversalité" (L'Harmattan).

Mourad YELLES : Ulysse et le Maître de l'Heure. Éléments pour une poétique du sacré dans l'œuvre de Habib Tengour
L'un des épisodes centraux de la mythologie personnelle de Habib Tengour met en scène Ulysse de retour dans sa patrie et contraint de subir une ultime épreuve : être reconnu par les siens. Par-delà sa résonnance littéraire, voire philosophique, une fois replacée dans un contexte proprement algérien, l'épreuve homérique renvoie inévitablement aussi à un contexte politique (déjà présent chez Homère avec le thème du rétablissement de la légitimité royale). Comme c'est le cas dans Tapapakitaques ou dans L'Épreuve de l'arc, le narrateur, double algérien d'Ulysse, tente ainsi de négocier un rapport pour le moins difficile avec sa société mais également avec le Pouvoir. Par ailleurs, la notion d'épreuve renvoie à un autre volet de la mythologie tengourienne : le culte des saints et le sacré populaire maghrébin. Il est évidemment question ici des voies de l'ascèse mystique. Mais les études anthropologiques (dont celles de Habib Tengour lui-même) ont montré l'importance du lien étroit entre sacré, religion et politique dans l'histoire culturelle du Maghreb. Et ceci jusque dans ses aspects les plus tragiques (cf. la "décennie noire" algérienne). Entre mirages du pouvoir et vertiges de l'extase, à l'image d'"Ulysse chez les intégristes" (Gens de Mosta), le héros tengourien tente de résoudre une équation insoluble à travers une quête qui demeure fondamentalement poétique.

Mourad Yelles est Professeur des universités émérite en littératures maghrébines et comparées à l'Inalco et membre de l'équipe LACNAD, il a également enseigné aux universités d'Alger, de Paris VIII et de Paris III. Comparatiste et anthropologue, il travaille notamment sur les processus de métissage des formes, des pratiques et des imaginaires dans le champ littéraire maghrébin (arabophone et francophone) et des Antilles : Les Miroirs de Janus. Littératures orales et écritures postcoloniales (Alger, OPU, 2002), Habib Tengour ou l'ancre et la vague. Traverses et détours du texte maghrébin (dir., Karthala, 2003), Cultures et métissages en Algérie. La racine et la trace (L'Harmattan, 2005), Habib Tengour. L'arc et la lyre. Dialogues (1988-2004) (Casbah Éditions, 2006), Traduire la pluralité du texte littéraire (avec Patrick Maurus et Marie Vrinat-Nikolov, Paris, Éditions L'Improviste, 2015).

Khalid ZEKRI : Une lecture de Dans le soulèvement : la maghrébine condition
Dans son essai Dans le soulèvement, Algérie et retour, Habib Tengour "n'enseigne point, il raconte" comme disait Montaigne à propos de ses propres essais. Il raconte ce qu'on pourrait s'aventurer à appeler ici "l'algérienne condition". Mais pas seulement. Car il s'agit aussi de la "maghrébine condition" qu'il raccroche à une histoire et à des références beaucoup plus larges pour l'inscrire, in fine, dans l'humaine condition. J'analyserai dans ma communication les idées développées dans cet essai tout en faisant référence à d'autres ouvrages de Habib Tengour.

Khalid Zekri est Professeur des universités en littérature comparée et sciences sociales et membre de l'Équipe d'Études Culturelles et Linguistiques à la Faculté des Lettres et des Sciences humaines de Meknès. Il a également été professeur invité aux universités de Leipzig, Aix-la-Chapelle et Mannheim. Il est lauréat en 2019 du Grand Prix du Maroc (catégorie sciences sociales) pour son ouvrage : Modernités arabes : de la modernité à la globalisation.


BIBLIOGRAPHIE :

• Jacqueline Arnaud, La Littérature maghrébine de langue française, Deux tomes, Paris, Publisud, 1986.
• Jacques Berque, L'Intérieur du Maghreb. XVe-XIXe siècles, Gallimard, 1978.
• Charles Bonn, Lectures nouvelles du roman algérien. Essai d'autobiographie intellectuelle, Classiques Garnier, 2016.
• Beida Chikhi, Maghreb en textes. Écritures, histoires, savoirs et symboliques, Paris, L'Harmattan, 1996.
• James Clifford & George E. Marcus (éd.), Writing culture. The Poetics and Politics of Ethnography, University of California Press, 1986.
• Nabile Farès, Maghreb, étrangeté et amazighité, Alger, Koukou, 2016.
• Ernest Gellner, Muslim Society, Cambridge University Press, 1981.
• Marc Gontard, Violence du texte. La Littérature marocaine de langue française, Paris, L'Harmattan, 1981.
• Pierre Joris & Habib Tengour (éd.), Poems for the Millenium, Vol. Four : "The University of California Book of North African Literature", Berkeley, University of California Press, 2013.
• Abdelkébir Khatibi, Maghreb pluriel, Paris, Denoël, 1983.
• Regina Keil-Sagawe & Hervé Sanson (éd.), Les portes du poème. Hommage à Habib Tengour, Alger, APIC, 2022.
• Ghyslain Lévy, Catherine Mazauric & Anne Roche (éd.), L’Algérie, traversées, Colloque de Cerisy, Paris, Hermann, 2018.
• Abdelwahab Meddeb, L'Exil occidental, Paris, Albin Michel, 2005.
• Anne Roche, Algérie : écritures de l'autre, Alger, Casbah, 2017 (Paris, Kimé, 2019).
• Hervé Sanson, La Trace et l'écho : Une écriture en chemin. Entretiens avec Habib Tengour, Blida, Le Tell, 2012.
• Habib Tengour, Dans le soulèvement, Essais. Algérie et retours, Paris, La Différence, 2012.
• Mourad Yelles (éd.), Habib Tengour ou l'ancre et la vague. Traverses et détours du texte maghrébin, Paris, Karthala, 2003.
• Mourad Yelles, L'Arc et la lyre, Alger, Casbah, 2006.
• Mourad Yelles, Cultures et métissages en Algérie. La racine et la trace, Paris, L'Harmattan, 2006.
• Sonia Zlitni-Fitouri (éd.), "Les écritures nomades de Habib Tengour", Expressions Maghrébines, vol. 11, n°1, 2012.


SOUTIENS :

• Centre interdisciplinaire d'étude des littératures d'Aix-Marseille (CIELAM, EA 4235) | Aix Marseille Université (amU)
• THALIM (UMR 7172, CNRS) | Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
• Langues et Cultures du Nord de l'Afrique et Diasporas (LACNAD, EA 4092) | Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO)
Institut français d'Algérie
Centre Pierre Naville | Université d'Évry
Association Victor Hugo
Printemps des poètes - Luxembourg

Manifestation scientifique subventionnée par le CS de l'INALCO


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


JEAN COCTEAU, LE DÉNIAISEMENT DES LETTRES ET DES ARTS


DU LUNDI 4 AOÛT (19 H) AU DIMANCHE 10 AOÛT (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]


Montage de : disque Columbia de La Voix humaine (1930) ;
Cocteau en 1921 dans le rôle d'un des Phonographes des

Mariés de la Tour Eiffel © D.R. ;
Cocteau travaillant aux décors d'
Œdipus Rex
pour la reprise de 1952, cl. P. A. Constantin © D.R.


ARGUMENT :

Comment approcher et comprendre aujourd'hui la démarche créatrice de Cocteau, cet artiste aux dons multiples qui, s'affirmant en tout comme poète sans se laisser cantonner dans les territoires traditionnels de la poésie, fut aussi dessinateur, chorégraphe, scénographe, romancier, essayiste, réalisateur, éditeur et acteur à l'occasion, auteur de théâtre et de cinéma, homme de presse et de radio, peintre, décorateur de monuments publics, céramiste, etc., suivant les impulsions de sa personnalité explosive et l'idée qu'une œuvre d'art "doit satisfaire toutes les muses" ? Aux reproches de dispersion et d'amateurisme régulièrement formulés par ses contemporains, Cocteau a opposé la continuité cachée de Picasso, son grand modèle, "la seule dont on ne se lasse pas et dont on ne s'aperçoive qu'avec le recul ou sous un certain angle", et les pratiques de déniaisement d'un Satie et d'un Radiguet. Déniaiser consiste, à leur exemple, à sortir la littérature et les arts de leurs routines, traditions ou modes, et, pour chaque auteur, à ne pas se répéter soi-même. Cocteau s'y emploie en jouant la carte de la pluralité des arts et de l'intermédialité. Le colloque vise à mettre en avant et illustrer la constance, la portée et la cohérence profonde de sa démarche, en essayant sur elle la clé de lecture de ce principe de déniaisement, à l'épreuve des théories contemporaines de l'intermédialité.


MOTS-CLÉS :

Arts graphiques, Arts plastiques, Arts du spectacle, Chanson, Cinéma, Cocteau (Jean), Corps, Dada, Danse, Dessin, Fiction, Intermédialité, Littérature, Musique, Patrimonialisation, Photographie, Poésie, Postérités, Roman, Surréalisme, Théâtre


CALENDRIER PROVISOIRE (26/03/2025) :

Lundi 4 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants, ainsi que du Foyer de création et d'échanges


Mardi 5 août
DÉMARCHE DE L'ARTISTE (I) : AMBITIONS
Matin
Duo 1 : Introductions
Pierre-Marie HÉRON : Déniaiser, dépatiner, contredire… la démarche artistique de Cocteau expliquée par lui-même
Danielle CHAPERON : Déniaisement et intermédialité

Duo 2 : Question(s) d'avant-garde
David GULLENTOPS : Approches intermédiales de la "poésie" de Cocteau
Marie-Paule BERRANGER : Cocteau des années 20 : avec et contre Dada et les surréalistes

Après-midi
Atelier du dictionnaire, avec François AMY DE LA BRETÈQUE

Duo 3 : Figures de l'auteur
Émilien SERMIER : Cocteau, personnage de fiction
David MARTENS : Cocteau par lui-même. Un autoportrait l'air de ne pas y toucher

Soirée
Claude ARNAUD : Cocteau, lignes de vie | Rencontre-entretien animée par David GULLENTOPS


Mercredi 6 août
INTERMÉDIALITÉS VISUELLES
Matin
Pratiques du dessin dans les arts graphiques et au-delà
Dominique BERT : Cocteau dessinateur | Rencontre-entretien animée par David GULLENTOPS

Empreintes du dessin dans les autres arts, table ronde animée par Cyrielle DODET, avec Sandrine FARAUT RUELLE (œuvre plastique), Jacinthe HARBEC (musique et ballet), Émilien SERMIER (roman) et Fanny VAN EXAERDE (cinéma)

Après-midi
Théâtre, ballet, mode, cinéma : croisements, déniaisements
Duo 1 : Intermédialités au théâtre
Cyrielle DODET : "Le théâtre est une fournaise" : qu'embrase le geste intermédial de Cocteau ?
Marika GENTY : Gabrielle Chanel et Jean Cocteau, la scène en partage

Duo 2 : Postérités de Cocteau au cinéma
Christophe MEURÉE : Les filiations de l'écrivain-cinéaste : Cocteau, Duras, Toussaint
Ivelise PERNIOLA : Des Enfants terribles (Jean Cocteau) à The Dreamers (Bernardo Bertolucci) : suggestions et croisements narratifs

Soirée
Projection animée par Guillaume BOULANGÉ


Jeudi 7 août
DÉMARCHE DE L'ARTISTE (II) : DÉNIAISER LE CANON / ENTRER DANS LE CANON
Matin
Trio : Cocteau et la gloire
Pierre-Marie HÉRON : Devenir Cocteau, ou comment incarner le génie de la France
Sandrine FARAUT RUELLE : Jean Cocteau sur la Côte d'Azur : les œuvres monumentales
Susanne WINTER : Quand la consécration vient de l'étranger : les voyages en Allemagne des années 1950

Atelier de l'œuvre : Le Musée du Bastion à Menton

Après-midi
DÉTENTE


Vendredi 8 août
INTERMÉDIALITÉS SONORES
Matin
Duo 1 : Intermédialités en musique
Olivier RAUCH : Une "parenté subtile" : l'écriture des Chevaliers de la Table Ronde de Jean Cocteau et du Paradis perdu d'Igor Markévitch
Claude COSTE : Jean Cocteau face aux avant-gardes musicales des années 50

Marion BRUN : "Typographie auditive" et monologue d'auteur : les disques d'Orphée et des Parents terribles (1962)

Après-midi
Duo 2 : Modalités de la voix
Stéphane HIRSCHI : Écrire pour des voix : Cocteau en chanté ?
Danielle CHAPERON : Off et over : voix et graphies dans les films de Cocteau

Atelier de l'œuvre : Le disque Columbia 1930 (poèmes d'Opéra dits par l'auteur)

Atelier du dictionnaire , avec François AMY DE LA BRETÈQUE

Soirée
"Les chansons de Cocteau" | Karaoké animé par David GULLENTOPS


Samedi 9 août
LE CORPS MODES D'EMPLOI
Matin
Duo 1 : Plateaux
Fanny VAN EXAERDE : "Les cris d'une foule accompagnent cette image" : enjeux des photographies de plateau et photographies de tournage dans les films de Cocteau
Mélissa GIGNAC : Phénixologie ou le strip-tease de la création

Duo 2 : Représentations du corps
Ann VAN SEVENANT : Plurisexualité et genre nouveau
Gil CHARBONNIER : Jean Cocteau, ambulancier de la Croix-Rouge (1915-1916) et l'émergence du droit international humanitaire : vers une nouvelle sensibilité artistique

Après-midi
Duo 3 : Le corps à l'œuvre
Hiroyuki KASAI : La Mort du Sphinx ou la transmutation réversible du corps — à travers les manuscrits de La Machine infernale
Guillaume BOULANGÉ : "Animal l'animal" : Jean Marais dans les films de Jean Cocteau

Emplois du corps dans les arts du spectacle, table ronde animée par Danielle CHAPERON, avec Guillaume BOULANGÉ (cinéma), Cyrielle DODET (théâtre et cinéma), Jacinthe HARBEC (ballet) et Stéphane HIRSCHI (chanson, music-hall)

Soirée
Le Mystère de Jean l'Oiseleur de Jean Cocteau, lecture originale d'Armelle CHITRIT avec les linogravures de Fanny VAN EXAERDE [dans le cadre du Foyer de création et d'échanges]


Dimanche 10 août
Matin
Synthèse et Bilan

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Danielle CHAPERON : Off et over : voix et graphies dans les films de Cocteau
La filmographie de Jean Cocteau se distingue par une multitude de démarches que l'on pourrait qualifier d'"auteuristes" : des œuvres résolument autobiographiques, des films où il est à la fois scénariste, dialoguiste et réalisateur, des films dans lesquels il incarne lui-même un personnage, parfois le rôle principal, ou se confond sous une forme fictionnalisée. Il y a enfin ces films qu'il accompagne d'un journal de bord qui dévoile leur processus de création tout en en assurant le commentaire. Bien que la politique des auteurs, théorisée par Les Cahiers du cinéma dès 1950, ait largement contribué à valoriser l'individualité créative des réalisateurs, il n'en demeure pas moins que cet art, à l'instar du théâtre, échappe à l'emprise d'un auteur unique. Force est de constater que Jean Cocteau a, pour sa part, su déployer une variété de procédés stylistiques (selon la définition de Marielle Macé) visant à instituer son rôle de "poète du cinéma". Parmi les procédés qui retiendront notre attention, figurent sa voix enregistrée et sa "graphiation". Dans cette analyse, nous croiserons les outils de l'analyse filmique et ceux de l'analyse de la bande dessinée, en particulier ceux développés par Philippe Marion et Jacques Dürrenmatt. Cela nous permettra, de manière intermédiale, de rendre compte des diverses manières dont Jean Cocteau a cherché à inscrire son corps d'auteur dans son œuvre cinématographique.

Danielle Chaperon est professeure de littérature française à la faculté des Lettres de l'université de Lausanne (UNIL). Le théâtre occupe actuellement une place centrale dans son activité d'enseignement et de recherche. Elle a dédié son premier ouvrage à l'œuvre de Jean Cocteau : Jean Cocteau. La Chute des angles (Lille, Presses universitaires de Lille, 1991) et dirigé un numéro de la Revue des Sciences humaines consacré à Jean Cocteau (n°233, 1994). Bien que tournée depuis vers d'autres problématiques (les relations entre les sciences et la littérature, la dramaturgie contemporaine), elle continue de publier régulièrement sur cet auteur (une douzaine d'articles).

David GULLENTOPS : Approches intermédiales de la "poésie" de Cocteau
Dès les années 1920 jusqu'à la fin de sa carrière, Cocteau défend un des principes du dadaïsme qui incite à s'insurger inlassablement contre les manifestations de l'art qui sont instituées de façon officielle, reconnues par la presse, même promulguées par l'une ou l'autre avant-garde. Nous savons que Dada a repris ce principe aux tenants de l'anarchisme intellectuel de l'avant-guerre qui cherchaient à faire advenir une réalité sociale idéale, dont ils déplaçaient à chaque fois les attentes et les objectifs pour la parfaire. Lorsque Cocteau assigne à l'art la nécessité de rendre visible l'invisible, comprenons par là qu'il essaie de rendre perceptible ce qui n'a pas encore été perçu. Il applique le principe d'insurrection à la "poésie", tout d'abord en faisant usage de toute la panoplie de modes d'expression artistiques ou médias (poésie, roman, dessin, théâtre, cinéma, …), puis en décloisonnant les genres, les disciplines et les hiérarchies artistiques qui les régissent et les contraignent, enfin en les enrichissant mutuellement par des échanges et des interférences entre médiums basiques et techniques. Par ses pratiques intermédiales, Cocteau entend innover sur le plan de la création, projet qu'il désigne sous l'appellation du "genre nouveau", tout en cherchant à "animer" ses œuvres et les rendre "vivantes".

David Gullentops est professeur émérite de littérature française et d'intermédialité à la Vrije Universiteit de Bruxelles (VUB), membre de l'Académie royale de Belgique (KVAB) et directeur des Cahiers Jean Cocteau. Il est le coéditeur des Œuvres poétiques complètes de Jean Cocteau dans la "Bibliothèque de la Pléiade" (2005) et l'auteur de plusieurs ouvrages sur Cocteau : Les Mondes de Jean Cocteau. Poétique et Esthétique (avec Ann Van Sevenant, Non Lieu, 2012), Écrits sur la musique de Jean Cocteau (avec Malou Haine, Vrin, 2016), Écrits sur l'art de Jean Cocteau (Gallimard, 2022) et Jean Cocteau et l'intermédialité (Éditions de l'université de Bruxelles, 2024). Il codirige actuellement avec Pierre-Marie Héron l'équipe de chercheurs chargés de composer le Dictionnaire Jean Cocteau.

Pierre-Marie HÉRON : Déniaiser, dépatiner, contredire… la démarche artistique de Cocteau expliquée par lui-même
"La forme de la pensée, un nombre limité de problèmes, un petit vocabulaire simple, l'angle de vision (véritable style) sont ce par quoi [un poète] se distingue des autres" (Le Secret professionnel) : dans le vocabulaire de Cocteau, dépatiner, appliqué aux lieux communs qu'il s'agit de nettoyer et éclairer sous un angle neuf pour qu'ils retrouvent leur jeunesse et leur fraîcheur, ou aux chefs-d'œuvre en général, du théâtre grec en particulier, qu'il s'agit de rafraîchir "car un chef-d'œuvre porte en soi une jeunesse que la patine recouvre mais qui ne se fane jamais" (à propos d'Antigone), est un mot-programme assez connu. Contredire et ses dérivés aussi, à travers les variations répétées du poète sur l'esprit de contradiction comme forme de l'esprit de création, accompagnant en 1928 l'affirmation qu'il a "toujours (et presque systématiquement) contredit ce qui se faisait à l'avant-garde" (Une entrevue sur la critique avec Maurice Rouzaud). Mais déniaiser est resté jusqu'à présent assez inaperçu, sinon dans le vers-calembour d'Opéra proclamant la nécessité de déniaiser le sublime : "Leur Ève nue, houle sublime, doigts, hêtres des nids aisés". De fait, les brefs essais réunis dans Le Rappel à l'ordre au milieu des années 1920 utilisent à peine le mot, pas plus que ceux d'après-guerre. Pourtant telle note de la préface de 1922 aux Mariés de la tour Eiffel nous apprend que le projet du ballet le plus célèbre de Cocteau était "en somme de déniaiser la niaiserie", et tels passages de la Lettre à Jacques Maritain qu'une des grandes leçons de Satie au groupe des Six a été "que ce qui est grand ne peut avoir l'air grand, ce qui est neuf avoir l'air neuf, ce qui est naïf avoir l'air naïf" et que cette leçon, le poète l'a appliquée à la littérature pour y "déniaiser quelques genres : le comique, la grâce, la tragédie, le roman, le théâtre", à quoi Radiguet a ajouté "la réclame". Or ce mot est aussi tout un programme, et même la clé de compréhension, sinon de toute la démarche artistique de Cocteau, du moins de ce qui la distingue au plus haut point, si l'on en croit une note de 1958 ajoutée au volume II de sa Poésie critique : "Si l'on découvre un jour ma spécialité, celle où j'étais seul et incomparable, ce sera le déniaisement des genres". Dans cette première intervention du duo inaugural, il s'agira d'expliciter ce que déniaiser veut dire, en faisant l'hypothèse que dépatiner et contredire aident à en déployer le sens sans l'épuiser.

Pierre-Marie HÉRON : Devenir Cocteau, ou comment incarner le génie de la France
Avec la défense et promotion d'une "musique française de France" au moment du Coq et l'Arlequin, bien connues, il y a dans la démarche artistique du Cocteau des années 1920, celui du Rappel à l'ordre, des convictions sur l'identité française, le génie français, l'écrivain français, la phrase française, qu'il sera intéressant de rappeler pour mieux mettre en perspective sa posture des années 1950. Trente ans plus tard en effet, dans la décennie de l'élection à l'Académie française et d'une pluie de reconnaissances internationales, ces convictions ont atteint un comble : incarner le génie de la France, cet "éternel terrain de lutte entre le bon sens et l'ange du bizarre" (Discours de réception à l'Académie française) et que tous le reconnaissent en lui. On se demandera si et comment, survivant obstinément à sa longue habitude de "recevoir des coups" de ses pairs en littérature et contredisant son dédain répété de la célébrité, par quoi une œuvre est admise sans être comprise (Journal d'un inconnu), le déniaisement des arts et des lettres dont Cocteau a fait sa spécialité s'applique à cette posture de "génie pur France" du XXe siècle.

Pierre-Marie Héron, ancien membre senior de l'Institut universitaire de France, est professeur de littérature française à l'université Paul-Valéry Montpellier 3. Il a longtemps impulsé des recherches sur les écrivains et la radio en France (XXe et XXIe siècles), régulièrement publiées dans la revue en ligne Komodo 21 et aux Presses universitaires de Rennes. Dernier volume paru : Le désir de belle radio aujourd'hui (fiction, documentaire), en codirection avec Éliane Beaufils et Christophe Deleu, PUR, 2024. Auteur d'ouvrages sur Genet, Jouhandeau et Cocteau (Cocteau. Entre écriture et conversation, PUR, 2010), il anime aussi à Montpellier un programme de recherche sur ce dernier auteur, programme à l'origine du site internet Jean Cocteau unique et multiple, revu en 2022, et de nombreux colloques, parmi lesquels "Cocteau journaliste" (2014), "Douze ans de journal posthume. Le Passé défini de Jean Cocteau" (2019), "Cocteau d'une guerre à l'autre" (2019) ; dernier volume paru : Quoi de neuf sur Jean Cocteau ? (2024), co-dir. David Gullentops, Classiques Garnier. Pierre-Marie Héron codirige en ce moment, avec David Gullentops, la réalisation d'un Dictionnaire Jean Cocteau chez Champion, à paraître en 2027.


François AMY DE LA BRETÈQUE
François Amy de la Bretèque est Professeur émérite d'études cinématographiques de l'université Paul-Valéry de Montpellier ; Agrégé de grammaire (lettres classiques) ; Membre du Centre de recherche RIRRA21 ; Membre du CA de la cinémathèque Institut Jean-Vigo de Perpignan ; Responsable de la recherche et des publications dans cette institution ; Historien du cinéma et historien des représentations. Il est l'auteur de plusieurs livres et de nombreux articles notamment sur les représentations du Moyen Âge au cinéma, sur Louis Feuillade, sur le cinéma des premiers temps ; Membre du programme Cocteau du centre RIRRA21 depuis sa création ; Coéditeur de l'ouvrage Jean Cocteau. Une encre de lumière (Montpellier 1989) ; Contributions plus récentes sur Cocteau : sur le cinéma dans ses articles des années 1930, sur sa "filmographie secondaire", sur sa contribution au scénario de Juliette ou la Clé des songes, sur l'image du persécuté que le poète se donne dans Le Passé défini.

Claude ARNAUD : Cocteau, lignes de vie
Cette rencontre entretien permettra d'aborder, entre autres, les sujets suivants :
- Selon quelle méthode écrire une vie, et avec quels buts ? ;
- Cocteau comme cas biographique rêvé, avec la métamorphose comme ressort romanesque ;
- Cocteau, avec le temps long (l'Histoire, les générations qu'il traverse, de 1900 à 1960) comme abscisse, et le temps court (le rêve, la poésie, l'instant sublimé) comme ??? ordonnée ;
- La relation entre le biographe et son modèle ? ;
- Quelle ambition nourrir pour ce genre qui en manque, généralement ? ;
- Ce qu'il a apporté au biographe et ce que le biographe espère lui avoir apporté.

Claude Arnaud est romancier, essayiste et critique. Il a notamment publié chez Grasset les romans Le Caméléon (1994), Qu'as-tu fait de tes frères ? (2010), Brèves saisons au paradis (2012) et Je ne voulais pas être moi (2016). Il est également l'auteur de nombreux essais, dont Qui dit je en nous ? qui a obtenu le prix Femina de l'essai en 2006. Il est membre du jury du Prix de littérature André Gide et du Prix Sévigné. Pour les coctaliens, il est connu pour trois ouvrages majeurs consacrés au poète : une biographie parue chez Gallimard (2003) et deux essais publiés chez Grasset sur les rapports du poète avec Marcel Proust (2013) et Pablo Picasso (2023).
Publications
Chamfort, Robert Laffont, coll. "Français", 1987 (Prix littéraire Fénéon 1988).
Le Caméléon, Grasset et Fasquelle, coll. "Français", 1994 (Prix Femina du premier roman 1994).
Jean Cocteau, Gallimard, coll. "Biographies", 2003 (Prix de l'Académie française 2004).
Le Jeu des quatre coins, Grasset et Fasquelle, coll. "Français", 1998.
Qui dit je en nous ? : une histoire subjective de l'identité, Grasset et Fasquelle, coll. "Essais français", 2006 (Prix Femina essai 2006).
Babel 1990 : Rome, New York, Saint-Pétersbourg, Gallimard, coll. "Folio Senso", 2008.
Qu'as-tu fait de tes frères ?, Grasset et Fasquelle, coll. "Français", 2010 (Prix Jean-Jacques Rousseau 2011).
Brèves saisons au paradis, Grasset et Fasquelle, coll. "Français", 2012.
Proust contre Cocteau, Grasset et Fasquelle, coll. "Couverture bleue", 2013 (Prix de la Madeleine d'or 2013).
Je ne voulais pas être moi, Grasset et Fasquelle, coll. "Français", 2016.
Portraits crachés : un trésor littéraire de Montaigne à Houellebecq, Robert Laffont, coll. "Bouquins", 2017.
Juste un corps, Mercure de France, coll. "Traits et portraits", 2022.
Picasso tout contre Cocteau, Grasset, coll. "Couverture bleue", 2023 (Prix André Malraux 2023 de l'essai d'art et Prix Khöra de l'Institut).

Marie-Paule BERRANGER : Cocteau des années 20 : avec et contre Dada et les surréalistes
Comment Cocteau en vient-il à susciter les réticences ou la franche animosité à la fois des poètes de la modernité (Cendrars, Reverdy, ou même Apollinaire) et des avant-gardes Dada et surréalistes ? Présenté comme l'émanation d'une sociabilité parisienne où haute bourgeoisie et aristocratie se mêlent à quelques excentriques aux provocations mesurées, il fréquente des milieux d'une mondanité au parfum proustien saupoudré d'opium et d'or. Force est de constater que ce sont souvent les mêmes milieux où les futurs surréalistes désargentés trouvent leurs mécènes, les mêmes éditeurs, les mêmes revues, souvent les mêmes lieux de villégiature, de jazz et de fête, du Bal Blomet au Bœuf sur le toit. Pourtant, Cocteau fait figure d'anti-Jacques Vaché pour Breton, de roi de l'intrigue et de l'embrouille pour Soupault et Desnos, de "danseur maquillé" pour Reverdy. "Ange Miracle" dans Anicet ou le Panorama, roman (Aragon), il devient "Poteau" dans Le Bon Apôtre (1923) un autre roman à clé de Soupault qui lui voue une haine intacte jusque dans les années 80. Sans rappeler exhaustivement les échanges de noms d'oiseau, les pointes et épigrammes, on conviendra que ni le personnage que surjoue Cocteau, ni son entrisme ou son opportunisme n'expliquent cette unanimité. Nous chercherons les lignes de fracture plutôt dans sa poétique, dans sa pratique de l'image et des formes du poème, de l'emprunt et du collage, dans l'évolution de sa conception de la poésie où les surréalistes dénoncent des "effets" de rupture. En revenant aux critiques par lesquelles Breton revient sur son premier recueil, Mont de piété, on interrogera cette poétique de l'effet où le mystère et la surprise obtenus après coup par la suppression des éléments de liaison signalent, aux yeux des surréalistes, la supercherie de la littérature et de l'art.

Marie-Paule Berranger, professeure émérite de littérature française à l'université Sorbonne nouvelle, a depuis sa thèse (1984) orienté ses recherches sur l'histoire et la poétique du surréalisme, sur l'évolution des genres littéraires au XXe siècle : Dépaysement de l'aphorisme (Corti, 1987), Poésie en jeu (Bordas, 1989), Les petits genres de la poésie moderne (PUF, 2004), Notes, notations et carnets de voyage (collectif, PUC, 2009), Évolutions révolutions des valeurs critiques (collectif, Presses de la Méditerranée, 2015). Ses essais et articles s'attachent principalement aux œuvres de Robert Desnos (Commentaire de Corps et biens, Gallimard, 2010, site archives-desnos.com), Philippe Soupault, André Breton, André Pieyre de Mandiargues, Frédéric Jacques Temple et Blaise Cendrars (Commentaire de Du monde entier au cœur du monde, Gallimard, 2007). Elle a procuré une édition critique de la Correspondance de Blaise Cendrars et Jacques-Henri Lévesque (Zoé, 2017) et de Emmène-moi au bout du monde… ! (Œuvres romanesques, t. II, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 2017). En novembre 2024, elle a réuni dans une anthologie les écrits de 33 femmes surréalistes sous le titre de L'araignée pendue à un cil (Poésie/Gallimard).

Dominique BERT : Cocteau dessinateur | Rencontre-entretien
Avec Dominique Bert, nous allons parcourir la pratique du dessin chez Cocteau : d'abord les premiers dessins de presse, puis la période de maturité de l'entre-deux-guerres — avec l'album Dessins, le livre illustré Le Mystère de Jean l'Oiseleur, les illustrations pour Opium, Le Livre blanc et Querelle de Brest —, enfin la période de l'après-guerre, qui a vu la naissance du "style Cocteau" — avec la décoration de la villa Santo Sospir, les fresques de la chapelle Saint-Pierre, les peintures murales réalisées à Menton, Londres et Milly-la-Forêt. Nous aborderons aussi les innovations de Cocteau sur le plan graphique, dont l'usage de la couleur, l'emploi d'instruments alternatifs de dessins et les répercussions de son art graphique dans les arts appliqués (tapisserie, céramique, art mural et décoration). L'entretien a pour objectif de mettre en lumière l'originalité des dessins de Cocteau, leur apport à l'art graphique du XXe siècle et leur influence sur de nombreux artistes contemporains.

Dominique Bert, galeriste à Paris, membre de la Chambre européenne des Experts d'art, est spécialisé dans les dessins de Jean Cocteau dont il a organisé plusieurs expositions.

Marion BRUN : "Typographie auditive" et monologue d'auteur : les disques d'Orphée et des Parents terribles (1962)
Cette communication se concentrera sur l'étude des enregistrements sonores de Jean Cocteau, lecteur de ses pièces de théâtre, notamment Orphée et Les Parents terribles, disques édités par la Voix de l'auteur en 1962. Ces disques ont la particularité d'être intégralement lus par l'auteur, alors même que la forme dramatique appelle peut-être de façon plus privilégiée l'interprétation à plusieurs voix. Il semble dès lors que le projet esthétique de ces enregistrements est bien de donner une version sonore livresque, faire, selon les mots même de Cocteau, une "typographie auditive, quelque chose qui n'est ni le livre, ni la déclamation"1. Cocteau crée ainsi un objet intermédial non identifié. Ces disques renforcent la représentation d'un théâtre monologué chez Cocteau, qui fait de la voix le médium central de sa dramaturgie. Le support du disque est pensé, non comme un simple outil de transmission et de diffusion, qui n'enregistrerait que "les clichés de [sa] voix"2, à l'ère de la reproductibilité, mais comme un moyen d'explorer une forme de modernité dramatique, vers l'épuration du dialogue.
1 Jean Cocteau, Autoportraits de l'acrobate, Fata Morgana, 1993, p. 23.
2 Cité en couverture du disque Jean Cocteau, L'œuvre enregistrée, Frémeaux et associés, 2014, 4 CD.

Marion Brun est maîtresse de conférences en littérature française XXe à l'université Paul-Valéry Montpellier 3 au RIRRa21. Elle est spécialiste de Marcel Pagnol auquel elle a consacré sa thèse publiée chez Classiques-Garnier, Marcel Pagnol classique-populaire. Ses travaux de recherche portent plus largement sur la question du canon littéraire et sur les diffusions médiatiques de la littérature hors du livre (livre audio, adaptation cinématographique, objets dérivés).

Gil CHARBONNIER : Jean Cocteau, ambulancier de la Croix-Rouge (1915-1916) et l'émergence du droit international humanitaire : vers une nouvelle sensibilité artistique
Durant le conflit mondial de 1914-1918, les premiers grands dispositifs d'action humanitaire, issus des Conventions de Genève et celles de La Haye, ont été expérimentés. Une salle de l'actuel Musée du CICR à Genève, dédiée aux fiches et à de multiples documents relatifs aux victimes de la Grande Guerre, témoigne de la volonté de l'époque d'individualiser la souffrance, jusqu'à produire de véritables récits humanitaires. Jean Cocteau, ambulancier de la Croix-Rouge (Services de secours CR, Secteur 131- 1915-1916) a participé à ces récits par ses témoignages (correspondances, textes divers publiés ou inédits) et par la transposition de son expérience dans son roman, Thomas l'imposteur (Gallimard, 1923) qui est aussi une fiction humanitaire. Cette communication se donne pour objectif de définir le sens de la mission de Cocteau, poète-ambulancier, en dialogue avec l'émergence des principes du droit international humanitaire de l'époque. La vision de Cocteau procède d'une nouvelle sensibilité, d'un front artistique, faisant entrer la souffrance des blessés et la menace permanente de la mort dans une zone esthétique hors norme (en raison notamment de sa dimension plurielle articulant le texte, le dessin, la photographie), reflet d'un art d'avant-garde réagissant à l'extrême brutalisation des sociétés européennes.

Gil Charbonnier est professeur de littérature française du XXe siècle à la Faculté de droit et de science politique de l'université d'Aix-Marseille (Laboratoire de droit privé et de sciences criminelles, LDPSC - UR n°4690). Ses travaux portent sur le cosmopolitisme chez les écrivains français (1920-1980) et les relations entre droit et littérature. Il est également secrétaire général de l'Association internationale des amis de Valery Larbaud. Parmi ses ouvrages récemment parus figurent : L'idée d'Europe chez Paul Morand, Honoré Champion, "Littérature de Notre Siècle", 2023 ; Gil Charbonnier et Franck Petit, Quand la littérature moderne (ré) invente le droit. Œuvres choisies du XXe siècle à nos jours, LexisNexis, 2023 ; Gil Charbonnier et María Isabel Corbí Sáez (dir.), Valery Larbaud et les mondes espagnol et hispano-américain. Nouvelles approches critiques, Cahier Valery Larbaud, n°60, Classiques Garnier, 2024 ; Gil Charbonnier (dir.), Le Passage à l'Afrique, Presses universitaires d'Aix-Marseille, "Cosmopolitismes", 2024. Il est également l'auteur d'articles sur Cocteau, dont "Morand et Cocteau : une amitié moderniste à l'épreuve dans leurs Journaux de guerre", Cahiers Jean Cocteau, n°20, Intermédialités, 2022 et "La déconstruction du mythe de la justice dans la reprise d'Antigone de Jean Cocteau. Plaidoyer pour un accent nouveau en droit et littérature (Law and Literature)", Cahiers Jean Cocteau, n°21, Cocteau et les arts de la scène, 2023.

Armelle CHITRIT
Armelle Chitrit bénéficie d'une résidence d'écriture de Normandie Livre & Lecture. Participant au Foyer de création et d'échanges "LIRE AVEC LES OISEAUX", la poétesse proposera avec les colloques Jean COCTEAU et Habib TENGOUR, une LECTURE d'après des dessins de Cocteau et une ADAPTATION de La Conférence des oiseaux, conte persan de Farid al-Din Attar (1177), dont la lecture mise en scène par Karina Cherès-Kolb, marionnettiste plasticienne, est prévue le 16 août sur une composition sonore incluant certainement les volatiles.

Claude COSTE : Jean Cocteau face aux avant-gardes musicales des années 50
Le nom de Cocteau est lié à la création musicale de la première moitié du XXe siècle, qu'il s'agisse de Stravinski, de Satie ou du groupe des Six. Comment l'auteur du Coq et l'Arlequin va-t-il faire face après 1945 à la révolution du dodécaphonisme, du sérialisme, à l'activisme du jeune Pierre Boulez, à la création en 1954 du Domaine musical ? La réponse passe par l'écriture des Paraprosodies et, surtout, par un dialogue renouvelé avec Stravinski et Poulenc.

Professeur émérite à l'université de Cergy Paris, Claude Coste consacre une grande part de sa recherche aux relations de la littérature et la musique. Il est en particulier l'auteur des Malheurs d'Orphée (L'Improviste, 2003), d'Orphée ou les sirènes (Presses Universitaires de Paris Ouest, 2014) ; il prépare un ouvrage sur la signification en musique. Il est l'éditeur scientifique avec Sylvie Douche de Barthes et la musique aux Presses Universitaires de Rennes en 2018.

Cyrielle DODET : "Le théâtre est une fournaise" : qu'embrase le geste intermédial de Cocteau ?
Dès ses premiers textes dramatiques, Cocteau revendique une "poésie de théâtre" visible et concrète, où les métaphores sont par exemple "transformées en visions scéniques" (Corvin). Une poésie franchement destinée à la scène théâtrale. Au gré de ses expériences dramaturgiques, il n'a en effet de cesse d'investir la scène comme un lieu d'intense activité, où il développe des "véhicules" de poésie en élaborant un geste intermédial singulier. Outre la puissance littérale du langage offerte scéniquement, Cocteau agit "par machines", grâce à divers médias et en se fondant sur les potentialités dramaturgiques de différentes technologies (comme le téléphone, le phonographe ou encore la radio). Par ces recours et leurs usages, il multiplie les dynamiques intermédiales, et partant les processus interartistiques. Mais surtout, il élabore une réflexion en action sur les médias, qui contribue à "déniaiser" de concert le théâtre et la poésie. Par ce geste inventif, performatif et réflexif, Cocteau redessine enfin les possibles du théâtre et de sa capacité poétique.

Ancienne élève de l'ENS de Lyon, agrégée de Lettres, Cyrielle Dodet est maître de conférences en études théâtrales à l'université Champollion d'Albi et membre de LLA-Créatis de l'université Toulouse Jean Jaurès. Spécialiste des dramaturgies contemporaines, elle s'intéresse aux dialogues interartistiques et au devenir intermédial dans les écritures théâtrales européennes et nord-américaines — qu'elle a étudiées dans sa thèse réalisée en cotutelle entre la Sorbonne nouvelle et l'université de Montréal. Ses recherches portent plus largement sur la poésie dans les arts du spectacle vivant, sur les théories et pratiques de l'intermédialité, et sur les liens entre théâtre et arts visuels. Depuis 2024, elle est membre de la commission Théâtre du CNL.

Sandrine FARAUT RUELLE : Jean Cocteau sur la Côte d'Azur : les œuvres monumentales
Au début des années 1950, Jean Cocteau est fatigué de la capitale, du milieu artistique parisien. Il choisit la Côte d'Azur. Il y est déjà passé dans les années 1910 (de 1911 à 1921), puis plus longuement de 1922 à 1935 et à partir de 1950 il a l'opportunité de s'y installer, accueilli par son nouveau mécène Francine Weisweiller, propriétaire de la Villa Santo Sospir. Il y restera jusqu'à son départ en 1962. Cette région va lui permettre de décentraliser son œuvre et de se consacrer à de nouveaux médiums, prouvant encore une fois qu'il est un artiste pluridisciplinaire : la peinture, le pastel, le crayon gras, la céramique, la mosaïque, le vitrail, le gemmail, la résine polyester, la tapisserie, la ferronnerie… Et bien sûr le mur peint qui lui permettra de laisser des traces de son œuvre monumentale.

Sandrine Faraut Ruelle est Attachée principale de Conservation au Musée Jean Cocteau à Menton depuis 2008, diplômée de l'École du Louvre (1992), lauréate du concours de Bibliothécaire territorial (2011), docteure en Droit, Histoire du droit et des institutions (Université Nice Sophia Antipolis, 2015) et chercheure associée, Laboratoire Ermes, Université Nice Sophia Antipolis (2015-2017). Elle est l'auteure de plusieurs études sur Cocteau, dont "Sarah Bernhardt et "les monstres sacrés" de Jean Cocteau" (Catalogue Musée Jean Cocteau, collection Séverin Wunderman, 2011), "Un artiste mis en lumière" (Le Magazine littéraire Cocteau, n°536, 2013), "La correspondance entre Jean Cocteau et Irène Lagut" (Cahiers Jean Cocteau, n°12, 2014), "Jean Cocteau sur la Côte d'Azur" (Instinct Nomade, n°12, 2023) et Jean Cocteau Je reste avec vous (Éditions Ville de Menton, 2023).

Marika GENTY
Marika Genty est, depuis 30 ans, déléguée au patrimoine historique chez Chanel. Elle est l'auteure des textes du catalogue de l'exposition Chanel, l'Art comme univers (musée Pouchkine, 2007), de nombreuses notices sur le site intranet de Chanel et de plusieurs articles dont "Chanel/Bérard : l'esprit des formes, l'essence du style" (dans Jean-Pierre Pastori (dir.), Christian Bérard. Au théâtre de la vie, Éditions Silvana, 2022) et "La création en partage" (dans Célia Bernasconi (dir.), Christian Bérard. Excentrique Bébé, Flammarion, 2022).

Mélissa GIGNAC : Phénixologie ou le strip-tease de la création
Le Testament d'Orphée propose une expérience rare au photographe présent sur le plateau pour en enregistrer les images. Alors qu'usuellement les photographies de tournage sont censées révéler les coulisses de la création, se jouer des frontières entre fiction et réalité, scène et ville, acteurs et personnages, on peut légitimement se questionner sur ce que leur auteur voit et expose aux yeux des curieux, dès lors que le film lui-même n'a de cesse de briser le quatrième mur. L'album Phénixologie1 offre une occasion singulière d'explorer les échanges réciproques entre photographie et film, pour mieux "déniaiser" les catégories existantes (celle de la photographie dite de tournage notamment) et les frontières artificielles de la création (fiction vs réalité). C'est avant tout une expérience de liberté et de poésie que Lucien Clergue vit sur ce tournage, et qui lui permet, selon le conseil de Cocteau, de "rouler à contre-vague"2.
1 Phénixologie. Photographies de Lucien Clergue. Tournage du film Le Testament d’Orphée de Jean Cocteau, Arles, Actes Sud, 2003.
2 Elisabeth Aubert Schlumberger, Lucien Clergue, à la mort, à la vie, Les Films du paradoxe, 2009.

Mélissa Gignac est maîtresse de conférences à l'université de Lille, chercheuse au Centre d'Études des Arts Contemporains. Ses recherches portent actuellement sur les photographies de cinéma. Elle a notamment publié Quatre-vingt-treize, d'Albert Capellani, une histoire d'images (Presses universitaires du Septentrion, 2023), Le Scénario : une source pour l'Histoire (AFRHC, 2020) et dirigé un n° spécial de la revue Déméter, Théories et pratiques artistiques contemporaines "Fantasmes du cinéma américain en France" (4, 2019).

Stéphane HIRSCHI : Écrire pour des voix : Cocteau en chanté ?
On s'appuiera sur les paroles des chansons écrites par Cocteau pour esquisser des lignes de force stylistiques d'une écriture pour la voix (en particulier celles, féminines, de Piaf et Oswald), qui, peut-être, trouveraient des échos intermédiaux dans d'autres formes de création chez Cocteau, monologues, théâtre ou cinéma.

Stéphane Hirschi, ancien élève de l'ENS (Ulm), est professeur de littérature française à l'université polytechnique Hauts-de-France (Valenciennes) depuis 1999, où il a été Doyen de la Faculté des Lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines. Il a publié ou coordonné dix-sept livres, dont Jacques Brel, Chant contre silence ; Sur Aragon. Les voyageurs de l'infini ; Aragon et le Nord ; Chanson : l'art de fixer l'air du temps ; Nord et chansons ; Paris en chansons et La chanson française depuis 1980. Il a fait paraître plus de 150 articles en France et à l'étranger, dans des revues prestigieuses : NRF, RSH, ArtPress2, Europe, Télérama,… et a participé à plusieurs émissions télé ou radio (France 3, France Culture, etc.). Inventeur de la "cantologie" — étude de la chanson considérée dans sa globalité (textes, musique et interprétation) —, il dirige la collection "Cantologie", aux Belles Lettres/PUV, qui compte 9 ouvrages. Il a fondé en 1996 le festival Le Quesnoy en chanteurs (27 éditions). Après une délégation CNRS au laboratoire IHRIM, il se consacre également à l'écriture de fiction, nouvelles et romans.

Hiroyuki KASAI : La Mort du Sphinx ou la transmutation réversible du corps — à travers les manuscrits de La Machine infernale
Le manuscrit autographe de La Machine infernale, longtemps présumé perdu ou détruit, a été redécouvert en 2012 et intégré à la collection du Musée des Lettres et Manuscrits à Paris. Nous avons pu l'examiner peu avant la fermeture soudaine et définitive de ce musée privé en 2015, avant la dispersion de ses collections. C'est dans ce contexte que nous avons entrepris une étude génétique de la pièce. À l'origine, elle n'était pas destinée à être une œuvre à grande échelle en quatre actes. Cocteau a d'abord rédigé ce qui allait devenir l'acte II, conçu comme un prologue à Œdipe-Roi, son adaptation libre de la tragédie de Sophocle, puis l'acte I, comme un pro-prologue à l'acte II. Avant de s'atteler aux actes III et IV, il envisageait une représentation autonome des deux premiers actes, accompagnée de scènes plus brèves, sous le titre provisoire de La Mort du Sphinx. Cette communication s'interrogera, en se référant aux premiers manuscrits riches en variantes non retenues dans la version finale, sur le corps du Sphinx en perpétuelle transmutation, oscillant entre deux figures opposées : celle d'une jeune fille imprégnée de fragilité humaine et celle de Némésis, déesse implacable de la vengeance. Le corps du Sphinx, prédestiné par les dieux à tuer et à mourir, apparaît comme un intermédiaire dans un ordre infiniment hiérarchique, tel un rouage de cette machine infernale.

Hiroyuki Kasai est professeur de langue et littérature françaises à l'université Keio, à Tokyo. Spécialiste de Jean Cocteau et du poète surréaliste japonais Shuzo Takiguchi, il se consacre actuellement à l'étude génétique de La Machine infernale de Cocteau, dont il vient de faire paraître une édition critique dans les Cahiers Jean Cocteau (en ligne, 2024), ainsi qu'à une recherche sur la collaboration créative entre Takiguchi et Joan Miró. Auteur de plusieurs articles consacrés à ces deux poètes, il est notamment co-rédacteur de Shuzo Takiguchi 1958. Un regard voyageur (Presses Universitaires Keio, 2009) et des Cahiers Jean Cocteau 16 — Jean Cocteau et l'Orient (Éditions Non Lieu, 2018). Parmi ses travaux en préparation figure une Correspondance entre Shuzo Takiguchi et Joan Miró (Presses Universitaires Keio).

David MARTENS : Cocteau par lui-même. Un autoportrait l'air de ne pas y toucher
Au début des années 1950, les Éditions du Seuil lancent la collection de monographies de poche illustrées, "Écrivains de toujours". Faisant quelque peu mentir son titre, la série consacre nombre de ses premiers volumes à des écrivains vivants, manière pour la jeune maison d'édition de faire figurer certains grands noms à son catalogue. Certains d'entre eux ne manquent pas de s'intéresser de près au livre qui leur est consacré. Difficile d'imaginer qu'un créateur aussi soucieux de son image que l'était Cocteau n'ait pas pris une part active à l'élaboration du volume qui lui est consacré par André Fraigneau en 1957. Absent de Paris, son implication passe par une correspondance conservée dans les archives du Seuil, à l'Institut Mémoire de l'Édition contemporaine (IMEC, Caen). Son examen permettra de rendre compte de la façon dont Cocteau, tout en se donnant des airs de ne pas vraiment se mêler du livre et de laisser une pleine liberté à son auteur, oriente sensiblement la façon dont Fraigneau, dans cette collection dédiée aux écrivains, construit la légende de son modèle en mettant, notamment en avant la diversité de ses moyens d'expression. Il s'agira ainsi d'analyser les échanges entre les deux auteurs et la dynamique relationnelle qui a donné lieu à ce Cocteau par lui-même.

David Martens est professeur de littérature française (XIXe-XXIe siècle) à l'université de Louvain (KU Leuven). Il s'intéresse notamment à la figure de l'écrivain, ainsi qu'à la patrimonialisation et aux autres formes de médiation de la littérature, qu'elles passent par la photographie ou l'exposition par exemple. Il a fondé en 2016 le réseau des RIMELL (Recherches interdisciplinaires sur la muséalisation et l'exposition de la littérature et du livre) et le site litteraturesmodesdemploi.org, qui coordonne les recherches sur les rapports entre littérature et exposition. Il a en outre fondé en 2021, avec Olivier Belin, Claude Coste, Mathilde Labbé et Marcela Scibiorska, le réseau PatrimoniaLitté, qui s'intéresse aux relations entre littérature et patrimoine. Il a notamment publié dans les revues Communisation & langages, Littérature, Poétique, Poetics today ou encore Word & Images.

Christophe MEURÉE : Les filiations de l'écrivain-cinéaste : Cocteau, Duras, Toussaint
Jean Cocteau a pratiquement inventé la figure de l'écrivain-cinéaste et ouvert la voie à de nombreux créateurs : Marguerite Duras, Alain Robbe-Grillet, Chris Marker, Pier Paolo Pasolini, Peter Handke, Jean-Philippe Toussaint n'étant pas ses moindres épigones. Au départ des exemples de Duras (1914-1996) et de Toussaint (1957-), il s'avère possible de saisir les constantes de l'influence de Cocteau telle qu'elle s'exerce sur plusieurs générations. Le propos s'articulera en trois volets : la fascination revendiquée pour les acteurs et les actrices, le cinéma comme mise en mouvement des arts plastiques et mise en scène de l'écriture, le film comme territoire de réflexion sur la création. Seront convoqués, sans volonté d'exhaustivité, les films suivants : Le Sang d'un poète, Orphée, Le Testament d'Orphée, Son Nom de Venise dans Calcutta désert, Le Navire Night, Césarée, L'Homme atlantique, La Patinoire, Trois Fragments de Fuir et The Honey Dress.

Christophe Meurée est coordinateur scientifique aux Archives & Musée de la Littérature (Bruxelles). Ses recherches portent principalement sur les littératures de langue française de la fin du XIXe siècle jusqu'à nos jours. Auteur de deux collectifs et d'une vingtaine d'articles sur l'autrice, il est vice-président de la Société internationale Marguerite Duras et codirige, avec Florence de Chalonge, les Cahiers Marguerite Duras. Il a coordonné, avec Maria Giovanna Petrillo, le numéro de Roman 20-50 sur M.M.M.M. de Jean-Philippe Toussaint, auquel il a également consacré une quinzaine d'articles et sur lequel il prépare un essai à paraître fin 2025.

Ivelise PERNIOLA : Des Enfants terribles (Jean Cocteau) à The Dreamers (Bernardo Bertolucci) : suggestions et croisements narratifs
En 2003, le réalisateur italien Bernardo Bertolucci tourne The Dreamers en hommage à la Nouvelle Vague. Le film est inspiré du roman de Gilbert Adair publié en 1988 sous le titre The Holy Innocents. Adair, qui collaborera aussi avec Bertolucci au scénario et au tournage du film, s'inspire lui-même des Enfants Terribles de Jean Cocteau paru en 1929. Il en reprend certains éléments, comme le triangle amoureux qui naît entre les trois jeunes et rebelles protagonistes, mais il déplace son récit en 1968, année-charnière de la contestation estudiantine. De son côté, Bertolucci, à travers un travail profond de renvois et de références, resitue Cocteau dans l'influence qu'il a eue sur les jeunes turcs de la Nouvelle Vague et relit l'écrivain à travers le cinéma, en insérant aussi quelques références au film que Jean-Pierre Melville a tiré du roman de Cocteau en 1950. Cette intervention a pour but de révéler les filiations, les citations et les rapports intertextuels existant entre les quatre textes examinés.

Ivelise Perniola est professeure d'histoire du cinéma et de la cinématographie documentaire à l'université degli Studi Roma Tre. Elle a publié de nombreux essais sur le cinéma documentaire italien et international.
Publications
Jean Luc Godard. Fino all'ultimo respiro, Carocci, 2022.
Gillo Pontecorvo o del cinema necessario, ETS, 2016.
L'era postdocumentaria, Mimesis, 2014.
L'immagine spezzata. Il cinema di Claude Lanzmann, Kaplan, 2007.
Oltre il Neorealismo-Documentari d'autore e realtà italiana del dopoguerra, Bulzoni, 2004.
Chris Marker o del film saggio, Lindau, 2003 (deuxième édition mise à jour en 2011).

Olivier RAUCH : Une "parenté subtile" : l'écriture des Chevaliers de la Table Ronde de Jean Cocteau et du Paradis perdu d'Igor Markévitch
À partir de la correspondance inédite de Jean Cocteau adressée à Igor Markévitch, des archives et des mémoires du musicien, l'évidence d'un compagnonnage amical entamé avec la production de la Cantate en 1930 et poursuivi au cours de l'été et de l'automne 1934, au moment où Jean Cocteau rejoint Markévitch pendant plusieurs mois en Suisse, aboutit à une écriture parallèle du texte de la pièce Les Chevaliers de la Table Ronde et de celle du livret de l'oratorio Le Paradis perdu. Igor Markévitch évoque une "parenté subtile" entre les deux œuvres. De l'aveu même du musicien, Jean Cocteau a pu apporter son concours à la mise en poème des idées de son jeune ami. Plus subtile encore est l'influence des discussions et débats entre le Poète et le Musicien sur le développement des scènes de la pièce écrite par Cocteau et surtout sur la singularité des personnages. Cette amitié née et développée autour du travail et de la création sera une des plus solides et sincères que Cocteau a pu nouer avec un artiste musicien. La correspondance adressée par Cocteau à Markévitch qui sera largement évoquée lors de cette communication, atteste de la profondeur et de la longévité de cette relation.

Olivier Rauch, professeur agrégé puis proviseur de lycée, est chercheur indépendant depuis sa retraite. Ses recherches portent notamment sur l'œuvre de Jean Cocteau et son impact, notamment en Angleterre et elles aboutiront à la publication d'un ouvrage, Jean Cocteau, Du côté de l'Angleterre et des Anglais.

Émilien SERMIER : Cocteau, personnage de fiction
Peu d'écrivains auront été, autant que Jean Cocteau, transformés en personnage de fiction. Dès le début des années 1920, celui-ci apparaît — sous des noms variables — dans plusieurs récits à clés et romans (Albertine disparue de Proust, Anicet ou le panorama, roman d'Aragon, Le Bon Apôtre de Soupault, Caravansérail de Picabia, "Le Passant bleu" de Reverdy, Les Faux-Monnayeurs de Gide ou plus tard encore, dans un autre contexte, dans La Mort de Radiguet de Mishima). Cette intervention voudra ainsi passer en revue toutes ces figurations fictionnalisées de Cocteau qui, chacune à sa façon, entend déniaiser un peu l'image du poète — que ce soit en révélant des vérités insoupçonnées ou, au contraire, en cherchant à démasquer un prétendu imposteur. On tâchera dès lors de mesurer en quoi toutes ces fictions participent à divers mythes et contre-mythes de l'auteur — et quels enjeux cristallisent la figure de Cocteau – avant d'examiner comment l'auteur lui-même a pu s'envisager (par réaction ?) dans ses fictions romanesques, notamment dans les premières pages du Grand Écart.

Maître assistant à l'université de Lausanne, Émilien Sermier est spécialiste des avant-gardes littéraires des années 1920. Outre de nombreux articles, il est l'auteur de l'ouvrage Une Saison dans le roman. Explorations modernistes : d'Apollinaire à Supervielle (José Corti, 2022 / Prix de la Critique 2022, INGE) ainsi que de l'essai Diamétralement modernes. Poètes francophones d'Amérique latine (Les Impressions Nouvelles, 2025). Il a également réédité les poèmes français de Vicente Huidobro et d'Alfredo Gangotena (L'Oncle d'Amérique, 2025). Membre du comité directeur de la revue Histoires Littéraires et co-directeur du Centre d'Études Blaise Cendrars, il participe actuellement à plusieurs notices du Dictionnaire Jean Cocteau.

Fanny VAN EXAERDE : "Les cris d'une foule accompagnent cette image" : enjeux des photographies de plateau et photographies de tournage dans les films de Cocteau
À la suite de Jean-Pierre Berthomé qui exploraient "ce que nous apprennent des photographies de plateau" (2020), cette intervention propose de parcourir les photographies de plateau et de photographies de tournage des longs métrages écrits et/ou réalisés par Cocteau, dont les dossiers sont conservés à la Cinémathèque française de Paris. Outre la fonction mémorielle et utilitaire des photographies de tournage et la fonction promotionnelle des photographies de plateau, ces images peuvent être considérées comme témoin de l'œuvre et du microcosme qui se met en place autour de celle-ci. La coexistence physique des acteurs, actrices, techniciens, opérateurs, scriptes, maquilleuses et costumières, occupant l'espace du cliché, révèle que chacun contribue à cette entreprise extraordinaire qu'est le cinéma, véritable "véhicule de poésie" selon Cocteau. Comment ce travail "en famille" est-il immortalisé par la pellicule photographique ? Comment la photographie rend-elle compte des "ça a été" des corps à l'ouvrage, participant chacun à leur façon à la fabrique cinématographique ? À l'instar du portrait de Cégeste que le poète obtient des mains de la gitane dans Le Testament d'Orphée la photographie joue un rôle dans la construction de l'effet factice que Cocteau aime à mettre en place afin de "patiner" l'œuvre filmique. En effet, le déniaisement opère également par la confrontation de l'identité de l'acteur et du personnage, réunies en un seul corps dans le film, pourtant rendues visibles par la présence des membres de l'équipe de tournage — la photographie rendant saillante l'incongruité de la fiction en train de se faire.

Fanny Van Exaerde a soutenu en 2023 une thèse intitulée ""Une poésie cinématographique". Étude historique, génétique et intermédiale des scénarios et dialogues de Jean Cocteau". Cette thèse a été réalisée dans le cadre d'une cotutelle, sous la codirection de Florence de Chalonge (UR Alithila, Université de Lille) et de David Gullentops (CLIC, Vrije Universiteit Brussel). Cette thèse, lauréate du Prix de Thèse 2023 de l'ED SHS, est en cours de publication. Ses recherches portent sur la littérature du XXe siècle, l'intermédialité, la génétique textuelle, les archives et le cinéma, et, plus récemment, les écritures ordinaires.

Ann VAN SEVENANT : Plurisexualité et genre nouveau
Le paysage sexuel contemporain reflète plusieurs éléments que nous retrouvons déjà dans les dessins érotiques de Jean Cocteau. La diversité de genres et de pratiques sexuelles est une des caractéristiques de son œuvre qui montre l'étendue de son ouverture d'esprit. Son imaginaire nous invite à remettre en question la hiérarchie traditionnelle des genres. Et il étend cette problématique à toute la nature, en présentant des formes hybrides du monde homme-animal-plante. Ainsi trouvons-nous dans ses dessins des visions alternatives aux modèles de société familiers. À plus d'un titre, le genre nouveau de Cocteau est actuel.

Ann Van Sevenant, professeure de philosophie (University College Antwerp), est l'auteure d'une vingtaine d'ouvrages en philosophie. Avec David Gullentops, elle a publié Les Mondes de Jean Cocteau. Poétique et esthétique (Paris, 2012), et réalisé le film Lecture intermédiale d'un film. Le Sang d'un poète (Bruxelles, 2024).

Susanne WINTER : Quand la consécration vient de l'étranger : les voyages en Allemagne des années 1950
Tout au long de sa vie soucieux de sa réputation et de sa réception, Cocteau a cultivé l'image du poète solitaire et incompris dans sa patrie. En revanche, à l'étranger, et en particulier en Allemagne, son œuvre semble de temps à autre rencontrer la compréhension et le succès espérés, si bien qu'au milieu des années 1950, Cocteau salue "la jeunesse étudiante allemande d'après la guerre comme le plus sérieux et le plus sensible des publics". À partir de propos de Cocteau sur ses voyages en Allemagne dans les années cinquante et d'articles et reportages dans la presse allemande contemporaine, il s'agira de mettre en contraste la perspective de Cocteau avec celle des autres et d'interroger la relation qui existe entre l'autoperception et l'hétéroperception.

Susanne Winter est professeur de littérature française et italienne à l'université de Salzbourg (Autriche). De 2000 à 2005, elle a dirigé le Centro tedesco di studi veneziani à Venise. Elle a publié des livres sur les Fiabe teatrali de Carlo Gozzi et sur la poésie de Jean Cocteau et a co-dirigé des ouvrages sur Cocteau et les arts et Cocteau et l'intermédialité.


BIBLIOGRAPHIE :

• ARNAUD, Claude, Jean Cocteau, Paris, Gallimard, "Biographies", 2003, 864 p.
• BOULANGÉ, Guillaume, ROLOT, Christian (dir.), Jean Cocteau et Édith Piaf : deux monstres sacrés, Montpellier, PULM, "Arts", 2015, 166 p.
• BROWN, Kathryn, "Remembering the Occupation : La Mort et les Statues by Pierre Jahan and Jean Cocteau", Forum for Modern Language Studies, vol. 49, n°3, 2012, p. 286-299.
• CESTIER, Maryline, Wenn Orpheus Ödipus begegnet : Mythenvarianten in Jean Cocteaus theatralischem und filmischem Werk, Tübingen, Stauffenburg, 2013, 298 p.
• CHAPERON, Danielle, Jean Cocteau. La chute des angles, Lille, Presses universitaires de Lille, "Objet", 1991, 230 p.
• CHAPERON, Danielle, "Les Parents terribles et L'Aigle à deux têtes au cinéma – fauves en cage et aigles en liberté", in LINARES, Serge (dir.), "Les Adaptations", Revue des Lettres modernes. Série Jean Cocteau, n°5, 2008, p. 131-148.
• CHAPERON, Danielle, "Entrer-sortir : contribution à une poétique de l'espace dramatique coctalien", in LINARES, Serge, WINTER, Susanne (dir.), "Création et intermédialité", Revue des Lettres modernes. Série Jean Cocteau, n°8, 2018, p. 221-243.
• GULLENTOPS, David, VAN SEVENANT, Ann, Les Mondes de Jean Cocteau : poétique et esthétique. Jean Cocteau's Worlds : Poetics and Aesthetics, Paris, Éditions Non Lieu, 2012, 398 p. [avec un DVD (versions française et anglaise)].
• GULLENTOPS, David, "Esthétique de l'affiche littéraire chez Jean Cocteau", Histoires littéraires, n°82, "Littérature et publicité", avril-mai-juin 2020, p. 27-50.
• GULLENTOPS, David, Jean Cocteau et l'intermédialité, Bruxelles, Éditions de l'université de Bruxelles, "Littérature(s)", 2024, 194 p.
• HARBEC, Jacinthe, Ballets russes et Ballets suédois : la musique à la croisée des arts 1917-1924, Paris, Vrin, "Musicologies", 2021, 504 p., Chapitre 2 consacré à "Parade : la rencontre du réalisme et du cubisme", p. 47-117 et chapitre 3 consacré aux "Mariés de la tour Eiffel : le surréalisme total du "plus vrai que le vrai"", p. 119-197.
• HÉRON, Pierre-Marie, Cocteau : entre écriture et conversation, Rennes, PUR, "Interférences", 2010, 176 p.
• HÉRON, Pierre-Marie, LINARES, Serge (dir.), "Jean Cocteau. Pratiques du média radiophonique", Revue des lettres modernes, Série Jean Cocteau, n°7, 2013, 242 p.
• HÉRON, Pierre-Marie, "Écriture et dessin au début des années vingt", in LINARES, Serge, WINTER, Susanne (dir.), "Création et intermédialité", Revue des Lettres modernes. Série Jean Cocteau, n°8, 2018, p. 75-105.
• LINARÈS, Serge, Cocteau. La ligne d'un style, Paris, Sedes, 2000, 224 p.
• LINARÈS, Serge (dir.), Jean Cocteau, Paris, L'Herne, "Cahiers de l'Herne", 2016, 544 p.
• LINARÈS, Serge, WINTER, Susanne (dir.), "Création et intermédialité", Revue des Lettres modernes. Série Jean Cocteau, n°8, 2018.
• SURMANN, Caroline, Cinéma et théâtre chez Jean Cocteau : intermédialité et esthétique, Paris, Classiques Garnier, 2012, 330 p.


SOUTIENS :

Université Paul-Valéry-Montpellier III
• Université de Bruxelles (Vrije Universiteit Brussel)
• Université de Lausanne (UNIL)
Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


UN MYSTÈRE À CARENTAN : LE SAINT JULIEN RETROUVÉ (1529)


DU DIMANCHE 27 JUILLET (19 H) AU JEUDI 31 JUILLET (14 H) 2025

[ colloque de 4 jours ]



ARGUMENT :

Tout part de la découverte d'un exemplaire imprimé du Mystère de Saint Julien, pièce représentée à Carentan (Normandie) en 1529-1530. La trouvaille est spectaculaire, puisqu'on pouvait avoir le sentiment que toutes les pièces de ce genre avaient été dénichées, éditées et analysées. Il s'agit donc d'un évènement majeur pour l'histoire du théâtre français.

À Cerisy, ce mystère atypique fera l'objet d'une étude littéraire et historique visant à éclairer son contexte de production, son ancrage dans la vie culturelle, mais aussi à révéler ses enjeux dramaturgiques et linguistiques. Fort d'une ambition interdisciplinaire, le colloque se distinguera par son ouverture : à travers la rencontre entre public et spécialistes, il sera l'occasion de penser les conditions de représentation du mystère et d'éclairer la vie culturelle en Normandie à la fin du Moyen Âge. Des tables rondes, des performances musicales et dramatiques ponctueront les quatre jours.


MOTS-CLÉS :

Dévotion, Hagiographie, Moyen Âge, Mystère, Normandie, Osber (Nicolas), Pèlerinage, Poésie dramatique, Réforme, Renaissance, Théâtre


CALENDRIER PROVISOIRE (16/07/2025) :

Dimanche 27 juillet
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Lundi 28 juillet
Matin
DÉCOUVERTE DU MYSTÈRE DE SAINT JULIEN REPLACÉ DANS SON CONTEXTE
Jean-Baptiste AUZEL & Denis HÜE : Ouverture
Mario LONGTIN : Le Saint Julien de Nicolas Osber : un mystère parmi les mystères
Marion POUSPIN : La place du saint Julien dans le monde imprimé normand de l'époque

Après-midi
POÉSIE, RÉSEAUX, HISTOIRE
Lyse ROY : Nicolas Osber, étudiant de l'université de Caen
Louise FRAPPIER : L'influence de l'Œdipe de Sénèque dans le mystère de Nicolas Osber

Soirée
Récit de la découverte du Mystère de Saint Julien et lecture italienne, par Denis HÜE et Mario LONGTIN


Mardi 29 juillet
Matin
ANALYSE LITTÉRAIRE DU TEXTE (I) — LANGUE ET FORMES
Stéphane LAÎNÉ : La langue de Nicolas Osber, langue de Normandie au premier XVIe siècle
Corinne DENOYELLE : Formes et fonctions des rondeaux triolets dans le Mystère de Saint Julien

Après-midi
ANALYSE LITTÉRAIRE DU TEXTE (II) — LE TEXTE EN PERFORMANCE
Stéphanie LE BRIZ-ORGEUR : "Pour neant je suis nommé Mordant", "Puis que je suis lieutenant general / du noble Roy, je dois estre loyal"… : mise en drame et (possibles) mises en scène du libre arbitre dans Le jeu et mistere de Monsieur saint Julien
Jelle KOOPMANS : Affaires infernales et un personnage tantalisant (Tantalus)

Soirée
Traverser le Jeu et mystère de monsieur saint Julien : une expérimentation théâtrale du collectif de La Bourrasque, avec Marie BOUHAÏK-GIRONÈS et Fabien CAVAILLÉ | Présentation


Mercredi 30 juillet
Matin
LA DÉVOTION À SAINT JULIEN, CONTEXTE HISTORIQUE, LITTÉRAIRE ET ARTISTIQUE
Sandra DUCRUET : Saint Julien l'hospitalier, du texte hagiographique au mystère
Adeline RUCQUOI : Saint Julien pèlerin et protecteur des pèlerins de Compostelle

La dévotion à saint Julien dans l'ouest de la France à la fin du Moyen Âge (XIVe-XVIe siècles), table ronde avec Vincent JUHEL [Les chemins de pèlerinage entre Manche et Bretagne] et Thibaut LEHUÉDÉ [Saint Julien de Vouvantes]

Après-midi
"HORS LES MURS" — À CARENTAN-LES-MARAIS
Ouvert au public : Visite de l'église de Carentan avec le père Daniel JAMELOT, suivie de l'intervention d'Éric BARRÉ : Aux origines de la famille Osber, Pierre Osber, un profiteur de la Guerre de Cent Ans

Au théâtre de Carentan-les-Marais
Denis HÜE : Nicolas Osber, poésie en Normandie début du XVIe siècle

L'aventure maritime des Normands et la fin du Moyen Âge (1500-1540), table ronde avec Mario LONGTIN, Romain BERTRAND et Christophe MANEUVRIER

Soirée
Au théâtre de Carentan-les-Marais
Ouvert au public : Parole et musique dans le Saint Julien, par François RÉMOND et Chloé RICHARD-DESOUBEAUX


Jeudi 31 juillet
Matin
La place du Saint Julien : dramaturgie en Normandie, tradition et innovation, table ronde avec Mario LONGTIN, Denis HÜE, Clément SALIOU et Camille SALATKO

Jean-Baptiste AUZEL, Jérémie BICHÜE, Denis HÜE & Mario LONGTIN : Conclusions générales du colloque

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Jean-Baptiste AUZEL
Jean-Baptiste Auzel, conservateur général du patrimoine, archiviste paléographe, est directeur des archives départementales, Maison de l'histoire de la Manche, depuis 2013, et a co-organisé à Cerisy les colloques Saint Louis en Normandie (hommage à Jacques Le Goff) en 2016, Musique sacrées en Normandie : rites et pratiques (XIIe-XXIe siècles) en 2021 et publié les actes afférents. Il a également co-écrit et dirigé plusieurs publications sur l'histoire du département de la Manche et la Normandie, notamment :
- La Normandie existe-t-elle ? Être Normand au fil des siècles. Actes du colloque tenu à Saint-Lô du 22 au 25 décembre 2017, Archives départementales de la Manche, 2019.
- De Destouches au Chevalier Des Touches, Archives départementales de la Manche, 2023, précédé d'une nouvelle édition du roman Le Chevalier Des Touches, de Jules Barbey d'Aurevilly.
- Une histoire de Marin. Archives et souvenirs de Marin-Marie (1901-1987), Orep éditions, 2015.

Jérémie BICHÜE
Jérémie Bichüe est maître de conférences en littérature française du XVIe siècle à l'université de Caen Normandie. Il travaille sur la poésie de la première moitié du siècle (en particulier Marot et les poètes marotiques) et ses recherches actuelles pour sur la satire, la poésie de circonstance, la poésie religieuse et la culture joyeuse. Depuis 2022, il anime avec Sandra Provini le séminaire "Publication et circulation des recueils poétiques en Normandie au XVIe siècle" et prépare actuellement, pour les éditions Droz, une édition critique des textes de la querelle Marot-Sagon.
Publications
"Voix singulières, voix collectives : pratique du discours rapporté dans les formes poétiques à refrain de L'Adolescence clémentine", Styles, genres, auteurs, Gilles Couffignal et Adeline Desbois-Ientile (dir.), Sorbonne Université Presses, 2018.
Avec Katell Lavéant, "Replacer la farce dans les festivités joyeuses du XVIe siècle. Le cas des Soupiers de Monville", Réforme, Humanisme, Renaissance, n°93(2), 2021.
Avec Pauline Dorio, "Le manuscrit de la Renaissance et ses lecteurs : itinéraires d'un recueil spirituel de Charles Fontaine", Arts et Savoirs [en ligne], n°17, 2022.
"1542-1546 : un jalon dans l'histoire de la poésie réformée français : l'exemple de Marot et de Beaulieu", Revue Camenæ [en ligne], n°32, septembre 2024.

Denis HÜE
Docteur ès lettres, Professeur émérite de l'université Rennes 2, Denis Hüe s'est spécialisé sur la littérature normande de Wace à la fin du Moyen Âge, et sur la compétition poétique du Puy de Palinods de Rouen. Il a également travaillé sur la vie théâtrale rouennaise, et publie en 2025 Le Jeu et mystère de Saint Julien aux Classiques Garnier en collaboration avec Mario Longtin.
Publications
La Poésie Palinodique à Rouen, 1486-1550, Champion, 2002 (Prix Gossier de l'Académie de Rouen, 2002), Rééd. Classiques Garnier, 2023.
Petite Anthologie Palinodique, Champion, 2002, Rééd. Classiques Garnier 2023.
Amadas et Ydoine, édition et traduction, en collaboration avec C. Ferlampin-Acher, Champion Classiques, 2020.
Les Fragments sagiens d'Aspremont, Bibliothèque d'Alençon, Paradigme, 2020.
"Le vin à Rouen : la vigne et la Vierge, gouel et triballe", De la Treille au poème, Culture(s) et usages de la vigne et du vin à la Renaissance, Violaine Giacomotto-Charra et Jacqueline Vons (dir.), Maison des Sciences de l'Homme d'Aquitaine, 2020.
"Le théâtre de Rouen et la Réforme, Théologie et dramaturgie dans le Moral à cinq personnages de Pierre Du Val", Revue d'Histoire du Théâtre, avril-juin, 2020/2.
"Récrire la vie de saint Nicolas après Jean Diacre : le travail de Wace", Le style de Wace, Actes du colloque de Jersey 2019, Denis Hüe, Françoise Laurent, Michel Vital Le Bossé et Laurence Mathey-Maille (dir.), Paradigme, 2020.

Mario LONGTIN
Mario Longtin est professeur agrégé de littérature médiévale à l'université Western Ontario depuis 2004. Il est spécialiste de l'ancien théâtre français et s'intéresse tout particulièrement aux mystères. Récemment, il a découvert à Madrid un mystère imprimé datant de 1530 inconnu des spécialistes. Il s'agit du mystère de saint Julien dont l'édition critique préparée en collaboration avec Denis Hüe paraîtra sous peu dans la collection "Muses renaissantes" chez Classiques Garnier. En juin 2025, il organise avec Nina Hugot et Clément Saliou, à Saint-Mihiel en Lorraine, un colloque intitulé "DOM Nicolle Loupvent, voyageur et dramaturge" consacré à la relation de pèlerinage en Terre Sainte du bénédictin et au Mystère de saint Étienne Pape qu'il a écrit pour la ville de Saint Mihiel en 1548. Le colloque lorrain coïncide avec la mise en ligne sur la plateforme associée au projet "Melpomène" de la transcription manuscrit du mystère de saint Étienne Pape. Mario Longtin a écrit plusieurs articles sur l'ancien théâtre français dont un publié dans la revue Seizième siècle en collaboration avec Marie Bouhaïk-Gironès : "Un mystère ne s'improvise pas. De l'organisation des jeux par personnages au XVIe siècle".
Publications
"Conventions de lecture : la Pausa dans le Mystère de sainte Barbe en cinq journées", Langues, codes et conventions de l'ancien théâtre, J-P Bordier (dir.), Champion, 2002.
"La Farce du Cuvier vue avec les lunettes du clerc", Mélanges Michel Rousse, Classiques Garnier, M. Bouhaïk, D. Hüe, J. Koopmans (dir.), 2012.
"Le Recueil de Rouen et le patrimoine spectaculaire rouennais au XVIe siècle", en collaboration avec E. Doudet, La Renaissance à Rouen. L'essor artistique et culturel dans la Normandie des décennies 1480-1530, Sandra Provini (dir.), PURH, 2019.
"Un mystère ne s'improvise pas. De l'organisation des jeux par personnages au XVIe siècle", en collabotation avec M. Bouhaïk, Seizième siècle, n°23, automne 2023.


Thibaut LEHUÉDÉ
Docteur en histoire médiévale à l'UBO en co-direction avec l'EPHE, Thibaut Lehuédé a soutenu en 2024 une thèse sur la représentation du pouvoir dans les milieux princiers bretons (XIVe-XVIe siècles) sous la co-direction d'Yves Coativy et de Laurent Hablot. Ayant une formation d'historien et d'historien de l'art, ses recherches liées à l'histoire culturelle portent sur la relation entre images et pouvoirs à la fin du Moyen Âge. Il s'intéresse tout particulièrement à la production de discours iconographiques et emblématiques et à leur réception.
Publications
"Le relief aux cerfs du château de Suscinio, témoignage d'une tentative emblématique avortée du duc Jean IV ?", Annales de Bretagne et des Pays de l'Ouest, t. 124-1, 2017, p. 7-30.
"L'église médiévale de Saint-Julien-de-Vouvantes", Annales de Bretagne et des Pays de l'Ouest, t. 127-4, 2020, p. 53-95.
"Pour une réattribution du jeton de la chambre des comptes de Rohan : nouvelle proposition en faveur d'Anne de Rohan (1485-1529)", Revue numismatique, Vol. 180, 2023, p. 333-352.
"Le chapeau dans les sceaux de la noblesse bretonne à la fin du Moyen Âge", Revue d'héraldique et de sigillographie, décembre 2024 [en ligne].

Adeline RUCQUOI : Saint Julien pèlerin et protecteur des pèlerins de Compostelle
Le pèlerinage à Compostelle fut l'un des trois "pèlerinages majeurs" de la Chrétienté. Au contraire des sanctuaires locaux ou régionaux qui pouvaient être périodiquement visités, le "saint voiage" vers ces lointaines destinations n'était généralement effectué qu'une fois dans la vie du pèlerin. Saint Julien était l'un des saints protecteurs invoqués par les pèlerins qui l'entreprenaient. Dans Le Jeu et mystère de saint Julien, ce dernier devient un pèlerin et de nombreuses mentions aux Sarrasins, à la ville de Palence — Palencia ? — et à celle de Port Marin — Puertomarín ? —, ou encore à la dévotion à "saint Jacques de Galice" jalonnent le Chemin qui mène au finis terrae, au tombeau de l'apôtre Jacques.

Adeline Rucquoi, Directeur de Recherche émérite au CNRS, spécialiste de l'histoire de l'Espagne médiévale, a consacré une partie de ses recherches au pèlerinage à Saint-Jacques de Compostelle. En français, elle a notamment publié Mille fois à Compostelle. Pèlerins du Moyen Âge (2014) et À Jacques, apôtre, frère de Jean (2021), et a coordonné Saint Jacques et la France (2003), Le Voyage à Compostelle. Du Xe au XXe siècle (2018), et, avec Christophe Alcantara, les volumes Interroger les chemins de Compostelle au XXIe siècle (2024) et Les chemins de Compostelle, itinéraire culturel européen et patrimoine mondial : histoire, enjeux et perspectives (2024).


Traverser le Jeu et mystère de monsieur saint Julien : une expérimentation théâtrale du collectif La Bourrasque, avec Marie BOUHAÏK-GIRONÈS et Fabien CAVAILLÉ
Quatre jeunes comédiennes et comédiens issus du Conservatoire à Rayonnement Régional de Caen proposeront plusieurs temps de lecture et d'expérimentation du mystère de Nicolas Osber. Marie Bouhaïk-Gironès, Directrice de Recherche au CNRS (EHESS-CRH), et Fabien Cavaillé, Professeur en arts de la scène à l'université de Caen, assureront le conseil dramaturgique sur cette résidence artistique. La résidence sera l'occasion de réfléchir ensemble à plusieurs problèmes historiques et esthétiques sur la lecture et le jeu de cette forme théâtrale : comment lire un texte aussi monumental ? Comment expérimenter l'intégration des formes lyriques dans le cours du dialogue et le parler-chanter-danser caractéristique du théâtre de cette époque ? Comment incarner les nombreuses figures du Saint Julien (quatuor de personnages vs cohortes) et comment travailler à partir des modalités de jeu de l'époque (rôlets, partitions, action rhétorique, etc.) ? Comment mettre en espace les différents lieux du mystère (étages vs champ) et représenter spatialement les voyages, pèlerinages et errances au cœur de cette histoire ? Comment, grâce à la performance pratique, penser l'expérience théâtrale qui peut naître d'une vie de saint, aussi riche en romanesque qu'en ferveur spirituelle, et comment la réemployer, l'actualiser ou la réinterpréter dans le cadre d'une création contemporaine ?

Marie Bouhaïk-Gironès est historienne, directrice de recherche au CNRS (Centre de Recherches Historiques, EHESS). Spécialiste des pratiques théâtrales des XVe et XVIe siècles, elle travaille sur l'histoire sociale et technique des spectacles, la fonction du théâtre et de la performance dans une perspective d'histoire longue et sur l'histoire de l'acteur, du jeu et de la rhétorique. Elle exerce par ailleurs une activité de collaboratrice artistique et de dramaturge auprès d'acteurs et de metteurs en scène et enseigne dans des écoles de théâtre. Elle a récemment publié sur un mystère hagiographique : Le mystère de Romans. 1509, une cité en spectacle, Paris, Éd. EHESS, 2023.

Professeur en études théâtrales à l'université de Caen Normandie, Fabien Cavaillé est spécialiste de l'histoire des spectacles français entre le XVIe et le XVIIe siècle. Il travaille également sur l'appropriation du patrimoine spectaculaire par la scène contemporaine. Il a notamment publié : Théâtre, guerres et religion (Europe, XVIe siècle), C. Bouteille, F. Cavaillé, E. Doudet (dir.), Colloque de Cerisy, Revue d'Histoire du Théâtre, n°286, avril-juin 2020/2 et Baroque au présent, F. Cavaillé, J. le Blanc, C. Lechevalier, C. Mounier-Vehier (dir.), Théâtre/Public, n°250, janvier 2024.


BIBLIOGRAPHIE :

• Marie BOUHAÏK-GIRONES, Le Mystère de Romans, 1509, une cité en spectacle, Presses de l'EHESS, 2023.
• Marie BOUHAÏK-GIRONES et Mario LONGTIN, "Un mystère ne s'improvise pas. De l'organisation des jeux par personnages au XVIe siècle", Seizième siècle, n°23, automne 2023.
• Denis HÜE et Mario LONGTIN, Le Jeu et mystère de Saint Julien, Éditions Classiques Garnier, à paraître en 2025.
• Denis HÜE, "Petite note sur un mystère inconnu composé, joué et imprimé en Normandie", Hommes et femmes du livre à Rouen au XVIe siècle, E. Lalou et Th. Claerr (dir.), Brépols, à paraître en 2025.
• Denis HÜE, "Saint Julien et sa prière", Grandes Et Petites Mythologies III, K. Ueltschi (dir.), Epure, 2024.
• Jelle KOOPMANS, "Un théâtre singulier ou un théâtre pluriel. Comment écrire une histoire du théâtre dans les provinces ?", Littératures classiques, 2018/3, n°97, p. 35-54.
• Jelle KOOPMANS, Le Théâtre des exclus au Moyen Âge, Hérétiques, sorcières et marginaux, Imago, 1997.
• Nicolas LE CADET, Les Mystères français au XVIe siècle, "Introduction", Seizième siècle, n°23, automne 2023.
• Graham A. RUNNALLS, Études sur les mystères : un recueil de 22 études sur les mystères français, suivi d'un répertoire du théâtre religieux français du Moyen Âge et d'une bibliographie, Champion, 1998.
• Graham A. RUNNALLS, Les Mystères dans les provinces françaises (en Savoie et en Poitou, à Amiens et à Reims), Champion, 2003.
• Clément SALIOU, "Que peuvent nous apprendre les archives sur les mystères du XVIe siècle ?", Seizième siècle, n°23, automne 2023.
• Darwin SMITH, Gabriella PARUSSA et Olivier HALEVY, Le Théâtre français du Moyen Âge et de la Renaissance, L'Avant-Scène Théâtre, 2014.


SOUTIENS :

Archives départementales, Maison de l'histoire de la Manche | Département de la Manche
Western University · Canada
• Centre d'étude et de recherche éditer/interpréter (CÉRÉdl, UR 3229) | Université de Rouen Normandie
• Lettres Arts du spectacle Langues romanes (LASLAR, UR 4256) | Université de Caen Normandie (Unicaen)
• UFR Humanités et sciences sociales (HSS) | Université de Caen Normandie (Unicaen)
• Office universitaire d'études normandes (OUEN) | Université de Caen Normandie (Unicaen)
• Centre d'études des langues et littératures anciennes et modernes (CELLAM) | Université Rennes 2
• Projet ANR MELPONUM – Mélpomène à l'ère numérique | Université de Lorraine


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


LES PROPAGATIONS :
UN NOUVEAU PARADIGME POUR LES SCIENCES SOCIALES ?


DU VENDREDI 25 JUILLET (19 H) AU JEUDI 31 JUILLET (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]



DIRECTION :

Dominique BOULLIER, Jean-François LUCAS, Guillaume SIBOUT, Françoise THIBAULT


ARGUMENT :

La compréhension des crises récentes — Covid, gilets jaunes, émeutes urbaines, fake news — résiste aux méthodes centrées sur l'étude du rôle des structures sociales existantes, ou des opinions ou préférences individuelles. Certes, ces points de vue sur le social ont acquis un statut incontournable appuyé par des dispositifs de quantification conventionnels, qu'il s'agisse des recensements ou des sondages. Les phénomènes de propagation, de contagion, de viralité et d'imitation caractéristiques de ces crises échappent aux approches traditionnelles qui les réduisent à des causes sociales classiques ou les limitent à des expressions du Web. Une autre approche consiste à considérer ces phénomènes de propagations comme un cadre conceptuel inédit qui est nourri par des outils numériques de traçabilité, qui permettent de suivre les phénomènes en détail, parfois à la seconde près. Cette approche autorise des explorations d'effets de contagion par voisinage, occasionnel ou durable, qu'il s'agisse des expositions à des flux de signaux et de messages en ligne, ou dans l'espace public. De nos jours les grandes plateformes ont le contrôle de ces traces, mais il est possible de tester des modélisations sur les données d'autres plateformes. La place d'Internet, et de son architecture dans ces propagations, doit aussi être interrogée. Pour chaque phénomène, tels les mouvements financiers, les épidémies ou les mouvements de foule, de nouveaux concepts et des méthodes spécifiques peuvent être déployés.

L'objectif du colloque est de conforter ces voies de recherche prometteuses en faisant dialoguer des disciplines et métiers différents, tous concernés par le décryptage des phénomènes complexes de propagation, rendu possible par des méthodes de traçabilité. Des spécialistes de diverses disciplines seront réunis autour de ces enjeux majeurs pour les sciences sociales, qui questionnent la gouvernance de ces situations collectives.


MOTS-CLÉS :

Big Data, Crises, Diffusion d'innovations, Épidémie, Foules, Propagation, Réseaux numériques, Théorie sociale, Traces, Viralité


CALENDRIER PROVISOIRE (25/06/2025) :

Vendredi 25 juillet
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Samedi 26 juillet
Matin
PRÉSENTATION DU CADRE CONCEPTUEL ET DISCUSSION GÉNÉRALE DU MODÈLE
Dominique BOULLIER : Propager les propagations dans les sciences sociales : présentation générale des enjeux du colloque
Emmanuel DIDIER : Propagation et évolution des méthodes quantitatives

Après-midi
LES TROIS POINTS DE VUE SUR LE SOCIAL : QUELLE DIPLOMATIE ?
Madeleine AKRICH : Propagations et ANT
Jacques LÉVY : Auto-mobiles
Nonna MAYER : La science politique au défi des "big data" : leur apport et leurs limites


Dimanche 27 juillet
Matin
PROPAGATION DES RUMEURS ET DES CONVERSATIONS (I)
Pascal FROISSART : Comment la théorie de la rumeur s'est-elle propagée au XXe siècle ?
Pierre LIVET : Les propagations : nouvelles focalisations, accroissement des complexités ?

Après-midi
PROPAGATION DES RUMEURS ET DES CONVERSATIONS (II)
Mariannig LE BÉCHEC : Analyse sémiotique et agencement de la propagation sur les médias numériques
Limor SHIFMAN : The Value of Internet Memes [visioconférence]


Lundi 28 juillet
Matin
AUX SOURCES DE L'ÉPIDÉMIOLOGIE ET COVID
Bruno CANARD : Propagations virales : de la simplification moléculaire à l'impact sociétal
Frédéric KECK : Contagion, imitation et participation : anthropologie et épidémiologie de Lucien à Daniel Lévy-Bruhl
Camille BESOMBES : Propagations : repenser les maladies infectieuses émergentes depuis les milieux et les contextes écologiques et sociaux au sein de l'Anthropocène

Après-midi
DÉTENTE


Mardi 29 juillet
Matin
FOULES, MOUVEMENTS SOCIAUX, AMBIANCES
Pascal AMPHOUX : Ambiance et propagations
Guy THERAULAZ : Propagation de l'information sociale et coordination des comportements collectifs : des sociétés animales aux foules humaines

Après-midi
LE NUMÉRIQUE ET SES MÉTHODES DE TRAÇABILITÉ (I)
Michele COSCIA : Comparing and Grouping Spreading Processes on Networks [visioconférence]
Jean-Philippe COINTET : Agentivités artificielles, vers des sciences sociales artificielles [visioconférence]


Mercredi 30 juillet
Matin
LE NUMÉRIQUE ET SES MÉTHODES DE TRAÇABILITÉ (II)
Ksenia ERMOSHINA : Diffractions : traces numériques et plateformes décentralisées

FINANCE, MARKETING, INNOVATION
Michel FEHER : La vie politique du capital humain

Après-midi
Guilhem FOUETILLOU : Propagations et marketing
Gérald GAGLIO : Diffusion des innovations et propagations : entre accointances et dissemblances


Jeudi 31 juillet
Matin
GOUVERNER LES PROPAGATIONS ?
David COLON : L'infodémiologie, une science de la gouvernance des infodémies
Valère NDIOR : Qui gouverne la modération des contenus sur les réseaux sociaux ?

Conclusion et discussion générale

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Dominique BOULLIER
Dominique Boullier est Professeur des Universités émérite en sociologie, IEP Paris (Sciences Po), Centre d'Études Européennes et de Politique Comparée (CEE). Il a été directeur de plusieurs laboratoires (Costech, UTC ; Lutin, Cité des Sciences ; Lares, Rennes2 ; Médialab, Sciences Po), chef d'entreprise, adjoint au maire de Rennes. Ses travaux ont porté sur toutes les dimensions du numérique et actuellement plutôt sur les villes numériques, les technologies cognitives (dont l'IA), les modes d'habiter le numérique (habitèle) face aux propagations, nouveau point de vue pour les sciences sociales.

Jean-François LUCAS
Jean-François Lucas, docteur en sociologie, est délégué général de Renaissance Numérique, think tank indépendant et apartisan dédié à la transformation numérique de la société. Il fut par le passé directeur conseil "Territoires intelligents et numérique responsable" en cabinet de conseil, et chercheur académique dans le champ de la conception et du management de projets de recherche innovants.

Guillaume SIBOUT
Guillaume Sibout est diplômé de Sciences Po Paris en humanités numériques, de l'École des hautes études en sciences de l'information et de la communication (Celsa), et de philosophie à Sorbonne Université. Il a été responsable communication et marketing dans plusieurs grandes entreprises, et enseigne la culture numérique dans plusieurs écoles.


Pascal AMPHOUX : Ambiance et propagations
Une ambiance se propage, elle est contagieuse, elle procède par voisinages. Elle est virale, parfois même virulente, toujours et infiniment variante. Effets d'amplification, d'estompage ou d'effondrement… Elle s'auto-organise ou s'auto-détruit. Elle échappe à la seule volonté de ceux qui la créent, n'est pas pour autant structurellement déterminée par ses conditions initiales. C'est à explorer quelques liens, théoriques ou pragmatiques, entre des phénomènes de propagation et des situations d'ambiance que cet exposé sera consacré.

Bruno CANARD : Propagations virales : de la simplification moléculaire à l'impact sociétal
Les ancêtres des virus sont les premières entités à avoir programmé leur propagation grâce à du matériel génétique, dans la soupe prébiotique originelle. Les virus sont actuellement les entités les plus nombreuses représentées sur la planète, celles dont la propagation a été la plus réussie. Leurs mécanismes mis en jeu ont été sélectionnés au cours de l'évolution, ou le sont parfois en temps réel. Ils sont divers et spécialisés, rendant caduque la définition d'une unité pertinente de description universelle. L'exemple du taux de reproduction R0, dont chacun s'est emparé pendant la pandémie, illustre les difficultés de décomposition en variables et descripteurs moléculaires, propres à chaque virus et chaque population touchée, aptes à rendre compte de la dynamique d'une épidémie, et à y adapter une réponse sociétale.

Jean-Philippe COINTET : Agentivités artificielles, vers des sciences sociales artificielles
Dans cette présentation, nous examinerons la nature des recherches de sciences sociales menées à partir des grands modèles de langue. De façon croissante, les IA génératives sont perçues comme un nouvel instrument et une nouvelle source pour enquêter sur les dynamiques sociales, politiques et culturelles. En plus de proposer un panorama de ces recherches, nous nous interrogerons sur le changement de focale que nous invite à prendre ce nouveau matériau. Comment les anciennes formes de représentations du social sont-elles digérées par les prompts de ces modèles d'apprentissage automatique, et de quelles formes d'agentivités permettent-elles de rendre compte ?

David COLON : L'infodémiologie, une science de la gouvernance des infodémies
La pandémie de Covid-19 s'est accompagnée d'une "infodémie", définie par l'OMS comme "une surabondance d'informations, certaines fiables et d'autres non, qui rend difficile pour les gens de prendre des décisions pour leur santé". Le vaccinoscepticisme, le climatoscepticisme ou les théories du complot sont autant de "virus informationnels" dont la propagation pose des défis majeurs. Cette contribution dessinera les contours de l'"infodémiologie", la science de la gouvernance des infodémies, un nouveau domaine de recherche global, transdisciplinaire et orienté vers l'innovation sociale.

Michele COSCIA : Comparing and Grouping Spreading Processes on Networks
When studying a spreading process one key task is to determine whether other spreading processes might favor it (such as related rumors in conspiracy theory) or impede it (such as spreading condom usage should block HIV from spreading). To do so, we need a way to estimate the distance between two different spreading configurations. In this work, I show how a generalization of the Euclidean distance on a graph is useful in this regard. By systematically analyzing pairs of spreading configurations, we can group them in meaningful clusters.

Camille BESOMBES : Propagations : repenser les maladies infectieuses émergentes depuis les milieux et les contextes écologiques et sociaux au sein de l'Anthropocène
Les maladies infectieuses émergentes se multiplient, illustrations de l'Anthropocène. Malgré d'importantes recherches, certaines d'entre elles restent des énigmes épidémiologiques : leurs émergences et réémergences ou leur cycle de transmission et réservoir épidémiologique restant incomplètement compris. Le paradigme biomédical moderne pense ces maladies depuis les agents infectieux considérés comme pathogènes, en les déterritorialisant. Il s'agira ici de penser ces agents infectieux depuis leurs propagations à la fois spatiales et temporelles, grâce à de nouveaux modes de traçabilité. Il s'agira de faire une étude des espaces et des rythmes : d'une part à travers la phylogénie et la phylogéographie des agents infectieux, comme une archéologie des circulations virales reconstruisant les propagations ou les accélérations évolutives détectables depuis les génomes viraux, en naviguant entre temporalités de crises et temporalités longues évolutives. Et d'autre part, à travers la récente généralisation de l'épidémiologie des eaux usées, approche permettant l'étude de flux agrégés depuis les environnements en essayant de caractériser les circulations des entités depuis les environnements et les circulations interspécifiques.

Emmanuel DIDIER : Propagation et évolution des méthodes quantitatives
Dans cette intervention, Emmanuel Didier reviendra sur l'histoire des méthodes quantitatives et de leurs évolutions et confrontera en particulier l'apparition des méthodes de sondage aléatoires pendant les années 1930 puis des méthodes de benchmarking néo-libérales pendant les années 2000 à la théorie de la propagation.

Ksenia ERMOSHINA : Diffractions : traces numériques et plateformes décentralisées
Notre présentation portera sur les aspects méthodologiques d'une enquête sur les migrations numériques, pour proposer d'analyser l'exode vers les outils décentralisés et chiffrés comme un processus de diffraction des traces numériques. Tandis que sur les plateformes centralisées comme Facebook ou X les utilisateurs sont confrontés à des demandes d'authentification et vérification (données personnelles réelles, scans des pièces d'identité, numéros de téléphone, etc.), et beaucoup de travail se fait autour de la construction du soi numérique (on va parler des réseaux "égo-centrés"), les alternatives décentralisées proposent des possibilités de pseudonymisation, de multiplication d'identités numériques et le choix de ne plus laisser de traces numériques ou au moins de brouiller les pistes.

Michel FEHER : La vie politique du capital humain
Envisager une personne comme un capital ouvert à la spéculation revient à assumer que sa valeur dépend du cours des actifs qui composent son portefeuille. Parce qu'un tel système de notation n'offre rien moins qu'une manière de mesurer l'importance relative de chacun, sa mise en œuvre fait du discrédit la malédiction qui hante les assujettis au capitalisme financiarisé. Cependant, plutôt qu'à opposer une simple fin de non-recevoir à la condition qui leur est assignée, d'aucuns n'hésitent pas à jouer le jeu de la valorisation pour leur compte : l'indexation de leur dignité sur l'appréciation de leur capital humain leur apparaît moins comme un mal à conjurer que comme un défi à relever.

Guilhem FOUETILLOU : Propagations et marketing
À partir du milieu des années 2000, les acteurs du marketing et de la communication ont adopté les méthodes d'analyse des réseaux sociaux afin de les mettre au service des entreprises et des institutions. Toutefois, malgré deux décennies d'innovations et l'essor de nombreuses startups traquant les phénomènes de propagations, ces approches n'ont pas réussi à s'imposer durablement au sein de ces organisations. Paradoxalement, l'exploitation à l'échelle de ces traces numériques et de leurs réplications a été pleinement réalisée par les grandes plateformes numériques — Google et Facebook en tête — qui s'en sont saisies pour structurer l'espace informationnel du web social, en optimiser la monétisation mais aussi en altérer la transparence. Cette intervention analysera au travers de l'expérience singulière de l'un de ses acteurs, les raisons de cet échec relatif et les conséquences qu'elles ont eu en termes de dépendance aux géants du numérique.

Pascal FROISSART : Comment la théorie de la rumeur s'est-elle propagée au XXe siècle ?
Si la rumeur est un concept né dans les tréfonds du XIXe siècle, elle n'a connu sa première théorisation qu'en 1902, sous la plume d'un expert allemand en psychologie du témoignage, et sa popularisation en 1947 quand un psychologue américain fait paraitre en 1947 une "Psychology of Rumor", qui devient instantanément un classique. La popularité du concept n'est pourtant pas attribuable à de seuls phénomènes d'édition académique. Une intense campagne de promotion involontaire a pris place dans les médias américains pendant la Seconde Guerre mondiale, sous le nom de "clinique des rumeurs", d'abord dans un journal de Boston, puis dans de très nombreuses répliques partout aux États-Unis.

Gérald GAGLIO : Diffusion des innovations et propagations : entre accointances et dissemblances
Dans cette communication, le thème de la "diffusion des innovations", en rappelant sa critique et ses dépassements, sera mis en tension avec le modèle des propagations. Il s'agira d'abord de mettre en évidence ce qui rapproche les propagations d'un thème classique en anthropologie, popularisé par E. Rogers, mais aussi de relever ce qui les distingue. Cela permettra ensuite de revenir, à l'aide d'exemples, sur le concept d'innovation et sur son intérêt heuristique dans nos sociétés.

Frédéric KECK : Contagion, imitation et participation : anthropologie et épidémiologie de Lucien à Daniel Lévy-Bruhl
Le débat sur la contagion était au centre des débats sociologiques en France au début du vingtième siècle, entre la doctrine de Tarde fondée sur l'imitation des individus créateurs et celle de Durkheim fondée sur la participation à la conscience collective. Je montrerai que Lucien Lévy-Bruhl a trouvé une position intermédiaire dans ce débat en partant de la figure de la sentinelle dans l'affaire Dreyfus. Une sentinelle peut être définie comme un vivant à la frontière du collectif qui porte des signaux d'alerte d'un mal qui peut affecter l'ensemble du collectif et dont la rencontre est l'occasion d'inventer de nouvelles formes de justice. Je retracerai la transmission de cette figure de Lucien Lévy-Bruhl à son arrière petit-fils Daniel Lévy-Bruhl, épidémiologiste à l'Institut National de Veille Sanitaire.

Mariannig LE BÉCHEC : Analyse sémiotique et agencement de la propagation sur les médias numériques
Des éléments visuels, des émojis, des GIFs, des mèmes se sont popularités sur les plateformes du web pour identifier des marques, des territoires, des émotions. Nous étudions les pratiques, encouragées par les plateformes, de propagation de certains éléments visuels parfois détournés. Nous reviendrons sur cet agencement par les plateformes et sur les médiations mises en place ainsi que les pratiques mobilisées pour détourner et instrumentaliser ces signes.

Jacques LÉVY : Auto-mobiles
Prendre le "point de vue" de la propagation ne conduit pas forcément à en faire un "paradigme" s'appliquant à l'ensemble du monde social. Cependant, ce point de départ peut aider les chercheurs à comprendre que le monde des humains comprend, dans sa réalité, deux faces indissociables. Il est tout autant fixe parce que mobile que mobile parce que fixe. Il est fait d'auto-mobiles pour lesquels l'identité se déploie avec et par le mouvement, ce qui veut dire aussi avec et par le changement.

Pierre LIVET : Les propagations : nouvelles focalisations, accroissement des complexités ?
Quand on nous parle de propagation, nous pensons à la diffusion d'une information, mais aussi à celle d'une épidémie, ou d'une vague de chaleur ou d'orages. Cependant, l'usage des réseaux sociaux d'informations laisse chacun de nous penser que son information est similaire à celle de tout le monde, que l'information qu'il apporte à son réseau aura pour tous le même impact qu'elle a eu pour lui-même, et que plus il est plongé dans ces flux de propagation, meilleure est son insertion sociale.
En fait, la multiplication des propagations d'information a autant de chances de se combiner avec une diversité des interprétations. Et si certaines d'entre elles deviennent dominantes, cela peut tenir à ce qu'elles renforcent nos opinions, et/ou à ce qu'elles marquent plus vigoureusement des clivages, et cela ne garantit pas qu'elles soient les plus fiables. Des clivages peuvent se former insidieusement, et si les divergences croissent peu à peu, ils peuvent finir par devenir conflictuels.
Cela ne détruit pas forcément une société, quand ces dynamiques de propagation fonctionnent aussi pour réduire les divergences — on peut se représenter cela par des lignes de propagation qui divergent d'abord, mais peuvent reconverger ensuite. Dans ce cas de figure, les propagations, même quand elles ont commencé par diverger, restent dans le même "bassin attracteur", et cette re-convergence assure que des liens sociaux qui s'étaient distendus nous maintiennent malgré tout dans une même société.
Or une des propriétés d'une société "complexe" — au sens fort du terme : "non simplifiable, non réductible à des combinaisons plus simples d'éléments" — est qu'il est possible que de petites différences ou déviations puissent en se cumulant nous faire sortir de notre "attracteur", de l'ensemble de règles et d'usages que nous sommes capables de suivre de manière collectivement compatible. Il n'est même pas exclu que certaines tentatives pour bloquer ces propagations-là, pour limiter la complexité et demeurer dans la zone de compatibilité avec le mode de vie sociale que nous parvenons à gérer, puissent avoir ces effets contraires. Nos essais de limitation des conséquences des propagations doivent eux-mêmes être prudents.

Nonna MAYER : La science politique au défi des "big data" : leur apport et leurs limites
Que font les "big data" aux sciences sociales ? La théorie des propagations est-elle le nouveau paradigme, rend-elle obsolète les approches par les structures sociales ou par les préférences individuelles, inutile la démarche hypothético déductive ? Partant de la science politique je montrerai la portée heuristique de ces nouvelles données, tout en soulignant leurs angles morts et leurs biais, et je plaiderai pour la complémentarité des approches, une data science sans exclusive.

Valère NDIOR : Qui gouverne la modération des contenus sur les réseaux sociaux ?
Cette intervention sera consacrée à une analyse critique des stratégies et référentiels affectant la modération des contenus sur les réseaux sociaux, en France comme à l'échelle internationale. L'analyse portera notamment sur la pression normative exercée par les États mais aussi par la société civile à l'égard des plateformes, sommées de mettre en œuvre des mécanismes de modération plus efficaces face à la circulation de contenus illicites, inauthentiques ou parfois simplement clivants (discours de haine, campagnes de désinformation, opérations d'influence, etc.). Cette intervention interrogera également le rôle ambivalent des réseaux sociaux qui, tout en se revendiquant comme de simples hébergeurs depuis les années 2000, mobilisent des outils techniques et para-juridiques leur conférant un pouvoir éditorial de facto. L'épisode de la suspension des comptes de Donald Trump à la suite de l'assaut du Capitole rappelle cette capacité d'action autonome, laquelle a suscité un débat quant à la légitimité de décisions privées restreignant la circulation d'informations présentées comme étant d'intérêt public. Seront finalement évoquées les caractéristiques essentielles des instruments juridiques applicables à la modération des contenus, au premier rang desquels le Règlement sur les services numériques (Digital Services Act - DSA). Ce dernier, marqué par une recomposition des rapports entre autorités publiques et acteurs privés, institue un cadre contraignant en matière de modération, de transparence et de responsabilité mais dont la mise en œuvre repose sur l'action croisée, parfois dissonante, d'une variété d'acteurs publics et privés.

Limor SHIFMAN : The Value of Internet Memes
In this talk, I will explore memes' role in political participation and cultural globalization, arguing that their power lies in a unique ability to bridge individuals and collectives. Furthermore, I will examine the relationship between memes and values, proposing that internet memes construct two types of values : general values conveyed through their content and communicative values rooted in ideals of interaction.

Guy THERAULAZ : Propagation de l'information sociale et coordination des comportements collectifs : des sociétés animales aux foules humaines
Dans cet exposé, je présenterai les principaux mécanismes impliqués dans la coordination des comportements et la propagation de l'information dans les sociétés animales (insectes sociaux et certaines espèces vivant en groupe chez les poissons et les ongulés). J'aborderai également des phénomènes collectifs similaires observés chez l'homme au cours des déplacements de foules. Je présenterai enfin certains modèles de comportements collectifs établis à partir de l'analyse des interactions sociales.


BIBLIOGRAPHIE :

• Akrich M., Callon M. & Latour B. (dir.) (2006), Sociologie de la traduction. Textes fondateurs, Paris, Presses des Mines de Paris.
• Boullier D. (2023), Propagations. Un nouveau paradigme pour les sciences sociales, Armand Colin.
• Cointet J.-P. & Parasie S. (2018), "Ce que le big data fait à l'analyse sociologique des textes. Un panorama critique des recherches contemporaines", Revue française de sociologie, 2018/3, vol. 59, p. 533-557.
• Colon D. (2023), La guerre de l'information. Les États à la conquête de nos esprits, Paris, Taillandier.
• Darwin C. (1859), The Origin of Species, Harvard University Press.
• Dennett D. C. (1995), Darwin's Dangerous Idea : Evolution and the Meanings of Life, London, Allen Lane.
• Desrosieres A. (1993), La politique des grands nombres. Histoire de la raison statistique, Paris, La Découverte.
• Didier E. (2020), America By the Numbers : Quantification, Democracy, and the Birth of National Statistics, MIT Press.
• Dulac [collectif] (2022), Pour une théorie du social, Éditions du CNRS.
• Feher M. (2017), Le temps des investis. Essai sur la nouvelle question sociale, Paris, La Découverte.
• Fillieule O. (1997), Stratégies de la rue. Les manifestations en France, Paris, Presses de Sciences Po.
• Froissart P. (2002), La rumeur. Histoire et fantasmes, Paris, Belin, coll. "Débats".
• Gaglio G. (2021), Sociologie de l'innovation, Paris, PUF, coll. "Que sais-je ?".
• Keck F. (2020), Les sentinelles des pandémies. Chasseurs de virus et observateurs d'oiseaux aux frontières de la Chine, Zones sensibles.
• Livet P. (1994), La communauté virtuelle. Action et communication, Combas, L'Éclat.
• Shifman L. (2014), Memes in Digital Culture, Cambridge, MIT Press.
• Tarde G. (2001), Les lois de l'imitation, Les empêcheurs de penser en rond.
• Theraulaz G. (2014), "Embracing the creativity of stigmergy in social insects”", Architectural Design, 84(5), p. 54-59.
• Thevenot L. (2006), L'Action au pluriel. Sociologie des régimes d'engagement, Paris, La Découverte.


SOUTIENS :

• Centre d'études européennes et de politique comparée (CEE) | Sciences Po / CNRS
• Institut des études et de la recherche sur le droit et la justice (IERDJ)
Snapchat
La Fabrique de la Cité


BULLETIN D'INSCRIPTION



Programme 2025 : un des colloques

Programme complet


"À DISTANCE ET ENSEMBLE"
NOUVELLES PERSPECTIVES SUR BEAUVOIR ET SARTRE


DU MERCREDI 16 JUILLET (19 H) AU MARDI 22 JUILLET (14 H) 2025

[ colloque de 6 jours ]


Simone de Beauvoir et Jean-Paul Sartre, Paris [FND57-RZ6]
Freund Gisèle (1908-2000)
(C) RMN Gestion droit d'auteur / Fonds MCC / IMEC
Localisation : Saint-Germain-la-Blanche-Herbe, IMEC


ARGUMENT :

"À distance et ensemble". C'est par ces mots que Simone de Beauvoir décrit, dans La Force de l'âge, ses échanges avec Sartre mobilisé sur le front de l'Est à partir de septembre 1939. Indépendamment de tout éloignement géographique, la formule décrit à la perfection leurs rapports, tissés de proximité, de conversations incessantes, de relectures critiques mutuelles, que contrebalance une exigence d'autonomie dans l'initiative et la réalisation de leurs productions respectives. Seuls quelques entretiens, en particulier celui de La Cérémonie des adieux, ont réuni leurs noms sur une même couverture. Par-delà l'image, sulfureuse ou idéalement libre, qu'on a pu se donner de leur relation, par-delà le mythe de gémellité soigneusement forgé par Beauvoir elle-même, le fonctionnement de ce couple mérite d'être élucidé. En quoi le déploiement de leur pensée, de leur écriture, de leur engagement, sur des terrains et des registres si divers, est-il redevable aux modalités de collaboration, de complémentarité, d'entraide, de concurrence, ou de répartition des tâches, qui s'établissent au sein de ce duo ?

Les études beauvoiriennes et sartriennes sont parvenues aujourd'hui à une connaissance approfondie des deux écrivains. Mais peu s'aventurent à saisir, dans sa complexité, sans a priori ni hiérarchie, ce couple même, "Sartrébeauvoir", étrange objet littéraire, politique, philosophique. Pour faire droit à l'actualité de ces deux œuvres polymorphes, seront réunis chercheurs et chercheuses, français et étrangers, relevant d'ancrages disciplinaires différents et intervenant selon divers formats, la place faite à la jeune recherche attestant de la vigueur et le dynamisme du champ.


MOTS-CLÉS :

Beauvoir (Simone de), Correspondances, Couple, Édition, Existentialisme, Féminisme, Littérature, Manuscrits, Philosophie, Sartre (Jean-Paul)


CALENDRIER PROVISOIRE (15/07/2025) :

Mercredi 16 juillet
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Jeudi 17 juillet
DES CONCEPTS ET DES IMAGINAIRES
Matin
Jean-Louis JEANNELLE : Devenir public
Juliette SIMONT : La rupture de Sartre/Beauvoir et Camus. Épilogue, 1954-1959

Après-midi
Louise MAI : Psychiatrisation de l'imagination : figures du bovarysme chez Beauvoir et Sartre
Jennifer McWEENY : Une théorie existentialiste de l'"Esprit" : Beauvoir et Sartre, 1930-1939

Soirée
Autour du film Les Sorcières de Salem


Vendredi 18 juillet
MATÉRIALITÉS
Matin
John IRELAND : Des Interviews venues du froid : le théâtre, Moscou, 1956-1962
Jean BOURGAULT : Une morale en devenir ? La place de L'Idiot de la famille dans l'écriture sartrienne de la morale

Après-midi
Christina HOWELLS : La spirale : circularité et altération
Grégory CORMANN & Jeremy HAMERS : Les Sorcières de Salem : notes sur un film que Sartre avait en texte(s)

Réflexions autour de manuscrits de Beauvoir et Sartre, table ronde avec Jean BOURGAULT, Esther DEMOULIN et Jean-Louis JEANNELLE

Soirée
Les archives de l'Institut national de l'audiovisuel (INA), par Catherine GONNARD et Esther DEMOULIN


Samedi 19 juillet
À LA LETTRE
Matin
Jean-François LOUETTE : Sartre, la poésie dans la prose
Claudia BOULIANE : Une drôle d'écrivaine : traits comiques beauvoiriens

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
Patrice MANIGLIER : Présentation de la revue Les temps qui restent


Dimanche 20 juillet
RÉSEAUX ET RÉCEPTIONS
Matin
Jean-Christophe CORRADO : Beauvoir et Sartre : entremises éditoriales

Après-midi
Élisabeth RUSSO : Des Chemins de la liberté aux Mandarins : pour une réception croisée ?
Kate KIRKPATRICK : Pas ce "French Hegel". Une réception croisée du Deuxième Sexe et de L'Être et le Néant en anglais

Soirée
Ârash AMINIAN TABRIZI & Bénédicte DUTHION : Lieux d'écritures, écritures des lieux : Beauvoir, Sartre et la Normandie


Lundi 21 juillet
GENRE, ANTHROPOLOGIE ET POLITIQUE
Matin
Autour de 68 : la place du désir chez Sartre et Beauvoir, table ronde avec Thomas BOLMAIN, Chiara COLLAMATI, Alexandre FERON, Louise MAI et Hervé OULC'HEN

Après-midi
Esther DEMOULIN : Penser le deuxième sexe après Le Deuxième Sexe : le féminisme hors du livre
Cristina STOIANOVICI : Rareté beauvoirienne et rareté sartrienne : la circulation d'un concept
Natalie DEPRAZ : Simone de Beauvoir, une philosophe d’un nouveau genre ? Interdépendance des concepts sartriens et beauvoiriens

Soirée
Histoires de traduction, table ronde avec Céline LETAWE, Nao SAWADA, Patricia WILLSON et Vincent von WROBLEWSKY


Mardi 22 juillet
Matin
Restitution des doctorants, avec Ârash AMINIAN TABRIZI (NYU), Chloé BOUSQUET (Université Libre de Bruxelles), Florine BRAGAGNOLO (Université de Liège), Béatrice LEFEBVRE-CÔTÉ (Université de Montréal), Louise MAI (Sorbonne Université), Sophia MILLMAN (Princeton University), Hiroaki SEKI (Université de Rikkyo) et Cristina STOIANOVICI (Université Paris 1)

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Grégory CORMANN
Grégory Cormann enseigne la philosophie française contemporaine et la philosophie des sciences humaines à l'université de Liège, où il codirige le centre MAP-Matérialités de la politique (UR Traverses). Il est l'auteur de Sartre. Une anthropologie politique, 1920-1980 (Peter Lang, 2021). Directeur de la revue L'Année sartrienne depuis 2006, il est membre de l'équipe Sartre de l'ITEM et a publié plusieurs manuscrits de Sartre, notamment Morale et Histoire (2005) et Les racines de l'éthique (2015). Également spécialiste des revues intellectuelles de l'après-Seconde Guerre mondiale, il a récemment consacré plusieurs articles aux relations entre Sartre et Beauvoir et à l'effet du Deuxième sexe sur la pensée française du XXe siècle, notamment au prisme des Cahiers du GRIF et de la pensée de Françoise Collin.

Esther DEMOULIN
Esther Demoulin est maîtresse de conférences en littérature du XXe siècle à l'université Paris Cité et membre du CERILAC. Elle est l'autrice de Beauvoir et Sartre. Écrire côte à côte (Impressions Nouvelles, 2024). Co-responsable avec Jean Bourgault de l'équipe "Sartre" de l'ITEM, secrétaire du Groupes d'Études Sartriennes, elle édite actuellement, en collaboration avec Sylvie Le Bon de Beauvoir les paroles et écrits féministes de Beauvoir pour les éditions Gallimard.

Jean-Louis JEANNELLE
Jean-Louis Jeannelle est Professeur de littérature du XXe siècle à Sorbonne Université et membre du CELLF-UMR 8599. Il est l'auteur de Vies mémorables. Variations littéraires sur le genre des Mémoires de la Libération à nos jours (Hermann, 2024), de Cinémalraux : essai sur l'œuvre d'André Malraux au cinéma (Hermann, 2015) et de Films sans images : une histoire des scénarios non réalisés de "La Condition humaine" (Seuil, coll. "Poétique", 2015). Il a précédemment publié Résistance du roman : genèse de "Non" d'André Malraux (CNRS Éditions, 2013), Écrire ses Mémoires au XXe siècle : déclin et renouveau (Gallimard, coll. "Bibliothèque des idées", 2008) et Malraux, mémoire et métamorphose (Gallimard, 2006) et est le co-éditeur des Mémoires de Simone de Beauvoir en Pléiade (2018).

Juliette SIMONT : La rupture de Sartre/Beauvoir et Camus. Épilogue, 1954-1959
On se placera après la retentissante brouille de Camus et Sartre, qui eut lieu en 1952, dans Les Temps Modernes, autour de la critique de L'Homme révolté et de la question du rapport au communisme — dont Sartre se rapprochait quand Camus s'en était éloigné. Quels sont les échos de ce déchirement de l'intelligence dans les œuvres ultérieures de ceux qui en furent acteurs ou témoins ? Il sera question des Mandarins de Beauvoir (1954), de La Chute de Camus (1956), des Séquestrés d'Altona de Sartre (1959) : sur des modes très différents, autant de portraits d'une génération intellectuelle confrontée à la question de ses responsabilités dans un siècle de violence.

Juliette Simont, chercheuse émérite au Fonds National de la Recherche scientifique de Belgique, a enseigné la philosophie à l'université libre de Bruxelles, a été adjointe à la direction des Temps Modernes où elle a publié de nombreuses études sur Sartre ; elle préside le Groupe d'Études sartriennes et co-dirige la revue Études sartriennes. Elle est l'autrice, notamment, de Jean-Paul Sartre. Un demi-siècle de liberté (De Boeck, 2015) ; elle a co-édité, sous la direction de J.-F. Louette, le volume des Écrits autobiographiques de Sartre en Pléiade (2010) et co-dirigé, avec Esther Demoulin et Jean-François Louette, le volume collectif "Les Temps Modernes", d'un siècle l'autre (Les Impressions Nouvelles, 2023) ; elle contribue à la revue Les Temps qui Restent.


Ârash AMINIAN TABRIZI
Ârash Aminian Tabrizi est doctorant en Littérature comparée à New York University. Sa thèse porte sur les écrits de jeunesse de Jean-Paul Sartre.

Thomas BOLMAIN
Thomas Bolmain est docteur en philosophie de l'ULiège (2011), collaborateur scientifique de cette université, et maître-assistant en haute école. Depuis une thèse consacrée à la présence de Kant chez Michel Foucault, ses recherches et publications portent sur la philosophie française contemporaine, et tout particulièrement Sartre, ainsi que sur la psychanalyse lacanienne et l'histoire du marxisme. Sur le portail Cairn, on lira, entre autres, "Le silence et la faim. Note sur Robert Linhart", Dérivations, n°9 ; ""Ils discouraient morts…". Sartre et l'institution de Kierkegaard", Collamati C., Oulc'Hen H. (éds.), L'institution instable, Hermann ; ou encore, bientôt, "À propos d'une bévue. Le jeune Foucault, Sartre et la critique du sujet de la psychologie" (à paraître dans les actes de la journée d'étude "Les cercles de la subjectivité", Paris-Nanterre).

Claudia BOULIANE
Claudia Bouliane est professeure agrégée à l'université d'Ottawa. Ses recherches menées suivant l'approche de la sociocritique des textes portent sur la littérature française des XXe et XXIe siècles et traitent des représentations littéraires de la ville, de l'adolescence et du tourisme de masse. Elle a publié L'Adolescent dans la foule : Aragon, Nizan, Sartre aux Presses de l'université de Montréal en 2018 et de nombreux articles dans plusieurs revues savantes. Elle est directrice de la collection des Archives des lettres canadiennes et rédactrice en chef de la revue Simone de Beauvoir Studies.

Jean BOURGAULT
Jean Bourgault est agrégé de philosophie, docteur en philosophie (L'Invention de la méthode dans la philosophie de Jean-Paul Sartre). Il a enseigné cette discipline durant 38 ans dans divers lycées, dont 12 années dans la Khâgne classique du lycée Condorcet, à Paris. Auteur de nombreux articles sur Sartre, il a publié un certain nombre de textes inédits de cet auteur, dont, avec Grégory Cormann, Les Racines de l'éthique (Études sartriennes, n°19, 2015). Il a été membre du comité de rédaction des Temps Modernes et est membre du comité de rédaction des Études sartriennes. Il co-anime, avec Esther Demoulin, le "groupe Sartre" de l'ITEM (CNRS/ENS). Il est le co-fondateur, avec Yann Mouton, d'une jeune maison d'édition : Les Grands Détroits.

Chloé BOUSQUET
Chloé Bousquet est doctorante en philosophie depuis 2022 à l'université libre de Bruxelles, où elle prépare une thèse sur la phénoménologie de l'image de Sartre, sous la direction de Vincent de Coorebyter (ULB) et la co-direction de Nicolas Monseu-Van Cleemput (Université de Namur). Son travail de thèse s'intitule La Phénoménologie de l'image de Sartre : une réévaluation de l'interprétation sartrienne de Husserl. Elle est membre du Groupe d'études sartriennes et participe également aux travaux du groupe de recherche Aesthetics & Critique (Université de Fribourg). Elle a publié "La direction symbolique de l'analogon chez Sartre. Un éclairage sur L'Imaginaire à partir de L'Idiot de la famille", Études sartriennes, n°28, "Intertextualité de L'Idiot de la famille", 2024.

Florine BRAGAGNOLO
Florine Bragagnolo est doctorante en philosophie à l'université de Liège (F.R.S.-FNRS). Elle réalise une thèse sur l'acceptation sociale de la défiguration, dirigée par Grégory Cormann (ULiège) et Nathalie Grandjean (UCLouvain), intitulée "Regarder les visages défigurés. Une analyse butlerienne du Service de chirurgie maxillo-faciale du CHU d'Amiens et de l'Institut Faire Faces".

Chiara COLLAMATI
Chiara Collamati est maîtresse de conférences à l'université de Liège, où elle co-dirige le Centre de Recherches sur les Matérialités de la Politique (MAP). Parmi ses publications : Le Passé qui vient. Essai sur la philosophie politique de J.-P. Sartre (Vrin 2024) et Dall'Apocalisse all'istituzione. Sartre filosofo politico (Mimesis 2024).

Jean-Christophe CORRADO
Ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de lettres modernes et docteur, Jean-Christophe Corrado est l'auteur de nombreux travaux consacrés à Jean Genet, notamment Dans les choses plus que les choses. L'Imaginaire de Jean Genet, paru à La Baconnière en 2024, et Genet lyrique. Écriture du moi, amour et célébration chez le premier Genet, qui sera disponible en janvier 2025 chez Sorbonne Université Presses. Outre Genet, il a consacré des travaux à André Gide, Julien Green, Simone de Beauvoir et Marcel Jouhandeau. Il a enseigné successivement à Sorbonne Université, l'université polytechnique des Hauts-de-France et Nantes Université.

Alexandre FERON
Alexandre Feron est maitre de conférences à l'université Paris 1 Panthéon Sorbonne. Ses recherches portent sur la philosophie française contemporaine, la phénoménologie, le marxisme et le rapport entre philosophie et sciences humaines. Il a publié Le Moment marxiste de la phénoménologie française (Sartre, Merleau-Ponty, Tran Duc Thao) (Springer, 2021).

Jeremy HAMERS
Jeremy Hamers enseigne le cinéma documentaire et l'éducation aux médias à l'université de Liège où il dirige l'Unité de recherches Traverses. Il est l'auteur de nombreux articles sur le cinéma documentaire allemand, sur la Théorie critique de l'École de Francfort et sur ses héritages hétérodoxes en théorie des médias. Outre le n°84 de la revue Quaderni consacré à la radicalité ouvrière (co-dir. G. Geuens, 2014) et le n°69 des Cahiers d’études germaniques (co-dir. G. Cormann et C. Letawe, 2015) consacré à l'œuvre écrite et audiovisuelle d'Alexander Kluge, il a codirigé avec C. Letawe l'ouvrage Hans Magnus Enzensberger. Jeu de construction pour une théorie des médias (Les presses du réel, 2021), le vol. 9 de la revue Captures consacré aux "esthétiques du ratage" (co-dir. L. Jousten, F. Monvoisin, D. Tomasovic), et le vol. 33 de la revue Symploke, intitulé "Transparency" (co-dir. I. Mayeur, F. Provenzano, E. Schurgers, J. Teurlings, à paraître en 2025). Avec Grégory Cormann, il a signé plusieurs articles consacrés notamment à la Théorie critique, à l'œuvre littéraire et cinématographique d'Alexander Kluge, et aux films de Werner Herzog.

Christina HOWELLS : La spirale : circularité et altération
Cette communication propose une relecture du Sartre tardif à travers la figure de la spirale, image-clé mais négligée de sa pensée dialectique. Plutôt que simple métaphore, la spirale incarne un modèle d'évolution ouverte, non linéaire, articulée autour des notions de totalisation sans totalisateur, de praxis et de pratico-inerte. À partir du tome II de La Critique de la raison dialectique et de L'Idiot de la famille, deux études de cas — Staline et Flaubert — permettent de montrer comment la spirale personnalise, ou sclérose. Là où Staline s'effondre dans une rigidité mortifère, pris au piège de ses propres structures, Flaubert, lui, parvient à intégrer ses contradictions dans l'œuvre d'art. En filigrane, cette lecture conteste les caricatures habituelles du sujet sartrien, trop souvent réduit à une liberté désincarnée. Au contraire, il s'agit ici de penser la liberté à partir de la situation, dans toute sa complexité historique et matérielle. Loin de toute synthèse hégélienne, la spirale sartrienne invite à une pensée du détour, de la répétition transformée — et peut-être, du salut.

Christina Howells est professeur à l'université d'Oxford (Grande Bretagne) et Fellow de Wadham College. Co-fondatrice (avec Michael Scriven) de la revue Sartre Studies International, elle est l'auteur de Sartre's Theory of Literature (MHRA, 1979), Sartre : The Necessity of Freedom (CUP, 1988), Derrida : From Phenomenology to Ethics (Polity Press, 1998), et Mortal Subjects : Passions of the Soul in Late Twentieth-Century French Thought (Polity Press, 2011). Elle a aussi dirigé deux recueils sur Sartre, The Cambridge Companion to Sartre (CUP, 1992) et Sartre (Longman, 1995), ainsi que French Women Philosophers : A Contemporary Reader (Routledge, 2003), et (avec Gerald Moore) Siegler and Technics (Edinburgh UP, 2013).

John IRELAND : Des Interviews venues du froid : le théâtre, Moscou, 1956-1962
La traduction récente de deux interviews théâtrales inédites données par Sartre à Moscou en 1956 et 1962 me permet d'interroger le phénomène récurrent des inédits parmi ses interviews théâtrales, symptôme d'une ambivalence curieuse par rapport au théâtre. Cette communication explore une nouvelle stratégie de Sartre face à un public soviétique, mais aussi les nouveautés apportées par ces interviews dont une appréciation élogieuse, jamais formulée ailleurs, du TNP de Jean Vilar. Et parlant des spectacles sur la guerre d'Algérie, Sartre passe sous silence Les Paravents de Genet, élision révélatrice d'un désaccord séparant les deux dramaturges au cours des années 1960. Le rôle discret mais capital de Beauvoir qui accompagne Sartre à Moscou, mis au jour dans la deuxième partie de La Force des choses permet également un nouvel éclairage du thème de ce colloque : "À distance et ensemble".

John Ireland enseigne la littérature française et francophone à l'université d'Illinois à Chicago. Ancien président de la North American Sartre Society et ancien Executive Editor, Sartre Studies International, il est membre associé du groupe Sartre de l'ITEM (CNRS-ENS) qui a édité le Théâtre complet de Sartre (Gallimard, "Bibliothèque de la Pléiade", 2005). Spécialiste du théâtre contemporain, il a aussi publié Sartre, un art déloyal : théâtralité et engagement (Jean-Michel Place, 1994), une édition bilingue de Noureddine Aba, La récréation des clowns / Clowns at Play (L'Harmattan, 2021) et Theater, War, and Memory in Crisis : Vichy, Algeria, the Aftermath (University of Michigan Press, 2025).

Kate KIRKPATRICK : Pas ce "French Hegel". Une réception croisée du Deuxième Sexe et de L'Être et le Néant en anglais
Pendant une grande partie du vingtième siècle, Beauvoir a été exclue des débats philosophiques de l'existentialisme en anglais, et son existentialisme a souvent été minimisé dans les comptes-rendus philosophiques de son féminisme. Il est donc difficile de trouver des "réceptions croisées de L'Être et le Néant et du Deuxième Sexe en tant qu'œuvres philosophiques qui s'engagent profondément dans les deux. Depuis les œuvres d'Eva Lundgren-Gothlin et de Nancy Bauer, plusieurs interprètes philosophiques du Deuxième Sexe ont partagé l'hypothèse que le Deuxième Sexe est hégélien. Selon ses lectures la "question Hegel" trouve sa meilleure réponse dans une lecture de Beauvoir à travers le "Hegel français" d'Alexandre Kojève. Après avoir exposé ce débat, je propose trois arguments pour démontrer que ce n'est pas ce "French Hegel" qui éclaire le mieux Le Deuxième Sexe.

Kate Kirkpatrick est Fellow et directrice d'études en philosophie à Regent's Park College (Université d'Oxford). Elle a écrit sur la phénoménologie et l'existentialisme français. Sa biographie de Simone de Beauvoir, Devenir Beauvoir. La force de la volonté (Flammarion, 2020) était un des "livres de l'année" pour Lire, Le Magazine littéraire, et l'un des meilleurs essais parus en 2020 selon Télérama ; l'ouvrage est paru en poche en 2023 dans la collection "Champs". Kate Kirkpatrick a publié par ailleurs : Sartre on Sin : Between Being and Nothingness, Oxford University Press, 2017 ; "Expectant Anxiety", in Liesbeth Schoonheim et Karen Vintges (dir.), Beauvoir and Politics : A Toolkit, Abingdon, Routledge, 2023 ; "Beauvoir and Sartre's "Disagreement" about Freedom", Philosophy Compass, 18(11), 2023, p. 1-14 ; "Femininity, Love, and Alienation : The Genius of The Second Sex", Journal of the British Academy, 12(1/2), 2024, p. 1-26.

Béatrice LEFEBVRE-CÔTÉ
Béatrice Lefebvre-Côté est docteure en littératures de langue française de l'université de Montréal et de l'université Sorbonne Nouvelle. Sa thèse, intitulée "De soi et des autres : entrelacs de l'intime et du collectif dans les écritures de soi contemporaines", porte notamment sur les œuvres de Simone de Beauvoir, de François Bon, d'Emmanuel Carrère, d'Annie Ernaux et de Georges Perec. Son mémoire de maîtrise, complété en 2019, était quant à lui consacré à l'ethos d'une transfuge intellectuelle dans l'œuvre d'Annie Ernaux. Elle enseigne à présent la littérature au Cégep de Rimouski (Canada).

Céline LETAWE
Céline Letawe est docteure en philosophie et lettres (orientation "langues et littératures germaniques") et titulaire d'un diplôme d'études spécialisées en traduction. Elle enseigne la traduction et la traductologie à l'université de Liège depuis 2011. Membre du CIRTI (Centre Interdisciplinaire de Recherches en Traduction et en Interprétation), elle concentre ses recherches sur la visibilité des traducteurs, la traduction collective et le transfert de théorie. Elle collabore au projet SITRAD (Simenon en traductions, 2024-2026).

Jean-François LOUETTE : Sartre, la poésie dans la prose
Sartre a plusieurs fois critiqué la prose poétique : chantante, évanescente, décadente. À la Barrès, d'un mot. Pourtant, comme souvent, la pratique sartrienne déjoue sa théorie. Dans La Nausée et dans Le Sursis, textes qui formeront le corpus principal de l'analyse, la prose de Sartre, ici et là du moins, multiplie, dans le sillage de Baudelaire, les synesthésies de type symboliste, ainsi que les effets de musicalisation. Elle évoque et parfois cite des chansons, la plus célèbre étant un air de jazz, "Some of these days". Mais quel rôle peut revenir aux chansons dans Le Sursis, dès lors que Sartre prétend devenir un romancier politique ?

Ancien élève de l'École Normale Supérieure, Jean-François Louette a enseigné aux universités de Grenoble, de Lyon, et de la Sorbonne. Pour la Bibliothèque de la Pléiade, il a dirigé les éditions des romans et récits de Bataille (2004), des écrits autobiographiques de Sartre (2010), et d'un choix de romans de Dieu la Rochelle (2012), et collaboré aux éditions du théâtre complet de Sartre, des Mémoires de Beauvoir ainsi que des œuvres de Victor Segalen. Il a publié plusieurs ouvrages sur Sartre, le dernier s'intitulant Sartre et Beauvoir, roman et philosophie (La Baconnière, 2019).

Louise MAI
Agrégée de lettres modernes et ancienne élève de l'École Normale Supérieure, Louise Mai mène une thèse sur la critique sartrienne des savoirs psychiatriques à Sorbonne Université sous la direction de Jean-François Louette. Elle a notamment publié deux articles à ce sujet : "La "solution hystérique". L'Idiot de la famille dans le contexte de l'antipsychiatrie", Études sartriennes, n°28, 2024, et "Herméneutique du regard médico-légal. Faits divers et criminologie, des sœurs Papin à l'"Érostrate" de Sartre", Soin, Sens et Santé. An International Journal of Health Humanities, n°1, 2024.

Patrice MANIGLIER
Patrice Maniglier est maître de conférences au Département de Philosophie de l'université Paris Nanterre ainsi que, pour une part de son enseignement, au Département d'Arts du Spectacle. Spécialiste de philosophie française contemporaine, de philosophie des sciences sociales (surtout linguistique et anthropologie), d'esthétique et de théorie du cinéma, il est notamment l'auteur de La Vie énigmatique des signes : Saussure et la naissance du structuralisme (2006), Le Vocabulaire de Lévi-Strauss (Ellipses, 2002), La Perspective du Diable, Figurations de l'espace et philosophie, de la Renaissance à Rosemary's Baby (Actes Sud, 2010), Foucault va au cinéma (Bayard, 2011), La Philosophie qui se fait (Cerf, 2019), La Terre, le philosophe et le virus, Bruno Latour expliqué par l'actualité (Les Liens Qui Libèrent, 2021), Sœurs, Pour une psychanalyse féministe (avec Silvia Lippi, Seuil, 2023). On pourra consulter ses publications sur https://u-paris10.academia.edu/PatriceManiglier. Il co-dirige la collection "MétaphysiqueS" aux Presses universitaires de France et, après avoir fait partie du comité de rédaction de la revue Les Temps Modernes, il a lancé Les temps qui restent.

Jennifer McWEENY
Jennifer McWeeny consacre ses recherches à la philosophie du genre et de la race, la philosophie de l'esprit, la phénoménologie et l'existentialisme, ainsi que les études décoloniales. Elle est à l'origine du domaine de la philosophie féministe de l'esprit et a développé une théorie du genre qui considère les genres comme une fonction du type de relation corps-soi qui structure la conscience. Ses cadres théoriques ont été utilisés par des chercheurs pour aborder des questions relatives à la théorie du genre, à la pédagogie critique de la race, aux études juridiques, aux études littéraires, à la théorie queer, à la communication, à l'écoféminisme, aux études sur les traumatismes, à la théorie décoloniale et aux études sur le handicap. Jennifer McWeeny est lauréate du Fulbright National Research Scholar Award (France 2019-2020), rédactrice en chef de la revue Simone de Beauvoir Studies et membre du comité de rédaction de la série "Studies in Feminist Philosophy" d'Oxford University Press. Elle écrit actuellement un livre sur la phénoménologie du genre.

Sophia MILLMAN
Sophia Millman est doctorante au sein du département de français et d'italien de l'université de Princeton et boursière d'échange à l'École normale supérieure. Sa thèse porte sur le style tardif de Simone de Beauvoir, Agnès Varda, Maryse Condé et Annie Ernaux. Ses articles récents ont été publiés dans La Revue des lettres modernes et Women in French Studies, et son prochain article sera publié dans The French Review. Elle est également responsable des recensions de la revue Simone de Beauvoir Studies.

Hervé OULC'HEN
Hervé Oulc'hen est agrégé et docteur en philosophie. Il enseigne en Classes préparatoires à Poitiers. Il est secrétaire du Groupe d'Études Sartriennes et membre de l'ITEM – Institut des textes et manuscrits modernes. Ses recherches portent notamment sur la théorie sociale de Sartre, en dialogue avec les sciences sociales, la théorie critique et la philosophie française contemporaine. Entre autres publications, il est l'auteur de deux essais, Sartre et le colonialisme. La Critique d'un système (Éditions La Digitale, 2015), L'Intelligibilité de la pratique. Althusser, Foucault, Sartre (Presses universitaires de Liège, 2017). Il a dirigé deux ouvrages collectifs, Usages de Foucault (PUF, 2014) et, en codirection avec Chiara Collamati, L'Institution instable. Parcours critiques à partir de Jean-Paul Sartre (Hermann, 2021).

Élisabeth RUSSO : Des Chemins de la liberté aux Mandarins : pour une réception croisée ?
La réception croisée du cycle romanesque de Sartre Les Chemins de la liberté et du roman de Simone de Beauvoir Les Mandarins ne va pas de soi en littérature. Il arrive évidemment que le nom de l'un ou de l'autre apparaisse au détour d'une critique, d'une notice de sa ou de son petit camarade. Mais c'est davantage en philosophie que leurs œuvres et leurs pensées sont confrontées. Toutefois, les années 1980 ont vu paraître des travaux majeurs sur Sartre en littérature, grâce notamment aux contributions de Michel Contat et Geneviève Idt. Quant à Beauvoir, Jean-François Louette est pour beaucoup dans la reconsidération littéraire de ses romans. Il s'agira de cheminer dans l'histoire de cette réception croisée problématique, de la parution des œuvres (1945-1954) jusqu'à notre époque, voire d'imaginer des sujets comme autant de pistes de confrontation ou de fictions d'une réception future.

Élisabeth Russo est agrégée de Lettres modernes, docteure en Littérature française de Sorbonne Université. Elle a soutenu une thèse de doctorat sur l'écriture romanesque de la virilité dans les années 1940 et 1950, sous la direction de Jean-François Louette. Ses récents travaux concernent la place des femmes journalistes dans les années 1950.

Nao SAWADA
Nao Swada est docteur en philosophie à l'université de Paris I, Panthéon-Sorbonne et professeur à l'université Rikkyo (Tokyo). Il a notamment publié en japonais : La littérature française du XXème siècle au prisme de Sartre (2019) et L'Appel à l'aventure. Lecture éthique de Sartre (2002), et a traduit en japonais Les Mots, L'Imaginaire, Les Chemins de la liberté et L'idiot de la famille de Sartre.

Hiroaki SEKI
Hiroaki Seki est docteur en lettres et chercheur à l'université de Rikkyo, Japon. Il a soutenu une thèse intitulée "Idées de la littérature chez Jean-Paul Sartre : des tensions sans système ?" à Sorbonne Université sous la direction de Jean-François Louette. Ses recherches portent principalement sur la notion de littérature, en lien étroit avec la philosophie. Il est l'auteur de plusieurs articles, dont "Sartre et la figure de Cassandre" (International Sartre Studies, 2017), "Humanisme et la question du langage : Sartre lecteur de Brice Parain" (ibid., 2020), "The Discovery of the Other in Post-War Japan : Two Sartreans on Kyoto School and Zainichi Koreans" (co-écrit avec Kobayashi Nariaki, dans Sartre and the International Impact of Existentialism, 2020), "Pensée, image et langage. Sartre et Henri Delacroix" (Études sartriennes, 2021) et "Oe Kenzaburo and Pursuit of Authenticity through the Imagination : Creolizing Sartre in Japan ?" (Creolizing Sartre, 2023).

Cristina STOIANOVICI
Cristina Stoianovici prépare actuellement une thèse sur la rareté dans la Critique de la Raison dialectique de Sartre à Paris 1 Panthéon Sorbonne, sous la direction de Jocelyn Benoist.

Patricia WILLSON
Patricia Willson est traductrice et docteure en lettres. Elle est l'autrice de La Constelación del Sur. Traductores y traducciones en la literatura argentina del siglo veinte (2004, 2017) et de Página impar. Textos sobre la traducción en Argentina : conceptos, historia, figuras (2019), ainsi que la co-éditrice de volumes collectifs sur la traduction. Elle a été enseignante à l'université de Buenos Aires, le Colegio de México et l'université de Liège. Elle a traduit, entre autres, Gustave Flaubert, Paul Ricœur, Roland Barthes, Jean-Paul Sartre, Mary Shelley, Mark Twain, Rudyard Kipling et Slavoj Zizek. Elle est membre du CIRTI à l'ULiège.

Vincent von WROBLEWSKY
Vincent von Wroblewsky est philosophe et traducteur. Il fut chercheur à l'Académie des Sciences de RDA jusqu'en 1990 ; de 1991 à 2005 il fut responsable de l'édition de l'œuvre de Sartre aux éditions Rowohlt et en assura la traduction ; de 1993 à 2023, président de la Société Sartre en Allemagne. Il a publié notamment : Eine unheimliche Liebe - Juden in der DDR (Éditions Philo, 2001), traduit en français en 2005 sous le titre Un étrange amour - Être juif en RDA (Paris, Champion) ; Pourquoi Sartre ? (Bordeaux, Le Bord de l'Eau, 2005, en allemand : Lebendiger Sartre - 115 Begegnungen, Berlin, BasisDruck, 2009). Son travail de traduction du français vers l'allemand est important : notamment Sartre, Camus, Julia Kristeva, récemment Boualem Sansal.


BIBLIOGRAPHIE :

• Bourgault Jean et Jeannelle Jean-Louis, Sartre-Beauvoir : genèses croisées, Genesis, n°53, 2021.
• Celeux Anne-Marie, Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoir : une expérience commune, deux écritures, Paris, Nizet, 1986.
• Contat Michel, "Sartre/Beauvoir, mythe et réalité d'un couple", dans Pour Sartre, Paris, Presses universitaires de France, coll. "Perspectives critiques", 2008, p. 491-527.
• Contat Michel, "La collaboration Beauvoir-Sartre", dans Tom Bishop et Caroline Girard (dir.), Simone de Beauvoir, Centennial Conference, New York, The Center for French Civilization and Culture New York University, 2009, p. 184-202.
• Contat Michel, "Beauvoir et Sartre : c'est Castor et Pollux", dans Liliane Lazar (dir.), L'Empreinte Beauvoir. Des écrivains racontent, Paris, L'Harmattan, 2009, p. 199-210.
• Cormann Grégory, ""Madame de Beauvoir, c'est moi". Une archéologie féministe de la pensée française contemporaine (Sartre, Lévi-Strauss, Bourdieu)", Veritas, vol. 63, n°2, mai-août 2018, p. 640-672 (repris dans Grégory Cormann (dir.), L'Année sartrienne, n°33, juin 2019, p. 7-22).
• Daigle Christine et Golomb Jacob (dir.), Beauvoir & Sartre. The Riddle of Influence, Bloomington, Indiana University Press, 2009.
• Demoulin Esther, Beauvoir et Sartre. Écrire côte à côte, Les Impressions Nouvelles, 2024.
• Jeannelle Jean-Louis et Lecarme-Tabone Éliane (dir.), Simone de Beauvoir, Paris, Éditions de l'Herne, 2012.
• Gothlin Eva, "Beauvoir et Sartre : deux philosophies en dialogue", dans Christine Delphy et Sylvie Chaperon (dir.), Cinquantenaire du "Deuxième Sexe", Paris, Syllepse, 2002, p. 113-120.
• Idt Geneviève et Louette Jean-François, "Sartre et Beauvoir épistoliers en guerre : Voilà de la lettre ou non ?", Études sartriennes, n°5, 1993, p. 69-91.
Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir, film de Max Cacopardo, commentaires de Madeleine Gobeil et Claude Lanzmann, 1967.
• Kail Michel, Beauvoir et Sartre. Pour un matérialisme féministe, Paris, PUF, 2023.
• Kirkpatrick Kate, Devenir Beauvoir : la force de la volonté, trad. Clotilde Meyer, Flammarion, 2023.
• Kruks Sonia, "Simone de Beauvoir : between Sartre and Merleau-Ponty", Simone de Beauvoir Studies, vol. 5, 1988, p. 74-80, traduit dans Les Temps modernes, n°520, novembre 1989, p. 81-103.
• Lecarme-Tabone Éliane, "Le couple Beauvoir-Sartre devant la critique féministe", Les Temps modernes, n°619, 2002/3, p. 19-42.
• Louette Jean-François, Sartre et Beauvoir, roman et philosophie, Genève, La Baconnière, 2019.
• Meo Patricia de, Dalhousie French Studies, vol. 9, 1986, "Perspectives sur Sartre et Beauvoir", dir. Patricia de Meo.
• Poisson Catherine, Sartre et Beauvoir : du "je" au "nous", Amsterdam/New York, Rodopi, 2002.
• Rouch Marine, "Chère Simone de Beauvoir". Vies et voix de femmes "ordinaires". Correspondances croisées 1958-1986, Paris, Flammarion, 2024.
Simone de Beauvoir Studies, vol. 8, 1991, "The Legacy of Simone de Beauvoir and Jean-Paul Sartre".
Simone de Beauvoir Studies, vol. 20, 2003-2004, "The Talk of the Town: Beauvoir and Sartre".
• Teroni Sandra et Vannini Andrea, Sartre e Beauvoir al cinema, Firenze, La Bottega del cinema, 1989.


PARTENARIAT :

• Institut national de l'audiovisuel (INA)


SOUTIENS :

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• Centre d'études et de recherches interdisciplinaires en lettres, arts et cinéma (CERILAC, URP 441) | Université Paris Cité
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• Fonds de la recherche scientifique (F.R.S.-FNRS)
• Unité de recherches TRAVERSES | Université de Liège (ULiège)
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