Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


L'ARCHITECTURE EN NORMANDIE À L'ÂGE CLASSIQUE


DU MERCREDI 3 OCTOBRE (19 H) AU DIMANCHE 7 OCTOBRE (14 H) 2018

[ colloque de 4 jours ]



DIRECTION :

Étienne FAISANT


ARGUMENT :

À la suite des deux colloques tenus à Cerisy : L'architecture normande au Moyen Âge (1994) et L'architecture de la Renaissance en Normandie (1998), cette nouvelle rencontre poursuivra l'examen et la valorisation du patrimoine normand en s'intéressant aux XVIIe et XVIIIe siècles. Si elle demeure peu étudiée, nombre d'importants monuments de Normandie attendant encore leur première monographie, cette période ne fut en effet pas un moment moins intense : d'innombrables châteaux et de grands bâtiments monastiques, entre autres, témoignent toujours de l'activité qui régna alors dans la province. Celle-ci abrite ainsi des monuments majeurs, comme le château de Balleroy dû à François Mansart, celui de Bénouville conçu par Claude-Nicolas Ledoux, ou les bâtiments conventuels des abbayes de Rouen et de Caen.

Ce colloque n'entend néanmoins pas se cantonner à l'examen d'œuvres exceptionnelles ou très célèbres, mais souhaite proposer des approches variées : études de carrières, de grandes opérations urbaines et rurales, de types architecturaux… en considérant aussi bien l'architecture privée et religieuse que l'architecture publique, les fortifications et les jardins. Il s'agira ce faisant d'explorer plus largement les dynamiques et les tendances qui marquèrent la province, en s'interrogeant notamment sur le rapport à Paris.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 3 octobre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Jeudi 4 octobre
Matin
Étienne FAISANT : Introduction
Alain HUGON : La Normandie et la monarchie française : regards croisés sur les relations de la Province avec l'Ile de France (XVIIe-XVIIIe s.)
Alexis DOUCHIN : Le regard des érudits sur l'architecture de leur temps dans la Normandie des XVIIe et XVIIIe siècles

Après-midi
Visite révisée du château de Cerisy, par Étienne FAISANT

ARCHIVES CONTEMPORAINES
Gilles DÉSIRÉ DIT GOSSET : L'architecture des XVIIe et XVIIIe siècles en Normandie vue par l'administration des Monuments historiques

VILLES ET URBANISMES
Julien DESHAYES : Construction d'hôtels particuliers et mutations urbaines dans le Valognes des XVIIe et XVIIIe siècles
Claire ÉTIENNE-STEINER : Le Havre, ville royale
Viviane MANASE : La reconstruction de Dieppe après 1694 : entre idéal urbain et réalités


Vendredi 5 octobre
"HORS LES MURS" — À CAEN
Matin
SÉANCE PUBLIQUE À L'HÔTEL DE VILLE DE CAEN (SALLE DES MARIAGES)
CAEN AU XVIIIe SIÈCLE
Étienne FAISANT : L'œuvre architecturale des Intendants à Caen
Alexandre GADY : À l'ombre de Saint-Étienne : les bâtiments monastiques de l'abbaye aux Hommes de Caen

Visite du rez-de-chaussée de l'Hôtel de ville (sacristie, escalier des mâtines, cloître, grand escalier, pavillon d'entrée)

Après-midi
Visite en ville : Ancien couvent de la Visitation (actuel quartier Lorge, désormais Fonds régional d'art contemporain), Place Fontette, Place Saint-Sauveur, Place de la République, Hôtel de Blangy (aujourd'hui Centre communal d'action sociale) et Bâtiments monastiques de l'abbaye aux Dames (siège de la Région)


Samedi 6 octobre
GRANDES DEMEURES, ARCHITECTURE RELIGIEUSE ET JARDINS
Matin
Claude MIGNOT : Balleroy et les échos normands d'un château de François Mansart [enregistrement audio en ligne sur Canal U, chaîne La forge numérique | MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Vincent SIMONET : Des thèmes et des variations. Les façades de quelques châteaux haut-normands du XVIIe siècle
Erwan PATTE : Éléments sur la construction des châteaux de la seconde moitié du XVIIIe siècle à partir de quelques études de cas en Normandie

Après-midi
Christine GOUZI : De Versailles à Mondaye : les modèles du décor de l'abbaye de Mondaye à la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle
Yves LESCROART : Les hôtels particuliers de Rouen : entre diffusion des modèles parisiens et créations originales
Étienne FAISANT : Parterres, allées et perspectives : aspects des jardins dans la Normandie du XVIIe siècle
Jeanne POTTIER : L'influence des Lumières sur les jardins normands du XVIIIe siècle au travers des cas de Thury-Harcourt et de Canon
Emmanuel LUIS : Construire dans le monde rural en Normandie : édifier, restaurer, décorer les églises aux XVIIe et XVIIIe siècles


Dimanche 7 octobre
Matin
TRAVAUX EN NORMANDIE ET CARRIÈRES D'ARCHITECTES
Vincent DROGUET : Antoine-Mathieu Le Carpentier et la Normandie
Sophie POIRIER-HAUDEBERT : Jacques Basché, ingénieur-géographe des Ponts-et-Chaussées et architecte en Normandie
Nicolas FAUCHERRE : Vauban et la Normandie
Étienne FAISANT : Conclusions

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Étienne FAISANT : L'œuvre architecturale des intendants à Caen
Commissaires départis pour l'exécution des ordres du roi dans les généralités, les intendants de justice, police et finances ont régulièrement joué un rôle éminent dans l'aménagement des villes françaises au XVIIIe siècle. À Caen, ils s'employèrent ainsi à faciliter les circulations et desserrer le tissu urbain, en faisant supprimer les points d'étranglement et abattre les murailles, comme en témoigne encore la place Saint-Sauveur. Ils tinrent également un rôle essentiel dans la construction, aux entrées de la ville, de grands bâtiments qui ne furent pas uniquement conçus pour répondre à une fonction utilitaire — casernes au sud, palais des juridictions à l'ouest — mais reçurent également un aspect particulièrement monumental. Ils se dotèrent enfin d'un hôtel, rue des Carmes. En examinant ces diverses réalisations, cette communication s'attachera à préciser le rôle exact des intendants et les relations que ceux-ci entretinrent avec les échevins et les autres autorités de la ville. Elle tentera également de distinguer ce qui releva du cadre de leurs missions de ce qui résulta de leurs goûts propres. La comparaison entre leurs différentes œuvres pourra en effet permettre de mettre en évidence des personnalités fort entreprenantes, au premier rang desquelles s'impose le baron de Fontette.

Docteur en histoire de l'art, Étienne Faisant a consacré sa thèse à l'Architecture de Caen du règne de Charles VIII au début du règne de Louis XIII. Secrétaire-adjoint de la Société des antiquaires de Normandie, il consacre une large part de ses travaux au patrimoine normand.
Publications
"Les Grandes Écoles, siège de l'université de Caen (1432-1789)", dans Éduquer et instruire en Normandie, Actes du congrès tenu à Saint-Lô du 14 au 17 octobre 2015, Louviers, FSHAN, 2015, p. 371-382.
"Une place Royale avant les places royales : l'exemple de Caen", dans Alexandre Gady (dir.), Jules Hardouin-Mansart, Paris, Le Passage, 2017, p. 205-213.
"Un ingénieur des Ponts révolutionnaire ? Les projets d'Armand-Bernardin Lefebvre pour la ville de Caen", dans Hélène Rousteau-Chambon et Yann Lignereux (dir.), Nantes révolutionnaire, ruptures et continuités (1770-1830), Actes du colloque tenu à Nantes du 19 au 21 novembre 2015, à paraître.


Julien DESHAYES : Construction d'hôtels particuliers et mutations urbaines dans le Valognes des XVIIe et XVIIIe siècles
Considérée par Toustain de Billy comme "la cour du Cotentin", la ville "la plus polie, la plus spirituelle de la Basse-Normandie", Valognes se caractérise à l'époque moderne par une impressionnante concentration de demeures nobles urbaines. Le phénomène avait déjà pris à la fin du règne de Louis XIV une si grande ampleur que les officiers municipaux se plaignaient auprès de l'Intendant que le bourg soit "composé en la meilleur et la plus grande partie de noblesse originaire du lieu et autres qui s'y sont tenus", qu'il "en vient encore tous les jours de la campagne pour y demeurer". Paradoxalement, cet afflux de nobles exemptés devait en effet, en grevant ses finances, freiner la ville dans la conduite du grand projet de place royale dont elle caressait l'ambition. C'est au final par d'autres procédés, moins programmatiques et davantage opportunistes, que Valognes parvint au cours des XVIIe et XVIIIe siècles à effectuer une lente mais profonde mutation urbaine.

Julien Deshayes est historien de l'art de formation, directeur du Pays d'art et d'histoire du Clos du Cotentin, chercheur associé du Craham UMR 6273, Université de Caen Normandie.
Publications
"Identification des matériaux et étude du bâti, l'exemple du Clos du Cotentin", In Situ, n°6, Février 2006.
"L’hôtel-Dieu de Valognes", dans Hôtels-Dieu et pèlerins sur les chemins du Mont-Saint-Michel, Actes des 3e rencontres historiques d'Ardevon, 8 mai 2006, Association Les Chemins du Mont-Saint-Michel, Vire, 2008, p. 109-124.
"Valognes, une ville et ses hôtels particuliers", VMF, Vol. 232, Mai 2010, p.42-47.
"Les Legendre, une dynastie d'architectes valognais au siècle des Lumières", Val'Auna, revue historique sur Valognes et ses alentours, Vol. 22, Premier semestre 2013, p. 2-9.
"Les Veuves et la construction d'hôtels particuliers à Valognes sous l'Ancien Régime", dans Les Femmes en Normandie, Actes du congrès de la Fédération des sociétés historiques et archéologiques de Normandie tenu à Bellême en octobre 2013, Rouen, 2014, p. 111-118.

Vincent DROGUET : Antoine-Mathieu Le Carpentier et la Normandie
La carrière d'Antoine-Mathieu Le Carpentier (Rouen, 1709 - Paris, 1773) s'est presque entièrement déroulée à Paris. Employé par Jacques V. Gabriel sur le chantier de reconstruction du bâtiment de la Chambre des Comptes dans les années 1738-1740, il travaillera pendant trente-cinq ans, à la suite de cette première expérience, dans la capitale et terminera son parcours comme membre de l'Académie d'architecture et architecte du prince de Condé au Palais-Bourbon. S'il sut séduire une clientèle de gens de finances proches du pouvoir, pour laquelle il édifia ou remania des hôtels dans le contexte parisien, Le Carpentier maintint également, pendant une grande partie de sa vie professionnelle, des liens étroits et parfois tendus avec sa province natale, la Normandie. À travers certaines de ses commandes normandes — dont la plus prestigieuse aurait dû être celle du nouvel Hôtel de ville de Rouen — on peut percevoir le réseau d'amitiés et d'appuis qu'il avait su entretenir et conserver dans sa ville d'origine. Mais c'est aussi tout un entourage professionnel ou social qui se révèle, à y bien regarder, déterminé par les origines de l'architecte et par son attachement pour ses "compatriotes". Alors que Le Carpentier déclare fièrement avoir été "l'architecte de sa propre fortune", manifestant ainsi sa volonté de s'affirmer comme un self made man arrivé au sommet de son état par son seul talent, il n'est sans doute pas inutile de tenter d'apprécier, chez ce parisien d'adoption, l'étendue et l'importance des réseaux de solidarité et d'influence liés à son origine normande, dans le contexte d'une France de Louis XV où le rapport entre le pouvoir central et les provinces se révèle de plus en plus problématique, voire ouvertement conflictuel.

Vincent Droguet, conservateur général du patrimoine, est directeur du patrimoine et des collections du château de Fontainebleau.
Publication
Vincent Droguet, "Antoine-Mathieu Le Carpentier, un architecte en sympathie avec les sculpteurs", dans Guilhem Scherf (dir.), Augustin Pajou et ses contemporains, Paris, 1999, p. 191-222.

Claire ÉTIENNE-STEINER : Le Havre, ville royale
Sous l'égide de ses gouverneurs, Le Havre est dominé au XVIIe siècle par le Militaire et la Marine : le cardinal de Richelieu commande en 1628 une citadelle, le quartier Militaire, tandis que Colbert réquisitionne en 1663 le Bassin du Roi pour créer l'arsenal de la Marine. La porte Richelieu et son pendant, la tour François Ier, sont alors les seuls édifices monumentaux de la ville. La Municipalité ne se lance en effet dans aucune grande entreprise architecturale et, si elle érige en 1684 une statue de Louis XIV sur la place d'Armes, elle ne lui donne aucun cadre ordonnancé. Au XVIIIe siècle, en revanche, le développement des échanges favorise la construction d'établissements classiques voués au Commerce, au détriment de la Marine, tandis que les négociants se font construire des hôtels adaptés à l'usage de "maisons de commerce", ainsi que des "maisons de plaisance" sur la Côte d'Ingouville. À la suite des ingénieurs sollicités par les gouverneurs, Bruand ou Gabriel, des architectes parisiens dont Pâris et Moreau-Desproux travaillent au Havre et l'hôtel du gouverneur, construit en 1752, se réfère au modèle des hôtels de la capitale. Due à des artisans locaux, la majorité de la construction présente toutefois un caractère plus modeste. La Municipalité prend donc le parti de la dissimuler derrière des décors lors des visites de Louis XV puis de Louis XVI venu constater l'avancement des travaux du port. La décision d'agrandir Le Havre en 1786 scelle la victoire du Commerce : la Neuve ville est construite d'après le plan néoclassique de l'ingénieur Lamandé sur le quartier Miliaire et autour du nouveau bassin du Commerce. Mais Louis XVI refuse le projet de place royale et les troubles de la Révolution et de l'Empire reportent l'exécution du plan Lamandé, achevé seulement en 1840.

Docteur en histoire de l'art, conservateur général honoraire du patrimoine, Claire Étienne-Steiner a contribué de 1971 à 2015 à l'inventaire du patrimoine de Normandie, aux services de l'Inventaire général du Patrimoine culturel de Haute et Basse-Normandie. Elle a participé au colloque de Cerisy : L'architecture de la Renaissance en Normandie, organisé en 1998 par Bernard Beck et Isabelle Letteron ("Le Havre, ville neuve de la Renaissance ?") et en a co-dirigé la publication en 2004 (Presses universitaires de Caen). De 1991 à 2005, elle a réalisé l'inventaire du Patrimoine de l'agglomération du Havre et participé au comité scientifique pour l'inscription du centre reconstruit du Havre au patrimoine mondial de l'humanité qui a été obtenue en 2005.
Publications dans le cadre des collections de l'Inventaire général
Itinéraires du Patrimoine sur Harfleur (la ville et l'église), Sainte-Adresse et le Nice havrais, le port et le centre reconstruit du Havre, édités par Connaissance du Patrimoine de Haute-Normandie (CPHN), 1992-1995.
Indicateurs du Patrimoine : Le Havre, ville, port et agglomération, CPHN, 1999.
Images du Patrimoine : Le Havre, Auguste Perret et la Reconstruction, CPHN, 1999.
Cahiers du Patrimoine : Le Havre, un port des villes neuves, édité par MONUM', 2005.
Collection "Patrimoine et territoires : Sainte-Adresse et le Nice havrais" (avec Christine d’Aboville), édité par la Région Haute-Normandie, 2010.
Collection "Cahiers du Patrimoine : Le Havre 1517-2017, la demeure urbaine", édité par Lieux Dits, 2017.
Ouvrages diffusés par les éditions Lieux Dits.

Nicolas FAUCHERRE : Vauban et la Normandie
Province frontière hautement stratégique car faisant directement face à l'Angleterre, la Normandie est l'objet à la fin du règne de Louis XIV d'attaques incessantes des flottes anglo-hollandaises : Cherbourg en 1692, La Hougue en 1692 et 1694, Le Havre en 1694. En 1689, il projette un grand port de guerre dans la rade de la Hougue aux dépens de Cherbourg. Une série de redoutes sont alors construites sur la côte orientale du Cotentin dite "côte de la Hougue". Jusqu'en 1694 et la construction des deux tours de la Hougue, la défense du littoral bas-normand repose essentiellement sur des fortifications passagères de campagne : retranchements et palissades, redoutes et batteries côtières. En 1686, 1694 et 1699, Vauban se rend sur place pour projeter la défense des ports de Dieppe, Honfleur, Carentan, La Hougue, Cherbourg, Granville et même du Mont Saint-Michel. Benjamin de Combes, ingénieur et marin, est nommé directeur des fortifications de Normandie en 1693 ; il met en place tout au long des côtes un réseau de corps de garde en dur (pierre) ou en bois.

Nicolas Faucherre est professeur d'archéologie et d'histoire de l'art du Moyen Âge à l'université d'Aix-Marseille. Membre du laboratoire d'archéologie médiévale et moderne en Méditerranée (UMR 7298 du CNRS). Après un doctorat sous la direction de Léon Pressouyre sur les premières citadelles royales françaises dans la transition à l'artillerie à poudre, il s'est spécialisé dans la fortification médiévale et classique, tant en France qu'en Méditerranée orientale, où il a dirigé plusieurs missions archéologiques sur des forteresses du Proche-Orient (Ani, Apamée de l'Oronte, Saône, Beaufort, Césarée), puis désormais en Inde et en Iran. Il assure également des missions d'expertise internationale pour ICOMOS et l'UNESCO.

Christine GOUZI : De Versailles à Mondaye : les modèles du décor de l'abbaye de Mondaye à la fin du XVIIe siècle et au début du XVIIIe siècle
Au XVIIe siècle comme au XVIIIe siècle, le grand décor conventuel normand emprunte souvent aux modèles parisiens religieux ou profanes. La proximité de Paris avec la Normandie, la circulation des peintres et des architectes expliquent en partie cet état de fait. L'abbaye de Mondaye n'échappe pas à cette règle, mais se présente comme un exemple particulier, notamment à cause de la présence d'un des membres de la famille Restout dans le monastère : l'architecte et décorateur Eustache Restout (1655-1743), beau-frère du peintre du roi Jean Jouvenet (1644-1717), établi à Paris dès 1661. Le décor de Mondaye est ainsi tributaire des grands exemples parisiens et versaillais, mais ces derniers sont toujours réinterprétés pour servir les normes de l'architecture prémontrée de la fin du XVIIe siècle.

Bibliographie
L'Architecture des Prémontrés : mélanges offerts au R.P. François Petit, Actes du Xe colloque du Centre d'études et de recherches prémontrées, 1984, Mondaye, Calvados, Amiens, CERP, 1985.
Jean Pelcoq, L'Abbaye de Mondaye, Caen, Imprimerie Colas, 1938 (2e édition).
Christine Gouzi, Jean Restout (1692-1768), peintre d'histoire à Paris, Paris, Arthena, 2000, 512 p.
Dominique-Marie Dauzet, Martine Plouvier (dir.), Actes du colloque international L'ordre de Prémontré au XVIIIe siècle, Centre d'Études et de Recherches prémontrées (CERP) [Caen et Mondaye, 20-22 septembre 2001], Berne, Peter Lang, 2011.
Christine Gouzi, "Une firme artistique dans la France de l'Ancien Régime : l'atelier d'Eustache Restout à l'abbaye de Mondaye", Actes du colloque international L'ordre de Prémontré au XVIIIe siècle, Centre d'Études et de Recherches prémontrées (CERP) [Caen et Mondaye, 20-22 septembre 2001], Berne, Peter Lang, 2011, p. 225-244.

Alain HUGON : La Normandie et la monarchie française : regards croisés sur les relations de la Province avec l'Ile de France (XVIIe-XVIIIe s.)
Les deux derniers siècles de l'Ancien Régime introduisent des changements dans les relations qu'entretiennent les autorités monarchiques et la province de Normandie. Avec l'achèvement du découpage des généralités, l'introduction et la structuration des intendances et des subdélégations, et les derniers soulèvements d'ampleur au milieu du XVIIe siècle, la réorganisation des structures administratives tout au long des 150 années qui suivent accompagne de profonds bouleversements économiques, sociaux et culturels dans la province. Ils ne sont pas sans conséquence sur l'histoire sociale et architecturale du bâti, de quelque nature qu'ils soient. Par cette communication, il s'agit de pointer la diversité et la nature des relations entre la Normandie et le centre du pouvoir politique.

Alain Hugon est professeur d'histoire moderne à l'université de Caen Normandie.
Publications
Naples insurgée. 1647-1648. De l'événement à la mémoire, PUR, Rennes, 2011, 408p. [trad. espagnole : La insurrección de Nápoles 1647-1648. La construcción del acontecimiento, Prensas de la Universidad de Zaragoza, Saragosse, 2014].
Philippe IV – Le siècle de Vélasquez, Payot, Paris, 2014, 500p. [trad. espagnole : Felipe IV y la España de su tiempo. El siglo de Velázquez, Barcelone, Crítica, 2015, 438p].
Éditions en collaboration avec
G. DÉSIRÉ DIT GOSSET, B. GARNIER, L. MAZIANE, L. RIDEL, Des galères méditerranéennes aux rivages normands. Recueil d'études en hommage à André Zysberg, Cahiers des Annales de Normandie, n°36, Caen, 2011, 568p.
A. BOLTANSKI (dir.), Les Noblesses normandes (XVIe-XIXe siècle), Colloque de Cerisy, PUR, Rennes, 2011.
S. HAFFEMAYER, Y. SORDET, C. VELLET (dir.), Images et révoltes dans le livre et l'estampe (XIV-XVIIIe), Catalogue de l'exposition Images et révoltes dans le livre et l'estampe XIVe-XVIIIe s., Bibliothèque Mazarine, 14 décembre 2016 - 17 mars 2017, Paris, Éditions des Cendres-Mazarine, 2016.

Yves LESCROART : Les hôtels particuliers de Rouen : entre diffusion des modèles parisiens et créations originales
Parlementaires et négociants ont édifié dans la ville de Rouen à l'époque classique de nombreux hôtels, dont une partie importante a été épargnée par les destructions de la Seconde Guerre mondiale. Dans le prolongement des recherches menées notamment par les chercheurs rouennais sous la direction d'Olivier Chaline sur l'histoire de cet habitat dans la topographie urbaine de Rouen, il convient d'approfondir ce qui appartient aux traditions architecturales locales et aux apports des modèles parisiens déclinés sous des formes renouvelées.

Yves Lescroart a été Conservateur des Monuments historiques de Normandie de 1976 à 2001, puis Inspecteur général des Monuments historiques en Alsace, Franche-Comté, Nord-Pas-de-Calais, puis Centre, Basse-Normandie et Champagne-Ardenne de 2001 à 2010. Il consacre une large part de ses travaux personnels au patrimoine normand.
Publications
"L'Hôtel du Haut-Doyenné à Lisieux", Monographie collective, 1985.
"Le château de Bénouville", Monographie collective, 1986.
"Le manoir en Pays d'Auge, évolution architecturale des logis de bois du XVe au XVIIIe siècle", Société royale des Antiquaires de Londres, 2002.
"La Place Stanislas et l'Hôtel de Ville de Nancy", Revue Monumental, 2005.

Viviane MANASE : La reconstruction de Dieppe après 1694 : entre idéal urbain et réalités
En 1694, la ville de Dieppe est presque entièrement détruite suite au bombardement perpétré par la flotte anglo-hollandaise (guerre de la Ligue d'Augsbourg). À l'initiative de Vauban, l'architecte Antoine De Ventabren reconstruit la cité, imposant aux habitants l'un des premiers règlements d'urbanisme français, avec de strictes servitudes constructives et décoratives. À une période où émerge un nouveau concept de ville, la reconstruction de Dieppe offre l'opportunité de tester certains principes d'urbanisme et d'organisation de l'habitat. Si la ville est pratiquement achevée vers 1720, l'exigence de façades uniformes avec entresol n'est plus de mise à partir de 1752, au profit d'un étage carré habitable, beaucoup plus en adéquation avec les réels besoins de la population. L'utopie de la ville idéale voulue par Vauban, avec ses rues identiques bordées par des façades rythmées par des séries d'arcades régulières, a dû céder le pas devant l'usage et les réalités quotidiennes des habitants.

Viviane Manase est Conservateur du Patrimoine — Inventaire du Patrimoine culturel - Région Normandie.
Publication
La reconstruction de Dieppe après la "grande bombarderie" de 1694, dans Actes du 3e Congrès Francophone d’Histoire de la Construction, Nantes, 21, 22 et 23 juin 2017, Paris, Picard (à paraître).

Claude MIGNOT : Balleroy et les échos normands d'un château de François Mansart
Le château de Balleroy bâti au sud-ouest de Bayeux sur les dessins de François Mansart entre 1631 et 1637 présente une composition pyramidante impressionnante, qui perfectionne le dessin proposé trois ans plus tôt pour le château du Plessis-Belleville près de Paris. Mansart en développe encore l'orchestration paysagère dans les années 1650. Cette réussite soutenue par le renom de Mansart a-t-elle eu des échos dans la province, ou les similitudes que l'on croit observer sont-elles seulement des analogies superficielles ? Tel sera l'objet de cette communication.

Claude Mignot a consacré de nombreuses études à l'architecture française au siècle de Louis XIII, notamment à Mansart.
Publications
François Mansart, le génie de l'architecture (dir avec Jean-Pierre Babelon), Gallimard, 1998.
François Mansart, un architecte artiste au temps de Louis XIII et de Louis XIV (avec Étienne Faisant et Joëlle Barreau), Le Passage, 2016.

Sophie POIRIER-HAUDEBERT : Jacques Basché, ingénieur-géographe des Ponts-et-Chaussées et architecte en Normandie
Originaire des environs de Chartres puis formé à l'école des Ponts-et-Chaussées, Jacques Basché (1728-1786) est envoyé en 1755 comme ingénieur géographe dans la généralité de Caen. Pourtant, en Normandie, il va surtout mener une carrière d'architecte qu'il terminera sous le titre d'architecte de Monsieur. Travaux de restauration, aménagements extérieurs ou constructions de châteaux, plusieurs chantiers de la seconde moitié du XVIIIe siècle portent sa signature. Le palais épiscopal de Coutances et le château de Boucéel à Vergoncey témoignent de l'influence, sur les premières réalisations de cet architecte, du modèle des maisons de plaisance diffusé par Jacques-François Blondel.

Bibliographie
"Jacques Basché, "géographe" des Ponts-et-Chaussés et architecte en Normandie", La revue de l'Avranchin et du Pays de Granville, n°386, mars 2001.
"Les maisons de plaisance dans la Manche aux siècles des Lumières 1710-1760", Revue de la Manche, Fasc. 173, janvier 2002.
"Les façades des châteaux du XVIIIe siècle dans le département de la Manche. La façade, un instrument de valorisation sociale", dans Construire, reconstruction, aménager en château en Normandie, Annales de Normandie, 2004.

Jeanne POTTIER : L'influence des Lumières sur les jardins normands du XVIIIe siècle au travers des cas de Thury-Harcourt et de Canon
Cette communication s'attachera à présenter deux exemples insignes des jardins pittoresques réalisés en Normandie au XVIIIe siècle, ceux aménagés autour des châteaux de Thury-Harcourt et de Canon (Calvados). Ces deux réalisations ont en effet l'intérêt d'être documentées, pour la première, par un traité sur l'art des jardins rédigé par le duc François-Henri d'Harcourt (1726-1802) et, pour la seconde, par d'abondantes sources encore conservées au château. Ces archives attestent que, tout comme le duc d'Harcourt, Jean-Baptiste Jacques Elie de Beaumont (1732-1786), seigneur de Canon, dirigea les moindres détails de l'élaboration de son jardin, depuis Paris, grâce à la correspondance qu'il entretenait avec ses mandataires locaux. Les deux domaines étaient aussi liés par un approvisionnement de plantes exotiques que les pépinières d'Harcourt envoyaient alors à Canon. Les deux châtelains normands, ayant de nombreuses similitudes par leurs activités et leurs goûts, adoptèrent la mode des jardins irréguliers, qui commençait alors à se répandre en France. En réaction au style classique du Grand Siècle, ces deux parcs sont les réceptacles des réflexions du XVIIIe, alors siècle des Lumières et de la sensibilité rousseauiste.

Jeanne Pottier est titulaire d'un Master 1 en Histoire, obtenu à l'université de Caen Normandie avec un mémoire sur les jardins des châteaux de Canon et de Thury-Harcourt préparé sous la direction de M. le professeur Alain Hugon.


SOUTIENS :

• Office universitaire d'études normandes (OUEN) | Université de Caen Normandie
• Direction régionale des Affaires culturelles Normandie (DRAC)
• Région Normandie
• Ville de Caen

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


REENACTMENT / RECONSTITUTION : REFAIRE OU DÉJOUER L'HISTOIRE ?


DU SAMEDI 22 SEPTEMBRE (19 H) AU SAMEDI 29 SEPTEMBRE (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



ARGUMENT :

La ferveur pour l'histoire s'étend aujourd'hui largement au-delà des cercles initiés et paroles consacrées. Elle prend notamment la forme de reconstitutions grandeur nature, en temps réel, d'événements à caractère historique : batailles, festivités, rites religieux ou civiques, ambassades, processions, repas, spectacles ou même modes de vie… En marge du discours scientifique (qui pourtant les nourrit) et surtout du discours institutionnel (dont pourtant elles s'inspirent), les initiatives de ces "reconstitueurs" ou performeurs attestent d'un rapport de réappropriation, voire de détournement, où les publics s'emparent de l'Histoire pour vivre une expérience sensible ou sensorielle, participative et immersive.

Rejouer l'histoire n'est pas un geste comme un autre, puisqu'à la faveur de la reconstitution, le temps se redéploie en cristallisant de nouveaux enjeux, entre commémoration, marchandisation, expérimentation et subversion. Ce que l'anglais nomme reenactment peine à trouver un équivalent en français, la traduction même du mot posant problème : remise en acte, réactivation, recréation, reconstitution, restitution…

L'objectif de ce colloque consiste à définir cet acte complexe et à cartographier ces pratiques diverses de reconstitution historique d'hier et d'aujourd'hui, depuis les exploitations mémorielles et récréatives jusqu'aux dispositifs scientifiques et artistiques, en passant par les avatars numériques, entre survivance du passé et acte de création imaginaire.

Largement ouvert aux expérimentations concrètes, il articulera ateliers, conférences, débats, tables rondes et projections autour de plusieurs thématiques structurantes. Une première séquence de travail permettra d'abord de distinguer usages anciens et pratiques contemporaines ; une seconde séquence interrogera les enjeux de production et de diffusion de cette "fabrique" d'histoires ; une troisième séquence étudiera les usages sociaux du Reenactment en fonction de leurs objectifs et implications, afin de mettre en évidence des points de tension entre différentes formes de médiation de l'Histoire.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Samedi 22 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Dimanche 23 septembre
PERFORMANCE ET HISTOIRE
Matin
Estelle DOUDET & Martial POIRSON : Cadrage, définition, périodisation, typologie
Guy SPIELMANN : Re(con)stitution, Reenactment, reconstruction, revival : enjeux et défis épistémologiques d'une démarche paradoxale

Après-midi
Atelier
Sur les costumes d'époque, théâtre, opéra, cinéma (avec exposition de costumes mannequinés), par Mickael BOUFFARD

Atelier récurrent
Guy SPIELMANN [avec la Compagnie Sapasousakas et les participants au colloque volontaires] : Mise en scène d'une parade de société (Collé ou Carmontelle) [avec restitution le dernier après-midi]

Soirée
Projection-Débat
Benjamin Lazar, Le Bourgeois Gentilhomme / Jean-Marie Villégier, Atys | Commentaires de Guy SPIELMANN


Lundi 24 septembre
RITES CIVIQUES ET RELIGIEUX D'HIER ET D'AUJOURD'HUI
Matin
Mémoires autochtones et histoires locales, table ronde avec :
Isabel YAYA McKENZIE : Ce que l'histoire fait au rituel. Les représentations de la capture du dernier Inca dans les Andes péruviennes
Mathieu VIAU-COURVILLE : Post-mémoire, Embodiment et Reenactment au Musée : continuités et reconstructions symboliques [intervention établie avec Karen WORCMAN]

Après-midi
Mémoires officielles et histoires instituées, table ronde avec :
Pascal BRIOIST : Les spectacles d'histoire de Léonard de Vinci à la cour de François Ier
Isabelle BARBÉRIS : Figures votantes : rejouer les bifurcations de l'histoire ou de la fable

Atelier récurrent
Guy SPIELMANN

Soirée
Atelier
Le self-défense des suffragettes, par Daniel JAQUET


Mardi 25 septembre
RECONSTITUTIONS HISTORIQUES : USAGES POPULAIRES ET SPONTANÉS
Matin
Captations mémorielles, table ronde avec :
Romain JOBEZ : Batailles sans guerre. Reconstitution de conflits sur les scènes allemandes et françaises (XIXe-XXe siècles)
Tamara KONDRATIEVA : Bolchevicks et Jacobins, une captation d'héritage ?

Après-midi
Exploitations mémorielles, table ronde avec :
Audrey TUAILLON DEMÉSY : L'histoire vivante médiévale : les tendances
Pauline BORD : Concilier Recherche et Reconstitution à destination du grand public. Le défi d'Histoire Retrouvée
Frédérique TROUSLARD : Une pédagogie du passé : l'action des associations

Antoine de BAECQUE : Rêver et refaire un festival : Cannes 1939, l'événement qui n'eut pas lieu. Uchronie, histoire fiction, événement avorté

Soirée
Atelier
Recherches et recréations des cosmétiques du début du XVIIIe siècle. Pour une approche de la médiation par les sens, par Frédérique TROUSLARD


Mercredi 26 septembre
LA FABRIQUE DES HISTOIRES : USAGES SAVANTS ET HISTORIOGRAPHIQUES
Matin
Atelier
La reconstitution scientifique des arts martiaux et de l'équitation médiévale et renaissante, par Daniel JAQUET

Après-midi
Dispositifs optiques, sonores, olfactifs, tactiles, gustatifs, table ronde avec :
Isabelle PARESYS : La Renaissance au cinéma : la question du costume
Aurélie MOUTON-REZZOUK : Voir, entendre, penser comme… Dispositifs d'échange symbolique et muséographie

Dispositifs immersifs et cultures numériques : protocoles ludiques et pédagogiques, table ronde avec :
Isabelle BACKOUCHE : De l'histoire à l'immersion sonore : l'expérience de Gens de la Seine
Jeffrey M. LEICHMAN : La Foire aux reenactments : problématiques de la restitution d'un théâtre du dix-huitième siècle par le biais du jeu vidéo
Thomas FACCHINI : Histoire et jeux vidéo : quand la guerre devient un jeu

Soirée
Projection-Débat
Peter Watkins, Culloden | Commentaires d'Antoine de BAECQUE


Jeudi 27 septembre
USAGES ARTISTIQUES ET CULTURELS
Matin
Dispositifs immersifs et cultures numériques : protocoles ludiques et pédagogiques (suite), table ronde avec :
Sophie RAUX : La restitution numérique du pont Notre-Dame, quels enjeux pour l'histoire des marchés artistiques ?
Patrick FRAYSSE : Rejouer le Moyen Âge avec les nouveaux dispositifs de médiation dits immersifs ou augmentés : entre renouvellement des représentations et performances documentaires

Après-midi
Anne BÉNICHOU : Disputer son rôle dans l'histoire : le reenactment dans les pratiques et les institutions de l'art contemporain [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Atelier
Reprise : "usure" et "renaissance" de l'œuvre performative, conférence-performance de Besnik HAXHILLARI & Flutura PREKA (The Two Gullivers)


Vendredi 28 septembre
USAGES ARTISTIQUES ET CULTURELS
Matin
Fictions d'histoire et archives vivantes, table ronde avec :
Estelle DOUDET : Histoires par personnages : les spectacles mémoriels dans la France médiévale
Martial POIRSON : Performances post-coloniales : entre déconstruction et remotivation des stéréotypes coloniaux

Estelle DOUDET & Martial POIRSON : Synthèse-conclusive, débats, restitutions, échanges

Après-midi
Atelier récurrent
Spectacle avec les participants du colloque volontaires. Parade de société et théâtre au château, suivi d'un débat animé par Guy SPIELMANN


Samedi 29 septembre
PASSAGE À L'ACTE
Matin
"HORS LES MURS" — AU MONT SAINT-MICHEL
• Accueil à l'entrée du site
• Visite proposée par Xavier BAILLY (Administrateur de l'abbaye du Mont-Saint-Michel)
Faire vivre un lien, l'histoire en actes, table ronde animée par Xavier BAILLY, avec François JEANNEAU (Architecte en chef des monuments historiques)
• Débat

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Isabelle BACKOUCHE : De l'histoire à l'immersion sonore : l'expérience de Gens de la Seine
La Ville de Paris a entrepris depuis plusieurs années de faire des bords de Seine un lieu de vie pour les Parisiens. Si ces nouveaux usages des rives sont propres au XXIe siècle, ils renvoient toutefois à l'histoire du fleuve. Pendant plusieurs siècles, il a été au cœur de la vie des Parisiens dans toute leur diversité. Vaste supermarché et gigantesque blanchisserie, lieu d'habitation comme place commerciale, la Seine était aussi un lieu de détente où il faisait bon se promener l'été et se distraire. Gens de la Seine est un parcours sonore dans lequel des personnages qui ont vécu et travaillé sur le fleuve content leur expérience aux Parisiens et aux touristes qui inscrivent leurs pas dans ceux des habitants de la capitale au XVIIIe siècle. Cette manière inédite de raconter l'histoire de Paris allie plaisir de l'expérience d'écoute, incarnation du passé le plus quotidien et respect d'une haute qualité scientifique. Elle a été conçue comme un projet citoyen : restituer aux chercheurs l'initiative de la production d'un savoir disponible pour le plus grand nombre.

Isabelle Backouche est directrice d'études à l'EHESS (CRH). Historienne, ses travaux portent sur l'histoire urbaine, en articulant transformations sociales et matérielles de la ville. Ses récentes enquêtes portent sur le terrain parisien, notamment sur les motivations de l'aménagement sous Vichy de l'îlot insalubre n°16 au sud du Marais (Paris transformé. Le Marais 1900-1980 : de l'îlot insalubre au secteur sauvegardé, Créaphis, 2016). Aujourd'hui, elle travaille sur le vaste transfert d'appartements des familles juives sous l'occupation dans la capitale (en savoir plus) et sur la Zone autour de Paris.
Publications
La Trace du fleuve. La Seine et Paris, 1750-1850, Éditions de l'EHESS, 2000 [rééd. 2016].
Aménager la ville. Les centres urbains français entre conservation et rénovation (de 1943 à nos jours), Armand Colin, 2013.

Isabelle BARBÉRIS : Figures votantes : rejouer les bifurcations de l'histoire ou de la fable
De Robert Hossein jusqu'à Yan Duyvendak, la mise en scène, et en action, d'un public votant joue la carte du re-examen de l'histoire (les procès rejoués par Hossein) ou bien de l'historicisation de la fable dramatique (Faust, Hamlet). Le monde parallèle du théâtre y concurrence de manière ambivalente l'histoire, en jouissant de son statut duplique de "fiction réelle". Le reenactment s'inscrit dans la tradition de la réécriture, mais avec l'agentivité spécifique de la scène, qui a un pied dans la fiction et l'autre dans la "non-fiction" (Frédéric Pouillaude). Ces remises en jeu sont également éclairantes des idéologies démocratiques qui se "rejouent", cette fois-ci de manière plus inconsciente, sur le terrain de l'art vivant.

Anne BÉNICHOU : Disputer son rôle dans l'histoire : le reenactment dans les pratiques et les institutions de l'art contemporain
À partir de la performance Two Undiscovered Amerindians Visit the West (1992-1994) de Coco Fusco et Guillermo Gòmez-Peña, du film qui en a été réalisé par Fusco et Paula Heredia, The Couple in the Cage (1993) et de l'exposition Re.Act Feminism 2. A Performing Archive (2011-2013), cette communication abordera la portée mémorielle et politique des reenactments en art contemporain. À travers eux, les artistes, les spectateurs et les professionnels des institutions muséales renégocient les représentations et les récits historiques, l'assignation des places que chacun y occupe, et la distribution des responsabilités et des pouvoirs dans leur élaboration, selon une dialectique complexe de l'archive et du vivant, du direct et du médiatisé, de la normativité et de l'agentivité (ou capacité d'agir). Quels sont les impacts de ces expériences sur les communautés et les institutions impliquées ? Participent-elles d'une mutation des rôles de l'art et des musées ?

Anne Bénichou est professeure d'histoire et de théorie de l'art contemporain et d'études muséales à l'université du Québec à Montréal. Ses recherches actuelles sur les nouvelles formes de transmission des œuvres éphémères et performatives et sur le reenactment ont donné lieu à l'ouvrage collectif Recréer/Scripter. Mémoires et transmissions des œuvres performatives et chorégraphiques contemporaines (Dijon, Les Presses du Réel, 2015), au numéro thématique "Refaire/Redoing" (Intermédialités. Histoire et théorie des arts, des lettres et des techniques, n°28-29, 2017), ainsi qu'à des articles dans Performance Research, Ligeia, Thema, Ciel Variable.

Pauline BORD : Concilier Recherche et Reconstitution à destination du grand public. Le défi d'Histoire Retrouvée
Créé officiellement en janvier 2017, la société Histoire Retrouvée s'est fixée comme but de reconstituer des événements historiques en respectant les arts et les techniques de l'époque choisie. Avec des lieux de prestige comme les châteaux de Fontainebleau, Rambouillet ou encore Breteuil, cette société assure la documentation historique, la scénographie d'événements reconstitués de même que leur mise en œuvre. Elle commercialise également des reproductions d'objets ou de broderies historiques à destination du reconstituteur. Cette communication analysera ce style d'événementiel ainsi que les démarches de travail utilisées.
Site internet de l'entreprise où sont présentées les différentes manifestations et les reproductions en vente : lhistoireretrouvee.com.

Doctorante à l'université de Lille 3, laboratoire IRHIS, Pauline Bord achève une thèse sur Jean Bâtard d'Orléans, sous la direction de Bertrand Schnerb. Pratiquant la Reconstitution depuis six ans, elle organise en 2015 la fête costumée du Retour de l'Hermione, et les Journées Louis XV en 2016. Elle crée, avec M. Hervé Serrurier, la société Histoire Retrouvée en janvier 2017. Elle en assure la présidence.

Estelle DOUDET & Martial POIRSON : Cadrage, définition, périodisation, typologie
Cette introduction générale propose un cadrage théorique de ce qu'il est convenu d'appeler reenactment (définitions, typologie, problématiques), à partir de la cartographie des initiatives contemporaines en France comme à l'étranger et d'un état des recherches sur le sujet, notamment dans le monde anglo-saxon. Elle cherche à remettre en perspective historique les formes de reconstitution, afin d'isoler les phénomènes de concordance et de discordance des temps avec les pratiques actuelles. Elle proposera une typologie des formes de reenactment, en le distinguant de formes connexes, telles que revival, réitération, reconstitution, restitution ou encore réactivation…

Estelle DOUDET : Histoires par personnages : les spectacles mémoriels dans la France médiévale
Le Moyen Âge joue aujourd'hui un rôle central dans les spectacles d'histoire, où il est souvent représenté comme le temps d'émergence des identités locales et nationales. Mais rejouer les grands moments du passé, réinterpréter l'histoire récente grâce au spectacle est aussi, et peut-être surtout, une pratique médiévale, attestée par la vogue du tournoi-jeu de rôle parmi la chevalerie européenne comme par les mystères à partir desquels les croyants ont réinvesti l'histoire chrétienne. Cette contribution propose d'observer le développement exponentiel du "rejeu" mémoriel entre 1450 et 1530, en particulier dans les villes voisines du royaume de France, des Pays-Bas méridionaux aux rives du Léman. À travers les histoires romaines grâce auxquelles les habitants de Lille pensent leur identité civique au miroir des héros antiques, les spectacles qui performent des sièges célèbres, comme celui d'Orléans remporté par Jeanne d'Arc, et les fêtes qui célèbrent régulièrement l'alliance des cités suisses, sont questionnés les enjeux esthétiques et sociaux de la performance d'histoire au seuil de la modernité et esquissée une histoire longue du reenactment en français.

Professeur de langue et de littérature française du Moyen Âge à l'université Grenoble Alpes et membre junior de l'Institut Universitaire de France, Estelle Doudet est spécialiste de la communication publique dans les régions de langue française au seuil de la modernité. Elle a consacré plusieurs livres à l'histoire des spectacles aux XIVe-XVIe siècles, dont Moralités et jeux moraux, le théâtre allégorique en français (Garnier, 2018). Elle s'intéresse en particulier aux enjeux des représentations de l'actualité et de l'histoire par le biais de la performance.

Thomas FACCHINI : Histoire et jeux vidéo : quand la guerre devient un jeu
Depuis une vingtaine d'années, de nombreuses sciences sociales se sont intéressés à ce nouveau média culturel de masse que sont les jeux vidéo. La guerre, quelles que soit les époques et les conflits, occupe une place prégnante dans les productions vidéoludiques. Il faut questionner le processus de "mise en jeu" de la guerre, c'est-à-dire les diverses façons dont les créateurs de jeu (professionnels ou amateurs) s'approprient un conflit et comment ils synthétisent un fait historique dans un espace vidéoludique selon les attentes des joueurs. Cela amène à étudier le rapport du jeu aux diverses temporalités (contexte historique évoqué et simulé par le jeu, temps d'une partie de jeu) et les multiples dilatations temporelles qui en découlent. Si les joueurs peuvent être sensibles à une représentation historique, ils sont aussi à la recherche d'une temporalité particulière.

Publication
"Guerres et jeux vidéo : représentations et enjeux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale", Amnis, 15 | 2016 [en ligne].

Patrick FRAYSSE : Rejouer le Moyen Âge avec les nouveaux dispositifs de médiation dits immersifs ou augmentés : entre renouvellement des représentations et performances documentaires
La visite théâtralisée des monuments, les ateliers de reconstitutions vivantes de l'histoire ou les jeux d'évasion à thématique historique sont aujourd'hui des formes de traduction du passé par une interprétation libre. Le spectacle historique offre une appréhension exaltée ou magnifiée du Moyen Âge qui permet d'atteindre l'histoire, le passé à travers des activités, une narration, des jeux. On a donc recours à d'autres types de discours que scientifique, à savoir mythologique et de divertissement. Notre propos est d'analyser ces moments où l'industrie du tourisme détourne le monument et son histoire en essayant de capter des signifiés de médiévalité. Le Moyen Âge est souvent résumé dans ces dispositifs en une image générique qui propose des décors éphémères, des costumes, un scénario, des personnages qui naviguent entre fiction et histoire afin d'augmenter la réalité des vestiges que les visiteurs peuvent voir et de nourrir les imaginaires. Cette réflexion sera fondée sur le personnage médiéval le plus documenté : Jeanne d'Arc, à partir d'un lieu privilégié : Rouen et ses 3 lieux d'accueil du public : l'historial Jeanne d'Arc dans le palais épiscopal derrière la cathédrale, le spectacle son et lumière touristique appelé Panorama XXL et la Tour Jeanne d'Arc qui accueille un jeu d'évasion. Dans chacun de ses lieux, les visiteurs sont invités à rejouer l'histoire en s'immergeant dans le décor d'un événement de la vie de Jeanne d'Arc (Historial et Panorama) ou dans une ambiance médiévalisante (le donjon). Nous pourrons nous demander quels choix sont opérés par ces acteurs de la médiation-spectacle pour communiquer le patrimoine médiéval. Quels stéréotypes du Moyen Âge sont véhiculés, de manière consciente ou pas ? Quel Moyen Âge est reconstruit ? Nous nous proposons d'apporter des éléments de réponse à partir de l'observation de dispositifs de médiation et de l'analyse de discours recueillis auprès d'acteurs du tourisme. Nous essaierons de rendre saillants les points de rencontres et les éventuels phénomènes d'écart, appréhendés à réception, entre histoire et fiction.

Patrick Fraysse est maître de conférences HDR en Sciences de l'Information et de la Communication, Université de Toulouse - IUT Paul Sabatier (Département Information Communication), EA 827, Laboratoire d'études et de recherches en sciences sociales (LERASS), Équipe Médiations en information et communication spécialisées (MICS).
Références bibliographiques
Amalvi Christian, 2002, Le Goût du Moyen-Âge, Paris, Boutique de l'Histoire.
Ferré Vincent (dir.), 2010, Médiévalisme, modernité du Moyen Âge, Paris, L'Harmattan.
Fraysse Patrick, Barthet Laure, 2018 (à paraitre), "Muret 2013, reconstitution d’une bataille médiévale méridionale oubliée", Revue Interrogations, n°26.
Fraysse Patrick, 2017, "Les mises en scène du Moyen Âge dans les fêtes populaires médiévales", Communication et Langages, n°191, p. 29-50.
Fraysse Patrick, 2012, "Illustrer Jeanne d'Arc dans le Midi : circulation des signes johanniques et échos toulousains', in Amalvi Christian & Deramond Julie (dir.), Jeanne d'Arc entre la terre et le ciel du Midi, Regards méridionaux sur la bonne Lorraine, Actes du colloque de Montpellier (10 et 11 avril 2012), Paris, Michel Houdiard Éditeur, p. 232-243.
Tuaillon Demésy Audrey, 2014, "L'histoire vivante médiévale : pour une ethnographie du "passé contemporain"", Ethnologie française, Vol. 44, n°4, octobre-décembre, p. 725-736.

Romain JOBEZ : Batailles sans guerre. Reconstitution de conflits sur les scènes allemandes et françaises (XIXe-XXe siècles)
La croissante popularité du reenactement dans les salles de spectacle européennes pose la question du rapport du théâtre à l'histoire et de la valeur heuristique de cette pratique scénique. Nous chercherons à y répondre en considérant son archéologie à partir d'études de cas situées aux confins des arts circassiens et du théâtre : L'Histoire d'un drapeau, drame militaire d'Adolphe d'Ennery (1811-1899) présenté au Cirque Olympique à Paris en 1865, et Europa in Flammen (L'Europe en flammes), spectacle du cirque Sarrasini joué pendant la Première Guerre Mondiale. En douze tableaux, d'Ennery reconstitue la geste napoléonienne à travers ses grandes batailles, comme par exemple la prise du pont d'Arcole ou Waterloo. Le cirque Sarrasini, pour sa part, présente au public allemand sous forme d'attraction les armes les plus modernes utilisées dans le conflit mondial. Ces deux spectacles censés exalter les vertus du patriotisme permettent de traiter de la question de la représentation de la guerre, entre écriture scénique de l'histoire et mise en spectacle de l'actualité.

Romain Jobez, maître de conférences HDR en études théâtrales à l'université de Poitiers, est professeur associé à l'université de Bochum. Ses recherches portent sur le théâtre allemand et sur l'histoire des spectacles.
Dernières publications
(Avec Christina Schmidt) "Du "théâtre post-migratoire" à la société théâtrale ouverte : l'exemple du Maxim-Gorki-Theater", Alternatives théâtrales, n°133, 2017, p. 24-26.
"Répertoire, mise en scène et avenir proche du théâtre allemand", Théâtre/Public, n°225, 2017, p. 23-31.
"La rose brisée : Charlotte Ackermann, vedette mort-née du théâtre allemand des Lumières", in Le Sacre de l'acteur, Florence Filippi et alii (dir.), Paris, 2017, p. 223-232.

Tamara KONDRATIEVA : Bolchevicks et Jacobins, une captation d'héritage ?
Avant 1917, la Russie était loin d'être le seul pays où l'on se référait à la Révolution française pour résister à l'oppression. Après 1917 en revanche, la situation en Russie a cela d'extraordinaire, que l'imaginaire issu de la Révolution française obtient ici une fonction dans la vie réelle, un poids politique et social inconnus ailleurs. Un exemple de reenactement apparaît alors. Lénine, bien que prévenu des impossibilités historiques par la Révolution française, sait aussi l'utiliser. En s'engageant dans la Nouvelle politique économique en 1921, il pense ouvrir des possibilités nouvelles par l'auto-thermidorisation. Staline, convaincu qu'il ne peut pas contourner les impossibilités de l'Histoire incarnées dans l'expérience française, met fin à la NEP pour éviter Thermidor. Cette intervention autour des enjeux de Thermidor en Russie propose de réfléchir sur la dimension performative des analogies historiques.

Tamara Kondratieva, professeur émérite des Universités et membre associé du Centre d'études des mondes russe, caucasien et centre-européen (cercec/ehess/cnrs).
Publications
Bolcheviks et Jacobins. Itinéraire des analogies, 2e édition, Paris, Les Belles Lettres, 2017.
"La fin des révolutions : Raskolnikov et Robespierre", Cahiers du Monde russe, 58/1-2, 2017.
"1917, la révolution à la française ou à la russe ?", in L'idée russe face aux idées occidentales (à paraître).
"La Révolution française et la révolution d'Octobre dans le discours historiographique", à paraître en russe dans les Actes du colloque "100 ans de la Grande révolution russe" (Moscou, 9-11 octobre 2017).

Jeffrey M. LEICHMAN : La Foire aux reenactments : problématiques de la restitution d'un théâtre du dix-huitième siècle par le biais du jeu vidéo
VESPACE (Virtual Early modern Spectacles and Public, Active and Collaborative Environment) est une collaboration internationale de chercheurs en histoire du théâtre, littérature et préservation numérique du patrimoine, qui renouvelle la reconstitution des systèmes culturels disparus par le biais du jeu vidéo. L'objet de notre travail est le théâtre de la Foire Saint-Germain pendant la régence de Philippe d'Orléans (1715-1722), dont l'importance a été sous-estimée dans l'Ancien Régime. Nous sommes confrontés à plusieurs objets de reconstitution, allant des bâtiments et espaces intérieurs aux spectacles représentés, en passant par les interactions des spectateurs entre eux et avec la scène. Afin d'arriver à une recréation efficace d'un public d'antan, et de contraindre les joueurs à évoluer selon les règles de comportement de l'époque, une modélisation du monde sensible et social du théâtre de la Foire s'avère nécessaire et pleine d'écueils. En misant sur des interfaces corporelles et émotives que permettent les technologies de la réalité virtuelle, ce projet donne lieu à des produits de recherche inhabituels : ici, le jeu représente notre argument, qui se joue au lieu de se lire. La "lectrice" est plongée au sein d'une expérience affective et sensorielle rythmée par le déroulement du divertissement théâtral. En même temps, elle participe à la recherche, chaque campagne ajoutant des données sur l'efficacité des théories de reconstruction que représentent les environnements visuel, sonore, et social du jeu. Ce paradigme représente un départ important dans l'organisation des recherches en sciences humaines et dans la collaboration avec les chercheurs en informatique. Le projet VESPACE soulève des questions urgentes quant à la fiabilité des représentations, et appelle à une conceptualisation prenant en compte non seulement le désir d'attirer et de retenir l'attention des joueurs, mais aussi les exigences de rigueur scientifique de la recherche. Le "London Charter for the computer-based visualization of cultural heritage" souligne l'importance des normes internationales dans la reconstitution informatique du patrimoine historique et le danger des représentations de plus en plus convaincantes sur le plan sensoriel, qui risquent de passer pour "la réalité" chez les utilisateurs naïfs. Nous appelons à fonder un design "en profondeur" (deep design) qui permette à l'utilisateur d'accéder aux métadonnées, recherches, et théories alternatives qui sont autant de cautions visant à restaurer la posture critique du spectateur-participant au théâtre de la Foire du XVIIIe siècle.

Aurélie MOUTON-REZZOUK : Voir, entendre, penser comme… Dispositifs d'échange symbolique au musée
Nous nous proposons, à partir d'un ensemble d'études de cas (en particulier les expositions Dans la peau d'un soldat, de la Rome antique à nos jours, Musée de l'Armée, Paris, 12 octobre 2017 - 28 janvier 2018, et Corps Rebelles, Musée des Confluences, Lyon, 13 septembre 2016 - 5 mars 2017) de réfléchir à ce qu'impliquent les dispositifs muséographiques "participatifs" qui proposent au visiteur de prendre la place de, d'adopter la posture de, d'endosser les frusques de, d'entrer dans la peau d'un autre (le soldat, le danseur, le peintre, le modèle, le badaud, le scientifique…) — fut-ce de façon sommaire, très brève, ou métaphorique. En dehors de l'hypothèse qui est faite d'une facilitation et d'une intensification de l'apprentissage et de l'appropriation des "savoirs" sur le plan cognitif, il convient en effet d'interroger plus avant les présupposés et les enjeux de ces formes institutionnalisées du jeu de rôles, tant au regard des missions des institutions muséales que sur le plan symbolique, anthropologique et politique. Qu'est-ce qui se "joue", se "change", ou s'"échange" ? Pour quoi faire ? À quel prix ?

Aurélie Mouton-Rezzouk est maître de conférences en Études Théâtrales à l'Institut d'Études Théâtrales de l'université Sorbonne-Nouvelle Paris 3, et membre de l'Institut de Recherches en Études Théâtrales. Ses recherches portent tant sur les Arts du Spectacle — lieux et institutions, publics, patrimoines — que sur les musées et expositions qui leur sont consacrés, et qui ont fait l'objet de sa thèse (Exposer le théâtre, 2013) — et, plus largement, sur ces territoires communs au musée, à l'exposition, aux arts du spectacle, à la performance, et à la littérature. Elle co-anime avec François Mairesse et Flore Garcin-Marrou le programme de recherche "Ces lieux où l'on pense. Scène, Musée Bibliothèque".
Dernières publications
"L'opéra baroque sur la scène muséale, ou l'opéra autrement", en collaboration avec Julie Deramond, Culture et Musées, n°29, juin 2017.
"Remédiation. Les arts du spectacle dans l'exposition, un art de la manipulation", dans Corps/esprit/objet : Réinventons nos collections, Dominique Dewind et Nicole Leclercq (dir.), TLA, Performing arts resources #32, New York, 2016.
"Exposer le théâtre ?", Bernadette Dufrêne, Jérôme Glicenstein (dir.), Histoires d'Expositions, Paris, Hermann, 2016.
Le musée par la scène, avec Pauline Chevalier et Daniel Urrutiaguer, à paraître aux éditions Seconde Époque.

Isabelle PARESYS : La Renaissance au cinéma : la question du costume
Si l'on considère la production cinématographique française, ni le costume historique, ni même la représentation de la Renaissance sur les écrans n'ont spécialement attiré les chercheurs. Or les costumes, comme les décors, sont des artefacts visuels indispensables à la localisation de l'action dans un temps historique donné. Ils provoquent chez le spectateur un sentiment d'altérité et de distance temporelles, que le spectateur ait ou non une culture des modes anciennes. La communication abordera la façon dont le cinéma français costume la Renaissance au regard des représentations que l'on a de cette période et spécifiquement comment le costume l'habille pour l'écran.

Isabelle Paresys est maîtresse de conférences en histoire au département Culture de l'université de Lille, laboratoire IRHiS-UDL/CNRS. Ses travaux portent sur l'histoire culturelle des vêtements et de la mode à la Renaissance et à l'époque moderne ainsi que sur le costume historique au cinéma (pro.univ-lille.fr/isabelle-paresys/).
Publications
Paresys Isabelle, "Avec ou sans fraise. La Renaissance fait son cinéma", in La Renaissance en Europe dans sa diversité. Tome 3 : Circulation des hommes, des idées et des biens, héritages, Actes du Congrès international organisé à Nancy (10-14 juin 2013), dir. par Michel Deshaies, Lioudmila Chvedova, Stanislaw Fiszer et Marie-Sol Ortola, Nancy, Université de Lorraine, 2015, p. 439-454.
Paresys Isabelle, "De l'habit au costume : L'image du vêtement comme marqueur de temporalité", in À perte de vue. Les nouveaux paradigmes du visuel, éd. par Sophie Raux et Daniel Dubuisson, Dijon, Presses du Réel, 2015, p. 195-208.
Paresys Isabelle, "Corps, apparences vestimentaires et identités en France à la Renaissance", Apparence(s), 4 | 2012 [en ligne].
Boucher Shazia, Anne-Claire-Laronde et Isabelle Paresys (éd.), Plein les Yeux ! Le spectacle de la mode / A Feast for the Eyes : Spectacular Fashions, Milano, Silvana Editoriale SPA, 2012.
Paresys Isabelle et Natacha Coquery (éd.), Se vêtir à la cour en Europe (1400-1815), Villeneuve d'Ascq, Centre de recherche du château de Versailles, Institut de recherches historiques du Septentrion et CEGES Université de Lille 3 (collection "Europe du Nord-Ouest"), 2011.

Martial POIRSON : Performances post-coloniales : entre déconstruction et remotivation des stéréotypes coloniaux
La polémique autour de l'installation–performance Exhibit B du sud-africain Brett Bailey à Paris en 2014 a mis en évidence, non seulement la fracture coloniale dans l'ordre de la représentation et le système d'emplois typés sur lequel repose encore aujourd'hui le théâtre occidental, mais encore les effets de réception malencontreux de spectacles cherchant à faire revivre la situation d'emprise coloniale. Cette contribution a un triple objectif : interroger la vocation heuristique de protocoles de reconstitution de spectacles exotiques (Slide Show, Freak Show, Ethnic Show, zoos humains, exhibitions), afin de mettre en évidence l'efficacité performative de stratégies destinées à faire éprouver les mécanismes d'exploitation des corps et de dépossession des récits ; identifier les effets pervers de ces dispositifs critiques susceptibles de remotiver les stéréotypes ethniques qu'ils sont supposés dénoncer ; jauger de tels gestes artistiques de réparation symbolique à l'aune de leurs potentialités émancipatrices.

Martial Poirson est professeur d'histoire culturelle, de littérature et d'études théâtrales à l'université Paris 8 et visiting professor en Cultural Studies à New York University. Il a coordonné plus d'une trentaine d'ouvrages et de revues sur le théâtre, la littérature, le cinéma, les musées, l'économie politique et les cultures populaires. Il est également commissaire d'exposition et dramaturge.
Publications
Spectacle et économie à l'âge classique, Classiques Garnier, 2011.
Les Audiences de Thalie, Classiques Garnier, 2013.
Économie du spectacle, Puf, 2013 (avec I. Barbéris).
Politique de la représentation, Champion, 2014.
Théâtre en temps de crise (à paraître en 2018).

Sophie RAUX : La restitution numérique du pont Notre-Dame, quels enjeux pour l'histoire des marchés artistiques ?
Sous l'Ancien Régime, le pont Notre-Dame à Paris était surmonté de deux rangées de maisons délimitant une rue pavée, bordée de boutiques, abritant une soixantaine de marchands pour la plupart liés au commerce d'art et de luxe. À certains moments de son histoire, il a réuni d'importantes concentrations de marchands de tableaux. Parmi ceux-ci, s'est distingué dans la première moitié du XVIIIe siècle Edme-François Gersaint, pour qui Jean-Antoine Watteau peignit, en 1720, la fameuse Enseigne de Gersaint. L'intervention rendra compte des résultats d'une équipe de recherche interdisciplinaire ayant eu pour but de faire progresser l'étude de ce tableau singulier dans son environnement urbain par le recours aux technologies numériques. Immersive et interactive, cette restitution en images de synthèse permet de mieux saisir la dimension spectaculaire et provocatrice de cette enseigne devenue l'une des grandes icônes de l'histoire de l'art.

Sophie Raux est professeur d'histoire de l'art à l'université de Lyon et est responsable de l'axe "Art, Images, Sociétés" au sein du Laboratoire de Recherche Historiques Rhône Alpes (UMR 5190). Elle prépare actuellement la publication d'un ouvrage collectif consacré à la restitution du pont Notre-Dame.
Publication
Lotteries, Art Markets, and Visual Culture in the Low Countries, 15th-17th c., Brill, 2018.
Co-direction d'ouvrges
Moving Pictures. Intra European Trade in Images 16th-18th c., Brepols, 2014.
À perte de vue, les nouveaux Paradigmes du visuel, Presses du réel, 2015.

Frédérique TROUSLARD : Une pédagogie du passé : l'action des associations
Les associations relevant de la pratique de la reconstitution occupent une place singulière dans le large champ de la reconstitution. Le modèle associatif permet un grande diversité d'objets, d'organisations et de pratiques. De la recherche, à l'expérimentation et à la médiation, toutes les pratiques reposent sur la coopération des membres de l'association dans le cadre défini par ses statuts. La prise en compte d'une approche sociologique du modèle associatif dans le champ de la reconstitution permet d'éclairer des pratiques hors du champ académique. Leur adhésion à des valeurs, leur connaissances et savoir-faire déterminent les différents modes de médiation proposés tant au sein de l'association que vers leurs publics. Déambulations, ateliers pratiques, conférences, expositions, démonstrations, roleplay… quels acteurs et modèles pour quels publics ?

Frédérique Trouslard a été pendant 6 années présidente de l'association Le ministère des modes dont elle est actuellement membre du conseil d'administration. De formation supérieure en histoire des arts, elle a accompagné la mise en place et anime les ateliers pédagogiques pour les membres de l'association. Elle élabore et coordonne des projets de médiation pour le grand public en partenariat avec des structures muséales ou culturelles. En 2017, elle a créé HISTOR, une structure de conseil et de formation spécialisée en histoire de la mode. Elle accompagne la réalisation de leurs costumes des bénévoles dans le cadre de reconstitutions historiques. Elle anime des ateliers pour le grand public et les adultes (mode et parfums au XVIIIe siècle). Elle a une approche pratique de la reconstitution historique : histoire des techniques, costume, cosmétique et cuisine.

Audrey TUAILLON DEMÉSY : L'histoire vivante médiévale : les tendances
L'histoire vivante (qui englobe la reconstitution historique et les Arts martiaux historiques européens) est une activité de loisir contemporaine qui donne à voir des réactivations du passé dans le présent, sous l'angle de pratiques corporelles. Il s'agit, ici, de s'intéresser à l'histoire vivante médiévale sur le territoire français, à l'aide d'une approche ethnographique réalisée entre 2009 et 2017. Plus spécifiquement, la question se pose de savoir comment les re-créations d'objets enclenchent une immersion dans le passé. Les vêtements, mais aussi les armes, facilitent le passage d'un monde (contemporain) à un autre (historique). En outre, ces re-créations (matérielles et techniques) sont aussi des outils donnant lieu à un sentiment d'appartenance à une communauté créée par les pratiquants d'histoire vivante, organisant des savoir-faire et induisant des savoir-être. Suivant cette logique, la corporéité en jeu permet de comprendre comment l'apparence, la présentation de soi, mais aussi l'usage fait de son corps en situation de mise en action de l'Histoire, font partie d'un système qui produit un dépaysement temporel et organise l'activité. Au-delà, ces recréations du passé interrogent l'imaginaire en jeu dans ces loisirs. Si l'accent est mis sur la rigueur historique et les expérimentations réalisées, l'imaginaire de la conformité à l'histoire demeure un élément central pour comprendre les pratiques contemporaines d'histoire vivante.
Bibliographie indicative
Chaize Pierre-Alexandre, 2013, "Des mots aux gestes : le rôle du texte et du vocabulaire dans l'expérimentation historique", Revue STAPS, Vol. 101, pp. 103-118.
Fournier Laurent Sébastien, 2008, Le "petit patrimoine" des Européens, Paris, L'Harmattan.
Gapps Stephen, 2002, Performing the Past : a Cultural History of Historical Reenactements, Thèse de Doctorat en Philosophie, Sydney, Université de Sydney.
Jaquet Daniel, 2016, "Entre jeux de mains et jeux de mot : faire l'expérience ou expérimenter les gestes d'après les textes techniques. Reproduire ou répliquer des objets…", Revue suisse d'histoire / Itinera, Vol. 39, pp. 11-18.
Jenkins Henry, 2013, La Culture de la convergence : des médias au transmédia, trad. fr., Paris, Armand Colin [2006].
Schwint Didier, 2002, Le Savoir artisan. L'efficacité de la mètis, Paris, L'Harmattan.

Audrey Tuaillon Demésy, docteure en sociologie, est maître de conférences en STAPS à l'université de Franche-Comté. Ses travaux, selon une approche socio-ethnographique, portent sur les mondes imaginaires mis en vie et les activités ludiques "alternatives", situées entre subculture et monde social (reconstitution historique, quidditch, etc.).
Publications
Tuaillon Demésy Audrey (2013), La re-création du passé : enjeux identitaires et mémoriels, Besançon, PUFC.
Tuaillon Demésy Audrey (2014), "L'histoire vivante médiévale : pour une ethnographie du "passé contemporain"", Ethnologie française, Vol. 44, n°4, pp. 725-736.
Tuaillon Demésy Audrey (2017), "Le quidditch moldu. De l'imaginaire à la réalité", Questions de communication, Vol. 31, pp. 393-413.
Tuaillon Demésy Audrey (2017), "La cuisine des reconstitutions historiques : réinventer l'alimentation du passé", Anthropologie et société, Vol. 41, n°3, à paraître.

Mathieu VIAU-COURVILLE : Post-mémoire, Embodiment et Reenactment au Musée : continuités et reconstructions symboliques [intervention établie avec Karen WORCMAN]
Quelles relations les musées entretiennent-ils avec les formes de mémoire culturelle fondées sur la réactivation et la réinterprétation de la mémoire individuelle et collective ? En s'appuyant sur les concepts de post-mémoire (M. Hirsch) et de construction sociale du trauma culturel (J. Alexander), nous présentons ici deux expositions récentes, au Québec et à São Paulo, qui s'écartent de la perspective historique traditionnelle au profit des expériences vécues. Comment les musées peuvent-ils soutenir les collectivités dans leurs efforts pour faire face aux souffrances sociales ? Par ailleurs, si l'on conçoit l'espace d'exposition comme davantage qu'un simple dispositif de commémoration, comment les expositions peuvent-elles renforcer l'engagement des collectivités et promouvoir la reconstruction sociale ? Nous tenterons de répondre à ces questions en tenant les concepts d'embodiment et de reenactment comme constitutifs du travail collectif de mémoire. Seront plus précisément examinées les notions de post-mémoire, soit la relation d'une génération à la précédente lorsque cette dernière a été témoin d'un trauma culturel et collectif, et celle de la construction sociale du trauma culturel. Nous viserons à illustrer l'utilité de ces cadres conceptuels à l'heure où les musées sont appelés à réconcilier les liens intergénérationnels et, ce faisant, à réaffirmer leur rôle et leur engagement dans la société contemporaine.

Mathieu Viau-Courville est coordonnateur de recherche à l'université du Luxembourg. Il était auparavant chargé de recherche au Musée de la civilisation, Québec. Ses publications récentes en muséologie et patrimoine incluent des articles dans Museum International, Museum and Society, Pasajes de pensamiento contemporáneo et Revista d'etnologia de Catalunya ainsi que dans le récent collectif Patrimoine et identités locales, L'Harmattan. Il est membre du conseil de rédaction de la revue Museum International publiée par le Conseil international des Musées (ICOM).

Karen Worcman est fondatrice et directrice du Museu da Pessoa, São Paulo, premier musée numérique du Brésil fondé en 1991. Historienne et chercheure rattachée au groupe Diversitas de l'université de São Paulo, elle est l'auteure, avec Joanne Garde-Hansen, de l'ouvrage Social Memory Tecnhology : Theory, Practice, Action (Routledge, 2016). Elle est membre (Fellow) des regroupements Ashoka et Wellbeing.org.

Isabel YAYA McKENZIE : Ce que l'histoire fait au rituel. Les représentations de la capture du dernier Inca dans les Andes péruviennes
Chaque année, au cours des festivités votives de Santa Rosa de Lima, le village de Chiquían (Pérou) est le théâtre d'une représentation tendue. Dans les rues, pendant de longues heures, les hommes et les femmes qui ont la charge, à tour de rôle, de la célébration, mettent en scène la capture du dernier souverain Inca par les troupes de Francisco Pizarro (1532). À l'instar de plusieurs communautés dispersées des hauts plateaux andins, Chiquían perpétue la représentation de cette confrontation historique dans un cadre ritualisé. Ces collectivités, pour beaucoup éloignées des espaces formels de production du savoir, façonnent ainsi leur propre trame narrative de l'invasion espagnole. Au delà de la question de l'origine de ce topos, cette conférence propose d'interroger les constructions vernaculaires de l'histoire à partir d'une ethnographie réalisée en 2017. Il s'agira de mettre en lumière les modalités de transmission de cette mémoire historique, de dégager les affects que suscite sa mise en acte, et d'éclairer les enjeux locaux qui gouvernent le choix des acteurs sociaux dans leur formulation du passé.

Historienne, Isabel Yaya McKenzie est pensionnaire de la Fondation Thiers, chargée de recherche temporaire du CNRS depuis 2016. Rattachée au Laboratoire d'anthropologie sociale, ses recherches proposent une anthropologie historique du politique dans les Andes. Ses publications portent sur la production, les usages et les enjeux du savoir historique, les dispositifs hégémoniques et l'articulation entre organisation sociale et logiques d'action.


ATELIERS :

Recherches et recréations des cosmétiques du début du XVIIIe siècle. Pour une approche de la médiation par les sens, par Frédérique TROUSLARD

Le développement d'outils numériques prend une part importante dans les actions de médiation scientifiques et culturelles. Ces approches privilégient dans un environnement virtuel la vue et l'ouïe. Mais quelle place pour une approche concrète et sensorielle ? De la recherche, à l'expérimentation et à la médiation, je vous présenterai la démarche, le matériel, les cosmétiques recréés dans le cadre d'un projet autour des cosmétiques parfumés d'après Le Parfumeur françois, qui enseigne toutes les manières de tirer les odeurs des fleurs et de faire toutes sortes de compositions de parfums… par le Sr Barbe, parfumeur (Lyon, 1693).

Frédérique Trouslard a été pendant six années présidente de l'association Le ministère des modes dont elle est actuellement membre du conseil d'administration. De formation supérieure en histoire des arts, elle a accompagné la mise en place et anime les ateliers pédagogiques pour les membres de l'association. Elle élabore et coordonne des projets de médiation pour le grand public en partenariat avec des structures muséales ou culturelles. En 2017 elle a créé HISTOR, une structure de conseil et de formation spécialisée en histoire de la mode. Elle accompagne la réalisation de leurs costumes des bénévoles dans le cadre de reconstitutions historiques. Elle anime des ateliers pour le grand public et les adultes (mode et parfums au XVIIIe siècle). Elle a une approche pratique de la reconstitution historique : histoire des techniques, costume, cosmétique et cuisine.


Reprise : "usure" et "renaissance" de l'œuvre performative, conférence-performance de Besnik HAXHILLARI & Flutura PREKA (The Two Gullivers)

Inspiré directement de l'œuvre de Marina Abramovic, ainsi que de notre expérience de la reprise de son œuvre pour laquelle nous possédons la permission légale de neuf de ses performances, nous allons parler de l'"usure" et de la "renaissance" de l'œuvre performative et de son rapport avec le théâtre. Il s'agit d'une réflexion théorique et pratique, sur les effets que le temps produit sur la performance, le temps qui efface certains traits et en accentue d'autres. À travers des opérations de répétitions, de reprises et de renouvellements, nous voulons découvrir et mettre en évidence le noyau de l'œuvre performative qui résisterait au temps et à l'oubli. Pour appuyer notre réflexion, nous allons parler de notre re-enactment de Nightsea-Crossing de Marina Abramovic & Ulay ainsi que de la reprise de notre propre performance Transparent Travel (2004-2018). Tout au long de notre communication, il y aura des démonstrations de reprises d'actions performatives pour et avec le public présent.

Nés en Albanie, Besnik Haxhillari & Flutura Preka (The Two Gullivers), ont étudié les arts visuels à Tirana, Lausanne, Berlin et à Montréal (PhD à UQÀM). Depuis 1998 ils travaillent en duo sous le nom d'artiste The Two Gullivers. Ils ont présenté leur travail performatif à la Biennale de Venise (1999), à Hamburger Bahnhof Berlin (2000), à la Biennale de Pékin (2005), à VIVA Art Action (2006, 2010) à Montréal, à la Galerie Leonard & Bina Ellen, Montréal (2013) et au Musée national des beaux-arts du Québec (2016). Ils ont fait partie de : Installation Art in the New Millenium (2003), East Art Map (2006), Marina Abramovic : The Artist is Present (2010).

Besnik Haxhillari est professeur au Département de philosophie et des arts à Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR). Il s'intéresse au processus de création et à la génétique de l'art de la performance à travers le dessin préparatoire.

Flutura Preka est artiste-chercheure, membre du groupe de recherche URAV à UQTR. Ses recherches portent sur les enjeux de re-enactment en performance et en art contemporain.


BIBLIOGRAPHIE :

• MIRC Sébastien (dir.), Les cahiers du jeu vidéo : La guerre, Vol. 1, Châtillon, Édition Pix'n Love, 2008.
• NEITZEL Sönke & WELZER Harald, Soldats : combattre, tuer, mourir, Procès-verbaux de récits de soldats allemands, Paris, Gallimard, 2013 [2011].
• RUFAT Samuel & TER MINASSIAN Hovig, Les jeux vidéo comme objet de recherche, Paris, Questions théoriques, 2012.


SOUTIENS :

• EA 1573 "Scènes du monde, création, savoirs critiques" (Labex Arts H2H) | Université de Paris 8
• UMR 5316 "Litt&Arts", composante Imaginaire et Socio-Anthopologie | Université Grenoble Alpes
• Institut universitaire de France
• Abbaye du Mont-Saint-Michel

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


LE TRAVAIL EN MOUVEMENT

ORGANISATIONS, FRONTIÈRES, RECONNAISSANCES


DU JEUDI 13 SEPTEMBRE (19 H) AU JEUDI 20 SEPTEMBRE (17 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Émilie BOURDU-SZWEDEK, Michel LALLEMENT, Pierre VELTZ, Thierry WEIL


ARGUMENT :

Depuis quelques années, les indices d'une vaste recomposition du travail n'ont cessé de se multiplier. Outre la révolution numérique dont on commence à percevoir et à anticiper les nombreux effets, il faut compter avec de nouvelles formes de gestion des activités productives qui en appellent à toujours plus d'engagement au travail, de responsabilités sociales, de collaborations horizontales… À l'image des transformations qui affectent les lieux comme les temps des pratiques professionnelles, ce sont par ailleurs les frontières même du travail qui sont aujourd'hui en train de bouger.

Le colloque rassemblera dirigeants d'entreprise, directeurs des ressources humaines, syndicalistes, universitaires, acteurs publics ainsi que toutes celles et ceux intéressés par le thème du travail et de ses transformations autour de trois interrogations : 1) Quelles sont les nouvelles pratiques productives et les nouvelles formes d'organisation du travail ? 2) Comment se transforment les frontières du travail ? 3) Quelles sont les implications de ces changements pour les modes de reconnaissance au travail, du travail et par le travail ?

Pour aborder toutes ces questions, le programme sera établi sur la base de communications ou de tables rondes suivies de débats, d'ateliers et de discussions autour de témoignages et de représentations du travail, par exemple cinématographiques. Les participants pourront proposer des thèmes d'atelier et décideront le premier jour à quel atelier ils souhaitent contribuer. Sont également prévues des visites d'entreprises locales illustrant des formes intéressantes d'agencement de collectifs de travail.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Jeudi 13 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Vendredi 14 septembre
Matin
LES MOTS ET LES CHIFFRES DU TRAVAIL — QUI SONT LES "TRAVAILLEURS" AUJOURD'HUI ?
Michel LALLEMENT : Le travail et ses normes
Maryse SALLES : Langages au travail : quelques enjeux
Serge VOLKOFF : Les parcours professionnels dans le "paysage" des conditions de travail et de leurs changements : approche par trois études quantitatives

QUEL TRAVAIL POUR LA SOCIÉTÉ DEMAIN ?
Louise GAXIE : Animation d'une réflexion en petits groupes pour élaborer collectivement une carte mentale autour de la thématique du travail

Après-midi & Soirée
Suite du travail sur la carte mentale et restitution des groupes

Michèle SEBAG : Qualité de la vie au travail et santé économique des entreprises : étude des relations causales

Propositions de thèmes d'atelier
Sophie BERNARD : Travail et plateformes numériques
Jean-Yves BOULIN : Le futur du temps de travail ou le temps de travail du futur ?
Olivier CARLAT : Mesure du travail : une opportunité pour le dialogue social
Isabelle MAGNE & Dimitri PLEPLÉ : Philosophie de l'entreprise libérée : observations et questionnements
Jean-Michel SAUSSOIS : Représentation du travail au cinéma

Bourse aux ateliers (chacun choisit ceux auxquels il veut participer) et première séance d'atelier


Samedi 15 septembre
Matin
LES NOUVELLES FORMES DU TRAVAIL : AUTONOMIE, RESPONSABILISATION, PARTICIPATION
Yves CLOT : Responsabilisation, autonomie, participation [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Jean-Yves BONNEFOND : Instituer le dialogue sur la qualité du travail : un enjeu de performance et de santé. L'exemple du dispositif DQT à l'usine Renault de Flins
Bertrand BALLARIN : La responsabilisation appliquée à l'entreprise Michelin

Après-midi
Séance de posters des doctorants

LES NOUVELLES FORMES DU TRAVAIL : INDIVIDUALISATION ET COOPÉRATION DANS LE TRAVAIL À L'ÈRE DU NUMÉRIQUE
Luca PALTRINIERI & Muriel PRÉVOT-CARPENTIER : Individualisation et coopération dans les entreprises de plateformes
Isabelle BERREBI-HOFFMANN : Intelligence artificielle et modes d'organisation du travail : enjeux, expérimentations, individuation
Flore BARCELLINI : Industrie du futur et robotique collaborative. Quelle place du travail et de ses transformations ?

Soirée
DU REVENU UNIVERSEL À L'ACCOMPAGNEMENT UNIVERSEL ?
Table ronde animée par Danielle KAISERGRUBER, avec Jean-Baptiste de FOUCAULD (Le revenu d'existence, planche de salut ou remède empoisonné de la société du travail ?) et Yannick VANDERBORGHT


Dimanche 16 septembre
Matin
LES EXPÉRIMENTATIONS LOCALES DANS LE DOMAINE DE L'EMPLOI, DE LA FORMATION ET DU TRAVAIL
Pierre MÉHAIGNERIE : Peut-on, par des politiques locales, agir pour surmonter nos faiblesses nationales : chômage, dépenses publiques, formation professionnelle, simplifications administratives… Comment ? Exemple de Vitré Communauté
Hervé RENAULT : Premiers retours sur l'expérimentation "Territoires zéro chômeur" dans le Calvados (ATIPIC Emplois Nouvelle Génération)
Jean-Marie BERGÈRE : Plaine Commune, Castres, Bassin minier, trois expérimentations soutenues par la Fondation de France

Après-midi
TRANSFORMATIONS DU TRAVAIL ET TERRITOIRE
Table ronde animée par Danielle KAISERGRUBER, avec Olivier BOUBA-OLGA (Dynamiques territoriales, éloge de la diversité), Frédéric REY (Les recompositions territoriales des régulations du travail) et Hervé DEFALVARD (Économie sociale et solidaire dans les territoires)

Soirée
Ateliers thématiques


Lundi 17 septembre
Matin
COMMENT FORMER AUX COMPÉTENCES REQUISES PAR LE TRAVAIL DEMAIN ?
Pierre FALZON : Développer les compétences d'arbitrage
Jean-Luc MOLINS : Quelle formation à l'ère numérique ?
Vivien ROUSSEL : "Le faire" dans la formation : l'exemple de fablabs d'insertion à Gonesse et à Montreuil

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
LES RÉCITS ET LES REPRÉSENTATIONS DU TRAVAIL
Jean-Michel SAUSSOIS : La figure du travail au cinéma


Mardi 18 septembre
Matin
QUELS CADRES JURIDIQUES POUR LES NOUVELLES FORMES DE TRAVAIL ?
Table ronde animée par Yves VEYRIER, avec Xavier BEAUDONNET (Les apports possibles de la négociation collective), Josépha DIRRINGER (Les transformations du droit social dans une économie numérique), Bénédicte RAVACHE et Valérie VAN GOETHEM

Après-midi
"HORS LES MURS"
Visites de la Coopérative d'Activité et d'Emploi Crescendo (Antenne de Saint-Lô), de l'Entreprise Donaldson (Domjean) ou de La p'tite Coop (Lingreville)

Soirée
LES RÉCITS ET LES REPRÉSENTATIONS DU TRAVAIL
Laurence DECRÉAU : Le bonheur au travail dans le roman contemporain


Mercredi 19 septembre
Matin
LES FRONTIÈRES DE L'ENTREPRISE : L'ENTREPRISE ÉTENDUE ET SA RESPONSABILITÉ
Mathilde FRAPARD : Les accords d'entreprise transnationaux : un modèle de régulation sociale en évolution

Le dialogue social international, table ronde animée par Guillaume DELAUTRE, avec Mathilde FRAPARD, Kostas PAPADAKIS, Denis PENNEL et Bernard THIBAULT

Après-midi
Ateliers thématiques (suite)


Jeudi 20 septembre
Matin
Restitutions des ateliers thématiques
Synthèse du colloque par les doctorants et jeunes chercheurs : Gabriel BOUDARD, Louise FAUVARQUE-GOBIN, Xiao HUANG, Isabelle MAGNE et Louise ROBLIN
Discussion générale

Après-midi
Tables rondes avec les cadres du Conseil départemental de la Manche — Animation : Sylvain ALLEMAND & Christine BACHELEZ
1) Nouvelles technologies, nouveaux usages, avec Philippe BOBLET, Cédric DOLET, Agnès JUGÉ et Jean-Baptiste de MAISTRE
2) Métiers de demain, formation et insertion, avec Perrine COURBARON, Émilie DESPLANCHES, Éric DUJARDIN et Christophe GELAND

DÉPARTS


PRESSE / MÉDIAS :

• "Qualité de vie des salariés et santé économique des entreprises, quelle relation ?", entretien avec Michèle SEBAG réalisé par Sylvain ALLEMAND [en ligne sur le site de L'EPA Paris-Saclay].


INTERVIEWS RÉALISÉES PAR LA FABRIQUE DE L'INDUSTRIE :


SOUTIENS :

• Bureau International du Travail (BIT)
• Fabrique de l'Industrie
• Fondation Gabriel Péri
• Fondation de l'Académie des technologies
• Veolia
• Chaire "Futurs de l'industrie, du travail et de l'innovation" | Mines-Paristech


PARTENARIAT :

• Association nationale des DRH (ANDRH)

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


L'USAGE DES AMBIANCES
UNE ÉPREUVE SENSIBLE DES SITUATIONS


DU MARDI 4 SEPTEMBRE (19 H) AU MARDI 11 SEPTEMBRE (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Didier TALLAGRAND, Jean-Paul THIBAUD, Nicolas TIXIER

Colloque à l'initiative de l'Unité de recherche de l'ESAAA et de l'équipe CRESSON (UMR AAU)


ARGUMENT :

Les ambiances et les atmosphères sensibles se prêtent à une grande diversité d'usages, que ce soit dans le domaine de l'art, de l'urbain ou des sciences sociales. Comment les ambiances contribuent-elles à mettre les situations ordinaires à l'épreuve du sensible ? En quoi ouvrent-elles de nouvelles pistes en matière de pratique artistique, d'expérimentation méthodologique ou d'exploration théorique ? Qu'en est-il d'une socio-esthétique située, attentive aux percepts et aux affects qui imprègnent nos milieux de vie et infusent les sensibilités contemporaines ?

De telles questions traverseront le colloque selon une triple exigence : d'une part, une attention particulière sera portée aux échanges, apports réciproques et questionnements communs entre le monde de l'art et celui des sciences sociales ; d'autre part, il s'agira d'initier une rencontre, d'ouvrir un dialogue inédit avec la pensée anglo-saxonne en la matière, mettant en résonance et en discussion l'approche des ambiances et celle des atmosphères ; enfin, l'usage des ambiances sera passé aussi bien au filtre des enquêtes et des théories qu'à celui des pratiques effectives et des expériences situées. Les journées seront organisées de manière à alterner activité réflexive et expérimentations concrètes, à mettre en partage des expériences autant qu'à mettre en débat des arguments.

D'une certaine manière, l'usage des ambiances conduit à expérimenter une nouvelle forme de colloque, entre discussion scientifique et expérimentation artistique. Amorcée par une virgule matinale produite par des doctorants, chaque journée alternera des communications suivies de débats, interventions et tables rondes avec des propositions esthétiques produites par des jeunes artistes pour se conclure en soirée par de petites formes performatives.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mardi 4 septembre
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Mercredi 5 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Maïlys TOUSSAINT : Chronique du quotidien à la Villeneuve de Grenoble

L'USAGE DES AMBIANCES
Didier TALLAGRAND, Jean-Paul THIBAUD & Nicolas TIXIER : Introduction
Gonçalo M. TAVARES : Lieux, corps, littérature | conférence-lecture – Traduction : Joana TEULE

Moment sensible | Présentation
Projection de Paris Port d'André Sauvage (1928), avec une composition sonore originale de Giuseppe GAVAZZA

Après-midi
QUELLES FORMES DE LA SENSIBILITÉ MODERNE ? | Animation : Céline BONICCO-DONATO
Nia PERIVOLAROPOULOU : Des ambiances urbaines au cinéma
Philippe SIMAY : La ville-pharmakon : vers une thérapeutique des ambiances urbaines [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Moment sensible | Présentation
Léo BAUDY

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Alexandre COSTANZO : Benjamin | lecture


Jeudi 6 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Vanessa STASSI : Récit auto-ethnographique d'une métamorphose urbaine, le cas de la Petite Ceinture de Paris

AMÉNAGISTE DE L'AMBIANCE
Laurent DEVISME : Vertige de l'usage

Moment sensible | Présentation
Florence SCHMITT

Après-midi
PASSAGES DU SENSIBLE | Présentation — Animation : Pascal AMPHOUX
Pierre LAFON : De l'expérience de la vacuité et de l'éphémère dans la pratique de l'architecture
Alexander RÖMER : "Faire ensemble" (ou bien le passage de l'action éphémère au temps long du projet)
Jean STERN : L'instant sur place

Moment sensible | Présentation
Dorian DEGOUTTE

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Stephen LOYE : Le "\vɛʁ\noir" | projection


Vendredi 7 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Gwendoline L'HER : Les mesureurs de la ville. Récit d'une balade collective de cartographie de la pollution de l'air à Rennes

QUEL DEVENIR DE LA SENSIBILITÉ CONTEMPORAINE ? — Animation : Anne BOSSÉ
François J. BONNET : Monde-Signe et Monde-Gouffre
Marc BREVIGLIERI : Soulèvement

Moment sensible | Présentation
Quentin LAZZARESCHI

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Hommage à Jean-Yves PETITEAU avec la présentation de Dockers à Nantes. L'expérience des itinéraires (esaaa éditions, Ensa Nantes, 2018). En présence de Bernard RENOUX


Samedi 8 septembre
JOURNÉE ANGLOPHONE — Traduction : Sophie PROVOST
Matin
Virgule matinale | Présentation
Ryma HADBI : Chronique d'une vie dans une cité des années 30

AMBIANCES VS ATMOSPHERES ? — Animation : Ola SÖDERSTRÖM
Olivier LABUSSIÈRE : Ambiance, an introductory experience to our ordinary environment
Derek McCORMACK : Atmospheres and the elemental

Moment sensible | Présentation
Joana TEULE

Après-midi
SOME MODES OF EXISTENCE OF ATMOSPHERES (QUELQUES MODES D'EXISTENCE DES AMBIANCES) — Animation : Damien MASSON
Friedlind RIEDEL : Moods and Modes. Thinking Atmosphere through Music
Izabela WIECZOREK : Atmospheres in formation : affective thresholds, immersive fields and active boundaries

Author (Derek McCORMACK) Meet critics (Rainer KAZIG & Gretchen SCHILLER)

Moment sensible | Présentation
Hedi Ali MESTIRI

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Julien CLAUSS & Giuseppe GAVAZZA | création sonore


Dimanche 9 septembre
JOURNÉE ANGLOPHONE — Traduction : Sophie PROVOST
Matin
Virgule matinale | Présentation
Sarah VAN HOLLEBEKE : La ville sous tensions. Repenser l'observation des divisions de l'urbain

WHAT DO YOU MEAN BY AFFECT ? (QU'ENTENDEZ-VOUS PAR AFFECT ? — Animation : Niels ALBERTSEN
Paul SIMPSON : The Ambiguity of Affect
Tonino GRIFFERO : What an atmospheric feeling can do ? Emotional games and critical distance

Moment sensible | Présentation
Jérémy LANCHON & Marion RAIMBAULT (Collectif La Meute)

Après-midi
HOW TO SENSITIZE INTERIOR SPACE ? (SENSIBILISER L'ESPACE INTÉRIEUR ?) — Animation : Bruno QUEYSANNE
Marc WINZ : Ambiances urbaines and atmospheres in research on the city-psychosis nexus
Emmanuel DOUTRIAUX : Affordances de l’ambiance / Architectures du commun

Dialogue : Jean-François AUGOYARD et Jean-Pierre PÉNEAU

Moment sensible | Présentation
Diane AUBRUN

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Naïm AÏT-SIDHOUM : Une fiction dans le parc | projection


Lundi 10 septembre
Matin
Virgule matinale | Présentation
Juste PECIULYTE : On interior atmospheric staging. Design example

DES FORMES SECONDES — Animation : Naïm AÏT-SIDHOUM
Conversation avec Pierre-Damien HUYGHE [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Moment sensible | Présentation
Ophélie CARPENTIER

Après-midi
DES AMBIANCES DE PENSÉE | Présentation — Animation : David ZERBIB
Pauline NADRIGNY : Écouter, penser : Thoreau, Ives et l'ambiance de la forêt
Noëlle BATT : Plasticité conceptuelle. Des vertus du flou, du vague, du mal délimité ou de l'indéterminé pour l'exercice de la pensée
Thierry MOUILLÉ : L'ambiant rotatif, en oui bémol et non dièse

Moment sensible | Présentation
Laura POUPPEVILLE

Soirée
Petite forme performative | Présentation
Jean-Marc CHAPOULIE : Re:re-Méditerranée | projection

The Party


Mardi 11 septembre
Matin
CLÔTURE : L'USAGE DES AMBIANCES
Restitution performée du Workshop "Design & espace"
Restitution dialoguée artistes / jeunes chercheurs
Quels dialogues entre art et ambiance ?, débat avec Marc BREVIGLIERI, Bruno QUEYSANNE, Joana TEULE et David ZERBIB

Après-midi
DÉPARTS


PRESSE / MÉDIAS :

• "Retours du colloque à Cerisy", par Maïlys TOUSSAINT [en ligne sur le blog Ambiances architecturales & urbaines du laboratoire CRESSON (UMR Ambiances Architectures Urbanités) | 30 octobre 2018].


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Niels ALBERTSEN
Niels Albertsen, social scientist (origin political science), professor emeritus at the Aarhus School of Architecture, Denmark. Research into urban and social theory, architectural and design theory, the sociology of the architectural profession, the sociology and philosophy of art. Head of the Department of Landscape and Urbanism (2003-2011), Co-director of the Centre for Strategic Urban Research (2004-2015).
Publication
"Atmosphere : Power, Critique, Politics. A conceptual analysis" in Nicolas Rémy & Nicolas Tixier (eds.), Ambiances, tomorrow, Volos, 2016.

Pascal AMPHOUX
Architecte et géographe. Professeur à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes. Activité indépendante de praticien et de consultant sur de nombreux projets architecturaux, urbains et/ou environnementaux (Bureau CONTREPOINT, Projets urbains, Lausanne). Chercheur au Centre de Recherches sur l'Espace Sonore et l'Environnement Urbain (CRESSON, École d'Architecture de Grenoble, UMR CNRS). Expert auprès de diverses institutions suisses, françaises ou européennes et notamment membre du conseil scientifique "Passages" à l'Institut pour la Ville en Mouvement (VEDECOM, Paris). Auteur de nombreux ouvrages et publications scientifiques portant sur l'environnement sonore et urbain, et de façon plus spécifique, sur les rapports entre la pratique du projet, l'esthétique paysagère et les méthodes des sciences sociales.

Jean-François AUGOYARD
Jean-François Augoyard est Directeur de recherche CNRS honoraire. Avec une formation en philosophie, sociologie, urbanisme et musicologie, il enseigne d'abord à l'Éducation Nationale puis entreprend une carrière de chercheur et d'universitaire. Ses travaux principaux portent sur les pratiques quotidiennes (marche, écoute), l'action artistique et l'expérience esthétique en milieu urbain. Fondateur du Centre de Recherche sur l'Espace sonore (1980) il a été co-fondateur, en 1992, du laboratoire "Ambiances architecturales et urbaines" et d'une formation doctorale sur le même thème. Outre quatre ouvrages (dont deux traduits en anglais et italien), il a publié de nombreux chapitres, articles et communications. Professeur ou conférencier invité en Europe, Chine, Amérique du Nord et du Sud, il a enseigné régulièrement dans tous les cycles universitaires à Vincennes, Paris X, Grenoble (Université des SHS et ENSAG).

Noëlle BATT : Plasticité conceptuelle. Des vertus du flou, du vague, du mal délimité ou de l'indéterminé pour l'exercice de la pensée
À partir du théorème de von Fœrster, présenté par Henri Atlan et Benny Shanon et qui énonce la nécessité d'un certain degré d'indétermination pour un bon fonctionnement des systèmes complexes, on argumentera, comme l'ont fait Peirce, Wittgenstein, Ingarden, Marcuse, Iser ou Lofti Zadeh, sur le fait qu'un certain degré d'indétermination conceptuelle peut être bénéfique à l'exercice de la pensée. C'est le cas, par exemple, quand il s'agit de penser l'articulation de systèmes qui semblent à première vue incompatibles. C'est ainsi qu'ont procédé Mireille Delmas-Marty et Jean-François Coste pour traiter de l'articulation des Droits de l'Homme et des différents systèmes juridiques nationaux, ou encore le peintre Francis Bacon lorsqu'il entreprend d'expliquer comment il brouille la logique de la représentation convenue en traçant des marques au hasard, "une sorte de diagramme" dont sortira finalement le tableau ; de même quand le logicien Charles Sanders Peirce conçoit l'idée d'états intermédiaires ou naissants qui forment une continuité entre la détermination et l'indétermination ; sans oublier l'usage fait par Deleuze et Guattari, à différents moments de leur parcours philosophique, du concept de "zone d'indiscernabilité", qu'il s'agisse de penser une "linguistique chromatique" (dans Mille Plateaux) ou la nature de la sensation dans l'œuvre d'art (dans Qu'est-ce que la philosophie ?).

Noëlle Batt est professeur émérite de littérature américaine et de théorie de la littérature à l'université Paris VIII. Elle a dirigé de 1984 à 2013 le Centre de Recherche sur la Littérature et la Cognition, et la revue TLE (Théorie, Littérature, Épistémologie) publiée par les Presses universitaires de Vincennes. Elle a publié de très nombreux articles de théorie et de critique littéraire, particulièrement dans le domaine des rapports transdisciplinaires entre littérature, sciences et philosophie (philosophie deleuzienne en particulier). Elle est intervenue en janvier 2018 dans le colloque : "Quand la forme devient substance. Puissance des gestes, intuition diagrammatique et phénoménologie de l'espace", sur le thème : "La dimension diagrammatique de l'écriture littéraire : un formalisme dynamique inscrit dans la sensorialité du langage".
Publications
"Penser par le diagramme" (dir.), TLE, n°22, 2004.
"Kairos, Mâ, Corn… Le langage artistique ou l'art de la jointure ouverte", La Relation, Paris, Michel Houdiard Éditeur, 2008.
"Composition, composition…", dans "Jeux et Enjeux du texte", TRANSATLANTICA, mai 2014 [en ligne].

Céline BONICCO-DONATO
Céline Bonicco-Donato, philosophe, est maître-assistante en sciences humaines et sociales à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble. Chercheuse au CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architectures, Urbanités). Elle développe une approche politique des ambiances urbaines dans les sociétés néo-libérales afin de cerner l'une des modalités contemporaines de l'esthétisation du politique.
Dernier ouvrage
Une archéologie de l'interaction, Paris, Vrin, 2016.

François J. BONNET : Monde-Signe et Monde-Gouffre
L'enjeu de cette communication est d'exposer les deux pôles antagonistes de l'expérience sensible du monde. L'un de ces pôles rayonne autour de la détermination pan-signifiante du monde en tant que monde construit, le second, au contraire, signale le sensible tapi sous le seuil : l'infra-sensible. De l'un à l'autre de ces pôles, se déploient, en dégradé, tous les devenirs de l'expérience sensible, de l'expérience panique à la perception surcodée anesthésiée.

François J. Bonnet, né en 1981, membre du Groupe de Recherches Musicales de l'Institut National de l'Audiovisuel (Ina GRM) depuis 2007, en est le responsable depuis 2018. Théoricien, il est également compositeur, plasticien et producteur sur France Musique de l'émission L'Expérimentale.
Publications
Les mots et les sons. Un archipel sonore, L'éclat, 2012.
L'infra-monde, MF édition, 2015.
Après la mort, L'éclat, 2017.

Anne BOSSÉ
Anne Bossé, architecte et géographe, enseignante à l'école nationale supérieure d'architecture de Paris Malaquais et membre de l'UMR CNRS AAU équipe CRENAU. Ses travaux interrogent les espaces du public, entre dimension matérielle et dimension politique, et les hybridations architecturales et urbaines liées aux processus migratoires.
cv.archives-ouvertes.fr/anne-bosse

Marc BREVIGLIERI : Soulèvement
Qu'est-ce que le trait naissant d'un souffle insurrectionnel ? Comment un regard posé sur la respiration, comme relation primordiale au monde, vient-il mettre en perspective un espace infra et proto-politique de partage, autant qu'une amplitude existentielle ? Comment les composantes climatiques de l'espace commun (turbulences, pulsations cosmiques, ennuagements atmosphériques, fusion symbiotique, etc.), qui parfois plongent leurs racines dans le sol de la colère, éveillent-elles des champs affectifs venant menacer l'ordre établi et prédisposent-elles à des gestes ascensionnels et extensionnels, des soulèvements ? Mais notre communication ira plus loin : quel rapport l'espace urbain occidental contemporain entretient-il avec le soulèvement ? Et poser une telle question permettra sans doute d'interroger certaines propriétés phénoménologiques et certaines dimensions épistémiques sur lesquelles repose cet espace, de méditer ses perspectives normalisatrices sur la qualité de vie, ses manières d'évaluer cette dernière, son axe de fondation ethnocentrique, son modèle politique et moral implicite, ses limites d'inclusivité et pour finir son univers existentiel spécifique.

Marc Breviglieri est professeur à la Haute École Spécialisée de Suisse Occidentale (HETS-Genève) et chercheur au Centre de recherche Ambiances Architectures Urbanités (CNRS). Ses thèmes de recherche touchent aux configurations et aux aménagements variés de l'habitation humaine, aux apprentissages de la vie commune, aux dimensions liant corps et espace et enfin aux questions d'ordre affectif, éthique et politique posées par l'expérience du soin. Il développe une sociologie d'inspiration phénoménologique nourrie par l'ouverture de perspectives méthodologiques liées à l'image (photographie-vidéo).
ies-geneve.academia.edu/MarcBreviglieri

Laurent DEVISME
Laurent Devisme est professeur des ENSA dans le champ SHS. Il enseigne plus particulièrement les études urbaines à l'ENSA Nantes. Chercheur rattaché à l'UMR AAU, ses travaux de recherche relèvent principalement d'une approche ethnographique de la fabrique urbaine. Il est également impliqué dans la discussion des théories urbaines contemporaines et dans les approches visant à cerner l'expressivité urbaine.
Publications récentes
L'architecture et l'urbanisme au miroir des formations (codirection avec Claude Cohen), Cahiers RAMAU, n°9, Éditions de la Villette, 2018.
"Ressorts et ressources d'une sociologie de l'expérience urbaine", in Sociologie et Sociétés, Vol. XLV, n°2, Automne 2013, pp 21-44.

Emmanuel DOUTRIAUX : Affordances de l'ambiance / Architectures du commun
Dans le prolongement d'un travail de recherche sur les Conditions d'air des architectures du contemporain (doctorat 2015), seront examinées les libéralités (potentielles) des ambiances, en ce que, à l'abri de couverts d'une certaine dimension, elles peuvent mettre en jeu l'exercice de communs d'une certaine nature.

Emmanuel Doutriaux est architecte, enseignant (Ensa Paris Val de Seine) et chercheur (Evcau). Son domaine de recherche est celui des ambiances, comprises comme situations construites (atmosphères et enveloppes) potentialisant des perceptions sensibles, des relations et des actions interindividuelles qui relèvent du commun. Auteur d'environnements domestiques et collectifs (foyers de travailleurs, refuges pour sans-abris), il participe aussi à la conception d'expositions d'art et d'architecture, et à des œuvres scéniques. Contributeur à des ouvrages de théorie et de critique, à des revues spécialisées et à des médias généralistes, il co-anime le groupe informel de recherche "Polygonale", comprenant architectes et artistes, enseignants et chercheurs.

Tonino GRIFFERO : What an atmospheric feeling can do ? Emotional games and critical distance
Atmosphere is an intersubjective and holistic feeling, more a spatial state of the world than a very private psychic state. For this reason, it is mine not because I possess it, but because it concerns me and often deeply involves me. Since it precedes analysis and influences the situation of the perceiver, resisting in some cases (the prototypical ones) any conscious attempt at projective adaptation or epistemic correction, it gives life to involuntary felt-bodily processes and, also as an outstanding example of quasi-thing, authoritatively modulates the predimensional space whose presence we feel. However, we need to better understand what kind of power and specific authority an atmosphere has, what its role in a pathic aesthetics, whether every practice generating atmospheres should be regarded as a manipulative one, and finally whether acquiring a better atmospheric "competence" (both as producers and perceivers) we can really learn how not to be grossly manipulated by these vague but very strong feelings.

Tonino Griffero is Full Professor of Aesthetics at the University of Rome "Tor Vergata" and editor, among others, of the book series "Atmospheric Spaces" (Mimesis International, Milan).
Full bibliography
2021.dottoratostoriaefilosofia.lettere.uniroma2.it/tonino-griffero/
atmosphericspaces.files.wordpress.com/2017/11/a-i-word.pdf
Most recent books
Atmospheres. Aesthetics of Emotional Spaces, Routledge, London-New York, 2014.
Il pensiero dei sensi. Atmosfere ed estetica patica, Guerini, Milan, 2016.
Quasi-Things. The Paradigm of Atmospheres, Suny, Albany, N.Y. 2017.

Pierre-Damien HUYGHE : Des formes secondes
Je discuterai l'idée que les ambiances sont nécessairement des résultats. Quelques-unes au moins relèvent d'architectures inachevées, voire, en un certain sens, manquantes. Et peuvent être, en conséquence, formées en second temps par des opérations qui ne sont pas architecturales au sens le plus habituel du terme, mais qui le sont cependant si l'on veut bien admettre que : 1) tout ce qui peut être fait en second n'est pas inévitablement secondaire, 2) le donner forme a pu être au moins un temps défini, par Sullivan par exemple, comme "l'expression" même de l'architecture ou comme l'affaire d'une architecture qui ne serait pas seulement "élémentaire". Parmi ces opérations, paradoxalement peut-être, il y a le cinéma, une façon en tout cas de passer à une sorte d'espace-temps supplémentaire. J'en donnerai quelques exemples. Parmi les enjeux de toute cette réflexion : une critique de la notion de non-lieu.

Pierre-Damien Huyghe, professeur à l'université Paris 1-Panthéon-Sorbonne, est l'auteur d'une quinzaine d'ouvrages, tous de philosophie de l'art et des techniques.
pierredamienhuyghe.fr
Publications
Modernes sans modernité, Lignes, 2009.
Le cinéma avant après, De l'incidence, 2012.
Art et industrie, Ré-édition Circé, 2015.
À quoi tient le design, De l'incidence, 2014.
Contre-temps, B 42, 2017.

Rainer KAZIG
Rainer Kazig, géographie humaine de formation, est chargé de recherche CNRS au sein de l'UMR Ambiances Architectures Urbanités, équipe CRESSON à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble. Ses recherches portent actuellement sur des ambiances et l'esthétique ordinaire.
Publication
Kazig, R. ; Masson, D. ; Thomas, R. (2017), "Atmospheres and Mobility. An Introduction", in Mobile Culture Studies. The Journal, 2017 (3), pp. 7-20.

Olivier LABUSSIÈRE : Ambiance, an introductory experience to our ordinary environment
This intervention considers the notion of urban ambience and attempts to characterise its generative dimension separately from the growing social demand for conditioned atmospheres (supermarkets, subways, etc.). Following the work of Gilles Deleuze, this paper revises the idea of perception as an activity of knowledge and focuses on it as an aesthetic experience. This is a process that utilises the notions of measure and rhythm. Ordinary perception would consist of a process of adjusting our knowledge to our lived environment, a case in which the measure is major and the rhythm is minor — or a classic process of recognition. Perception is also a fruitful field for aesthetic experiences, lived in daily situations in which the rhythm would become major and the measure minor. Our assumption is that Venice’s ambiences, as Proust describes them, can be traced to this outburst of the synthesis of perception : Measure fails to build an object, rhythm falls into a proliferative perceptual experience, and imagination no longer serves the purpose of comprehension but instead produces a very expressive space-time without any concept. The chapter builds on these notions (measure, rhythm) to discuss the idea of ambience as an introductory experience to our ordinary environment.

Olivier Labussière is a researcher in Geography at the French National Scientific Research Centre (CNRS). He is a member of the Pacte Social Sciences Research Centre (Grenoble, France) where he leads the interdisciplinary "Environments" research group. His research interests lie in the area of political ecology and geography of energy resources. He is developing an experimental workshop on visual media and documentary film.
Publication
Energy Transition. A sociotechnical inquiry, Palgrave, 2018 (in coll. with A. Nadaï).

Pierre LAFON : De l'expérience de la vacuité et de l'éphémère dans la pratique de l'architecture
Les pratiques du paysage de l'architecture et dans une certaine mesure certaines tendances de l'art contemporain, font aujourd'hui largement appel à des approches dites conceptuelles. Ces approches fondées sur une surévaluation de notre pensée discursive sollicitent notamment notre cerveau gauche qui génère l'illusion d'une séparation de notre être avec le monde où nous vivons. Dans ce contexte comment pouvons nous envisager une pratique dans la prise en compte de l'inséparabilité de l'être et de l'univers et la prise en compte de notions fondamentales comme la vacuité, l'interdépendance et l'impermanence des phénomènes ? Nous examinerons alors différentes modalités pour une approche expérimentale, factuelles et holistique de notre pratique, au delà de la pensée et dans l'activation d'un rapport au présent dans un monde vécu comme impermanence. Avec l'expérience que toute observation modifie ce qui est observé, nous pouvons nous interroger sur des notions d'inséparabilité et de synchronicité entre sujet et objet. L'architecture sera ici considérée comme l'une des formes les plus évoluée de l'art de la vacuité, susceptible de générer une "esthétique vivante" de l'éphémère.

Après une formation à l'École des beaux arts de Paris (Peinture et sculpture), Pierre Lafon est diplômé architecte DPLG à l'Unité pédagogique d'architecture n°6 en 1977. Professeur à l'école d'art de Rennes entre 1987 et 2017 il enseigne la scénographie et l'environnement dans une approche phénoménologique et holistique. L'agence d'architecture "Les ateliers Pierre Lafon" (anciennement sarl LDLV), se consacre à des recherches et des actions dans les domaines trans-disciplinaire du paysage, des infrastructures et de l'architecture. Entre 2009 et 2016 l'agence développe un important programme de transformation d'un site industriel en centre ville à Ningbo, province de Zeeiang en Chine. Différentes recherches et actions environnementales se manifestent par la mise en place d'installations in-situ et de prototypes (par exemple : installations "l'eau dans l'eau" en 2001 (mission art et infrastructure, CDDEC), installation "Relâche" en 2009 (théâtre le Quai à Angers). Il s'agit notamment aujourd'hui dans le contexte du programme "Floating Islands in Floating Landscape" de développer des centres d'essais pour l'épuration des eaux terrestres de l'échelle lacustre à un questionnement plus global des bassins versant.

Damien MASSON
Damien Masson est maître de conférences en urbanisme à l'université de Cergy-Pontoise. Ses champs d'enseignement concernent principalement les sciences sociales, les approches méthodologiques, la cartographie et les SIG qualitatifs. Son activité de recherche concerne d'une part, l'expérience vécue des trajets ordinaires en transports collectifs. D'autre part, ses travaux portent sur la question des effets des dispositifs (matériels, humains, discursifs) de surveillance et de sécurités sur l'expérience ordinaire des espaces urbains. Ils visent à fonder une critique sensible de la sécurisation ordinaire et extraordinaire des espaces urbains, et pour cela articulent différentes théories des ambiances et atmosphères (francophone, anglophone et germanophone) à la géographie des affects, et à la géographie culturelle. L'enjeu théorique sous jacent tient en l'articulation de la critique sociale, culturelle et politique des espaces urbains à une critique sensible. Ce faisant, l'enjeu pratique associé vise en la démonstration du potentiel politique de la notion d'ambiance.

Derek McCORMACK : Atmospheres and the elemental
This intervention will consider the relation between ideas of atmosphere and different versions of the elemental. In the first version, the elements refer to the meteorological worlds inhabited by different forms of life. In a second version, they refer to the physico-chemical arrangement of matter. Finally, in a third version, the elemental refers to a series of ontological propositions about what constitutes the world. The intervention will consider how these different version of the elemental are implicated in efforts to think with atmosphere in both affective and meteorological terms.

Derek McCormack is Professor of Cultural Geography at the University of Oxford. He has written about non-representational theories, atmospheres and, more recently, the elemental.
Publications
Refrains For Moving Bodies : Experience and Experiment in Affective Spaces, Duke University Press, 2013.
Atmospheric Things : On the Allure of Elemental Envelopment, Duke University Press, 2018.

Thierry MOUILLÉ : L'ambiant rotatif, en oui bémol et non dièse
Ça tourne : "On voulut graver les désirs humains dans l'esprit des dieux au moyen du rythme, après que l'on eut remarqué qu'un homme retient mieux dans sa mémoire un vers qu'une phrase en prose ; par le tic-tac rythmique on pensait aussi se faire entendre à de plus grandes distances ; la prière rythmique semblait s'approcher davantage de l'oreille des dieux." (Friedrich Nietzsche, La naissance de la tragédie).
À l'invitation de la session "ambiances de pensée", je me suis demandé comment articuler cette proposition à une courte histoire de la rotation, de la boule à facettes à Copernic, du 33 tours aux 72000 tours/minute d'un disque dur. C'est donc un exposé de rotations dont il s'agira, ni conférence, ni performance, juste une maquette d'exposition, en circonférence, l'ambiance du travail en train de se faire.

Thierry Mouillé est artiste et professeur à l'école supérieure d'art de TALM-Tours, il dirige le laboratoire des intuitions, unité de recherche en art (laboratoiredesintuitions.esaaa.fr). Il a notamment publié la série des Intuitive notebooks (Éditions de l'ESAAA, 2014-2016). Il développe depuis 1988 une œuvre pluridimensionnelle sous le terme générique de "La Fondation Mouvante".

Pauline NADRIGNY : Écouter, penser : Thoreau, Ives et l'ambiance de la forêt
"Where do we find ourselves ?" : où nous trouvons-nous ? — la question est posée par Emerson dans son essai "Experience". Gageons qu'une réponse très concrète peut lui être donnée à cette époque : dans les bois et leur ambiance sonore. Lieu concret d'expérience, la forêt, de Concord au Maine, est le lieu où s'enracine une pensée, celle de Thoreau, et une musique, celle de Charles Ives. Lieu non pas abstrait (comme la forêt labyrinthique de Descartes), mais ambiance sonore concrète que la philosophie et la musique américaines cherchent à figurer, en y agissant et en se mettant à l'écoute : "où nous nous trouvons penser".

Pauline Nadrigny est philosophe, spécialisée en esthétique et maître de conférences à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne (PhiCo/CEPA), membre du LIA CRNR (Centre de recherche franco-allemand sur les nouveaux réalismes). Ses recherches portent sur les musiques contemporaines et expérimentales, abordées sous divers aspects : relation entre pensée musicale et philosophie, mutations de l'écoute et de ses pratiques, paysage sonore et écologie acoustique.
Publications
Musique et Philosophie au XXe siècle : Entendre et faire entendre, Classiques Garnier, Coll. "Philosophie contemporaine", 2015.
Avec Catherine Guesde, The Most Beautiful Ugly Sound in the World : à l'écoute de la noise, Musica falsa, Coll. "Répercussions", 2018.

Jean-Pierre PÉNEAU
Jean-Pierre Péneau est architecte, docteur en histoire des sciences et des techniques, professeur honoraire des écoles d'architecture. Il est actuellement professeur-visiteur à l'école d'architecture de l'université de Carthage et responsable d'une équipe de recherche sur les ambiances. Il a mis au jour — en collaboration avec ses collègues du CERMA à Nantes, puis — à partir de 1992 en association avec les chercheurs du CRESSON de Grenoble — les premiers éléments d'une théorie des ambiances architecturales et urbaines, ainsi que les instruments opératoires, assurant le lien entre ces avancées théoriques et les activités de conception du projet. Il a en particulier exploré les modalités de la référenciation en matière d'ambiances.

Nia PERIVOLAROPOULOU : Des ambiances urbaines au cinéma
Des études récentes consacrées aux atmosphères filmiques abordent différents aspects du phénomène, de l'ambiance d'une salle du cinéma à l'atmosphère immanente d'un film. L'analyse des procédés cinématographiques à l'œuvre dans la production d'une atmosphère particulière y occupe une place centrale. Toutefois, l'ambiance des paysages, notamment des paysages urbains, au cinéma n'est pas que l'effet des procédés cinématographiques utilisés. J'aborderai la question du rapport entre l'ambiance d'une ville et celle émanant de son image filmique en repartant de l'œuvre de Siegfried Kracauer, où la grande ville et le cinéma sont pensés comme des éléments constitutifs d'une sensibilité moderne.

Nia Perivolaropoulou, a enseigné à l'université de Essen (Allemagne), où elle a été responsable des études cinématographiques dans le département de littérature. Ses recherches portent sur la théorie et l'esthétique du cinéma et ses rapports avec l'histoire et la mémoire. Spécialiste de Siegfried Kracauer, elle a notamment édité Les Employés. Aperçus de l'Allemagne nouvelle (1929) (2012) et avec Ph. Despoix L'Histoire. Des avant-dernières choses (2006), Théorie du film. La rédemption de la réalité matérielle (2010). Dernière publication : L'atelier cinématographique de Siegfried Kracauer (De l'incidence éditeur, 2018).

Sophie PROVOST
Traductrice de formation spécialisée en traductologie, Sophie Provost a suivi une formation trilingue à la Faculté de Traduction et d'Interprétation de l'université de Genève, Suisse. Après avoir validé sa maîtrise théorique en 2016, elle a pu mettre à profit ses compétences linguistiques au service du Parlement européen, ainsi que de nombreuses organisations internationales dans le cadre de missions bénévoles. Elle est aujourd'hui traductrice pour le Laboratoire Ambiances Architectures Urbanités (UMR CNRS 1963), où elle travaille en français et en anglais.

Professional translator specialised in translation studies, Sophie Provost graduated from the Faculty of Translation and Interpreting, University of Geneva, Switzerland. After defending her Master’s thesis in 2016, she applied her language skills to her work at the European Parliament, as well as for many international organisations, for whom she worked as a volunteer. She is now translator for the Laboratoire Ambiances Architectures Urbanités (UMR CNRS 1963), where she works both in French and in English.

Bruno QUEYSANNE
Bruno Queysanne est né à Casablanca en 1941. Après des études de philosophie à la Sorbonne au début des années 60, il devient, sur la recommandation de Louis Althusser, collaborateur de Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, de Janvier 1965 à Juillet 1967. En septembre 1967, il est nommé assistant de sociologie au Groupe C de la section architecture de l'ENS Beaux-Arts de Paris. Il participe activement au mouvement de Mai 68 et à la refondation de l'enseignement de l'architecture qui s'en suivra. En septembre 1970, il rejoint l'École d'Architecture de Grenoble, où il enseignera philosophie et histoire de l'architecture jusqu'à sa retraite en 2006. Depuis, il est enseignant invité à Casablanca, Marrakech ou Bogota. Il étudie l'architecture de la première Renaissance italienne, celle du Baroque en Bohême et au Piémont, ou celle des débuts de la Modernité de Loos et de Le Corbusier. Il s'intéresse aux villes "nouvelles", comme Pienza, Ferrara, San Francisco, Los Angeles, Casablanca ou Chandigarh. Outre les œuvres bâties, il étudie les textes théoriques, dans leurs diverses traductions, de Vitruve, Alberti, Vittone ou Semper. Il rencontre les "ambiances" dans sa traduction des "Prolégomènes à une psychologie de l'architecture" d'Heinrich Wölfflin, avec la notion de stimmung. Dans son étude du Mémorial Walter Benjamin de Dani Karavan à Portbou, il recourt aux notions d'unheimlichkeit et d'inconfort existentiel qui lui semblent qualifier cette œuvre remarquable.

Bernard RENOUX
Bernard Renoux est photographe. En 1983, il entre au service photographique de l'Inventaire Général du Patrimoine des Pays de la Loire à la Direction des Affaires Culturelles. Simultanément, il devient le photographe de la Revue 303 arts, recherches, créations dès sa création en 1984 jusqu'en 2014 où il entre au comité de rédaction. Il devient indépendant en 2000 et prend le statut d'artiste auteur, répond à des commandes des musées, FRAC, architectes, institutions culturelles et collectivités, qui se traduisent par de nombreuses publications de livres, catalogues et des expositions. Dans son travail, sa préférence va à l'exploration des rapports qu'entretient l'homme à son environnement et à sa propre image.

Friedlind RIEDEL : Moods and Modes. Thinking Atmosphere through Music
"Atmosphere" refers to a feeling, mood or Stimmung that fundamentally exceeds an individual person and instead pertains to the overall situation in which individuals find themselves. Atmosphere thus challenges a notion of feelings as merely the private inner states of a cognisant subject and instead affords an understanding of them as collective, extended, and situational. In this sense atmosphere can be considered a mereological concept : it prompts us to ask not only about the relational web of bodies with each other, but about the ways in which each body is part of and related to an overarching situational whole, one seemingly homogeneous rhythm or hue. Atmospheres can thus be described as a mode in which a group of individual bodies comes to exist as a felt-collective. This paper will investigate the structural affinity between musical modes and atmospheric moods to further explore the ways in which atmosphere operates as a medium that brings something into appearance which can neither simply be deduced from or reduced to the present bodies nor pinpointed to a source. Drawing on examples from religious music making in Myanmar I will explore how music as atmosphere can render dawning futures or repressed memories abundantly present, but also bring persons and things into appearance that are otherwise absent or ulterior.

Friedlind Riedel is a doctoral fellow at the Competence Centre for Media-Anthropology at Bauhaus University Weimar. As a musicologist and anthropologist, her interests lie with cultural histories of listening in Southeast Asia and with the peculiar relationship between music and mood. She has conducted extensive research on rituals in Myanmar and is currently working on a book that enquires into music and listening at the threshold of the human.

Alexander RÖMER : "Faire ensemble" (ou bien le passage de l'action éphémère au temps long du projet)
Nos projets sont des moments d'articulation entre deux temps : on les a pensés dans le long terme mais l'intervention, en soi, reste temporaire. Elle est conçue comme la "modalité de passage" d'un projet dans le long terme. Mais pourquoi mettre une telle énergie pour des productions temporaires, voire même éphémères ? La réponse est immédiate : le projet souvent n'est pas réalisable si on l'envisage sur le mode de la permanence — non seulement d'un point de vue administratif, mais aussi et surtout du point de vue de la dynamique du projet. Une action temporaire permet d'initier "une énergie du moment", quelque chose qui devient autonome et qui se prolonge dans le temps long… On peut passer un été tous ensemble sur un site, on invente une narration, on "fait ensemble", une communauté se crée… Nous avons ainsi réussi plusieurs "projets", qui ne se sont jamais arrêtés, mais d'autres ont échoué ! L'exposé commencera par le récit de quelques faillites (pour révéler le risque à prendre), pour ensuite parler des réussites, avec deux témoignages : l'un dans lequel les matériaux sont réutilisés à maintes reprises, l'autre dans lequel le lieu a repris vie. Dans les deux cas, on construit une situation, que l'on partage avec d'autres, les autres se l'approprient et ensuite, ils le poursuivent ! Littéralement le projet passe.

Alexander Römer est architecte et charpentier. Initiateur du réseau construclab (constructlab.net) et membre du ex-collectif EXYZT, deux laboratoires de recherche-action, d'expérimentations constructives et de création interdisciplinaire, il développe dans une dynamique collective une pratique du design et de l'architecture temporaire et participative. Ses projets lient conception et fabrication. Ils initient des collaborations avec les communautés locales et mettent en valeur les savoir-faire collectifs autant qu'individuels. Il envisage l'architecture et le design comme des médiums d'intervention sociale capables de mettre en place des espaces de dynamiques d'échanges.

Gretchen SCHILLER
Gretchen Schiller est chorégraphe et professeur à l'université de Grenoble Alpes. Elle mène ses recherches au sein de l'UMR LITT&ARTS 5316. Elle est responsable du Parcours Arts de la scène du Master Création Artistique de l'université Grenoble Alpes, directrice de Arts in the Alps ainsi que de la SFRCréation et lauréat du projet IDEX Performance lab depuis 2018.

Philippe SIMAY : La ville-pharmakon : vers une thérapeutique des ambiances urbaines
En s'interrogeant sur la dimension thérapeutique et capacitaire des ambiances urbaines, à partir des analyses de Walter Benjamin et Siegfried Kracauer sur le concept de "distraction" et les formes empruntées par la culture de masse, il s'agira de poser les bases d'une conception pharmacologique de la ville, conçue à la fois comme poison et comme remède. On questionnera la façon dont les ambiances permettent aux citadins de s'acclimater à un environnement complexe, parfois perçu comme chaotique ou traumatique, mais aussi de développer de nouvelles compétences en mobilisant des ressources générées par la métropole elle-même.

Philippe Simay est maître-assistant à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Paris-Belleville et co-directeur de la revue Métropolitiques. Il a coécrit Moholy-Nagy et le pont transbordeur de Marseille (Ophrys, 2013) et a dirigé Capitales de la modernité. Walter Benjamin et la ville (Éditions de L'Éclat), Le choc des métropoles : Simmel, Kracauer, Benjamin (avec Stéphane Füzesséry, Éditions de l'Éclat, 2008) et Droit de cité (Éd. PUF/Ciph, 2009).

Paul SIMPSON : The Ambiguity of Affect
What do you mean by affect ? Considering this question from within the context of recent research in Anglophone human geography on affect there is not necessary a single, agreed upon, stable definition of affect. While in broad terms affect is understood to relate to the body, sensation, and relationality, a variety of traditions co-exist, compete, compare, and critique in the aftermath of the "affective turn". In this presentation, I explore a range of these different understandings of affect and draw out a series of tensions that exist within them. This includes reflection on the relationships between affect, feeling, and emotion ; affect's autonomy or subjective tethering ; and, affect's social and biological organizations.

Paul Simpson is an Associate Professor of Human Geography in the School of Geography, Earth and Environmental Sciences, at the University of Plymouth. His research focuses on the social and cultural geographies of every day, artistic, and mobile practices and explores the complex situatedness of such practices in the environments in which they take place.

Ola SÖDERSTRÖM
Ola Söderström est professeur de géographie sociale et culturelle à l'université de Neuchâtel, Suisse. Ses travaux portent sur la culturelle matérielle des villes, le visuel en urbanisme et, plus récemment, sur le développement urbain dans les villes des Suds et les relations entre vie urbaine et psychose. Les dimensions affectives et émotionnelles de l'urbain saisies par les concepts d'atmosphère et d'ambiance sont particulièrement importantes pour son travail sur le rapport entre urbanité et schizophrénie.

Jean STERN : L'instant sur place
Dans la vocation de l'art à faire urbanité, il y a revendication à l'interagir avec le territoire. Cette artialisation (Alain Roger) conduit-elle au risque de dénaturation dans la projection du même, soit un labyrinthe, une entropie ; ou bien promet-elle un ambitieux partage de paysages ? En s'interrogeant sur quelques interventions in situ inscrites dans la cité ou le paysage, il s'agira d'y repérer les outils de perception que constituent la désorientation, le franchissement, le retournement, le décalage, la mise en déséquilibre du visiteur (un passeur entre urbain et terrain, suivant le nom programmatique de la revue fondée par Sébastien Marot) comme moyens sensibles qui engagent une lecture du site et/ou de l'œuvre, et invitent à construire un récit à plusieurs voix. À ce récit, le visiteur assignera une composante sensorielle (haptique, auditive) ou cognitive (historique / géographique / sociale) sur le mode de la distraction, en passant, d'un instant à l'autre.

Artiste et professeur à la HEAD - Genève jusqu'en 2013 où il a dirigé ALPes, programme postgrade orienté sur l'art dans la ville, et où il a animé le projet de recherche Gestes nomades (IRAD, HES-So). Ces deux activités sont documentées dans l'ouvrage sans le socle (2015, HEAD - Genève / art&fiction, Lausanne) codirigé avec Ivonne Manfrini. Comme artiste, Jean Stern développe une pratique de l'in situ qui aborde la question de la composante narrative de l'œuvre, dans un partage de récits et de parcours avec le public, et vise à une transformation discrète de l'espace qui l'accueille, qu'il s'agisse d'un espace public (Bains des Pâquis, Genève, 2015 ; EPFL, Lausanne, 2011-14) ou d'un espace paysager (Parc du Haut-Jura, 2012).

Didier TALLAGRAND
Didier Tallagrand est artiste. Il enseigne à l'École Supérieure d'Art Annecy Alpes depuis 2002. Il a fondé le master Design & espace en 2008 qu'il coordonne depuis. Il est président du centre d'art contemporain Angle à Saint-Paul-Trois-Châteaux. Ses travaux portent sur la question de l'art dans l'espace public où il déploie des actions et des formes en lien avec le paysage et les acteurs des territoires. Il interroge les statuts de l'image par le récit. Dernière exposition : Les dormantes (Maison Victor Hugo, Paris, 2015). Ses recherches actuelles portent sur la question des avant-pays dans les bassins versants de trois fleuves méditerranéens.

Gonçalo M. TAVARES
Gonçalo M. Tavares est né en 1970. Il est professeur à Lisbonne. Considéré comme l'un des plus grands noms de la littérature portugaise contemporaine, il reçoit les éloges d'auteurs célèbres comme Eduardo Lourenço, José Saramago, Enrique Vila-Matas, ou Bernardo Carvalho. Ses œuvres sont traduites dans une cinquantaine de pays.
Publications en français
Une jeune fille perdue dans le siècle à la recherche de son père, Éditions Viviane Hamy, 2018.
Matteo a perdu son emploi, Éditions Viviane Hamy, 2016.
Un homme : Klaus Klump & La Machine de Joseph Walser, Éditions Viviane Hamy, 2014.
Un voyage en Inde, Éditions Viviane Hamy, 2012.
Apprendre à prier à l'ère de la technique, Éditions Viviane Hamy, 2010.
Jérusalem, Éditions Viviane Hamy, 2008.
La série d'ouvrages Les habitants du quartier "O Bairro", Éditions Viviane Hamy, 2002-2010.

Jean-Paul THIBAUD
Jean-Paul Thibaud, sociologue, est directeur de recherche au CNRS. Il est chercheur au CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architectures, Urbanités). Son domaine de recherche porte sur la théorie des ambiances urbaines, la perception ordinaire en milieu urbain, la culture et l'ethnographie sensible des espaces publics, l'anthropologie du sonore, les méthodes d'investigation in situ. En 2008 Jean-Paul Thibaud a fondé le Réseau International Ambiances.
Publication récente
En quête d'ambiances. Éprouver la ville en passant, Genève, MétisPresses, 2015.

Nicolas TIXIER
Nicolas Tixier est architecte. Professeur à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble, il enseigne aussi à l'École Supérieure d'Art Annecy Alpes et à l'Institut d'Urbanisme et de Géographie Alpine de Grenoble. Chercheur au CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architectures, Urbanités), il mène parallèlement une activité de projet au sein du collectif BazarUrbain. Depuis 2018 il est directeur du Cresson et directeur adjoint de l'UMR AAU. Ses travaux actuels portent sur le transect urbain comme pratique de terrain, technique de représentation et posture de projet.
Publications récentes
Ambiances, tomorrow (en co-dir. avec Nicolas Rémy), Actes du 3e congrès international sur les ambiances, Volos, 2016.
Traversées urbaines, villes et films en regard, Genève, MétisPresses, 2015.

Izabela WIECZOREK : Atmospheres in formation : affective thresholds, immersive fields and active boundaries
Through analysis of the production and experience of spaces, and their theoretical contextualisation, the aim is to explore how the concept of atmosphere has been formed in an architectural trajectory inscribed within the history of the interior. Notions of "comfort", "mood", "theatricality", and "character" are only some of the atmospheric cognates that define this trajectory, revealing atmosphere's somewhat confusing yet inspiring plurality. A plurality that renders space, from which atmosphere emerges, as a relational and immersive field in which both body and environment are understood as integrative and generative forces extended in a fluid spatial substance of affective power. The paper argues that considering space as such an affective field carries a new material logic. It calls for approaching matter as a performative and generative becoming that defines sensory thresholds and active boundaries, conjuring up a notion of involvement, stirring imagination, beckoning our sensorium and inciting responsive patterns of behaviour.

Dr Izabela Wieczorek is an architect, researcher and educator. She has taught and lectured widely and is currently a Lecturer in Architecture at the University of Reading. Her research is situated at the nexus of academia and practice and explores relational, sensorial, performative, affective and ecological aspects of Architecture. From 2003 to 2017, Izabela was a co-director of Gálvez + Wieczorek arquitectura whose work has been awarded prizes as well as published and exhibited internationally. In 2017 she set up Atmospheric Architecture Agency — a research-based experimental practice that focuses on the atmospheric dimension of architecture and its implications for critical and collaborative design practices as well architectural alternative pedagogies.

Marc WINZ : Ambiances urbaines and atmospheres in research on the city-psychosis nexus
Ambiances urbaines and atmospheres can be approached from a double perspective in relation to the question of urban mental health ; on the one hand ambiances and atmospheres can be understood as the object of investigation, and on the other as a theoretical and analytical framework. In this presentation I first explore what and why we can learn more about urban ambiances when working with people diagnosed with psychosis. In the second part, I discuss ambiances urbaines and affective atmospheres as fertile concepts for studying how people living with a diagnostic of psychosis experience urban environments, and how the city relates to their mental state.

Marc Winz is a PhD candidate and a teaching assistant at the Institute of Geography of the University of Neuchâtel, Switzerland. Working under the supervision of Ola Söderström, Marc is conducting a doctoral research on the relationship between urban spaces and psychosis. He is interested in the way people diagnosed with schizophrenia experience urban environments, and how the city relates to their mental state.
Publication
Marc Winz, "An atmospheric approach to the city-psychosis nexus. Perspectives for researching embodied urban experiences of people diagnosed with schizophrenia", Ambiances, Varia [online].

David ZERBIB
David Zerbib coordonne l'Unité de Recherche de l'École Supérieure d'Art d'Annecy Alpes (ESAAA). Il est également maître d'enseignement en Philosophie de l'art à la HEAD (Haute École d'Art de Design de Genève). Rattaché au Centre de Philosophie contemporaine de la Sorbonne (PhiCo/CEPA : Culture Esthétique et Philosophie de l'Art) de l'université de Paris 1, ses recherches portent sur les principes d'une théorie esthétique contemporaine, à travers en particulier la question de la performance et du format. Il a co-édité Performance Studies in Motion, International perspectives and practices (Londres, Éditions Bloomsbury, 2014) et a dirigé la publication de In octavo. Des formats de l'art (Presses du réel/ESAAA, 2015).


VIRGULES MATINALES :

Des doctorants travaillant sur les ambiances introduisent chaque matinée par un témoignage de terrain, une expérience de recherche.

Ryma HADBI
Ryma Hadbi, urbaniste, est doctorante à l'École d'Architecture de Grenoble et membre de l'équipe CRESSON (UMR Ambiances, Architectures, Urbanités 1563 – Université Grenoble Alpes). Son travail porte sur l'attachement des habitants dans les cités ouvrières des années 1920-1930 (cités de l'Abbaye, la Capuche et Jean Macé à Grenoble) afin de déterminer ce qui y fait patrimoine et de penser leurs mutations. Ce projet de recherche se définit par l'immersion in situ pour produire le(s) récit(s) de ces lieux. La démarche méthodologique développée permet de récolter les mémoires individuelle et collective, les pratiques, les usages et les ambiances qui caractérisent ces cités.

Gwendoline L'HER
Gwendoline L’Her est doctorante en Études Urbaine à l'ENSA Nantes et à l'École Centrale de Nantes sous la direction de Daniel Siret et Myriam Servières. Membre de l'équipe Crenau de l'UMR Ambiances Architectures Urbanités, son travail porte sur l'émergence des dispositifs de description collective des villes au sein de l'action publique urbaine : métrologies, inventaires, relevés. Elle s'intéresse notamment à l'étude des interactions lors des balades collectives organisées dans le cadre des ateliers.

Juste PECIULYTE
Juste Peciulyte est doctorante en design à l'Académie des Beaux Arts de Vilnius (Lituanie), chercheuse associée à l'ArcInTexETN, programme de recherche artistique (Marie Skłodowska-Curie Research). Entre les disciplines d'architecture, de design d'interaction et design textile. Son travail de "recherche avec design" s'intéresse à la technicité paradoxale de atmospheric staging, en tant que technique de design d'espace. Malgré la forte association de atmospheric staging avec la mise en scène des commodités, cette technique visuelle s'avère également être inhérente à l'exploration et la découverte des nouvelles expressions spatiales. Pour révéler cette dimension performative du atmospheric staging, Juste explore des formats hybrides de workshop — performance. Le but étant de proposer de nouvelles définitions de techniques de modélisation d'espace performatifs dans le champ, dit, des représentations architecturales.

Vanessa STASSI
Vanessa Stassi est architecte-urbaniste, enseignante à l'École Spéciale d'Architecture ainsi que doctorante en urbanisme au sein du laboratoire CRESSON / UMR AAU 1563 CNRS (Ambiances Architectures Urbanités) sous la direction de Jean-Paul Thibaud et en co-direction avec Stéphane Bonzani du laboratoire GERPHAU (Philosophie, Architecture, Urbain). Son doctorat porte sur la part opérationnelle des ambiances (dimensions physiques et perceptions sensibles des usagers) dans le cadre du processus participatif d'aménagement de la Petite Ceinture de Paris (2015-2018).

Maïlys TOUSSAINT
Maïlys Toussaint, urbaniste, est doctorante au laboratoire CRESSON (UMR 1563 Ambiances, Architecture, Urbanité) à l'École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble. Ses recherches s'intéressent aux ambiances de la rénovation urbaine dans le quartier de la Villeneuve de Grenoble, et portent sur les habitudes et la vie quotidienne de ses habitants. Ces recherches l'amènent à se questionner sur les méthodes d'enquête et de restitution à mobiliser, comme la mise en récit d'expériences sensibles et la reconduction photographique de lieux urbains en transformation.
Publication récente
Maïlys Toussaint, "La méthode des itinéraires, entre récits de vie et ambiances urbaines. Saisir et partager des ambiances", Nicolas Rémy & Nicolas Tixier (dir.), Ambiances, tomorrow. Proceedings of 3rd International Congress on Ambiances, Septembre 2016, Volos, Greece, International Network Ambiances, University of Thessaly, vol. 1, pp. 399-404. 2016.

Sarah VAN HOLLEBEKE
Sarah Van Hollebeke est doctorante en sociologie à l'UCLouvain (CriDIS, groupe de recherche Metrolab) et en urbanisme à l'ENSA Grenoble (UMR AAU-CRESSON). Depuis 2014, elle enquête sur les relations entre politiques de rénovation urbaine et sciences sociales à Bruxelles. Elle s'intéresse aux instruments de connaissance, de représentation et de communication mis en place en vue de planifier et projeter le développement de la ville. Elle s'intéresse aussi de manière spécifique aux supports (cartes, statistiques, diaporama, etc.) qui donnent des appuis à des discours sur la coexistence des populations en ville. Elle réalise une ethnographie des rassemblements publics visant à co-produire des connaissances sur l'urbain ou à communiquer un "diagnostic" dans le cadre de projets urbains. Elle est co-auteur, avec Mathieu Berger, d'un article intitulé "Bruxelles sous tensions. Quelques pistes pour une conceptualisation des formes et enjeux de la mixité sociale" (ouvrage collectif publié aux Presses universitaires de Louvain).


MOMENTS SENSIBLES :

De jeunes créateurs rendent compte par de productions artistiques d'un lieu, d'une situation, d'une ambiance.

Diane AUBRUN
Diane Aubrun est diplômée en 2016 d'un DNSEP Design & Espace à l'ESAAA,. Elle vit et travaille à Paris. Elle aime utiliser l'outil caméra pour provoquer la rencontre et documenter des pratiques pouvant se rattacher au champ cinématographique. Elle s'interroge aussi sur sa pratique cinéphile en côtoyant la Cinémathèque et autres ciné-clubs. Elle aime y observer le moment de la projection, comme un moment unique, lié directement à celui du tournage où l'image est créée.

Léo BAUDY : Une manière de filmer
Installée dans les combles du château, la caméra offre une perspective axonométrique rêvée sur une ville de Haute-Savoie. À hauteur du pavé, elle s'abandonne ensuite à la mise en scène réglée d'ouvriers des travaux publics d'une ville au Brésil. Sans rentrer dans l'action, elle bénéficie d'une place de choix pour témoigner d'un braquage raté quelques minutes plus tôt dans une ville nord américaine. Ailleurs, la caméra distingue une rotation sur le paysage avoisinant et marque plusieurs temps longs pendant le panoramique, comme pour nous accompagner dans la découverte du territoire.
Notre attention portée aux choses simples — qui occupent l'espace du cadre et l'espace sonore — construit comme un paysage sensible. Les événements que l'on choisit de retenir et/ou ceux qui nous arrivent comme des accidents, associés à d'autres, s'articulent ensemble, s'harmonisent, se repoussent.
Il y a là une existence.

Léo Baudy vit et travaille à Clermont-Ferrand. Sa pratique du terrain se pense à la fois comme territoire de recherches et décor de fictions. Les gestes sont avant tout cinématographiques. Peut-être que c'est l'exécution qui compte. Le souci de fabriquer du récit par l'agencement de postures, le plaisir de l'agencement, et les poésies traversées. Les situations rencontrées sont l'objet de questionnements autour de la notion des ambiances et de la matérialité de l'événement. Ou comment approcher un terrain et décrire les phénomènes observés ?

Dorian DEGOUTTE : Projection de vidéos
Cette intervention prendra la forme d'une projection de films. Dorian Degoutte montrera plusieurs vidéos dont sa plus récente "Photo de Famille" et expliquera sa démarche de travail. Ce dernier film, tourné à Annecy avant de déménager en région centre, raconte la mise en scène d'une photo de groupe avec les habitants de son immeuble. Il s'inscrit dans une logique de travail "in situe" qui s'adapte au contexte et aux contraintes de création (économie, acteurs-habitants, matériel, etc.) et s'intéresse à la place de l'art dans notre quotidien.
Liées aux mêmes problématiques, les autres vidéos projetées ont été réalisées lors de voyages ou résidences d'artistes, dans la ville de Tétouan au Maroc, sur une plage au Sénégal, où encore dans une station de sports d'hiver en Haute-Savoie.
Photo de famille (titre provisoire, montage de la vidéo en cours)
Vidéo HD - 4:3 - 15' - Annecy - 2017/2018
Le Grand Vide
Vidéo HD - 16:9 - 17' - Centre d'Art de Flaine - 2016
Crêpas!
Vidéo HD - 16:9 - 6' - Tétouan Maroc - 2013
Le monument de la plage (titre provisoire, montage de la vidéo en cours)
Vidéo HD - 16:9 - 9' - Cap Skirring Sénégal - 2017

Dorian Degoutte est un artiste plasticien et réalisateur. Sa pratique de la vidéo, développée à l'École d'Art d'Annecy dans le département "design & espace", cherche à s'adapter aux différents contextes d'interventions (résidences d'artiste en milieu rural ou urbain, espaces publics ou privés, ou encore lors d'ateliers de création à destination des scolaires). Il travaille régulièrement avec l'Association Villeneuve la Série à Grenoble et s'est récemment installé dans le Berry pour construire un projet vidéo sur plusieurs années à Vierzon.
Son profil viméo : https://vimeo.com/doriandegoutte
Publication
49,9 Mégawatts, Éditions L'Erre de Rien, Lille, Carnet de voyage d'un tour de France des Centrales nucléaires en mobylette, 2013.

Jérémy LANCHON & Marion RAIMBAULT (Collectif La Meute) : Bons Baisers de Saint-Étienne, 2017. Présentation et discussion autour du projet
Nombreuses au début du XXe siècle, les maisons d'édition de cartes postales ont peu à peu disparu du département de la Loire, laissant derrière elles des centaines de clichés d'époque qui figent encore la ville de Saint-Étienne et sa région dans son passé industriel. Les éditeurs de vues jouent un rôle important dans le développement de l'image d'un territoire. En investissant financièrement dans des campagnes photographiques, d'impression et de diffusion, ils parient en quelque sorte sur le devenir des villes, leur développement touristique et façonnent un point de vue, une couleur locale... Dans l'utopie de relancer l'attractivité de la ville, le Collectif La Meute a parcouru le département de la Loire avec pour but d'identifier et de photographier les sites à caractère touristique. Ces clichés, édités selon les règles de la carte postale, ont été présentés et mis en vente pendant la biennale internationale du design 2017 sous la forme d'une vraie-fausse boutique souvenirs, laissant ainsi la ville de Saint-Étienne imaginer une nouvelle perspective : celle du tourisme de villégiature.

Fondé en 2015, le Collectif La Meute évolue surtout sous la forme de résidences artistiques dans lesquelles il met en place des protocoles d'immersion, des dispositifs, des événements, des interventions artistiques, créant des décalages qui perturbent ou incitent à changer de regard et l'usage d'un lieu. Le Collectif La Meute, livre ainsi des propositions singulières, engagées et situées, mettant en jeu des pratiques locales, des situations économiques, politiques et esthétiques. Son travail, souvent ludique et parfois festif est centré sur les questions de paysage, d'aménagement du territoire, d'intervention urbaine et d'architecture.
En savoir plus : https://issuu.com/collectiflameute

Quentin LAZZARESCHI : Art et manières, contextuel, contingent
Les manières d'être artiste, d'incarner l'artiste et de se définir comme tel ?
Aussi, la manière de faire : envisager des formes liées à des postures, des attitudes.
Situer la pratique pour l'élargir, proposer des formes qui s'éloignent des logiques de création.
La position plutôt que la production ? La production qui mène à la position ?
Adopter des démarches in situ, contextuelles.
Faire en fonction d'espaces, d'ambiances, d'environnements, de temporalités.
Proposer d'être artiste de manière contingente.
Le rôle de l'écriture et du récit dans ces expériences ?

Quentin Lazzareschi est diplômé de l'ESAAA en spécialité Art / Bachelor et Design & Espace / Master. Ses travaux portent principalement sur des questions de visibilité, de considérations, les décalages conventionnels, d'objets, d'actions, intégrant ou non le champ de l'art. Ses recherches actuelles visent au développement d'une plateforme en ligne qui permettrait de référencer "ce que les musées ne montrent pas" : collections non exposées, non choix, œuvres invisibles en général.
Ouvrage collectif
DIMANCHE [en ligne].

Hedi Ali MESTIRI
Hedi Ali Mestiri vit à Paris, il est designer et étudiant en recherche à l'ENS Paris-Saclay. Fraîchement diplômé d'un Master à l'ESAAA option Design & Espace, sa pratique du design démarre par la vidéo pour aboutir à des objets et/ou à un film. Son travail d'écriture de recherche est concerné par le statut et l'usage de l'image en mouvement dans le design. Ses questionnements actuels sont autour du rapport entre l'image et le volume dans la capture photographique médical.

Florence SCHMITT
Florence Schmitt vit et travaille à Lyon. Diplômée de l'ESAAA Annecy, DNSEP Design & Espace 2017 (schmittflorence.wixsite.com/portfolio).
"Oscillant entre espace d'exposition et espace scénique, d'une pratique plastique sculpturale et d'installations à un travail scénographique, j'en reviens souvent à la notion de Représentation et de ses nombreuses définitions associées. Je m'approprie des formes, des objets, des histoires principalement issus d’usages collectifs, publics. Je les mets en scène, je les nuance et leur donne un second sens de lecture afin de les montrer encore "plus vrai" peut-être, plus vivant. J'utilise souvent des moyens pauvres pour refaire la "grande image" et m'interroger sur le tragique de la vie (avec une pointe d'humour) : ce que l'on voit ou non et qui constitue ce qui nous entoure."

Joana TEULE
Présentation de plusieurs travaux plastiques et vidéos, qui s'inscrivent dans une démarche d'exploration des territoires au travers des activités des personnes qui l'habitent.

Joana Teule est une jeune artiste, xylograveuse au Brésil ; pêcheuse à la mouche en Haute-Savoie ; navigatrice sur le lac d'Annecy ; ouvrière agricole-hackiste en Provence ; ancienne Barista chez Starbuckscoffe. Participation à un ouvrage collectif : Dimanche, 2017.


PETITES FORMES PERFORMATIVES :

Présentation courte d'un travail de recherche et de production artistique.

Naïm AÏT-SIDHOUM : Une fiction dans le parc
Durant l'été 2018 une équipe de tournage prend place dans le parc Jean Verlhac, dessiné en 1968 par Michel Corajoud au cœur du quartier de la Villeneuve, grand ensemble situé au sud de Grenoble. Le parc est comme une miniature de nature avec ses collines, ses plaines, ses forêts et même un lac. Ce lieu est propice à la projection, il est comme un décor, inaccessible aux voitures, idéal pour tourner. Le parc Jean Verlhac fait de la Villeneuve une Cinecitta. L'équipe de tournage (technicien et acteurs) y reconstitue un récit historique, celui de Kunta Kinté, jeune africain arraché à ses terres en 1767 par les colons anglais pour être vendu comme esclave aux États-Unis.

Naïm Aït-Sidhoum est cinéaste. Il met en œuvre ses projets de films dans le quartier de la Villeneuve, grand ensemble construit à Grenoble à la fin des années 60. Ses films mettent en scène les habitants du quartier qui deviennent, le temps des tournages, des acteurs de fiction. En 2014 il produit "Guy Moquet", film sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs à Cannes et nominé au César du court-métrage en 2016. En 2017, il produit et réalise "Africa", grand prix au Festival Cinébanlieue et diffusé sur France 2 en 2018.

Jean-Marc CHAPOULIE : Re:re-Méditerranée
Re:re-Méditerranée est un film de la Méditerranée d'aujourd'hui dont les images proviennent de webcams installées sur le pourtour du bassin méditerranéen, au bord des plages, par les offices de tourisme, les associations de surfeurs, de météorologie, ou par des particuliers comme une version 2.0 de la perception. C'est une aventure sur le pourtour de la Méditerranée qui prend corps à travers un échange entre deux amis, l'écrivain Nathalie Quintane et le réalisateur Jean-Marc Chapoulie, parcourant tous deux la Méditerranée, immobiles depuis leur écran d'ordinateur. C'est un voyage sur une mer de paroles, qui frappent les images pour mettre en lumière une part des incohérences avec lesquelles nous vivons.

Jean-Marc Chapoulie est artiste. Cinéaste, performeur et essayiste, il tente de définir ce qui pourrait être défini comme du cinéma d'aujourd'hui.

Julien CLAUSS
En 1917, Éric Satie compose des pièces d'ameublement destinées à être jouées sous les bavardages.
En 1930, les ondes radio couvrent le globe et les auditeurs font l'expérience de l'écoute acousmatique.
En 1950, les musiques électroacoustique et électroniques naissent dans des studios de radios.
Puis le vinyle, la K7 et les radio FM accélèrent l'accès aux musiques exotiques ; des producteurs re-mixent le catalogue musical mondial en une "ambient music" qui s'étend du minimalisme aux musiques bruitistes.
Julien Clauss proposera deux situations d'écoutes inspirées de cette histoire.

Julien Clauss, plasticien, vit dans les Hautes-Alpes. Il a étudié le piano à l'Institut Suzuki de Strasbourg. Après un cursus universitaire en mécanique des fluides et thermodynamique, il étudie l'acoustique au CNAM à Paris, puis assiste Pierre Henry de 2001 à 2007 lors de ses concerts. Depuis 2001, il réalise des pièces sonores, des sculptures, des installations, des performances et des dispositifs radiophoniques.
En savoir plus : documentsdartistes.org/artistes/clauss/repro.html

Alexandre COSTANZO : Benjamin
Il appartient à Walter Benjamin d'avoir constitué, tout au long de son œuvre, un immense catalogue de gestes, d'attitudes, de postures, de perceptions et de situations qu'il recueillait dans les rues, dans des livres ou dans ses souvenirs pour les envisager comme des "images de pensée". Ce sont ces objets que je voudrais ressaisir en les associant à ceux que nous proposent Franz Kafka, Pier Paolo Pasolini ou Rosa Luxemburg et qui, ainsi mis ensembles, posent le problème du monde émancipé.

Alexandre Costanzo est philosophe, il vit à Paris et enseigne à l'École supérieure d'art Annecy Alpes. Cofondateur de la revue Failles, il est aussi membre du comité de direction de la revue de(s)générations. Il achève une thèse sous la direction d'Alain Badiou et a notamment publié plusieurs essais consacrés à la question de l'émancipation.

Giuseppe GAVAZZA
Toucher le son peut être traduit en espagnol "tocar el sonido" qui (re)traduit en français devient jouer le son, en anglais peut être "to play the sound", en allemand "den Klang zu spielen" ; mais en italien on ne joue / play / spielen pas et tocar el sonido devient "suonare il suono"…
Un instrument de musique est un objet sonore mais est-ce qu'un "objet sonore" est un instrument de musique ? Il vaudrait le demander à Pierre Schaeffer…
Les instruments musicaux (acoustiques) sont des objets matériaux mais est-ce que le son est tangible ? Est qu'on peut toucher / jouer un "objet sonore" ?
Si le langage a créé le monde, on peut comprendre pourquoi le monde est aussi splendidement compliqué ... au revoir au monde du langage.
Encore.
J’ai plus de questions que de réponses et vous demande d'imaginer une expérience multi-sensorielle pour toucher / jouer sons et objets, entre sons réels et artificiels, objets physiques et modèles physiques.

Giuseppe Gavazza, (1957, compositeur) vit et travaille à Turin et Grenoble. Après un diplôme à l'université de Turin, il est diplômé du Conservatoire de Milan en Composition et en Musique Électronique. Il a collaboré avec : CSC-Université de Padua, LIM-Université de Milan, Expérimental Studio SWF-Freiburg, l'IRCAM-Paris. Il mène une activité de recherche (PhD) au sein du laboratoire ACROE-ICA à Grenoble avec, comme sujet, l'utilisation du logiciel de synthèse par modèle physique GENESIS pour la création musicale et, depuis 1991, il est professeur de composition au Conservatoire de Cuneo, Italie. Ses compositions — récompensées dans des concours internationaux comme Irino Tokyo, Bucchi Roma, Ensemblia Monchengladbach, Briccialdi Terni, ICONS, Novara — sont exécutées et diffusées en Italie et à l'étranger. Elles sont éditées par BMG Ariola Ricordi et Edipan, enregistrées sur CD (Datum, 2E2M, DDT, Happy New Ears, Nuova Era) et jouées par importants musiciens. Il collabore habituellement avec des chorégraphes, plasticiennes, peintres, architectes, vidéoartistes, metteurs en scène de théâtre et cinéma, écrivains. Il a travaillé dans l'organisation et la promotion de la musique et de l'art contemporain. Il a obtenu des résidences d'artiste à la Fondation Château de La Napoule, USF Kulturhuset Bergen, Bogliasco Foundation, La vie des formes, Chalon-sur-Saone, Asilo Bianco, Ameno, META, Black Mountain College, USA.

Stephen LOYE : Le "\vɛʁ\noir"
Projection d'un extrait du film le "\vɛʁ\noir". Une enquête, chassé-croisé entre un anthropologue et un cinéaste, sur les lieux de la catastrophe aérienne du 24 mars 2015 dans les Alpes de Haute-Provence. À travers des archives, des témoignages et un travail cinématographique lié à la question du paysage, le film devient une recherche archéologique au sein des imaginaires de la mort et de sa représentation.

Stephen Loye mène un travail centré sur le cinéma et les problématiques qui découlent de ce medium. Issu des écoles d'art, il continue à pratiquer le dessin, la performance, la vidéo et l'installation. Il travaille souvent en binôme avec un anthropologue et des écrivains (Patrick Romieu, Nathalie Quintane et Théo Robine-Langlois).


WORKSHOP "DESIGN & ESPACE" :

Des étudiants en master Design & espace questionnent le CCIC, ses lieux, ses atmosphères et ses débats : Louis ANDREWS, Jérémie NICOLAS, Adeline OFFRET, Margaux PINTO, Sonia REYNOSO ALVARADO, Marine RIEUNIER, Anita SANCHEZ, Lana STEILER, Xu YAN, Xiyuan ZHANG.


BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE SUR LES AMBIANCES ET LES ATMOSPHÈRES :

• Ben Anderson, "Affective atmospheres", in Emotion Space and Society, 2009, pp. 77-81.
• Jean-François Augoyard, "L'environnement sensible et les ambiances architecturales", in L'espace Géographique, n°4, 1995, pp. 302-318.
• Mikkel Bille, Peter Bjerregaard, Tim Flohr Sørensen, "Staging atmospheres : Materiality, culture, and the texture of the in-between", in Emotion, Space and Society, 2014, pp. 1-8.
• Gernot Böhme, The Aesthetics of Atmospheres, New York, Routledge, 2017.
• Tonino Griffero, Atmospheres : Aesthetics of Emotional Spaces, New York, Routledge, 2017.
• Tim Ingold, "The atmosphere", in Chiasmi International, n°14, 2012, pp. 75-87.
• Yves Michaud, L'art à l'état gazeux, Paris, Stock, 2003.
• Timothy Morton, Ecology without Nature, Cambridge, Harvard University Press, 2007.
• Nicolas Rémy, Nicolas Tixier (dir.), Ambiances, demain | Ambiances, tomorrow | Ατμόσφαιρες, Αύριο, Actes du 3e Congrès international sur les ambiances, Volos, Grèce, Éd. Réseau International Ambiance – Université de Thessalie, Département d'architecture, septembre 2016, 1016 p., 2 volumes.
• Hermann Schmitz, "Atmospheric Spaces", in Ambiances [en ligne].
• Peter Sloterdijk, Sphères III. Écumes, Paris, Maren Sell Éditeurs, 2005.
• Jean-Paul Thibaud, En quête d'ambiances, Genève, MétisPresses, 2015.


SOUTIENS :

• École Supérieure d'Art Annecy Alpes
• École Nationale Supérieure d'Architecture de Grenoble
• Laboratoire Ambiances Architectures Urbanités (UMR CNRS 1563)
• Direction Générale de la Création Artistique
• Direction Générale du Patrimoine / BRAUP
• Réseau International Ambiances

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


NOUVEAUX ENJEUX PROSPECTIFS DES TERRITOIRES
ET CO-CONSTRUCTION DES STRATÉGIES


DU MERCREDI 29 AOÛT (19 H) AU DIMANCHE 2 SEPTEMBRE (14 H) 2018

[ colloque de 4 jours ]



DIRECTION :

Isabelle LAUDIER, Lucie RENOU


ARGUMENT :

Dans un contexte de mutations économiques, écologiques, sociétales d'une part, d'évolutions institutionnelles et de gouvernance locale d'autre part, la notion de territoire — et ce qui fait territoire — est remise en question.

Qu'est-ce qui fait territoire en ce début de XXIe siècle, comment identifier et caractériser les dynamiques à l'œuvre, et sur quelles bases construire les perspectives futures ? Comment les collectivités définissent-elles des visions stratégiques et pour quelles politiques ? Si les mutations en cours nous invitent à repenser la notion de territoire, il importe de dépasser une définition qui le considère seulement comme entité politico-administrative afin de mieux prendre en compte l'ensemble des mouvements qui le traversent et d'y intégrer davantage le rôle de la société civile et des transformations économiques et sociales actuelles. Enfin, comment co-construire des stratégies de territoires, proposant un cadre pour l'action publique et ouvrant des perspectives à l'ensemble des acteurs ?

La Caisse des dépôts, en tant qu'acteur du développement des territoires, engage des réflexions sur ces sujets dans un objectif de lutte contre les disparités territoriales. Le colloque s'appuiera sur la notion de mutation territoriale qui réinterroge les modalités d'actions des acteurs locaux, publics ou privés, et impose la nécessité de co-construire les stratégies.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 29 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Jeudi 30 août
LA DIVERSITÉ DES CONFIGURATIONS TERRITORIALES À L'HEURE DES TRANSITIONS
Matin
Caractérisation des territoires et enjeux de prospective actuels — Modérateur : Philippe FRÉMEAUX
Olivier BOUBA-OLGA : Comprendre les dynamiques territoriales, une entrée par les processus [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Nadine LEVRATTO & Denis CARRÉ : La diversité des trajectoires de développement des territoires : acteurs et systèmes
Stéphane CORDOBES : La prospective comme processus de réagencement sociospatial

Après-midi
Ateliers en parallèles : Les écosystèmes territoriaux à l'heure des transitions écologique et numérique
1) Transition écologique et territoires — Modérateur : Louis HENRY
Laetitia VERHAEGHE : Appréhender les nouvelles relations villes-campagnes en France : éclairage d'une étude de cas
Alice HERBELIN : Écologie territoriale et territoires traversés : application à la moyenne vallée du Rhône
Gilles LEPESANT : La transition énergétique comme levier du développement territorial
Benoit LEGUET : Les stratégies "climat" des territoires

2) Transition numérique et territoires — Modératrice : Vanessa CORDOBA
Antoine COURMONT : Qu'est-ce que le numérique fait aux territoires ?
Fanny LOPEZ & Cécile DIGUET : Territoires numériques et transition énergétique : quelles infrastructures ?
Gilles JEANNOT : Numérique et transformation de la gestion des villes [en collaboration avec Steve Bernardin, David Guéranger et Alexandre Mathieu-Fritz]


Vendredi 31 août
QUELS LEVIERS D'ACTION ÉCONOMIQUE LOCALE ?
Matin
Quatre exemples de leviers d'action économique locale — Modérateur : Julien GARNIER
Matthieu LEPRINCE : Simplifier les péréquations financières ?
Nicolas GILLIO & Sylvie DUVILLARD : L'action foncière et le maintien des activités productives dans les territoires des métropoles
Amandine TOUSSAINT & Julien MOULARD : Les zones d'activités économiques, ces espaces mal identifiés et pourtant leviers de développement économique et urbain
Gwénaël DORÉ : Clusters, économie de proximité et circuits courts [en collaboration avec Xavier Roy et Frédéric Wallet]

Après-midi
Table ronde d'acteurs de Normandie, enjeux et outils de la prospective territoriale — Modérateur : Philippe FRÉMEAUX
Jean-Philippe BRIAND (directeur-adjoint de l'Aucame - Agence d’urbanisme de Caen Normandie Métropole)
Sophie GAUGAIN (vice-présidente de la Région Normandie, en charge du développement économique et du soutien aux entreprises) : L'intelligence territoriale en Normandie
Robert BLAIZEAU (directeur général adjoint des services – Ville de Saint-Lô)
Fabrice JEANNE (directeur général des services du département de la Manche)
Florence MAS (directrice régionale de la Caisse des dépôts en Normandie)

"Les zones d'activités économiques, des espaces à dévoiler", exposition organisée par le Collectif Point Virgule, suivi d'un cocktail et de la remise du "prix Cerisy"


Samedi 1er septembre
VERS LA CO-CONSTRUCTION DES STRATÉGIES TERRITORIALES
Matin
Partager des visions de territoires, les ressorts de la coopération — Modératrice : Isabelle LAUDIER
Jean DEBRIE & Simon D'HÉNIN : Prospective et projet de territoires : quels dispositifs et méthodologies interdisciplinaires ?
Jean-Jacques TERRIN : Coproduction d'une vision partagée du territoire dans les villes moyennes
Patrice VUIDEL & Christian DU TERTRE : L'économie de la fonctionnalité et de la coopération : un nouveau modèle économique, levier d'un nouveau modèle de développement des territoires
Anne et Patrick BEAUVILLARD : Développer la maturité coopérative du territoire

Après-midi
Coproduire l'action locale avec des acteurs hétérogènes — Modérateur : Michel-François DELANNOY
Pauline GABILLET : Le Schéma directeur des énergies de la Métropole de Lyon, vers une politique énergétique métropolitaine solide et partagée
Bernard LEMOULT : Territoires en transition énergétique et sociétale : l'enjeu du "faire ensemble"
Frédéric GILLI : De la concertation à la co-construction : le grand public comme catalyseur de l'action locale
Hervé DEFALVARD : L'ESS à l'âge du translocalisme des communs


Dimanche 2 septembre
Matin
Conclusions du colloque, avec Franck CHAIGNEAU, Marc-Olivier PADIS, Lucie RENOU, Philippe SERIZIER et Michel SUDARSKIS

Après-midi
DÉPARTS


EXPOSITION :

"Les zones d'activités économiques, des espaces à dévoiler", organisée par le Collectif Point Virgule

Point Virgule, collectif à la croisée des disciplines liées à la ville, propose de mettre en place une exposition le temps du colloque. Il s'agit d'explorer de nouveaux supports de représentation des espaces productifs propices à nourrir les débats de Cerisy sur les nouveaux enjeux prospectifs des territoires. Souvent dépréciées, les zones d'activités économiques sont aujourd'hui des objets urbains mal identifiés et peu investis par les projets artistiques. Au travers de contributions sensibles et prospectives, il s'agira de poser un regard nouveau sur ces espaces, d'illustrer leur empreinte sur l'urbain et le paysage, sans occulter leur rôle dans les systèmes économiques locaux. Nous proposerons ainsi de croiser les regards de chercheurs, de praticiens, d'amateurs et d'usagers afin de contribuer à une compréhension et une définition de ce qu'est "l'objet ZAE" aujourd'hui.


SOUTIENS :

• Institut CDC pour la Recherche | Caisse des Dépôts
• Banque des Territoires | Caisse des Dépôts

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


HÉLÈNE BESSETTE : L'ATTENTAT POÉTIQUE


DU LUNDI 20 AOÛT (19 H) AU LUNDI 27 AOÛT (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



PRÉSENTATION VIDÉO :


DIRECTION :

Julien DOUSSINAULT, Claudine HUNAULT, Cédric JULLION


ARGUMENT :

Il se passe une chose étrange avec Hélène Bessette (1918–2000) : Gallimard publie de 1953 à 1973 treize de ses romans dans la collection blanche. Les plus grands noms de l'art et de la littérature (Beauvoir, Dubuffet, Duras, Leiris, Queneau, Paulhan, Sarraute) reconnaissent là une œuvre résolument moderne. Dans L'Express du 2 janvier 1964, Marguerite Duras évoque "la rareté extrême du talent dont [l'œuvre] témoigne" et déclare : "La littérature vivante, pour moi, pour le moment, c'est Hélène Bessette, personne d'autre en France". Malgré cela, les exemplaires s'épuisent, l'oubli gagne. Si l'œuvre ne s'est pas imposée en son temps, est-ce une question d'écriture, de style ? Est-ce une question sociale, une question d'appartenance ? Pourquoi Queneau voit-il en elle une "écriture orpheline" ?

Femme de pasteur en Nouvelle Calédonie, institutrice dans le Nord, préceptrice en Suisse, gouvernante en Angleterre, rêvant d'Amérique, Hélène Bessette, écrivaine, chercha son lieu toute sa vie. Parce qu'elle lutte contre l'obéissance et l'acceptation aveugle des hiérarchies sociales, parce qu'elle parle seule, parce qu'elle ne se soutient d'aucun groupe, d'aucun mouvement, d'aucune communauté, parce qu'elle a conscience de faire œuvre, elle se situe délibérément en dehors des mouvements intellectuels et politiques qui ont marqué les années 60/70, tout en se prononçant sur le monde qui l'entoure. Pour s'ensauver, elle mise tout sur le personnage principal de ses romans poétiques : l'écriture. Migration ininterrompue du réel à l'irréel, du rêve à la réalité, son œuvre expose, développe, superpose, transpose, renverse, inverse. Bessette crée un genre, le Roman poétique, qui devient son lieu d'expérimentation. Elle n'aura rien dit, ou si peu, sur elle à part son œuvre. La matière qu'elle a laissée sur sa vie peut n'être que fiction et jeu d'anamorphoses. Comment notre regard critique s'en trouve-t-il orienté ?

Oubliée, redécouverte et rééditée chez Léo Scheer de 2006 à 2012, elle est de nouveau en librairie depuis 2017, et promise à une publication intégrale au Nouvel Attila.

Ouvert à tous les lecteurs et curieux de cette œuvre insoumise, ce colloque, organisé à l'occasion du centenaire d'Hélène Bessette, se construira à partir de conférences, de performances et de lectures. Seront partie prenante de cette rencontre la poésie, la littérature, la psychanalyse, la philosophie, la théologie, la mathématique, la composition musicale, le jazz, le cinéma et le théâtre.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Lundi 20 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Mardi 21 août
Matin
Lectures dans le Hall de l'Orangerie
Hommage à Mathieu Riboulet, par Marie Anne GUERIN
Bertrand OGILVIE : Une si longue éclipse

Après-midi
Hélène SIRVEN : Les mondes insulaires d'Hélène Bessette. L'oxymore esthétique
Anne BIHAN : D'un autre hémisphère

Soirée
Lecture de Lili pleure avec Gilles AUFRAY et Magali MONTOYA


Mercredi 22 août
Matin
Lectures dans le Hall de l'Orangerie
Roland MEYER : Amour Bessette

Après-midi
Gilles AUFRAY : Hélène Bessette et le Rêve Américain
Annalisa LOMBARDI : "Les grandes œuvres de ceux qui ont abondamment souffert" : Hélène Bessette et la tradition du roman

Soirée
"Élégies croisées", lectures d'extraits de Bessette et de Goethe, suivies d'une discussion | Avec le colloque en parallèle Goethe : l’actualité d’un inactuel


Jeudi 23 août
Matin
Lectures dans le Hall de l'Orangerie
Silvia MARZOCCHI : Traduire Hélène Bessette dans sa langue

Après-midi
DÉTENTE


Vendredi 24 août
Matin
Cédric JULLION : Thèmes et fonctions à l'œuvre dans les romans d'Hélène Bessette
Charles ROBINSON : Le mal que vous causez, sous des apparences de nappe en dentelle, est votre tunique de Nessos

Après-midi
Julien DOUSSINAULT : Dans le secret

Le risque de l'éditeur, table ronde avec Silvia MARZOCCHI, Claire PAULHAN et Benoît VIROT

Soirée
Les "Ida" : Opératorio d'Éric BRABANT (extrait), Performance par Anaïs de COURSON (extrait), Ida en allemand (extrait), Ida en lecture croisée (italien / français) : Anaïs de COURSON et Silvia MARZOCCHI


Samedi 25 août
Matin
Lectures dans le Hall de l'Orangerie
Claudine HUNAULT : Hélène Bessette : une écrivaine qui n'appartient pas [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Après-midi
Renzo MEYER : Débusquer le vrai au détour du mot
Nicole CALIGARIS : "Le personnage fictif ne se hâte pas vers la sortie"

Soirée
Carte blanche aux auteurs, avec notamment Nicole CALIGARIS, Anne BIHAN, Silvia MARZOCCHI et Charles ROBINSON


Dimanche 26 août
Matin
Lectures dans le Hall de l'Orangerie
Marie Anne GUERIN : "Quel cinéma !" : Suite suisse d'Hélène Bessette et Le Camion de Marguerite Duras, ou l'art imaginer ce qu'il pourrait y avoir à voir et ce qu'il y a à entendre

Après-midi
Marina SALLES : "Cris et chuchotements" : voix de femmes dans quelques romans d'Hélène Bessette
Un attentat attentif, film réalisé par Liliane GIRAUDON

Soirée
Grande Balade, performance scénique et musicale, de Claudine HUNAULT et Cédric JULLION


Lundi 27 août
Matin
Descendance d'une œuvre, table ronde avec Éric et Patrick BRABANT (fils d'Hélène Bessette)

Conclusions du colloque

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Gilles AUFRAY : Hélène Bessette et le Rêve Américain
Hélène Bessette lit Gertrude Stein, Ezra Pound, E.E. Cummings, James Joyce… Hélène Bessette écrit un roman bilingue, Paroles pour une musique, en français et en anglais, aux deux tiers in English. La langue anglaise est vivante ; c'est une langue qui peut se renouveler à chaque phrase, une langue avec laquelle chacun peut jouer, une langue dont chacun peut se servir pour chercher sa voix, raconter son histoire, chanter sa colère et ses rêves, renaître ; c'est la langue des exilés, des sans-patrie, des sans-parole.
La langue est un pays ; le Rêve Américain — "the American Dream" — est aussi celui d'une langue.
Hélène Bessette et le rêve américain ou comment ces écrivains américains et irlandais qui travaillaient l'anglais — faisant de cette langue du pouvoir, majeure et impériale, un usage mineur — ont nourri son geste d'écriture.

Gilles Aufray a co-écrit avec Régis Hébette la pièce Prière de ne pas diffamer ou la véridique histoire d'Hélène Bessette de chez Gallimard (publiée dans la revue Frictions, n°25, créée au CDN de Caen en 2014). Il a collaboré à l'adaptation du roman Si et à la dramaturgie du spectacle éponyme mis en scène par Régis Hébette (créé au CDN de Caen en 2015). Il a écrit le texte "Hélène Bessette et le Rêve Américain" (publié dans Frictions, n°25).

Anne BIHAN : D'un autre hémisphère
Sans doute il importe peu de savoir si Hélène Brabant-Bessette a acquiescé avec enthousiasme ou en traînant les pieds à la longue traversée, dans le sillage de son mari pasteur, vers la Nouvelle-Calédonie / Pacifique Sud / un autre hémisphère.
Un autre lieu aurait fait l'affaire. Puis elle y aura finalement passé un temps fort bref. Moins de trois ans de date à date, dont une escale sur le chemin du retour à Sydney en Australie.
Mais.
Mais ce fut ce lieu-là, un bagne, une colonie, un lieu-île, lieu-archipel, lieu-terre/mer/ciel, un lieu-Paysage/P majuscule, sur l'autre bord du monde, par-delà la Ligne : la Nouvelle-Calédonie. Dont le nom ne figure même pas dans "La Grande Balade". Ni dans "La Route bleue". Ni dans semble-t-il aucun autre livre d'Hélène Bessette.
SI.
Et SI pourtant ce Paysage-force, cette île-prison aussi nommée île de l'oubli, était celui, dans l'angle mort de l'œuvre, ayant permis de donner corps physique à cette confuse expérience de l'étrange contre laquelle Hélène Bessette peut-être butait depuis l'enfance ?
L'étrange enfin éprouvé hors de soi, temps du Rêve-Réalité, écart possible à apprivoiser ?
Quête d'une langue autre / entre / antre, d'une langue / Croix du Sud, pour qui devine qu'écrire "n'a rien à voir avec signifier, mais avec arpenter, cartographier, même des contrées à venir" (Gilles Deleuze et Félix Guattari, "Mille plateaux") ?

Poète, dramaturge, nouvelliste, Anne Bihan, née en Bretagne entre fleuve et océan, Loire et Atlantique dont elle arpente les îles, s'envole pour la Nouvelle-Calédonie un jour de mai 1989. Sa vie et son écriture sont depuis profondément traversées par cet archipel d'Océanie dont elle partage durablement le destin. Sa résidence au sémaphore du Créac'h sur l'île d'Ouessant en 2013 lui a inspiré un Carnet de bord très suivi. Elle est depuis 2014 en charge des Publics, de la culture et de la communication à la Maison de la Nouvelle-Calédonie à Paris.
Quelques titres
Miroirs d'îles (Arcane 17, 1984) ; V ou portraits de famille au couteau de cuisine (Éditions Traversées, 2004) ; Parades (Éditions Traversées, 2004) ; Collision et autres traversées (Éditions Traversées, 2007) ; Ton Ventre est l'océan, Prix Camille Le Mercier D'Erm 2012 (Éditions Bruno Doucey, 2011) ; Toi Pays (Éditions Les Petites allées, 2016) ; "Trois fragments d'épiphanie" dans Au Nom de la fragilité – des mots d'écrivains (Erès, 2009) ; "L'Odeur des sorghos" dans Nouvelles calédoniennes (Vents d'ailleurs, 2011) ; "Répétition", dans Nouvelles de Nouvelle-Calédonie (Magellan & Cie, 2016) ; Ou encore Pour Solde de tout compte ; Voir Ouessant ; Écrire entre ; Autoportrait de l'auteur en incertaine ; Lettre à la femme empêchée

Julien DOUSSINAULT : Dans le secret
J'ai longtemps cru qu'au creux du "mystère Hélène Bessette" (une écrivaine majeure inexplicablement oubliée de l'histoire littéraire française), il y avait un secret. Et c'est en cherchant ce secret que j'ai pu écrire la biographie. Ce n'est donc pas un hasard si, pour ce colloque, je veux tourner autour de la notion de secret chez Hélène Bessette. Que renferme t-il ? Qui protège t-il ? Que met-il en danger ? Est-il au service du mensonge ou de la vérité ? Hélène Bessette parvient, dans chacun de ses romans, et grâce au "roman poétique", à exprimer l'inexprimable. En plongeant au cœur des territoires secrets de l'être humain, dans le silence des grandes solitudes, en pénétrant la nature profonde de ses personnages, elle nous fait alors mieux comprendre l'informulé, le non-dit, le gardé-en-soi ; le monologue intérieur, ce qu'elle a tu. Et, peut-être, ce qui l'a tuée.

Julien Doussinault, né en 1980, est libraire à l'Écume des Pages, à Paris. Il découvre Hélène Bessette au hasard d'une conversation et décide de faire tout son possible pour faire sortir son œuvre de l'oubli. Il est l'auteur de la première biographie d'Hélène Bessette (Léo Scheer, 2008) et s'engage dans l'édition complète de ses romans au Nouvel Attila.

Marie Anne GUERIN : "Quel cinéma !" : Suite suisse d'Hélène Bessette et Le Camion de Marguerite Duras, ou l’art imaginer ce qu'il pourrait y avoir à voir et ce qu'il y a à entendre
"Je  ne  viens  pas  pour  voir.
Ce  que  tout  le  monde  vient  voir.
Des  lacs  de  larmes  je  n'ai  rien  vu  le  premier  soir."

Suite suisse débute avec cette première vision, et aussi par ce que l'héroïne, narratrice, l'écrivain, seule, ne peut pas voir. En mettant l'accent sur l'unicité de son regard qui va sculpter le livre — et sa solitude, Suite suisse commence avec ces trois phrases qui n'en feraient qu'une avec des propositions raffinées, si un autre écrivain, Jean-Jacques Rousseau par exemple, présent tout au long du texte, les avait exprimées. L'espace, le vide, le blanc doublé, allongé (au repos ?) entre chaque mot accentue ce qui sépare Hélène Bessette de tous les autres écrivains, Marguerite Duras comprise. Même si la diction, la scansion durassiennes, mais surtout ses films semblent provenir des lointains inaccessibles de la lecture de Bessette qui avait enthousiasmé Duras. Dans Suite suisse, "Je", Stephi Bess, Fifi, la grande romancière, incarne mot à mot, dans l'absolu d'une solitude sans interlocuteur, TOUT le récit, au présent, la totalité de ce qui peut et pourrait se raconter. Ce courage, cette tyrannie, cet affront font penser à la voix omniprésente de la mendiante d'India Song. Et surtout j'ai vu Bessette, mise en scène, ou en fiction, par Duras dans Le Camion. Film essentiel, tourné au présent de l'indicatif et au conditionnel, les deux temps de prédilection de Suite suisse. D'immédiate concrétisation (figuration) de l'esprit, des imaginations, des idées. Deux Sujets, deux écritures, qui se regardent, celle de Duras dans ses films, qui divergent. Notamment leur orgueil social, et politique. Là où Bessette est la seule, rien d'autre que les phrases et que les mots, Duras ne l'est pas. Là où Hélène est entourée de vide — Marguerite est parmi les autres, et s'en fait la porte-parole. Suite suisse n'est pas un film, mais ça se pourrait, c'est Bessette qui l'évoque. Ses phrases émergent, telles des plans avec son et image, et lumière, dans "le noir opaque" :
"Alors je craque une allumette. Et sur l'écran ondoyant.
De la vacillante lumière.
Je vois cette vieille demeure.
Lourde. Large. Un peu basse.
Chargée de fer forgés. De grilles. De barreaux.
Au ras des pelouses.
Au ras de l'eau.
Pour accueillir. La Romancière Stéphi Bess.
En fuite."

Comme l'on sort du rêve pour entrer dans le film, comme Joan Fontaine entre de mémoire dans Rebecca d'Alfred Hitchcock.

Claudine HUNAULT : Hélène Bessette : une écrivaine qui n'appartient pas
Ici la femme est omniprésente dans tous ses états et Hélène Bessette n'est pas féministe. Les modes d'oppression exercés par un capitalisme mercantile transpirent dans tous ses romans et Hélène Bessette ne se dit pas socialiste. Son écriture s'impose des contraintes, avance d'hypothèse en hypothèse, le chiffre voisine avec la lettre et Hélène Bessette n'est pas oulipienne. Hélène Bessette invente un roman nouveau et elle ne fait pas partie du Nouveau Roman. Bessette n'adhère pas, ne se rallie pas, ne se soutient d'aucun mouvement, d'aucun parti, d'aucune cause. Elle avance seule avec une foi inextinguible dans la puissance de l'écriture, de son écriture. Il s'agit de faire œuvre, c'est-à-dire se risquer à être. Ce n'est pas un jeu. C'est une détermination. Quelles sont les conséquences de cette non appartenance ? En quoi ce choix lui a-t-il permis d'inventer sa propre langue et de la défendre malgré le silence autour d'elle, malgré l'isolement ? L'exigence poétique dans l'élaboration du roman serait-elle une défense pied à pied du Territoire et de la Vérité de la Personne face au mensonge de masse et à "l'ordre de l'urgence" ?

Performeuse, actrice, metteur en scène de théâtre et d'opéra, écrivain, psychanalyste. Claudine Hunault met en jeu dans toutes ses réalisations la charge poétique du mot et la puissance de la lettre. Qu'elle forme des chanteurs ou des acteurs à la présence scénique ou qu'elle soit elle-même en scène, elle développe un travail sur le verbe dans ses innombrables acceptions, cherchant à travers lui, à attraper des bouts de réel. Cette quête lui a fait rencontrer des écritures aussi rares que celles de Maurice Blanchot ou Hélène Bessette. Elle intervient dans de nombreux colloques sur les champs croisés de l'art et de la psychanalyse. Elle mène avec le musicien Cédric Jullion des recherches sur une écriture texte/musique. Depuis 1995, fondation et co-direction de Judith Productions. Conception des projets, mises en scène et interprétation. De 1972 à 1995, co-fondatrice et co-directrice du Théâtre La Chamaille à Nantes. Actrice et metteur en scène au sein du collectif. De 1993 à 1995, création du laboratoire Le Dernier Spectateur.
Performances
La Route bleue, d'après le roman poétique d'Hélène Bessette.
Grande Balade, d'après le roman poétique d'Hélène Bessette.
Les yeux clairs de Sanou Sorgho.
Autres Performances 2017/2018
Le moelleux des sons, spectacle sur Janacek avec Sarah Lavaud pianiste.
Liszt/L'errance romaine, en cours de travail avec Sarah Lavaud pianiste.
Déplacements / Dépossessions
L'Afrique, le Burkina Faso, Par les rues de sable rouge, premiers pas sur la terre africaine.
Cuba, Un Macbeth païen, mixité des langues et des peaux, des acteurs afro-cubains, des santeros, des percussionnistes / aller dans la Caraïbe éprouver un rapport à l'invisible.
Les Marquises, Le lieu d'une capture / aux Marquises on peut avoir peur du lever de soleil.
Publications
Comme une épaisseur différente de l'air, Éditions Cheyne, mars 2015.
Des choses absolument folles, Éditions EME, Bruxelles, 2012.
Désir d'Antigone, Éditions Tarabuste, 2006.
Heretu et les yeux de la nuit, Éditions L'Harmattan, 2006.
Articles
"L'Obésité, un lien chair payé", Revue ANALUEIN, n°24, juillet 2015.
"Comme si la terre se gondolait de ce que dit la voix", Triages, Art et Littérature, Éditions Tarabuste, n°22, juin 2010 et Revue ANALUEIN, n°13, décembre 2009.
"Les corps malades du signifiant", Revue de l'Association Lacanienne Internationale, n°13, 2008.
"Écritures et mise en scène de la parole", Extrait du colloque "Comme un concerto virtuel", Hôpital Édouard Toulouse, Marseille, 2001.

Cédric JULLION : Thèmes et fonctions à l'œuvre dans les romans d'Hélène Bessette
Tous les romans poétiques d'Hélène Bessette témoignent d'un traitement très sensible de la sonorité qui, du mot à la phrase, et de romans en romans, singularise tout autant le style de l'auteure, comme une basse d'Alberti dans une œuvre de Mozart, que son projet d'écriture continue tel que fut celui que Wagner a conceptualisé dans son œuvre totale. Hélène Bessette écrit comme un compositeur, peut-être sans le savoir. Elle harmonise une mise en thème de tous les éléments du discours qui, tour à tour, entrent en fonction pour conduire, répéter, accompagner, transposer, ornementer, renverser, étonner. Bouleverser. Ainsi, nous la reconnaissons. Nous sommes, par ce procédé, toujours en confiance et invités à suivre la permanente enquête qu'elle nous a livrée afin de mieux saisir ce que veut dire "s'écrire", en dehors de toute temporalité, et faire roman de soi à travers l'infaillible foi en l'éternité de l'art.

Cédric Jullion est musicien et écrivain. Il a étudié toute l'œuvre disponible d'Hélène Bessette et réalisé deux mémoires de recherche, La dissonance et la discordance, ainsi que La Pensée en fiction, sous la direction de Bruno Blanckeman, en Master de Lettres modernes à l'université Sorbonne-Nouvelle. Il est membre fondateur du "Gang du Roman Poétique", co-directeur artistique de Judith Productions, membre de l'Ensemble Cairn et Professeur d'Enseignement Artistique. Il publie ses textes littéraires sous le pseudonyme Oliver Rych.

Annalisa LOMBARDI : "Les grandes œuvres de ceux qui ont abondamment souffert" : Hélène Bessette et la tradition du roman
"J’ai peut-être écrit dix livres, mais j'en ai lu énormément" déclarait Bessette lors de l'un de ses entretiens avec Jean Paget en 1967. Les deux numéros de sa revue Le Résumé, ainsi que ses textes romanesques, sont effectivement très riches de références à la tradition littéraire, plus ou moins récente. Si au niveau des textes théoriques ces allusions gardent une valeur positive de modèle, dans les romans elles sont souvent traitées avec ironie en tant qu'emblèmes de l'exhibition superficielle d'un savoir, signes des identifications illusoires des personnages ou traces d'un horizon romanesque qui reste inatteignable. On interrogera cette ambivalence dans le traitement des références au passé littéraire, afin d'évaluer le rôle potentiellement paradoxal de la tradition dans une œuvre née sous le signe de ce "nouveau" que Queneau avait célébré à la sortie de Lili pleure et à l'époque d'un rejet répandu à l'égard du roman traditionnel qui fondait le programme créatif de certains des contemporains de Bessette.

Docteure en littérature française de l'université de Rome La Sapienza, Annalisa Lombardi est actuellement chercheuse post-doctorante à l'UMR THALIM de l'université de Paris 3. Auteure d'articles sur Jouve, Crevel et Giraudoux, elle a consacré deux mémoires à l'œuvre de Bessette et écrit les postfaces de ses romans publiés en italien par les éditions Nonostante.

Silvia MARZOCCHI : Traduire Hélène Bessette dans sa langue
À partir d'exemples concrets rencontrés lors de notre travail sur l'œuvre d'Hélène Bessette, nous explorerons certains problèmes que pose la traduction et, en particulier, soulèverons les questions qu'une écriture, comme celle de Bessette, suscite lorsqu'il s'agit de fixer un sens en vue de le recréer dans une autre langue alors que l'auteur ne l'a volontairement pas fermé dans la sienne. Comment restituer "la sphère des vibrations infinies du sens" [Roland Barthes, "Nouveaux essais critiques", dans Le degré zéro de l'écriture, Paris, Points Seuil, p. 100] dans une autre langue ? Est-ce possible ? Jusqu'où peut-on pousser les limites, syntaxiques par exemple, d'une langue lorsque traduite ? Nous tâcherons d'apporter quelques éléments de réflexion à ce qui est un questionnement toujours ouvert.

Italienne, Silvia Marzocchi, qui vit en France depuis les années 80, a travaillé notamment comme libraire à Paris et comme traductrice. Elle a traduit des ouvrages d'auteurs aussi différents que Claude Olievenstein, Olivier Py, Virginie Despentes, Hélène Bessette, ainsi que de nombreux volumes de la collection Découvertes (Gallimard). Son travail sur Hélène Bessette s'inscrit dans un projet plus personnel, fruit de sa collaboration avec la maison d'édition italienne Nonostante Edizioni. Romans d’Hélène Bessette déjà traduits en italien : N'avez-vous pas froid, Ida ou le délire, Vingt minutes de silence.

Renzo MEYER : Débusquer le vrai au détour du mot
"Débusquer le vrai au détour du mot" est l'une des facettes composant l'œuvre littéraire d'Hélène Bessette, imprégnée de la mélancolie qui nous anime lorsque nous contemplons la banalité de certains passages de notre vie alors que nous les aurions aimés trépidants et intenses. Cette mélancolie vient peut-être de la lucidité sans faille et sans triche qu'il faut garder pour proprement et fidèlement décrire les expériences passées. Cependant, les textes de Bessette témoignent de l'immense jouissance et bonheur qu'il y a à vivre notre vie. Elle fait, par son écriture, avancer cet ordre. Lors de ma première rencontre avec les écrits de Bessette, j'ai perçu une rigueur, un travail, un mouvement jusqu'à un propos qui évoquent la rhétorique et la philosophie mathématiques. Il s'agira d'étudier la relation d'un individu à la philosophie scientifique comparativement à celle qu'Hélène Bessette entretient avec son écriture afin de rapprocher deux mouvements et de ré-établir une certaine relation d'intimité entre Science et Littérature, au moins en partie. Ainsi se détermineront et s'interprèteront les propos philosophiques présents dans l'écriture de Bessette pour nourrir la pensée scientifique dans ce qu'elle a de plus rigoureux, de plus stable respectivement aux axiomes que cette pensée a eu besoin de poser pour exister, mais aussi de plus commun à tous les individus.

Renzo Meyer est étudiant en cursus scientifique, proche du monde musical et littéraire, il cherche à nourrir la pensée scientifique d'art et de mots.

Roland MEYER : Amour Bessette
Aimer son enfant, ce n'est pas désirer son enfant. Dans Lili pleure, il est question du désir de la mère. De l'enfant devenu objet du désir de la mère. Peut-on s'échapper de cette prison ? Le roman Lili pleure est l'histoire du renoncement à soi ; l'histoire de "l'absence d'importance" pour tenter de s'en libérer. Mais à quel prix ? Au prix du renoncement à se décider à agir en son nom propre ; à se décider à agir en référence à un autre, pensant par cette action prendre aux yeux de cet autre, aux yeux de tous les autres, une importance plus grande. Quelle différence entre aimer son enfant et le désirer ?

Roland Meyer est Docteur en Psychologie Clinique, Psychanalyste. Après des années universitaires orientées vers la recherche (DEA de philosophie, DEA de sociologie/ethnologie, doctorat de psychologie clinique et psychanalytique), il oriente ses recherches sur les rythmes et les mécanismes de la transe. Son engagement dans cette voie prend 3 directions : Un travail clinique en libéral ; Un travail de formateur et de supervision sur les "pathologies de l'actuel" auprès d'hôpitaux publics, de cliniques privées et des entreprises ; Un travail d'enseignement et de recherche sur la musique et la transe.
Publications, Travaux et Communications
"La jouissance à l'œil et les objets à volonté", Revue Lacanienne, 2014.
"Comprendre l'obésité", Colloque de la F.E.D.E.P.S.Y, 2015.
"Clinique de l'obésité et des troubles du comportement alimentaire", Analuein, 2013.
"Déshumanisation : nouvelle démarque avant liquidation", Cliniques Méditerranéennes, 2008.
"La fabrique de l'esclave heureux, essai sur la déshumanisation", Analuein, 2007.
"La nouvelle économie et la panne de l'Autre", Analuein, 2007.
"Paroles d'enfants à l'usage des adultes qui n'ont pas peur de grandir", 2006, L'Harmattan.
"Guérir quoi, guérir de quoi ?", in Apertura 19, 2005.

Charles ROBINSON : Le mal que vous causez, sous des apparences de nappe en dentelle, est votre tunique de Nessos
Le lien Ida-Bessette est très franc. De la démesure de Ida, Bessette possède la puissance des furies — qui est un thème très grec —, mais cette puissance, Bessette la possède dans un monde trivial, et à un moment où la littérature est incapable du cri. Cette puissance trouve donc une forme de diffusion tout autre que la forme qui devrait logiquement être la sienne : la déflagration. Elle opte pour l'échappée gazeuse du roman poétique, une forme presque privée, du fait de son peu de lecteurs, une forme-lierre au murmure droit. Le texte joue aussi, en basse continue, la carte du drame social, en exprimant la méchanceté petite bourgeoise, son mépris, sa laideur et sa sottise, ce qui n'exclut pas tout un tas de blessures ouvertes et petites plaies d'amour propre, de patrimoine menacé, qui font que la sottise des gestes quotidiens ne vaut pas absolue condamnation : à leur endroit, eux aussi connaissent une souffrance. Telle est la dimension politique du livre.

Charles Robinson explore la manière dont nous sommes au monde et en sociétés à travers ses romans et performances poétiques. Il travaille dans quatre directions qui s'entrelacent : l'écriture, la création sonore, la littérature live, le numérique (charles-robinson.blogspot.fr).
Publications
Génie du Proxénétisme, 2008, dresse les portraits d'entrepreneurs épanouis.
Dans les Cités, premier volet d'un cycle romanesque consacré à une cité fictive de banlieue et à la vie de ses habitants, devient une pièce radiophonique pour France Culture.
Fabrication de la guerre civile, second volet du cycle, 2016.

Marina SALLES : "Cris et chuchotements" : voix de femmes dans quelques romans d'Hélène Bessette
Les romans d'Hélène Bessette résonnent de cris et vociférations ou bruissent des chuchotements inquiétants de la rumeur, des "potins". Je souhaite me mettre à l'écoute de ces voix de femmes, particulièrement dans ces huis-clos féminins que sont Lili pleure, maternA, Suite suisse, Ida ou le délire, dont l'auteure observe avec acuité les divers grains, les variations de timbres, de registre, d'intensité, note les silences suggestifs, et ce, au moyen d'une riche création verbale qui tire le roman vers le théâtre ou la musique. "Organes de la parole", ces voix qui révèlent autant l'être ontologique que le personnage social portent un "discours" qui manifeste ou dénonce l'oppression, montre la déréliction, les divers visages de l'aliénation ou la rébellion des femmes, leur aspiration à la liberté. La très grande présence de la voix de l'auteure dans ces livres invite en outre à interroger les liens de l'œuvre avec le "genre" de l'autofiction, la portée et les limites du féminisme bessettien.

Docteure-ès-Lettres, chercheure associée au CRHIA de l'université de La Rochelle, Marina Salles est l'auteure de plusieurs ouvrages sur l'œuvre de J.-M.G. Le Clézio, dont Le Clézio notre contemporain (PUR, 2006) et Le Clézio, "Peintre de la vie moderne" (L'Harmattan, 2006), issus de sa thèse, et dirige actuellement Le Dictionnaire Le Clézio [en ligne]. La découverte des livres d'Hélène Bessette l'a amenée à faire des conférences (La Rochelle, Rochefort) sur cette écrivaine et lui a inspiré son livre : La Tour (Bessette), Les Choses (Perec) La Guerre (Le Clézio) : les Trente glorieuses en trois actes, publié aux Éditions Passage(s) (2018) avec une préface de Julien Doussinault.

Hélène SIRVEN : Les mondes insulaires d'Hélène Bessette. L'oxymore esthétique
Les romans poétiques d'Hélène Bessette ont l'apparence d'un archipel immense peuplé d'îles intimes, aux temporalités variées, connectées les unes aux autres par des formes littéraires spécifiques. Ces dérives des psaumes ou peut-être des ténô kanak invitent à libérer la conscience d'un ailleurs de soi mis sans cesse à l'épreuve. L'exploration du tressage subtil et vigoureux entre isolement et ouverture donne à ce paradoxe sa nécessaire vitalité. Au-delà de la parole de l'écrivaine, de la femme que fut Hélène Bessette dans la violence de ses traversées, le dépaysement esthétique persiste. La Grande Balade (1961) fera l'objet d'une attention particulière.

Hélène Sirven est maîtresse de conférences en sciences humaines appliquées à l'art et esthétique à l'École des Arts de la Sorbonne, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Membre de l'équipe Æsthetica de l'Institut ACTE (Université Paris 1, FRE 2021), co-directrice du programme "Créations insulaires" avec D. Berthet (Université des Antilles). Ses axes de recherche sont : exotismes ; anthropologie et esthétique des textes et images de "l'ailleurs" au dix-neuvième siècle (Victor Segalen) ; histoire et esthétique des voyages illustrés (revue Le Tour du monde, 1860-1914, archives Hachette) ; traductions (Éditions B2, Aldous Huxley) ; suivi éditorial (Éditions B2, Éditions de la Sorbonne, revue Recherches en Esthétique) ; insularité et art contemporain.
Sélection de texte récents
2018. Sirven, H., "Action lente. L'Œuf de Poincheval", Recherches en Esthétique, n°23, D. Berthet (dir.).
2017. Sirven, H., "Anecdoter le hasard : le geste topographique de Daniel Spoerri", Recherches en Esthétique, n°22.
2016. Sirven, H., "Impressions de voyage : la réception de l'exposition dans le contexte insulaire cubain", Recherches en Esthétique, n°21.
2015. Sirven, H., "Comparer les arts à l'aune d'une esthétique du divers ? Retour vers Victor Segalen et ses ouvertures actuelles", Nouvelle Revue d'Esthétique, n°16, PUF.
2015. Sirven, H., "D'îles en archipels, esthétiques insulaires", Recherches en Esthétique, n°20.
2105. Sirven, H., "Entretien avec Albert Loeb : le don, rencontres africaines : comment être le plus près possible de l'autre dans une sincérité et une compréhension réciproques", Figures de l'art, n°28, "Esthétique du don : de Marcel Mauss aux arts contemporains", J. Lageira et A. Lontrade (dir.).
2013. H. Sirven, "Exotisme et processus de création", site Wikicréation / Institut ACTE.
2013. H. Sirven, "Art(s) nouveau(x), au tournant du siècle", in L'Idéal Art nouveau, Xavier Chardeau et Josette Galiègue (dir.), Gallimard/Alternatives, Paris.


BIBLIOGRAPHIE :

Hélène Bessette, œuvres publiées

Aux Éditions Gallimard
Lili pleure, 1953.
MaternA, 1954.
Vingt minutes de silence, 1955.
Les Petites Lecocq, 1955.
La Tour, 1959.
La Route Bleue, 1960.
La Grande Balade, 1961.
N'avez-vous pas froid, 1963.
Si, 1964.
Suite Suisse, 1965.
Garance Rose, 1965.
Les Petites Lilshart, 1967.
Le Divorce interrompu, 1968.
Ida ou le délire, 1973.

Aux Éditions Léo Scheer, collection "Laureli"
Le Bonheur de la nuit, 2006.
maternA, 2007.
Suite Suisse, 2008.
Ida ou le délire, suivi de Le résumé, 2009.
La Tour, 2010.
N'avez-vous pas froid, 2011.
Si, 2012.

Aux Éditions du Nouvel Attila (label Othello) - Édition de l'œuvre intégrale en cours
Vingt minutes de silence, 2017.
Garance Rose, 2017.

À paraître au premier semestre 2018
On ne vit que deux fois.
La Grande Balade.
Ida ou le délire.

Ouvrages et inédits consultables à l'IMEC

Romans et nouvelles
Marie Désoublie, 1947-1948.
Ida ou le délire, 1960.
La Fête des fils, 1968.
Histoire du chien, 1966-1973.
Le Bonheur de la nuit, 1969-1972.
Fading, 1973-1976.
A cup of tea, 1975.
The team, nouvelle en anglais, 1976.
Le Roman de Rose, 1980.
Mer calme. Voyage heureux, 1982.
Roman champêtre en douze tableaux, inachevé, 1998.
Le Parcours du combattant, inachevé, non daté.

Portraits et récits
Lecocq ou la Cause imaginaire, 1956.
Portrait de groupe de vacances, 1956.
Portrait de Marguerite (Nota Bene), 1956.
La Visite de Jeanne, 1956.
Portrait d'une maison et Villa Augusta, 1994.
Portrait de groupe ce jour de congé, 1995.
Portrait d'une femme, 1996.
Portrait d'une petite fille, 1996.
Portrait d'un fait divers, 1996.
Récit St Victor. La conversation. Réflexions d'un abstentionnisme, 1997-1998.
Portrait de groupe ce jour de congé, non daté.
André Lebas, non daté.
Portrait d'une maison, non daté.
Portrait d'une femme, non daté.

Poésie
Élégie pour une jeune fille en noir, 1987-1994.
La Lampe d'albâtre, Chant d'automne, Que voit-elle ?, non datés.

Théâtre
Anna, 1967.
Chambre à louer, 1967.
Un amour malheureux, 1967.
Le Docteur Skinner, 1970.
Herford's play, non daté.
Histoire de Nkoutou, non daté.
La Veuve décontractée, non daté.
Le Boniment d'Édouard et Dorothée, non daté.
Pièce sans titre, non datée.

Scénario
Quinze août…, non daté.

Autre texte
À la recherche d'une politique avec Mounier pour en trouver une autre, non daté.

Dossier Le Résumé
Mémoire sur Georges Brabant.
Dossier sur la criminalité de 1935 à 1975.
Conditions de l'écrivain.
• Exemplaire du premier numéro de la revue.

Recherches graphiques
La Route bleue, essai de calligraphie, 1960
• Dessins et essais de couverture pour Lili pleure.

À propos d'Hélène Bessette

• Doussinault, Julien, Hélène Bessette - Biographie, Paris, Éditions Léo Scheer, Collection "Laureli", 2008 (épuisé).
• Doussinault, Julien, Hélène Bessette : l'œuvre muette, Mémoire de DEA en Littérature et civilisation française rédigé sous la direction d'Henri Godard et de Jean-Yves Tadié à l'université Paris-Sorbonne – Paris 4, 2004.
• Guerin, Marie Anne, "Hélène Bessette sommaire", in CCP, n°10 consacré à Pascal Quignard.
• Jullion, Cédric, Mémoires de recherche: "La dissonance et la discordance dans les romans poétiques d’Hélène Bessette" ; "La pensée en fiction, mémoire de recherche" ; Master 1 et 2 Sorbonne Nouvelle, sous la direction de Bruno Blanckeman.
• Dossier "Hélène Bessette" in La Revue littéraire, n°28, Paris, Éditions Léo Scheer, Automne 2006, p. 72 à 122. Par Laure Limongi, Mathieu Bénézet, Julien Doussinault, Céline Minard, Frédéric Léal et Nathalie Quintane.
• Limongi, Laure, "Hélène Bessette", in Indociles, Paris, Éditions Léo Scheer, 2012.
• Rossignol, Jean-Philippe, "Hélène Bessette", notes de lecture de maternA, in La Revue des deux mondes, mai 2008.

Revue électronique

• Desroziers, Marianne, "Le cas Hélène Bessette ou l'indifférence persistante", in L'Ampoule, n°3, 2012 [en ligne].

Articles sur Internet

• Sagot Duvauroux, Caroline, Duras et la divorcée Brabant, 2006 [en ligne].
• Limongi, Laure, Revue de presse : Hélène Bessette, 2006 [en ligne].
• Ritte, Jürgen, Hélène Bessettes Roman über Doppelmoral, 2012 [en ligne].


SOUTIENS :

• Gang du Roman Poétique
• Maison de la Poésie (Paris)
• Archives de France (dans le cadre des Commémorations nationales)
• Nouvel Attila
• Studio Éole (Blagnac)
• Institut Mémoires de l'édition contemporaine (IMEC)
• Judith Productions

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


GOETHE : L'ACTUALITÉ D'UN INACTUEL


DU LUNDI 20 AOÛT (19 H) AU LUNDI 27 AOÛT (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Christoph KÖNIG, Denis THOUARD, Heinz WISMANN


ARGUMENT :

Le nom de Goethe est célèbre et on mesure son importance, mais sans le lire vraiment. L'œuvre se présente au lecteur comme un cosmos inaccessible. L'observateur perspicace de son temps fut aussi résolument étranger à son époque et fut constamment perçu comme parfaitement inactuel. Il faut d'abord pénétrer, au moyen d'une lecture insistante, dans le monde de ses œuvres et dans leur idiosyncrasie pour découvrir leur actualité. De grands lecteurs tels que Nietzsche, Freud, Gide, Benjamin et Kafka se sont nourris, en actualisant son œuvre, de l'inactualité systématique de Goethe. C'est à cette figure de créativité que sera consacré le présent colloque. L'œuvre de l'âge mûr — le Divan occidental-oriental, les Années de voyage de Wilhelm Meister et le Faust. Deuxième partie — occupera une place centrale : Goethe retourne cette créativité contre ses propres œuvres et leur confère une dimension fortement réflexive. Comment Goethe a-t-il pu échapper à son propre classicisme ? Comment, ayant édifié sa propre statue, Goethe parvient-il à y échapper, à se réinventer autrement dans son œuvre tardive, devenant peut-être un "second auteur" à l'ombre du premier ? Les discussions interrogeront la figure de ce Goethe méconnu, encore sous-estimé et pourtant plus porteur d'avenir que l'icône du classicisme weimarien.

Les intervenants ayant particulièrement étudié ces aspects négligés de l'œuvre, seront attachés à faire apparaître les résonances actuelles de celle-ci, dans ses aspects scientifiques, sa distance instruite avec la philosophie, mais aussi dans son ouverture aux littératures du monde, dont il fut le pionnier, et dans la réinvention de la figure de l'auteur.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Lundi 20 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Mardi 21 août
LE DEUXIÈME AUTEUR
Matin
Michael FORSTER : Goethe et Hegel : le rôle de Faust dans la "Phénoménologie de l'esprit" (1807)
Christoph KÖNIG : Le statut d’auteur second comme procédé poétique dans la Nuit de Walpurgis classique

Après-midi
Anne LAGNY : Le théâtre dans l'œuvre tardive
Denis THOUARD : Du vieillissement : réflexion


Mercredi 22 août
SCIENCE, PHILOLOGIE, HISTOIRE, PHILOSOPHIE
Matin
Eli FRIEDLANDER : Goethe et Benjamin : de la Nature à l'Histoire
Bruno HAAS : Théorie des couleurs et phénomène originaire dans le contexte de la crise du langage autour de 1800

Après-midi
Atelier de lecture, avec Christoph SCHMÄLZLE : La réflexion de Goethe sur l'Art - Le groupe du Laocoon

Mildred GALLAND-SZYMKOWIAK : Symbolisme et théâtralité

Soirée
"Élégies croisées", lectures d'extraits de Bessette et de Goethe, suivies d'une discussion | Avec le colloque en parallèle Hélène Bessette : l'attentat poétique


Jeudi 23 août
LA FORME MODERNE DES ŒUVRES
Matin
Bernhard FISCHER : L'"agrégat" de Goethe : Les Années de voyage de Wilhelm Meister (1829)
Kirk WETTERS : "Voici venu le temps de l'unilatéralité". Spécialisation, différenciation et métier dans Les Années de voyage de Wilhelm Meister

Après-midi
DÉTENTE


Vendredi 24 août
PRISES DE POSITION ET AUTORÉFLEXION
Matin
Beatrice GRUENDLER : La poésie arabe comme tradition du Divan occidental-oriental

Atelier de lecture, avec Christoph KÖNIG : Philologie et créativité dans le Divan occidental-oriental

Après-midi
Werner WÖGERBAUER : L'art poétique des "Élégies romaines" [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]

Atelier de lecture, avec Christoph KÖNIG & Denis THOUARD : Élégie de Marienbaed


Samedi 25 août
CRITIQUE HISTORIQUE DES INTERPRÉTATIONS
Matin
Michael WOLL : De Goethe à Celan : le potentiel du Divan pour la poésie du XXe siècle
Alexandra RICHTER : La métamorphose comme paradigme philosophique : Walter Benjamin, lecteur des écrits scientifiques de Goethe

Après-midi
Roland KREBS : La Réception de Goethe en France dans les années 1930 et aujourd'hui
Christian HELMREICH : Soulever le voile d'Isis. Science de la nature chez Alexandre de Humboldt et Goethe


Dimanche 26 août
LA LANGUE DE LA TRADUCTION
Matin
François THOMAS : Goethe, penseur de la traduction
Guillaume MÉTAYER : Nietzsche et Goethe : épigramme et inactualité

Après-midi
Atelier de lecture, avec Elisabeth DÉCULTOT : La traduction comme dialogue critique: Goethe et Diderot sur la peinture

Soirée
Goethe en musique, avec Julien SÉGOL (baryton basse) et Kunal LAHIRY (pianiste)


Lundi 27 août
CONCLUSION
Matin
Dialogue entre Adolf MUSCHG et Christoph KÖNIG

Après-midi
DÉPARTS


SOUTIENS :

• Fondation Thyssen
• Université d'Osnabruck
• Goethe-Institut
• Association "l'art de lire"
• Centre Georg Simmel

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


VALÈRE NOVARINA : LES QUATRE SENS DE L'ÉCRITURE


DU VENDREDI 10 AOÛT (19 H) AU VENDREDI 17 AOÛT (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Marion CHÉNETIER-ALEV, Sandrine LE PORS, Fabrice THUMEREL

Avec la participation de Valère NOVARINA


ARGUMENT :

"Très longtemps il m'a semblé que tout devait atteindre quatre sens : chaque phrase, chaque réplique, chaque scène de l'Écriture — et y compris mon nom (et y compris mes initiales !)", peut-on lire dans le dernier essai de Valère Novarina, Voix négative précisément[1]. Quels sont les quatre sens possibles de VN : Voie Négative, Voix Négative, Via Novarina, Viande Niée ?… Si les pistes ne manquent pas, il convient cependant de s'interroger sur la valeur herméneutique, poétique et critique d'une telle approche : en quoi cette voie onomastique constitue-t-elle un mode opératoire pertinent pour aborder l'œuvre ? Comment saisir la quatressence d'une œuvre particulière ou de l'œuvre dans son intégralité (lecture littérale, allégorique, morale et anagogique)[2] ? Dans quelle mesure l'écriture novarinienne doit-elle être rattachée à la scène de l'Écriture et comment comprendre cette expression dans toutes ses dimensions ?

Par ailleurs, ces quatre sens de l'écriture renvoient-ils à quatre points cardinaux qui détermineraient un territoire novarinien ? Sont-ils à mettre en relation avec les "quatre langues nourricières"[3] qu'évoque l'écrivain (le hongrois, le dialecte franco-provençal, l'italien valsésian et le latin) ? Avec diverses autres langues / langues autres ? Peut-on les relier à cette quatrième personne du singulier dont se revendique l'auteur[4] ? En quoi cette quatressence scripturale invite-t-elle à explorer les voies poétiques, dramatiques/dramaturgiques, picturales et musicales — mais aussi philosophiques, théologiques ? Faut-il donc excéder le quatre ?

Tels sont quelques-uns des enjeux que se propose d'approfondir ce premier colloque de Cerisy consacré à l'œuvre d'un écrivain, dramaturge et peintre d'ores et déjà considéré comme un classique de la modernité. Ont répondu présents la plupart des principaux spécialistes et interlocuteurs de Valère Novarina : écrivains, philosophes, traducteurs, universitaires, comédiens et metteurs en scène. C'est dire que, en présence de l'auteur qui interviendra de diverses façons — notamment par des lectures —, seront développés de multiples domaines : théâtre, poésie, philosophie, dramaturgie, peinture, théorie, traduction, culture et langues de l'antiquité, histoire des idées… Pour le plus grand plaisir des passionnés, qu'ils soient professionnels ou amateurs éclairés.

[1] P.O.L, 2017, p. 40.
[2] Dans cette même page, Novarina nomme "sens à l'arraché" ce sens anagogique qui est "sursens", passage du sens littéral au sens spirituel.
[3] Cf. ibid., p. 36-47.
[4] Cf. La Quatrième Personne du singulier, P.O.L., 2012.


CALENDRIER DÉFINITIF :

Vendredi 10 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Samedi 11 août
Matin
Marion CHÉNETIER-ALEV, Sandrine LE PORS & Fabrice THUMEREL : Ouverture
Francis COHEN : Ethnographie du stade d’action dans le théâtre novarinien
Constantin BOBAS : Valère Novarina, hypothèses pour une écriture synesthésique d'origine lointaine

Après-midi
Lecture de L'Homme hors de lui, par Valère NOVARINA
Thierry MARÉ : Valère Novarina, avec ou sans Japon
Enikő SEPSI : Le rituel kénotique dans les travaux (écrits et spectacles) de Valère Novarina
Lecture de Voie négative, par Valère NOVARINA

Soirée
Projection | Le Vrai sang, texte et mise en scène de Valère Novarina (2011), captation à l’Odéon par Virgile Novarina et Raphaël O’Byrne


Dimanche 12 août
Matin
Annie GAY : Entrée dans l'impossible "avec l'acteur comme objet de désir"
Jean-Luc STEINMETZ : L'antédiluvien

Après-midi
Vernissage de l'exposition Novarina (une sélection de dessins et de photographies des spectacles)
Claude BUCHVALD : Mettre en scène Valère Novarina : L'Opérette imaginaire, accompagnée par l'acteur Claude MERLIN
Lecture de Lumières du corps, par Claude MERLIN
Table ronde avec Valère NOVARINA et Zsófia RIDEG

Soirée
Musique | "Dialogue avec une langue inconnue" [à partir d'Une langue inconnue de Valère Novarina (Éditions Zoé, 2012)], avec Mathias LÉVY (violon) et Valère NOVARINA (voix)


Lundi 13 août
Matin
Christine RAMAT : Les bouffonneries macabres sur la scène novarinienne : un comique rédempteur [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Marie GARRÉ NICOARÃ : Voix et dispositifs marionnettiques dans l'écriture de Novarina [texte lu par Sandrine LE PORS]

Après-midi
Lecture de L'Atelier volant, par Valère NOVARINA
Marie José MONDZAIN : Variations autour de L'Homme hors de lui
Inhye HONG : "Sentiment inconnu" : la porte ouverte sur les catharsis

Soirée
Théâtre | Le Discours aux animaux de Valère Novarina, par André MARCON


Mardi 14 août
Matin
Laure NÉE : Novarina. L'intranquillité
Marco BASCHERA : Comment faut-il lire les textes théâtraux de Valère Novarina ?

Après-midi
DÉTENTE

Soirée
Théâtre | "Le Monologue d'Adramélech : Homo Automaticus" de Valère Novarina, par Leopold von VERSCHUER


Mercredi 15 août
Matin
Olivier DUBOUCLEZ : "Un vide est au milieu du langage". Novarina et le sens de la prière
Lecture de Le Drame de la vie, par Valère NOVARINA
Débat autour d'Homo Automaticus, avec Leopold von VERSCHUER

Après-midi
Leopold von VERSCHUER : Traduire les litonies ou les quatre outils de la traduction
Angela LEITE LOPES : Traduire, penser, jouer. Valère Novarina et son vivier des langues
Table ronde sur la traduction, avec Yuriko INOUE, Enikő SEPSI et Zsófia RIDEG

Soirée
Dialogue avec le colloque en parallèle : Aragon vivant


Jeudi 16 août
Matin
Eric EIGENMANN : Valère Novarina : les quatre temps du respir
Patrick SUTER : Valère Novarina : une écriture frontalière

Après-midi
Louis DIEUZAYDE : Faire l'animal. Quelques sorties de route de l'humanité dans le jeu de l'acteur novarinien
Rafaëlle JOLIVET PIGNON : De la cour d'honneur à la cour d'école : la poétique novarinienne à l'épreuve du bac théâtre

Soirée
Musique | "Éloge du réel" (textes de Valère Novarina), avec Christian PACCOUD (accordéon) et Agnès SOURDILLON (voix)


Vendredi 17 août
Matin
Céline HERSANT : "Espace, es-tu là ?" : cartographie des territoires novariniens
Marion CHÉNETIER-ALEV & Fabrice THUMEREL : Conclusions
Lecture de Chaos, par Valère NOVARINA

Après-midi
DÉPARTS


PRESSE / MÉDIAS :

• "Ouverture du colloque", par Marion CHÉNETIER-ALEV, sur le site Libr-critique | 23 août 2018.

• "Aperçu des trois premières journées", par Fabrice THUMEREL, sur le site Libr-critique | 5 septembre 2018.

• "Compte-rendu du colloque", écrit par Pierrette EPSZTEIN, dans La Une CED, Les Chroniques sur le site La Cause Littéraire | 18 décembre 2018.


BIBLIOGRAPHIE :

DES ŒUVRES UTOPIQUES POUR ALLER TRÈS LOIN

Le Drame de la vie, Paris, P.O.L, 1984 ; Rééd. "Poésie/Gallimard", Préface de Philippe Sollers, 2003.
Le Discours aux animaux, Paris, P.O.L, 1987.
Théâtre [L'Atelier volant, Le Babil des classes dangereuses, Le Monologue d'Adramélech, La Lutte des morts, Falstafe], Paris, P.O.L, 1989.
Je suis, Paris, P.O.L, 1991.
La Chair de l'homme, Paris, P.O.L, 1995.

SEPT ŒUVRES POUR LA SCÈNE

Le Jardin de reconnaissance, Paris, P.O.L, 1997.
L'Opérette imaginaire, Paris, P.O.L, 1998.
L'Origine rouge, Paris, P.O.L, 2000.
La Scène, Paris, P.O.L, 2003.
L'Acte inconnu, Paris, P.O.L, 2007.
Le Vrai sang, Paris, P.O.L, 2011.
Le Vivier des noms, Paris, P.O.L, 2015.

SEPT ESSAIS PAR VALÈRE NOVARINA

Le Théâtre des paroles, Paris, P.O.L, 1989.
Devant la parole, Paris, P.O.L, 1999.
Lumières du corps, Paris, P.O.L, 2006.
L'Envers de l'esprit, Paris, P.O.L, 2009.
La Quatrième Personne du singulier, Paris, P.O.L, 2012.
Observez les logaèdres !, Paris, P.O.L, 2014.
Voie négative, Paris, P.O.L, 2017.

DEUX ENTRETIENS AVEC VALÈRE NOVARINA

Paysage parlé (avec Olivier Dubouclez), Chatou, Les Éditions de la transparence, 2011.
L'Organe du langage, c'est la main (avec Marion Chénetier-Alev), Paris, Argol, 2013.

SEPT DOSSIERS ET OUVRAGES CONSACRÉS À VALÈRE NOVARINA

TXT, n°12, Paris, Christian Bourgois, 1980, p. 3-49.
Valère Novarina. Théâtres du verbe, Alain Berset (dir.), Paris, Corti, "Les Essais", 2001.
Europe, n°880-881, Paris, août-septembre 2002, p. 3-178.
Le Théâtre de Valère Novarina. Une scène de délivrance, Louis Dieuzayde (dir.), Aix-en-Provence, Publications de l'université de Provence, 2004.
La Voix de Valère Novarina, Pierre Jourde (dir.), Paris, L'Harmattan, "L'Écarlate", 2004.
Littérature, n°176 : "Valère Novarina : une poétique théologique ?", O. Dubouclez, É. Grossman, D. Guénoun, A. James (dir.), Paris, Larousse, décembre 2014.
Valère Novarina, Laure Née (dir.), Paris, Classiques Garnier, "Écrivains francophones d'aujourd'hui", 2015.


FILMOGRAPHIE :

L'Atelier d'écriture de Valère Novarina, film réalisé par Pascale Bouhénic, DVD, Paris, Centre Georges Pompidou, 1996.
Ce dont on ne peut parler, c'est cela qu'il faut dire, film réalisé par Raphaël O'Byrne, Paris, Les Films à Lou/ARTE France, diffusion Arte, 15 novembre 2002. Rééd. dans L'Acte inconnu de Valère Novarina, coffret 2 DVD, livret élaboré par Marion Ferry, Chasseneuil-du-Poitou, SCÉRÉN/CNDP-CRDP, "Œuvres accompagnées", n°3, 2010.


SITOGRAPHIE :

• On trouvera sur le site de l'auteur une bibliographie complète des publications et des manifestations de, et autour de, Valère Novarina : novarina.com.


SOUTIENS :

• Centre de Recherches Textes & Cultures, équipe "Praxis et esthétique des arts" | Université d'Artois
• ICD "Interactions culturelles et discursives" (EA 6297) | Université de Tours
• Institut de Recherche en études théâtrales (EA 3959), Programme fédératif de recherche Mémoire des arts et des lettres & Théâtrothèque Gaston Baty | Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3
• Normandie Livre & Lecture
• Éditions P.O.L
• Site Libr-critique

Programme 2018 : un des colloques

Programme complet


ARAGON VIVANT


DU VENDREDI 10 AOÛT (19 H) AU VENDREDI 17 AOÛT (14 H) 2018

[ colloque de 7 jours ]



DIRECTION :

Daniel BOUGNOUX, Luc VIGIER


ARGUMENT :

Quarante ans après le colloque Le mouvement - Aragon, dirigé à Cerisy par Daniel Bougnoux en 1978, l'œuvre et la figure de l'écrivain ont connu d'importants développements posthumes, notamment marqués par la publication de huit volumes (dont un album) dans la bibliothèque de la Pléiade, par l'édition régulière de quatre revues et la soutenance d'un nombre considérable de thèses. Aragon n'est pas une curiosité patrimoniale, ni tout à fait un "classique" qu'on saurait donc où classer, sa production follement prolifique déborde les rangements ordinaires et ne cesse de troubler, d'enchanter ou d'interroger.

Ce nouveau colloque explorera sans doute quelques aspects inédits ou des textes à découvrir ; mais on insistera surtout sur la relation personnelle que ses livres entretiennent, d'une part, avec les chercheurs et, d'autre part, avec les simples lecteurs, qui sont aussi les auditeurs de merveilleuses chansons tirées de ses poèmes. Qu'est-ce qu'Aragon a encore à nous dire d'urgent ou de singulier aujourd'hui ? Quels écrits, et quels cris, font de sa haute figure un "contemporain capital" ? Beaucoup lui contestent ce titre. Aragon divise, et son orageuse silhouette suscite toujours autant d'amour que de haine. Au-delà des circonstances historiques, auxquelles lui-même accordait tant d'attention et qui ont bien sûr changé, les pressions et les sommations venues des sentiments, des passions ou de la révolte peuvent trouver dans cette œuvre un miroir ou une caisse de résonance très actuels. Largement ouvert à celles et ceux qui aiment lire Aragon, cette rencontre posera à chacun la question suivante : et vous, quelles raisons de vivre, quelles ressources morales, esthétiques, politiques tirez-vous de cet homme, de cette œuvre ? En quoi vous touche-t-il à l'intime ?


CALENDRIER DÉFINITIF :

Vendredi 10 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Samedi 11 août
Matin
Daniel BOUGNOUX : "Dans les ruines du temps démantelé" (Aragon) [enregistrement audio en ligne sur La forge numérique de la MRSH de l'université de Caen Normandie et sur le site Radio France, rubrique France Culture]
Luc VIGIER : Aragon ou l'écriture dessinée (1)

Après-midi
Elza ADAMOWICZ : Le collage ou la contradiction dans le réel
Johanne LE RAY : Aragon, au risque de la croyance

Soirée
Cabaret Aragon, par Liselotte HAMM & Jean-Marie HUMMEL (La Manivelle), avec Daniel BOUGNOUX [extrait vidéo sur la chaîne YouTube de Cerisy]


Dimanche 12 août
Matin
Georges SEBBAG : Aragon prend congé et revient saluer
Henri BÉHAR : Aragon, la machine au défi

Après-midi
Louise MAI : La loi, le moi et l'infini : pour une éthique du sujet aragonien
Emmanuelle ROIRON : Le rire d'Aragon [texte lu par Daniel BOUGNOUX]


Lundi 13 août
Matin
Jean-François RABAIN : Blanche, entre mémoire et oubli
Alice EL GHABA-ÉTIENNE : L'enchantement de la langue

Après-midi
Anne SZULMAJSTER-CELNIKIER : Aragon linguiste
Wolfgang ASHOLT : Aragon et l'Allemagne

Soirée
Cabaret franco-allemand, par Liselotte HAMM & Jean-Marie HUMMEL (La Manivelle)


Mardi 14 août
Matin
Maryse VASSEVIÈRE : Encore une fois Les Communistes ou la fin du grand récit
Aurélien D'AVOUT : L'immersion dans l'apocalypse. Lecture croisée des Communistes d'Aragon et du film Dunkerque de Christopher Nolan

Après-midi
DÉTENTE


Mercredi 15 août
Matin
Robert HORVILLE : Aragon/Ferré, deux conceptions croisées de la mise en musique des poèmes
Alice LEBRETON : Les collages dans le processus de création d'Aragon et dans la politique éditoriale des Lettres françaises (1965-1969)

Après-midi
Stéphane HIRSCHI : Aragon : le sans-père
Francisco FERREIRA : "Le biseau des baisers" : Aragon godardisé
Siân LUCCA : Aurélien, la question du genre

Soirée
Aragon dans ses lettres vives, lectures par Luc VIGIER
Dialogue avec le colloque en parallèle : Valère Novarina : les quatre sens de l'écriture


Jeudi 16 août
Matin
Edouard BÉGUIN : La vie de "l'homme écrit"
Claude ADELEN : La poésie d'Aragon

Après-midi
Velimir MLADENOVIĆ : Elsa Triolet et la Yougoslavie
Luc VIGIER : Aragon ou l'écriture dessinée (2)
Jean-Luc STEINMETZ : Entre Valère Novarina et Aragon


Vendredi 17 août
Matin
Daniel BOUGNOUX & Luc VIGIER : Conclusions générales

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Elza ADAMOWICZ : Le collage ou la contradiction dans le réel
Roman, tragédie, drame ? Le discours d'Aragon sur le collage prend des allures de récit théâtral, avançant à coup d'oppositions (collage cubiste contre surréaliste, poétique contre politique) et de contradictions (collage assimilé au merveilleux ou mis au service du réel, considéré comme simple jeu sans conséquence ou "test significatif de ma propre aventure spirituelle"). Et pourtant à partir de ces contradictions, de ce disparate, Aragon cherche à fabriquer une continuité, un "roman" dont les protagonistes — Max Ernst, John Heartfield ou Jiri Kolar — marqueraient les étapes de son parcours esthétique et politique. Notre but est de démonter les mécanismes de ce roman, l'histoire du collage constamment réécrite, pour montrer comment le collage est instrumentalisé, subordonné à l'itinéraire idéologique d'Aragon.

Elza Adamowicz est professeure émérite à Queen Mary University of London. Elle a publié de nombreuses études sur l'avant-garde européenne, Dada, le Surréalisme, et le livre d'artiste.
Publications
Surrealist Collage in Text and Image : Dissecting the Exquisite Corpse (1998, 2004).
Ceci n'est pas un tableau : les textes surréalistes sur l'art (2004).
Dada and Beyond (Co-édition, 2 vol. 2011, 2012).
Dada Bodies : between battlefield and fairground (À paraître).
Recherches actuelles
Un ouvrage sur André Breton et les arts visuels (Reaktion Press).

Claude ADELEN : La poésie d'Aragon
L'intervention comprend trois parties autour d'un thème qui est, selon son titre ("Une chose de caractère intime"), celui du traumatisme de l'abandon, lequel plonge profondément dans l'inconscient d'Aragon. Au-delà du fameux "mentir vrai", sous l'exaltation de l'amour, l'utopie politique (l'avenir de l'homme) on peut entrevoir la partie immergée de l'iceberg. Sous le bel canto (le lyrisme du désastre), sous la métaphore du théâtre ("Théâtre de l'insomnie") et dans les grands livres de poésie des années soixante, se cache "un mal inguérissable", un profond désespoir, un secret inavouable. Tous les grands poèmes d'Aragon sont des poèmes "à crier dans les ruines".

Claude Adelen est professeur de Lettres Modernes en région parisienne, à la retraite, réside à Montpellier. Ses premiers poèmes ont été publiés dans Les Lettres françaises, en 1969, à l'initiative d'Elsa Triolet et d'Aragon. Il est membre du comité de rédaction de la revue Action poétique de 1971 à 2013, date à laquelle cette revue a cessé de paraître. En tant que critique de poésie, il collabore à La Quinzaine littéraire, la NRF, Europe. Ses chroniques de poésie publiées dans Action poétique depuis 1987, ont été rassemblées en 2004 dans l'Émotion concrète (Éditions Comp'Act). Il a été secrétaire général de la Maison des Écrivains à Paris de 2004 à 2008.
Publications (Poésie)
Légendaire, EFR., Coll. "Petite Sirène", 1977.
Intempéries, Ipomée, 1989.
Le nom propre de l'amour, Le cri et J. Darras, 1994.
Aller où rien ne parle, Farrago, Coll. "Biennale internationale des poètes", 2001.
Soleil en mémoire, Dumerchez, 2002, Prix Apollinaire.
D'où pas même la voix, Dumerchez, 2006, Prix Louise Labé.
Légendaire, Auto-anthologie, Flammarion, 2010, Prix Théophile Gautier de l'Académie Française.
Obligé d'être ici, Obsidiane, 2012.
L'Homme qui marche, Flammarion, 2015.
"Je déteste les dieux qui n'ont pas mal aux pieds", Variations Hugo (À paraître chez Obsidiane).

Wolfgang ASHOLT : Aragon et l'Allemagne
"La culture allemande [qui] constitua l'un des aspects de la formation intellectuelle d'Aragon" (Annick Jauer) ne sera pas envisagée dans son ensemble mais à partir de quatre situations-clés : la rencontre avec les réalités sociales et politiques allemandes en 1918/19 ainsi que lors du séjour berlinois en 1922 ; l'anti-fascisme d'avant 1940 et surtout la "Reconnaissance à l'Allemagne" en 1939 ; les conséquences de l'expérience de l'occupation dans L'Enseigne de Gersaint en 1945 et le sort du "héros tragique du réalisme" (Florian Gödel) avec la réception dans les deux Allemagnes jusqu'à la "redécouverte" de l'Aragon surréaliste dans les deux pays au cours des années 1970. Au-delà de la diachronie, l'importance de la relation avec la culture allemande trouvera sa conclusion avec la tragédie du "vent interminable de l'Histoire" dans le poème "Hölderlin" de 1967, dépassant largement les influences d'une culture nationale.

Edouard BÉGUIN : La vie de "l'homme écrit"
"Aragon vivant" : cet intitulé invite à envisager la survie de l'œuvre de l'écrivain dans l'intensité du vivre. Faire survivre cette œuvre, cette tâche qui incombe à la postérité des lecteurs, ne consisterait pas à la classer, à la fixer, à la faire résister à l'épreuve du temps mais à activer les ressources de vie qu'elle recèle, pour assurer sa transformation, son renouvellement, son maintien en devenir. En préalable à une telle entreprise, il semble utile de se demander comment celle-ci s'accorde avec l'œuvre elle-même. Dans cette perspective, on se propose d'examiner la façon dont Aragon a conçu l'articulation du vivre et de l'écrire. L'investigation, tout en parcourant la totalité de l'œuvre, se fera sous le signe du "concept" de "l'homme écrit" qu'Aragon a mis en circulation dans Théâtre/Roman, son "dernier roman", ce texte testamentaire où l'écrivain s'affronte à la question de sa survie.

Edouard Béguin, professeur agrégé honoraire de l'Éducation nationale, a été le premier président de l'Équipe de Recherche Interdisciplinaire sur Louis Aragon et Elsa Triolet (ERITA). Il est l'auteur d'une thèse soutenue en 2002 à l'université Lyon 2 et intitulée Faire œuvre - Le problème de l'invention dans l'œuvre d'Aragon.

Henri BÉHAR : Aragon, la machine au défi
Oui, j'ai connu Aragon vivant, si c'est là le critère auquel il faut répondre pour s'exprimer au cours du présent colloque. Je figure même, par métaphore, dans l'un de ses romans, Blanche ou l'oubli. Mais son œuvre, je la connaissais bien davantage, d'une façon traditionnelle, dirais-je, jusqu'au jour où je l'ai abordée d'une manière toute différente grâce à la saisie numérique que mon frère opéra de l'ensemble intitulé L'Œuvre poétique d'Aragon, et aux diverses analyses, d'ordre mathématique, auxquelles je la soumis, dont je donnai quelque aperçu au colloque de Reims. Il est étrange que cet auteur, si curieux de la recherche qu'on pourrait entreprendre sur ses écrits, au point d'en léguer une partie, considérable, au CNRS, n'ait guère fait l'objet de ces travaux monumentaux auxquels se sont livrés divers chercheurs sur les œuvres de Flaubert, Proust ou Zola, en ayant recours à la machine. En l'attente d'une telle somme, mon propos sera triple : 1) déterminer la valeur exacte que l'auteur accordait aux deux concepts employés tour à tour par les organisateurs ; 2) me livrer à un examen critique des études assistées par ordinateur sur le corpus aragonien et, réciproquement, voir ce que des approches traditionnelles gagneraient à s'appuyer sur des analyses computationnelles ; 3) voir, enfin, comment l'œuvre d'Aragon, par certaines subtilités échappant à l'esprit de géométrie, met la machine au défi de l'interpréter totalement.

Daniel BOUGNOUX : "Dans les ruines du temps démantelé" (Aragon)
J'aurai au cours de ma vie beaucoup fréquenté Aragon, à travers l'édition de cinq volumes de ses romans dans la Pléiade notamment, qui ont fait de cet auteur ma véritable université. Je voudrais donc réfléchir à ce qu'il m'a vraiment appris, aux ressources d'énergie intellectuelle et morale, de courage, d'invention qu'il peut nous prodiguer si nous le lisons bien. Mais réfléchir aussi, dans les parages de François Jullien, au vers fameux "Le temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tard" : que veut dire "apprendre à vivre", est-ce bien concevable ? Nous, qui faisons profession d'enseigner, qu'aurons-nous vraiment transmis aux jeunes gens qui nous ont écoutés pendant quarante ans disserter des œuvres ? Mais encore, question médiologique, comment un auteur se survit-il ? Pourquoi (par exemple) l'éclipse presque totale de noms qui furent grands de leur vivant (Anatole France, Romain Rolland) et l'essor posthume de quelques autres ? Dans le cas d'Aragon, plus lu aujourd'hui qu'Eluard, à quoi tient sa (relative) survie, aux romans, aux dizaines de poèmes mis en chanson ? De quelle alchimie se compose ce qu'on appelle une postérité, cette floraison des cimetières ?

Daniel Bougnoux, philosophe, ancien élève de l'ENS, est professeur émérite à l'université des Alpes de Grenoble. Auteur d'une vingtaine d'ouvrages consacrés à la littérature et aux théories de l'information-communication, il a accompagné Régis Debray dans l'aventure des Cahiers de médiologie, devenus revue Médium. Il a dirigé l'édition des Œuvres romanesques complètes d'Aragon (cinq volumes) dans la bibliothèque de la Pléiade, et présenté aussi Le Paysan de Paris dans les Œuvres poétiques complètes de la même collection. Auteur avec Cécile Narjoux de deux Foliothèques, sur Aurélien puis Le Roman inachevé, il tient régulièrement un blog, "Le Randonneur" hébergé par La Croix, où il est assez souvent question d'Aragon, et maintenant de ce colloque en préparation.

Aurélien D'AVOUT : L'immersion dans l'apocalypse. Lecture croisée des Communistes d'Aragon et du film Dunkerque de Christopher Nolan
La dernière partie des Communistes d'Aragon et le récent film de Christopher Nolan restituent l'expérience de "l'enfer de Dunkerque" vécu par des milliers de soldats français et britanniques fuyant les troupes allemandes en mai-juin 1940. Ces deux œuvres produisent chez le lecteur ou le spectateur l'expérience poignante d'une immersion dans l'apocalypse de la guerre. La convocation du film Dunkerque permet d'interpréter à nouveaux frais le dispositif narratif employé par Aragon, dont l'intégration de cartes topographiques au sein même du texte est l'un des traits saillants. Derrière la puissance immersive des deux œuvres prévaut toutefois deux points de vue nationaux bien distincts. Il conviendra en ce sens d'observer les écarts entre la perception française et anglaise de la guerre ainsi que leurs implications politiques. Cette communication a donc pour but d'interroger les rapports entre poétique et politique du témoignage.

Aurélien d'Avout, ancien élève de l'École normale supérieure (Ulm) et agrégé de Lettres modernes, est actuellement doctorant à l'université de Rouen. L'objet de sa thèse, menée sous la direction de Jean-Louis Jeannelle, porte sur les représentations du territoire français dans les récits de l'année 1940.

Alice EL GHABA-ÉTIENNE : L'enchantement de la langue
La langue est le matériau de travail de chaque écrivain, mais elle revêt une importance particulière chez Aragon, sur lequel sa propre langue, mais aussi les langues autres (langue des autres écrivains et langues étrangères), exercent une fascination particulière, notamment à travers des procédés de citation et traduction, d'appropriation progressive de l'altérité pour se dire. L'œuvre aragonienne est donc le fruit d'un métissage langagier, qui prend une tournure particulièrement significative dans Le Fou d'Elsa avec l'arabe à travers la réappropriation de la figure du Medjnoun pour dire la folie de l'amour d'Elsa. Ce métissage comme cet intérêt pour les langues et les civilisations orientales sont aussi mis en scène par Mathias Enard (qui cite Aragon comme l'un de ses poètes préférés) dans ses romans, qui font se confronter Orient et Occident, à travers une hypertextualité vertigineuse. Il s'agira donc, à partir de cet écho oriental, de questionner les liens entre ces deux auteurs, d'esquisser une poétique comparée de la fascination pour l'autre et, au-delà, de son exhibition comme source de l'écriture.

Alice El Ghaba-Étienne est agrégée de Lettres Modernes et auteure de deux mémoires de master sur l'intertexte anglais chez Aragon, elle enseigne actuellement en région parisienne. Elle a rédigé plusieurs notices du Dictionnaire Aragon à paraître chez Champion, sous la direction de Nathalie Piégay et Josette Pintueles.

Stéphane HIRSCHI : Aragon, le sans-père
De la figure de Boniface, présenté comme le "sans-père" dans Les Voyageurs de l'Impériale, jusqu'au fil, plus que suggéré par Aragon dans Henri Matisse roman, de la construction par ce livre d'une forme d'adoption implicite du romancier par le peintre — dont ce livre serait témoignage et manifestation, toute l'œuvre d'Aragon semble traversée par cette question existentielle qui le taraude d'abord en tant qu'homme : comment exister sans père ? Il traduit d'emblée ce manque en effaçant de ses couvertures le prénom Louis hérité du père biologique, Louis Andrieux. Aragon s'affiche ainsi comme "sans père", marqué par un patronyme sans ascendant. Dès lors, en s'appuyant sur la mise en œuvre du personnage de Boniface, celui qui va sauver Suzanne, la fille de Blanche, on s'attachera à mettre en lumière la dynamique d'auto-engendrement si caractéristique d'Aragon, éternel orphelin d'une écriture de l'infini, en particulier dans plusieurs de ses romans, du Monde réel jusqu'aux derniers livres.

Stéphane Hirschi est un ancien élève de l'École Normale Supérieure (Ulm), ancien Président des Presses universitaires de Valenciennes ; Doyen de la Faculté des Lettres, Langues, Arts et Sciences Humaines (FLLASH) ; Professeur de littérature française moderne à l'université de Valenciennes depuis 1999.
Douze livres publiés ou coordonnés, dont Sur Aragon – Les voyageurs de l’infini ; Aragon et le Nord ; Jacques Brel, Chant contre silence ; Chanson : l'art de fixer l'air du temps et La chanson française depuis 1980 ; plus de quatre-vingt dix articles parus en France et à l'étranger.

Robert HORVILLE : Aragon/Ferré, deux conceptions croisées de la mise en musique des poèmes
En 1961, paraît, chez Barclay, le disque Les Chansons d'Aragon chantées par Léo Ferré. Cette collaboration entre le poète et le musicien va leur donner l'occasion d'exprimer, l'un et l'autre, leur conception de la mise en musique des poèmes. Deux textes croisés, "Léo Ferré et la mise en chanson, pour Aragon", "La Mise en musique pour Léo Ferré", verront ainsi le jour, figurant sur la pochette du disque et publiés conjointement dans Les Lettres Françaises du 19 janvier 1961. Ce sont ces deux textes, parfaitement complémentaires, qui donneront matière à cette communication.

Robert Horville, professeur émérite à l'université de Lille, a pour champ principal de recherche le XVIIe siècle et le théâtre. Auteur de plus de 40 ouvrages et d'une centaine d'articles, il a dirigé plusieurs collections de livres scolaires, à créé, à l'université de Lille 3, le département d'études théâtrales, qu'il a dirigé pendant une vingtaine d'années, et a été professeur invité dans une quinzaine d'universités étrangères. Il a aussi écrit plusieurs articles sur Aragon et, proche de Léo Ferré, il a beaucoup travaillé sur son œuvre, auquel il a consacré de nombreuses interventions et de nombreux articles : il a, en particulier, organisé, en 2004, un colloque international, réunissant une trentaine d'intervenants, intitulé "L'Œuvre polymorphe de Léo Ferré et a été l'instigateur des Rencontres d'Aulnoye-Aymeries organisées autour de ce grand artiste.

Alice LEBRETON : Les collages dans le processus de création d'Aragon et dans la politique éditoriale des Lettres françaises (1965-1969)
L'esthétique des collages est intimement liée à la jeunesse d'Aragon et la grande période des rencontres entre Dada et le surréalisme. Pourtant, comme la jeunesse en tant que telle et le souvenir des grands visages qui ont accompagné celle d'Aragon, les collages apparaissent parmi les grands sujets d'actualité à part entière à la fin des années 1960 dans l'hebdomadaire Les Lettres françaises. La mise à mort ne constitue pas la seule œuvre d'Aragon symptomatique d'une nouvelle étape tant romanesque qu'éditoriale : ce n'est pas un hasard si la même année paraît l'essai d'Aragon Les collages, comme un autre signe du dialogue que permettent Les Lettres françaises entre le début des années 1920 et les années 1960. Au cœur de ce dialogue vont se jouer les grandes questions récurrentes soulevées par les articles des Lettres françaises et particulièrement depuis le basculement de la politique éditoriale que suscite La mise à mort : ainsi, les Collages, œuvre de 1965 de rassemblements de textes sur des artistes qu'Aragon aime à percevoir comme un "roman inachevé" jouent le rôle de passerelle pas uniquement entre deux époques, entre deux états de jeunesse, vers la définition du réalisme perpétuellement en réflexion : elle est aussi le pont entre la notion de "roman" et l'"actualité", les deux faces du visage des Lettres françaises.

Johanne LE RAY : Aragon, au risque de la croyance
Dans un passage bien connu de La Fin du Monde Réel, Aragon se présente comme "appartenant à une catégorie d'hommes qui ont cru désespérément à certaines choses", avant de compléter sa pensée en précisant que ces hommes ont "toujours cru plus fort qu'ils n'ont craint". Comment ne pas identifier dans ce courage de croire, ce corps à corps avec l'Histoire, cette façon de s'exposer, une ressource majeure et très actuelle ? Alors même que la croyance est souvent stigmatisée par le sceptique pour le confort et la facilité qu'elle offrirait, et assimilée s'agissant d'Aragon à une persévérance coupable dans l'erreur, cette communication s'attachera à montrer qu'elle fut avant tout dans son parcours d'homme, d'écrivain comme de militant, la manifestation d'une formidable prise de risque (personnel, politique, existentiel), ce qu'une calcification ultérieure certaine a encore trop souvent tendance à occulter. Pour stimulantes qu'elles soient, les analyses psychanalytiques faisant du Parti comme d'Elsa le corset orthopédique nécessaire à l'enfant illégitime pour "tenir debout", ne rendent pas compte de l'ampleur, de la force et de la richesse de ce qui se joue dans l'embrassement passionnel qui marque le mode relationnel de l'homme Aragon au monde. Défions-nous des caractérisations qui font de cet engagement, au sens large du terme, une pathologie. "L'esprit révolutionnaire doit-il être considéré comme une maladie ?" demandait Simone Weil. "S'il s'agit de se fuir soi-même, il est plus simple de jouer ou de boire. Et il est encore plus simple de mourir".

Johanne Le Ray, agrégée de Lettres modernes, PRAG à l'université Paris Nanterre, termine actuellement une thèse sur la croyance dans la poésie d'Aragon sous la direction de Nathalie Piégay (Paris-Diderot). Également traductrice, elle s'est par ailleurs intéressée à la pratique de traducteur d'Aragon et a publié des articles sur cette question.

Louise MAI : La loi, le moi et l'infini : pour une éthique du sujet aragonien
L'infini aragonien s'écrit dans les années 1920 avant tout contre la loi, qu'elle soit morale, rationnelle, psychologique, sociale ou politique, et contre le moi, considéré par le poète comme une objectivation réductrice du sujet qui bride sa complexité et son imprévisibilité créatrice. Est-il alors seulement possible de penser une éthique à partir d'un philosophème — l'infini — qui fait fi de la loi et du sujet auquel celle-ci devrait s'appliquer ? Si l'association de ces deux termes pourrait paraître contradictoire, tant on a souligné le caractère aporétique d'une existence en prise avec l'infini, vouant le sujet qui en prend la défense à un nomadisme sans repères et à un nihilisme furieux, nous essaierons de souligner l'exigence existentielle qui soutient la défense passionnée par Aragon d'une telle notion, en explorant à partir d'elle la possibilité d'une véritable éthique. Le sujet de l'infini, loin de se réduire à une provocation inefficiente voire irresponsable, est porteur d'une révolte qui se donne comme une arme morale et politique apte à saper les fondements et les pièges de l'idéologie et de ses cadres normatifs. Nous chercherons ainsi, à partir de cette insoumission du sujet aragonien à la loi et au moi, à penser la possibilité d'une éthique de l'infini qui, dans ses aspirations comme dans ses éventuelles impasses, fait encore aujourd'hui d'Aragon l'un de nos plus proches contemporains.

Louise Mai, élève à l'École Normale Supérieure de Paris, a réalisé deux mémoires sous la direction de Jean-François Louette, le premier portant sur le rapport entre érotisme et infini dans l'œuvre de Louis Aragon, le second sur l'écriture du désir féminin dans un corpus de textes français de la première moitié du XXe siècle (Louis Aragon, Marguerite Duras, Joyce Mansour et Jean-Paul Sartre).

Velimir MLADENOVIĆ : Elsa Triolet et la Yougoslavie
Les liens entre Elsa Triolet et les artistes yougoslaves datent de 1927 quand elle a rendu visite à Paris à un artiste yougoslave Ljubomir Micić. En 1947, Louis Aragon et Elsa Tiolet ont visité la Yougoslavie. Après cette visite, Elsa Triolet a publié deux textes sur la Yougoslavie et sur les surréalistes yougoslaves. Ces textes ont provoqué une polémique intellectuelle entre Marko Ristić, Elsa Triolet et André Breton. Dans cette communication, nous allons analyser les liens qu'entretenait Elsa Triolet avec les artistes yougoslaves, la visite du couple en Yougoslavie, la réception de cette visite dans la presse yougoslave, la correspondance avec des écrivains serbes, tous les articles de journaux yougoslaves sur Elsa Triolet, ainsi que la réception de son œuvre dans la culture yougoslave et serbe jusqu'à nos jours.

Velimir Mladenović, doctorant en littérature française à l'université de Poitiers (France) et à l'université de Novi Sad (Serbie). Il a réalisé un mémoire sur "Le thème de la guerre dans les nouvelles de Vercors, Aragon et Aymé". Le 3 février 2018 à l'ENS, il a organisé le séminaire (direction M. Luc Vigier) sur "La réception de Louis Aragon et Elsa Triolet en Serbie".

Jean-François RABAIN : Blanche, entre mémoire et oubli
On interrogera la féminité. Le célèbre incipit de Nadja : "Qui suis-je", résonne dans toute l'œuvre d’Aragon. "Je ne sais plus qui je suis, j'ai oublié qui je fus, je ne crois pas que je vais être", écrit Aragon dans L'anonyme (Théâtre/Roman). Nadja habitée de l'absence d'elle-même renvoie Breton au fantôme qui le hante. Son double ? Le féminin en lui ? Freud note que Macbeth et lady Macbeth apparaissent comme un seul caractère scindé en deux personnages, comme souvent chez Shakespeare. "Chacun paraît imparfaitement compréhensible aussi longtemps que l'on ne l'a pas réuni à l'autre pour reconstituer l'unité", écrit-il. "Ne dormez plus, Macbeth assassine le sommeil et donc Macbeth ne doit plus dormir", écrit Shakespeare, mais c'est la reine qui devient somnambule. "Ainsi se réalise en elle, ce que Macbeth avait redouté dans l'angoisse de sa conscience. Ils épuisent à eux deux les possibilités de réactions au crime", écrit Freud. Breton fasciné par Nadja voit en elle toutes les dissolutions de son moi. La griffe du lion de Léona Delcourt court sur le visage léonin d'André. "Il a fallu que je cessasse d'être pour être qui je suis", écrit Breton. On interrogera à travers les dissolutions de la mémoire d'Aragon, à partir de Blanche et l'oubli, cette figure du féminin qui n'a cessé de hanter l'écrivain dans son œuvre.

Jean-François Rabain, pédo-psychiatre, psychanalyste, est un ancien membre titulaire de la Société Psychanalytique de Paris. Enseignant à Paris VI (Pierre et Marie Curie) et Paris XIII (Bobigny).

Emmanuelle ROIRON : Le rire d'Aragon
"Un grand auteur, c'est quelqu'un qui rit beaucoup", pour reprendre le mot de Deleuze. En effet, Aragon n'est jamais plus universel, donc plus "vivant" pour nous que lorsque nous avons le sentiment de le rejoindre : lire ses textes de façon jubilatoire, en entendant les échos de son rire, en est l'un des moyens privilégiés. Cette dimension de l'œuvre a longtemps été ignorée, car elle contrarie l'image de rigidité et de dogmatisme associée à Aragon ; elle reste méconnue aujourd'hui encore, dans la mesure où ce sont plutôt les déchirements de l'homme et de l'écrivain qui intéressent. Or c'est justement là que résident la singularité et le paradoxe du rire d'Aragon — celui qui relève de la narration et de la voix poétique. Il ne s'agit pas seulement d'un rire de protection, contrepoint à la gravité et à la contrainte — "ce rire déconcertant qui contredisait soudain tout ce qu'on venait de penser", comme le dit Aragon du rire de Tzara. On entend en même temps plusieurs voix dans ce rire, y compris parfois la voix lyrique d'Aragon : loin d'annuler l'émotion, cette indistinction la renforce. Son rire est alors un moyen de rendre sa parole insaisissable, donc toujours vivante.

Ancienne élève de l'École Normale Supérieure de Lyon et agrégée de lettres modernes, Emmanuelle Roiron enseigne la littérature en classes préparatoires, à Lyon. Elle a soutenu sa thèse sur l'art de la dérive dans les romans d'Aragon, en 2015, à l'université Paris Diderot, et publié plusieurs articles sur cet auteur. Elle a rédigé récemment une dizaine de notices du Dictionnaire Aragon, à paraître aux Éditions Champion, sous la direction de Nathalie Piégay-Gros et de Josette Pintueles.

Georges SEBBAG : Aragon prend congé et revient saluer
En 1932, à l'issue d'une longue pièce à grand spectacle et à grande distribution, Aragon a pris congé d'André Breton et du groupe surréaliste. Quelque trente ans après, il est revenu pourtant saluer ses anciens amis et a rejoué la pièce. Un tel mouvement pendulaire paraît inhérent à l'existence et à l'écriture d'Aragon ; il est à l'œuvre dans l'instant comme sur une longue période ; il peut dicter sa loi à un poème bref comme à un roman interminable. Ce jeu théâtral aragonien, où l'on se quitte pour mieux se saluer, peut-il s'immiscer dans notre monde contemporain ? Cela est plus que probable car, dès le départ, Aragon qui a franchi le seuil des espaces littéraire et philosophique et a gravi les scènes artistique et médiatique, n'a pas manqué d'en repérer certaines issues.

Georges Sebbag est écrivain, docteur en philosophie. Dans Potence avec paratonnerre, Surréalisme et philosophie (Hermann, 2012), il montre que le duo Aragon-Breton élabore un projet philosophie ; le surréalisme connaît une suite avec Foucault Deleuze, Nouvelles Impressions du Surréalisme (Hermann, 2015).

Anne SZULMAJSTER-CELNIKIER : Aragon linguiste
La présente contribution se propose d'apporter un éclairage sur un versant moins exploré du texte aragonien. Elle tente de dévoiler comment une conscience linguistique aiguë — celle du poète qui nous réunit — alliée à une réflexion métalinguistique percutante, elle-même nourrie, de l'intérieur, par un questionnement sur toutes les certitudes, conventions, règles, lois, catégories, identités, et, de l'extérieur, par une érudition ciblée, rejoignent des préoccupations chères à la communauté des linguistes. Parmi celles-là figurent notamment les dichotomies fondamentales avec lesquelles ces derniers opèrent, dégageant certaines distinctions subtiles, l'appréhension de l'immense diversité linguistique et l'expérience des limites du dicible. On cherchera à mettre en valeur comment de telles qualités, loin de se cristalliser en traité, s'incorporent en littérature, prennent forme, se sculptent dans l'écriture spécifique d'Aragon qui en tire toute sa force. Si le roman phare de cette analyse est Blanche ou l'Oubli, avec son héros Gaiffier le linguiste, quelques références à d'autres œuvres romanesques peuvent survenir à titre comparatif.

1990. Ingénieur à la Chaire de Théorie Linguistique, Prof. Claude Hagège, Collège de France.
2014. Membre de l'EA 7347, INHA-EPHE Histara.
2018. Responsable éditoriale de la revue La Linguistique.
Publication
Le yiddish à travers la chanson populaire, Préface d'André Martinet, 1991, Louvain-la Neuve, Éd. Peeters, Coll. "BCILL", 276 p.
Articles
"À travers les langues ; L'ennui, féconde mélancolie", Didier Nordon (dir.), Paris, Éditions Autrement, n°175, Janv. 1998.
6 préfaces "Histoire de mots" dans L'attraction, La défense, La mémoire, La force, Le risque, L'évolution, L'exemple, Le vide, EDP Sciences, Coll. "Mot à mot", 2002-2003.
"Représentations et imaginaires parisiens : métaphores, réanalyses et figements analytiques", La Linguistique, 2010/1, Vol. 46.
"Expression interlinguistique des ruines et poétique", Karolina Kaderka (dir.), Les Ruines, Entre destruction et construction des de l'Antiquité à nos jours, Rome, Campisano Éd., 2013.
"La question de l'origine des langues : vaine quête du Graal ?", Béatrice Fracchiolla (dir.), Les origines du langage et des langues, Vol. 2, Paris, L'Harmattan, Coll. "Marges linguistiques", 2013.
"Composition et dérivation expressives en yidiche", Le langage de l'émotion: variations linguistiques et culturelles, Leuven-Paris-Bristol, Éd. Peeters, 2017.

Maryse VASSEVIÈRE : Encore une fois Les Communistes ou la fin du grand récit
Cette communication suit mon processus de lecture et mêle les analyses littéraires à des parenthèses sur ma propre lecture, qui pourraient toucher aussi à la question de l'actualité d'Aragon. En proposant "Encore une fois Les Communistes" comme titre, j'ai l'impression de boucler la boucle : faire ainsi que mon premier et mon dernier articles soient sur ce roman encore si souvent décrié surtout par la doxa universitaire, est une façon de réhabiliter ce roman "réaliste socialiste à la française" pour sa modernité justement… Encore une fois Les Communistes… je privilégierais la partie militaire du roman, c'est-à-dire le tome IV sur la campagne de Belgique et la campagne de France qui constitue une sorte de roman dans le roman. Et le choix de ce corpus lié aux aléas de la lecture m'a mise sur le chemin d'une relecture et d'une découverte capitale concernant la parole romanesque qui situe ce roman pourtant "inachevé" et déceptif pour son auteur dans une rupture décisive avec ce que Pierre Bergounioux appelle "le grand récit". J'ai découvert l'extraordinaire modernité d'un grand roman qui, bien qu'inachevé, se situe à l'avant-garde du Monde réel, comme une première ébauche de l'écriture romanesque : 1) pour la prédominance du discours sur le récit comme une parole dans la guerre ; 2) pour le métalangage de l'art ; 3) pour le travail du lecteur. Ce sont les trois grands axes développés dans cette communication, le dernier permettant d'aborder la question de "ce qui me parle" dans l'œuvre d’Aragon. Et même qui se situe dans une ligne de partage avec d'autres écritures plus contemporaines apportant ainsi ma contribution à ce qui fait l'objet de notre colloque : l'interrogation sur "Aragon vivant"…

Maryse Vassevière est une ancienne élève de l'ENS de Fontenay, agrégée de Lettres Modernes et Docteur de l'université Paris III-Sorbonne Nouvelle où elle a enseigné de 1998 à 2008. Elle a publié Aragon romancier intertextuel ou Les pas de l'étranger chez L'Harmattan (1998) et de nombreux articles sur Aragon dans diverses revues (Europe, Mélusine, Recherches croisées Elsa Triolet-Aragon). Elle participe aux travaux des deux groupes Aragon de l'ERITA et de l'ITEM (séminaires et colloques) et fait partie du comité de rédaction de Recherches croisées Aragon-Elsa Triolet. Elle a participé au Dictionnaire Breton et au Dictionnaire Aragon. Elle a organisé en 2007 une journée d'étude de Paris III à la Sorbonne sur l'"Actualité d'Aragon" dont les travaux ont été publiés dans Recherches croisées (n°12, 2009). Et elle a coordonné le n°305 de Revue des Sciences Humaines, "Aragon une écriture au carrefour" (Presses du Septentrion, 2012), où elle a publié "Aragon et le "plagiat par anticipation" ou la filiation à rebours".
Derniers articles
Recherches croisées Aragon-Elsa Triolet, n°13, Presses universitaires de Strasbourg, 2012 : "Aragon, Breton et la peinture soviétique" et traduction d'une interview d'Aragon à la revue communiste italienne Rinascita en février 1968.
"Aragon et la lumière de Colette", Cahiers Colette, n°32, Société des amis de Colette, 2011.
Revue Mélusine, n°XXXI, 2011, "Correspondance Baron-Aragon".
"Aragon et la construction d'une image romanesque de la France", in La France des écrivains. Éclats d'un mythe (1945-2005), Marie-Odile André, Marc Dambre, Michel. P. Schmitt (éds), Presses de la Sorbonne Nouvelle, 2011.
"Aragon, métalangage et métalepse", in La Langue d'Aragon "Une constellation de mots", sous la direction de Cécile Narjoux, Éditions universitaires de Dijon, 2011.
Actes du colloque "Aragon et Les Lettres françaises", Recherches croisées Aragon Elsa-Triolet, n°14, 2013 : "Savoir aimer : une critique littéraire entre mémoire et avenir".
Recherches croisées Aragon-Elsa Triolet, n°15, Presses universitaires de Strasbourg, 2014 : "Les paradoxes d'Aragon".
Revue Mélusine, n°XXXV, 2015, "Aragon, Breton et les pompiers. Tout m'est sexe".
"Le manuscrit de Théâtre/Roman : jeux et chemins du sens", Théâtre/Roman d’Aragon Un singulier pluriel, sous la direction de Marie-Christine Mourier et Roselyne Waller, Presses universitaires de Valenciennes, 2015.
Revue d'histoire littéraire, Belgrade, 2017 : "Aragon, d'une avant-garde à l'autre".

Luc VIGIER : Aragon ou l'écriture dessinée
L'intérêt d'Aragon pour le dessin et les croisements entre l'écriture, la peinture et le tracé sont aussi anciens que ses premiers textes. La correspondance des années 1917-1930 a révélé un goût régulier pour le petit croquis rapide donné en guise d'illustration. Les années Dada sont de même peuplées de dessins issus des expériences les plus diverses : Aragon voit naître les dessins de Desnos, les cadavres exquis du groupe, les automatismes de Masson, plus tard ses illustrations du Con d'Irène, et l'on devine la fascination qu'exerceront plus tard les variations au fusain de Matisse sur son visage ou encore certains dessins de Cocteau. La question du dessin a également des implications politiques, avec ceux de Fougeron (1947) où Aragon verra le destin de l'art figuratif ainsi qu'un accès plus simple à l'art, moins indéchiffrable que la peinture, avant que le dessin de Picasso lors de la mort de Staline ne détruise l'amitié avec Fougeron. Ce n'est pas un cas isolé : le propos sera repris et approfondi dans la valorisation du dessin au sein des Lettres françaises (dirigées par Aragon de 1953 à 1972) mais aussi dans les textes d'Aragon sur André Masson, David D'Angers ou plus tard dans son approche des dessins de Giacommetti, avec l'ombre portée de la sculpture. Cet ensemble d'indices convervent vers la pensée, chez Aragon, d'un lien très étroit entre la pratique manuscrite de l'écriture et le dessin même, particulièrement identifiable dans Les Incipit (1969) et Henri Matisse, roman (1971), au moment où Aragon par ailleurs dessine à la place des photographies de l'album d'Elsa mais aussi sur les murs d'images de son appartement parisien, dans une sorte de surécriture palimpseste. On interrogera enfin l'érotisme des dessins du dernier chapitre de sa vie, qui jouent de la vibration des couleurs et des situations de désir.


SOUTIEN :

• Institut des textes et manuscrits modernes (ITEM) - UMR 8132 | CNRS / ENS

Programme 2018 : un séminaire

Programme complet


TEXTIQUE : RÉAPPRENDRE À ÉCRIRE


DU MERCREDI 1er AOÛT (19 H) AU MERCREDI 8 AOÛT (14 H) 2018

[ séminaire de 7 jours ]



DIRECTION :

Jean-Christophe TOURNIÈRE, Gilles TRONCHET


AVERTISSEMENT :

Le présent Séminaire, qui se tient tous les ans à Cerisy depuis 1989, accueille toute personne qui, ayant une suffisante maîtrise de la langue française, s'estime requise par le sujet traité.

En effet la textique est une discipline qui se développe avec sa technicité propre, mais l'usage de son vocabulaire spécial peut toujours se voir expliqué en vocabulaire courant.

À cela, il convient d'ajouter que les deux premières séances, tenues à partir des contributions appelées Un aperçu de la textique et Abrégé de textique, permettent aux nouveaux participants une rapide mise au clair, tandis que, un jour sur deux, l'après-midi, de facultatives séances supplémentaires sont destinées à fournir des explications sur les concepts majeurs.


ARGUMENT :

La textique ? Une discipline inaugurée, en 1985, par Jean Ricardou lors d'un séminaire tenu au Collège International de Philosophie, et visant à établir par niveaux une théorie unifiante de l'écrit accompagnée d'une théorie unifiante de l'écriture.

Sa méthode ? Explorer le domaine en cause selon des ensembles conceptuels d'exhaustion échelonnée, réfutables à mesure, le cas échéant, par tout contre-exemple établi comme tel.

Ses avantages ? Pour la théorie : une coordination conceptuelle de mécanismes jadis et naguère plus ou moins bien pensés, une reformulation critique de certaines notions trop admises, ainsi qu'une réévaluation concertée de phénomènes négligés, voire méconnus, et une classification réfléchie de la plupart des imperfections possibles. Pour les conséquences sur l'analyse : avec, pour base, la cardinale notion de lieu scriptuel, une attention inédite portée, notamment, sur les prétendues "broutilles". Pour les conséquences sur l'écriture : la possibilité de programmes et métaprogrammes raisonnés permettant la correction et la récriture à plusieurs. En général : une clarté et une rigueur neuves dans l'ordre des concepts.

Le thème 2018 ? À la suite du séminaire 2017 s'étant déroulé, pour la première fois, en l'absence de son fondateur (disparu en 2016), il a paru opportun d'orienter la suite des travaux du côté de la didactique et de la pédagogie, en explorant les leçons inédites qu'est susceptible d'apporter sur l'écriture la conceptualisation élaborée par la discipline.

Le travail ? Les contributions étant expédiées environ un mois à l'avance, chaque séance sera intégralement consacrée à leur discussion méthodique.

Les participants ? Toutes celles et tous ceux qui, répondant au critère formulé plus haut ("Avertissement"), sont intéressés ou intrigués par le domaine ainsi balisé comme par le travail dès lors permis, et qui, sachant que l'abondant vocabulaire technique se trouve en séance aussi réduit que possible, voire, s'il le faut, éclairci à mesure, désirent venir à titre de contributeurs actifs ou d'auditeurs curieux.

Les séances ? En guise d'initiation ou de révision, un retour, pendant quatre demi-journées, sur la méthode et les enjeux. Puis le traitement des autres contributions annoncées à partir des observations et des questions que chacune et chacun aura eu le temps de préparer.

L'inscription ? Il est souhaitable de l'accomplir au plus tôt à partir du 15 mars, et si possible avant le 15 mai (pour bénéficier du précoce envoi des écrits préparatoires).

••••••

À l'intention de celles et ceux qui souhaitent, d'ores et déjà, en savoir davantage, il est loisible d'ajouter les précisions suivantes.

Sitôt, d'une part, que la textique vise à établir une théorie unifiante de l'écrit dans ses divers modes (elle en recense quatre respectivement nommés phanoscrit, grammoscrit, iconoscrit, symboloscrit), et, conjointement, une théorie unifiante de l'écriture, ce qui l'oblige à une exhaustivité contrôlée sur un domaine immense, et sitôt, d'autre part, que ses premiers efforts, comme tels, datent du milieu des années 1980, nul doute que, à l'orée du prochain séminaire, comme pour les années précédentes, se posent, quant à la mise à niveau, l'un étant celui de l'initiation et l'autre celui de la révision, deux problèmes distincts.

Le problème de l'initiation concerne les participants nouveaux qu'une curiosité intellectuelle aura portés à venir une première fois, car il est nécessaire, pour bien saisir la pensée textique, voire pour y concourir, d'être mis en possession, aussi soigneusement que possible, de la méthode et des enjeux.

Le problème de la révision concerne les participants habitués, voire chevronnés, car il est opportun, avant ces journées de réflexion intense, de se remettre en tête, soigneusement, les grandes perspectives du travail.

Cette initiation et cette révision se feront à partir des contributions Un aperçu de la textique par Gilles Tronchet et Abrégé de textique par Jean-Christophe Tournière.

Quant à la préparation : ces écrits étant expédiés un mois environ avant le début du séminaire, les participants auront toute la durée qu'ils s'accorderont pour en prendre, à leur guise, ce qu'on appelle habituellement connaissance.

Quant à la discussion : les deux premières journées étant réservées à de libres échanges oraux sur ces contributions, les participants auront tout le loisir permis par les séances pour solliciter les éclaircissements éventuellement nécessaires, voire pour énoncer, très librement, d'éventuelles objections.


BIBLIOGRAPHIE :

Il est possible, d'ores et déjà, de prendre une vue de la textique en consultant, chacun paru aux éditions Les Impressions nouvelles dans la série TEXTICA, les six ouvrages suivants :

• Jean Ricardou, Intellection textique partagée
• Jean Ricardou, Intellection textique de l'écrit
• Jean Ricardou, Intellection textique de l'écriture
• Jean Ricardou, Intelligibilité structurale du trait
• Jean Ricardou, Grivèlerie
• Gilles Tronchet, Un aperçu de la textique


CALENDRIER DÉFINITIF :

Mercredi 1er août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, du colloque en parallèle, du séminaire et des participants


Jeudi 2 août
Matin
Gilles TRONCHET : Un aperçu de la textique | Initiation

Après-midi
Jean-Christophe TOURNIÈRE : Abrégé de textique (évolution 2018) | Initiation


Vendredi 3 août
Matin
Laurent LIENART : Obscénités en séries | Investigation

Après-midi
Laurent LIENART : Obscénités en séries | Investigation


Samedi 4 août
Matin
Patrice HAMEL : L'immanence de l'écriture | Invitation

Après-midi
Sandra SIMMONS : Écrire en fonction de l'espace | Invitation


Dimanche 5 août
Matin
Jean-Claude RAILLON : Pratique du bi-zonage | Investigation

Après-midi
Johanna GOSSART : Margeure(s) | Investigation


Lundi 6 août
Matin
Michel SIRVENT : Éclaircir l'écrit | Investigation

Après-midi
Michel SIRVENT : Éclaircir l'écrit | Investigation


Mardi 7 août
Matin
Gilles TRONCHET : En textique à bonne école avec la palinodation | Investigation

Après-midi
Gilles TRONCHET : En textique à bonne école avec la palinodation | Investigation


Mercredi 8 août
Matin
Perspective : Cercle Ouvert de Recherche en TEXTique (18-19), rencontre 2019 autour des travaux de Jean Ricardou

Après-midi
DÉPARTS


En première partie d'après-midi, un jour sur deux :
Gilles TRONCHET & Amandine CYPRÈS : Concepts majeurs | Explication

En fin d'après-midi, chaque jour :
APPRENDRE À RÉCRIRE | Atelier d'écriture


INITIATION :

Jean-Christophe TOURNIÈRE : Abrégé de textique (évolution 2018)

Ce travail vise à offrir, sur la base du massif théorique ayant pour titre Intellection textique (par Jean Ricardou)*, un exposé de ses concepts fondamentaux qui, à la fois, suive une construction méthodique et permette une accessibilité assez large.

Au niveau de sa construction, cet Abrégé de textique adopte la globale procédure qui organise toute ladite Intellection textique : celle nommée rubrication.

Elle consiste à décliner chaque phase démonstrative du propos en une série de rubriques dont voici les quatre principales :
- la "Définition", qui procède à la délimitation d'un concept ;
- la "Proposition", qui procède à l'affirmation d'une hypothèse impliquant ce concept ;
- l'"Argumentation", qui procède à la justification de cette hypothèse ;
- l'"Exemplation", qui procède à l'application du concept en jeu à des occurrences lors censées éclaircies.

Au niveau de son accessibilité, cet Abrégé de textique, dans son évolution 2018, veillera à l'élargir en convoquant, tirés des domaines les plus variés ("arts", "journalisme", "publicité", "sciences"…), de nombreux nouveaux exemples.

* ensemble composé de 12 tomes déployés sur environ 1600 pages.


Gilles TRONCHET : Un aperçu de la textique

Proposant une simple présentation de la textique, ce volume a été publié en 2012. Il a une double visée : d'abord, fournir un historique succinct, pour montrer dans quelles conditions et selon quelles étapes la textique est apparue et s'est constituée en une discipline nouvelle ; puis, offrir un exposé des principaux concepts et outils d'analyse élaborés jusqu'à présent.

Tout d'abord, comme la textique s'efforce d'établir une théorie unifiante des structures de l'écrit, il est indispensable d'expliquer la très large portée qu'elle donne à son objet, puis de préciser comment il trouve à se spécifier selon différents modes, permettant d'envisager, notamment, les particularités des caractères alphabétiques, des images et des symboles.

Ensuite, est retenu un domaine plus restreint et sans nul doute familier à tout lecteur, l'écrit représentatif relevant du mode grammique : cela correspond, quitte à simplifier un peu, aux écrits basés sur des séries de lettres, associables aux sonorités d'une langue et susceptibles, par équivalence avec d'autres séries, de faire surgir certaines idées (ainsi lorsqu'un terme s'échange avec sa définition). Il s'agit d'inventorier et d'expliciter les grandes catégories capables d'appréhender exhaustivement les structures possibles dans un écrit grammique : la textique prétend y parvenir, en l'attente d'une éventuelle démonstration contraire, susceptible de relancer la recherche.

Enfin, il a semblé utile de signaler quelques-uns des instruments analytiques servant à explorer en détail les dispositifs repérables dans un écrit représentatif, sachant que l'un des acquis majeurs de la textique consiste à distinguer, par rapport aux structures qui sont au service de la représentation, celles qui outrepassent un tel régime, en imposant leurs contraintes propres à la représentation, alors forcée de s'adapter. C'est le cas par exemple avec les rimes classiques, mais aussi avec beaucoup d'autres agencements irréductibles à la logique représentative, qui relèvent dès lors d'un régime métareprésentatif.

Il faut observer toutefois qu'un simple aperçu comme celui-ci ne saurait dispenser à propos de la textique davantage qu'une information initiale: une approche théorique plus fouillée, débouchant sur une pratique effective de la discipline, exige de bien plus amples développements.


INVESTIGATION :

Johanna GOSSART : Margeure(s)

Attentive à la question de la mise en page (de l'écrit théorique) et convaincue qu'il existe certains bénéfices à mettre en avant ce qui d'ordinaire est tenu à l'index, la contribution cherche à poursuivre l'examen visant à interroger les rapports qu'entretiennent le pavé d'imprimerie et sa marge alentour, éléments constitutifs de l'écrit, selon la définition qu'en donne la textique.

Il s'agira, d'une part, de récrire les feuillets précédemment commis, pour se risquer à les perfectionner, tant dans les dispositifs mis en œuvre que dans les résultats obtenus, et, d'autre part, de prolonger l'analyse, jusqu'à initier un questionnement vis-à-vis de ce que l'on peut nommer, issues des subdivisions du pavé d'imprimerie (que constituent, notamment, les paragraphes, les titres et les phases illustratives), les "marges intermédiaires" ou "secondaires".


Laurent LIENART : Obscénités en séries

Il s'agira de repérer, au sein d'Une légère blessure de Laurent Mauvignier, à la faveur d'une identité de lettres en position de vis-à-vis, une série de mots tous plus obscènes les uns que les autres.


Jean-Claude RAILLON : Pratique du bi-zonage

L'on nomme bi-zonage en textique le protocole selon lequel les analyses se trouvent partagées en deux secteurs distincts dévolus, d'un côté, aux observations de style ordinaire et de l'autre coté, aux développement rédigés avec le vocabulaire technique la discipline. Ce dispositif veut réserver au lecteur le loisir d'une lecture différenciée, soit continûment en langage commun s'il ne souhaite que récolter les résultats de l'examen, soit par alternance, en langage technique, s'il désire s'intéresser au jeu plus rigoureux des concepts requis.

Or, cette pratique rencontre maintes difficultés que l'on s'efforcera par l'exemple d'examiner de près.


Michel SIRVENT : Éclaircir l'écrit

Sous ce titre, seront proposées quelques pistes de réflexion liées à la récriture d'un écrit recourant à la discipline textique. Elles accompagneront la reprise et l'approfondissement de notre contribution 2017 "Lecture d'un logotype publicitaire".

Avec la récriture, sitôt que s'engage un ensemble d'opérations visant à réformer, voire à transformer un écrit, pointe d'emblée la question : récrire, certes, mais pour quoi faire ? En la circonstance, la récriture sera guidée par une recherche des manières qui permettraient une meilleure accessibilité de l'écrit à visée textique.

Or, si l'écrit à récrire recourt à la textique, c'est de plusieurs façons. L'une consiste à faire appel à certains concepts élaborés par la théorie. Une autre est de mettre en jeu les concepts pertinents et de recourir à la méthode textique. La mise en œuvre de certaines procédures (comme la circoncription, la palinodation) permet ainsi d'affiner l'analyse d'un objet.

Toutefois, un écrit peut recourir à la discipline textique (sa théorie, sa méthode d'analyse) sans pour autant se présenter comme un écrit textique. Et donc ce que, sous le nom de "textique", recouvre ladite discipline, ce n'est pas seulement, en tant que pure théorie, un formidable arsenal de concepts. Ni seulement, en la sphère pratique, avec sa panoplie d'"outils", une rigoureuse et fructueuse méthode d'analyse.

C'est surtout, progressivement élaborées et adoptées par la discipline, la mise au point de certaines particulières manières d'écrire. Ainsi, la textique, si elle propose, indissociable de celle de l'écrit, une théorie de l'écriture, ce n'est pas sans que s'édifie, pour ce faire, une précise façon de s'écrire. D'où l'expression "faire de la textique" ne saurait se réduire à une pure convocation de concepts ni à une stricte application de la "théorie" et de sa méthode d'analyse. Bref, proposer un écrit textique (et non point "de textique") ne va pas sans engager certaines précises procédures d'écriture et, par suite, de récriture.

•••••

En l'occurrence, l'écrit à récrire ("Lecture d'un logotype publicitaire") se présente comme un essai d'application pratique. Il porte sur un objet choisi pour son apparente simplicité. De plus, il est ici réduit sous la suivante forme élémentaire : "TRI▲NGLE". Ainsi schématisé, il comporte un seul mot dans lequel s'inscrit à la place d'une de ses lettres (A) un triangle. C'est un écrit mixte qui se déploie ainsi selon deux modes distincts, en termes textiques : le grammique et l'iconique. Outre sa structure en abyme, il comporte une autre particularité : il s'agit d'un écrit, dont le mode d'exposition, au lieu d'être fixe, stable et persistant (comme en sa présente inscription), est mobile, progressif et intermittent. Il s'agit donc, pour la théorie textique, de prendre en compte ce type d'écrit nommé, pour l'heure, kinescrit.


Gilles TRONCHET : En textique à bonne école avec la palinodation

Mis au point dans le cadre de la textique grâce aux travaux de Jean Ricardou, le concept de palinodation, appliqué aux écrits, est un outil majeur d'apprentissage. Le principe selon lequel un diagnostic à propos d'une structure, au fil d'un examen portant sur les mécanismes où elle s'intègre, est sujet à basculer en un autre, permet d'explorer des particularités souvent négligées et de réfléchir à leur élaboration. Par exemple, il donne à saisir l'intérêt d'un défaut repérable, quand ce dernier s'avère l'indice dans l'écrit d'une qualité moins immédiatement accessible. Cet angle d'approche, au-delà des trouvailles apparemment paradoxales qu'il procure, ouvre sur des façons nouvelles d'aborder l'écrit, donc aussi de pratiquer l'écriture.


INVITATION :

Patrice HAMEL : L'immanence de l'écriture

Opposée au matérialisme essentialiste auquel paraît succomber la textique, cette contribution exposera les principes d'un matérialisme sensoriel.

Celui-ci se caractérise par des modalités d'appréhension dont les principales sont l'endo-stimulation et l'exo-stimulation pour ce qui concerne les sensorialités, et d'autre part, un système d'analogies, de codes ou de relations physiques établis entre éléments constituant la représentation*.

Ces modalités peuvent être utilisées en littérature et mettre en évidence l'immanence de l'écriture, ce qui a été mis en pratique dans le roman Dans la boucle imparfaite publié récemment (éditions galerie[s]mortier).

* L'on trouvera cet appareil théorique défini sur le site patricehamel.org (rubrique "Théories", sous-rubrique "L'immanence de l'art") ou en vidéos sur YouTube.


Sandra SIMMONS : Écrire en fonction de l'espace

Imaginons quelqu'un voulant poser des mots dans un lieu défini, tel un plasticien des installations. Afin d'accomplir un écrit selon un espace donné, il faudrait aborder la question de la place. La textique possède un outillage apte à faire apprécier non seulement la place des mots mais aussi, et surtout, leur emplacement. Sans dépendre d'un idéalisme pondant, la textique engage à mesurer la juste contribution de la matérialité sous tous les angles. Écrire devient alors un exercice de mise en espace à travers une loupe qui permet de rencontrer, de comprendre, et de forger des écrits réglés.


APPRENDRE À RÉCRIRE | Atelier d'écriture :

Le travail quotidien en atelier d'écriture se fera sur la base de ce que la textique nomme RAPT (Récrit Avisé Par la Textique), lequel forme le lieu d'articulation de trois opérations majeures : la lecture (qui considère les structures d'un objet), la critique (qui détecte une faille dans les structures cet objet), et la récriture (qui corrige telle faille et améliore ainsi la tenue structurale de l'objet).

Il comportera les quatre phases suivantes :

Première phase : Sélection d'un écrit relativement simple, choisi par l'un(e) des participant(e)s et susceptible, selon elle ou lui, de bénéficier d'au moins un perfectionnement notable.

Deuxième phase : Analyse, par l'ensemble des participants, des structures que comporte tel écrit sélectionné.

Troisième phase : Critique, par l'ensemble des participants, des structures de l'écrit sélectionné, et conduisant à identifier, ou pas, celles présentant quelque défaut structural.

Quatrième phase : Si quelque faille est identifiée, recherche, par l'ensemble des participants, des structures alternatives permettant d'y remédier en élaborant une récriture censée perfectionner l'écrit sélectionné.

Deux exemples d'écrits qui pourront faire l'objet d'un RAPT :

"As de carreau", Atlas de littérature potentielle, Gallimard/Idées, 1981, p. 198.

André Breton, Signe ascendant, Poésie/Gallimard.