RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :
Frédérick LEMARCHAND
Frédérick Lemarchand est Maitre de conférences en sociologie à l'université de Caen Normandie. Codirecteur du Pôle Risques de la Maison de la recherche en sciences humaines de Caen. Dans l'héritage de la théorie critique, il travaille depuis quinze ans sur les aspects fondamentaux des sociétés technoscientifiques (crises du nucléaire, de la vache folle, OGM…).
Publications
"Le nucléaire, une technologie insoutenable", in Revue L'Économie Politique, n°72, Paris, 2016.
"Pour dépasser le concept de risque", in Du risque à la menace. Penser la catastrophe (sous la direction de D. Bourg, P.-B. Joly et A. Kaufmann), Colloque de Cerisy, Paris, PUF, 2013.
Les silences de Tchernobyl (avec G. Ackerman et G. Grandazzi), Paris, Autrement, 2006.
Patrick VASSORT
Patrick Vassort est Maître de conférences HDR de l'université de Caen Normandie. Il est directeur de publication de la revue Illusio.
Publications
Contre le capitalisme. Banalité du mal, superfluité et masse, Lormont, Le Bord de l'eau, 2013.
L'Homme superflu : Théorie politique de la crise en cours, Le Passager clandestin, 2012.
Le Sport contre la société (avec Clément Hamel et Simon Maillard), Lormont, Le Bord de l'eau, 2012.
Cédric BIAGINI : L'emprise numérique
Les nouvelles technologies recomposent le monde selon leur propre logique, celle de la performance et de l'efficacité. Elles renforcent le règne de la compétition et l'exigence d'aller toujours plus vite, de se mobiliser intégralement pour son entreprise et sur les "réseaux sociaux", d'être capable de s'adapter à toutes les évolutions technoculturelles, sous peine d'être exclu. L'homme numérique croit avoir trouvé l'autonomie en se débarrassant des pesanteurs du vieux monde matériel. "Enfin libre !", dit-il, alors qu'au contraire, il dépend de plus en plus de dispositifs technoscientifiques. Pour rester dans la course et tenter de maîtriser un réel qui lui échappe, il multiplie les machines. Mais ce sont elles qui désormais le possèdent.
Cédric Biagini anime les éditions L'échappée et contribue au journal La Décroissance.
Publications
L'Emprise numérique, L'échappée, 2012.
L'Assassinat des livres par ceux qui œuvrent à la dématérialisation du monde, L'échappée, 2015.
Aux origines de la décroissance, avec P. Thiesset et D. Murray, L'échappée, 2017.
Soleni BISCOUTO FRESSATO : Le peuple brésilien entre informations, divertissement et aliénation. Les images spectaculaires du Réseau Globo de Télévision
Depuis l'invention du cinéma et plus fortement avec la diffusion de la télévision, les sociétés se forment et s'informent à base d'images en mouvement. Actuellement, ces images sont, dans la plus grande majorité, des représentations plus que complices du néolibéralisme et du capital fictif. Elles sont la traduction la plus spectaculaire de l'industrie culturelle et fusionnent d'une façon permanente, l'information avec le divertissement. Elles deviennent facteur d'identification, d'influence et de formation des subjectivités ainsi que d'aliénation. Ce sont des images révélatrices d'une société en crise, non seulement économique et politique, mais surtout, englobant les consciences et aussi l'inconscient d'une grande partie de la population brésilienne. Au Brésil, ces images sont produites et diffusées de façon hégémonique par le Réseau Globo de Télévision, la première grande entreprise de télédiffusion dans le pays et la deuxième plus grande au monde. Depuis sa fondation en 1965, la Globo favorise un remaniement systémique entre information et loisir, entre réalité et fiction.
Soleni Biscouto Fressato est docteure en sociologie, chercheuse au Groupe de Recherche Oficina Cinema-História (Université Fédérale de Bahia) et rédactrice en chef de Culture et Cinéma de la Revue O Olho da História. Auteure de Caipira oui, moldu non. Représentations de la culture populaire dans le cinéma de Mazzaropi (EDUFBA, 2011) et de Le "miroir magique" des feuilletons (images spectaculaires remplaçant la réalité) (sous presse). Auteure et organisatrice, avec Jorge Nóvoa et Kristian Feigelson, de Cinématographe. Un regard sur l'histoire (EDUFBA, EDUNESP, 2009) et, avec Jorge Nóvoa, de Regards sensibles : les beautés des villes et ces barbaries (Prismas, 2018).
Benoît BOHY-BUNEL : Kant ou les Lumières de la valeur
Il s'agira de revenir sur l'un de mes essais dans lequel je propose une critique matérialiste et sociale de la Critique de la raison pure. Une relecture de Marx, Lukacs, Sohn-Rethel et Bergson, permettra de confronter une théorie critique et une critique des sciences modernes à ce texte fondateur de la philosophie moderne. En particulier, la division entre un certain travail intellectuel spécifiquement moderne et une praxis dépossédée fera problème.
Benoît Bohy-Bunel est professeur de philosophie certifié, théoricien critique à la Wertkritik et militant communiste libertaire.
Bibliographie
Kant, Critique de la raison pure.
Marx, Capital.
Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience.
Sohn Rethel, Travail intellectuel et travail manuel.
Lukacs, Histoire et conscience de classe.
Gérard BRICHE
Gérard Briche est Professeur de philosophie et d'esthétique à l'École Nationale d'Arts de Dunkerque-Tourcoing. Il est membre du groupe français de la "Nouvelle critique de la valeur".
Publications
La Grande dévalorisation : pourquoi la spéculation et la dette de l'État ne sont pas les causes de la crise (de N. Trenckel et E. Lohoff) - (Trad. sous la dir. G. Briche), Inter-éditions, 2014.
Éloge du vandalisme : comment être artiste après la fin de l'art, Gruissan, Éditions ESA-Publi.net, 2014.
"Ce qu'il reste de la politique", in Revue Lignes, n°41, ("Quête"), mai 2012-mai 2013.
Marc CHATELLIER : Entre angoisse, déni et fétichisme, la disparition de l'institution comme tiers structurant au sein de l'École
La notion de lutte pour la reconnaissance — telle que la pose Axel Honneth — apparaît comme le point aveugle des relations complexes qu'entretiennent entre eux les processus de domination, réification et émancipation. L'auteur a abordé successivement — et à des époques différentes — les trois concepts, pour essayer d'identifier les mécanismes qui, dans le capitalisme contemporain, empêchent les êtres humains d'accéder à la réalisation de soi. Quels sont les rapports qu'entretiennent les notions de réification et de reconnaissance dans la pensée de Honneth, au sein d'une théorie sociale ? Et davantage dans les processus éducatifs institués ? Ce sont les mécanismes intersubjectifs de socialisation et de constitution de la personnalité qui définissent le besoin d'humanité de l'homme et la gravité des blessures que lui inflige le mode de vie moderne. Le primat de l'Autre, tel qu'il a été mis en évidence sur le plan de la psychologie sociale donne toute sa portée à la réification : "si l'Autre ne me regarde pas comme une personne digne de considération, je ne suis pas seulement frustré de la reconnaissance à laquelle j'ai droit, je suis aussi empêché de me constituer comme personne à mes propres yeux, je n'existe pas comme Sujet". Dès lors dans un ensemble d'institutions éducatives en crises — où le sujet (maître/élève) vacille entre souffrance au travail et difficultés d'apprentissage — nous examinerons comment la réification prend un triple visage : entre angoisse, déni et fétichisme, et montrerons comment seul un retour à l'institution — au sens du tiers structurant — peut permettre de déployer une reconnaissance intersubjective non morbide.
Marc Chatellier est Professeur des écoles spécialisé en ZEP, docteur en Sciences de l'Éducation (2000, CREN EA2661) et doctorant en philosophie (2014-2018, CAPHI EA2136) de l'université de Nantes, membre du Comité de rédaction de la revue Illusio.
Publications
Freud à l'École, de la résistance des sujets aux sujets de la résistance, Lormont, Bord de l'Eau, 2017.
"La critique de la valeur comme renversement épistémologique des sociétés dites libérales", in Revue LESTAMP, Actes du colloque "Le mal aux limites des sciences sociales", Nantes, Éditions LESTAMP, Juin 2016.
"Le concept de reconnaissance en sciences sociales", in Revue Pratiques, n°73, "Subjectif objectif, l'inextricable", Paris, Mai 2016.
"Entre Performance et Équité Sociale : l'école face aux paradoxes du paradigme de la reconnaissance", in Actes du Colloque International Reconnaissance et Critique Sociale, Nantes, Septembre 2015, ENS Éditions (à paraître).
Christophe DAVID : De la fronde à la bombe : Benjamin et Anders face aux progrès des technologies guerrières
La réflexion sur le progrès des technologies guerrières a été une des lignes de force de la déconstruction de l'idéologie du Progrès, qui avait accompagné la Révolution industrielle, par la première génération de la Théorie critique. Déchiffrant le dernier conflit mondial en date, imaginant le suivant, Walter Benjamin et Günther Anders ont travaillé à mettre en place une conception de l'Histoire dont ce n'est plus le Progrès mais la Catastrophe qui décide du sens. "Aucune histoire universelle ne conduit du sauvage à l'humanité civilisée, mais il y en a très probablement une qui conduit de la fronde à la bombe atomique", écrivait Adorno dans Dialectique négative. Cette intervention se propose d'éclairer la contribution de Benjamin et d'Anders à cette philosophie de l'Histoire qui "conduit de la fronde à la bombe atomique".
Christophe David est maître de conférences en philosophie à l'université Rennes 2. Traducteur de Benjamin, Anders et Adorno, il leur a consacré de nombreux articles et a co-organisé avec Florent Perrier un colloque sur la "Théorie esthétique d'Adorno" à l'université Rennes 2 en octobre 2016.
Ronan DAVID
Ronan David, docteur en sociologie à l'université de Caen Normandie et membre du comité de rédaction de la revue Illusio, s'intéresse, dans le cadre de ses recherches, à l'étude des processus de réification, de domination à l'œuvre dans la différenciation des sexes, l'éducation, le sport.
Publications
Jouer le monde. Critique de l'assimilation du sport au jeu (avec Nicolas Oblin), Lormont, Bord de l'Eau, 2017.
Le Sport contre les femmes, Lormont, Bord de l'Eau, 2015.
Michelle DOBRÉ
Michelle Dobré est Professeur des universités à l'université de Caen Normandie, sociologue. Ses recherches sont orientées vers l'écologie politique.
Publications
La Face cachée du numérique. L'impact environnemental des nouvelles technologies (avec F. Flipo et M. Michot), Paris, L'Échappée, 2013.
Consommer autrement. La réforme écologique des modes de vie (avec S. Juan sous la dir.), Paris, L'Harmattan, 2009.
Émilie GAILLARD : Apports et perspectives ouvertes par un droit des générations futures pour faire face aux crises environnementales et bioéthique
Intégrer la finitude en droit est devenu un impératif particulièrement nécessaire à notre temps. Le droit n'a pas su empêcher l'avènement de l'Anthropocène et est actuellement pris de vitesse par la question du transhumanisme. Il est devenu impératif de remonter aux fondements philosophiques du droit, d'enrichir la matrice temporelle du droit de sorte que les générations futures prennent chair de droit. De nouveaux principes juridiques tels que ceux de non-discrimination temporelle, de dignité des générations futures ou encore d'intégrité de l'espèce humaine pourraient voir le jour. Ainsi, tant la protection des équilibres du vivant, de la planète que l'infime protection de la condition humaine de l'Humanité pourraient être protégés en droit. Leur traduction sous forme de droits de l'homme transgénérationnels, voire de crimes permettrait de renouveler l'effectivité du droit face à ses crises.
Émilie Gaillard, maître de conférences en droit privé à l'université de Caen Normandie, enseigne le droit international de l'environnement et des droits de l'homme à Sciences Po Rennes. Ses écrits accompagnent le changement de paradigme que nécessite la protection juridique des générations futures, tant en théorie générale que dans la mise en œuvre de ce nouveau droit. Ses écrits portent sur les droits de l'homme des générations futures, la démocratie transgénérationnelle, les crimes et dommages transgénérationnels.
Publication
Générations futures et droit privé. Vers un droit des générations futures (éd. LGDJ 2011, 673 p.), Thèse primée par l'Académie des Sciences Morales et Politiques en 2010.
Katia GENEL : Progrès et pathologies dans la théorie critique
En comparaison avec le scepticisme des premiers théoriciens critiques, notamment Benjamin, Adorno et Horkheimer, on peut constater une certaine résurgence de l'idée de progrès dans les versions récentes de la théorie critique (Habermas et Honneth). Cette idée accompagne une pensée en termes de maladie de la société qui a toujours été présente dans la tradition de Francfort mais prend un sens nouveau avec l'inflation de la référence à la pathologie. Il s'agira ici d'explorer cette métaphore médicale afin de saisir plus précisément la nature du progrès évoqué et d'expliciter la philosophie de l'histoire qui sous-tend ces théories sociales. La référence à la santé et à la maladie vient-elle se substituer à la référence au progrès ? La théorie critique peut-elle se passer d'une telle référence ?
Katia Genel, maîtresse de conférences en philosophie allemande à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, est actuellement en délégation au Centre Marc Bloch à Berlin.
Publications
Autorité et émancipation. Horkheimer et la Théorie critique, Paris, Payot, 2013.
Hannah Arendt. L'expérience de la liberté, Paris, Belin, 2016.
Ainsi que des articles sur l'École de Francfort et sur la sociologie et la philosophie françaises et allemandes contemporaines.
Philippe GODARD : Éducation, migrations, désillusion et… refus de parvenir ?
Dans un monde qui vit une mutation formidable, dans lequel l'État abandonne au secteur privé la totalité de ses rapports positifs avec ses citoyens, la place réservée par la nation à son système éducatif constitue un bon indicateur du niveau de totalitarisme. A fortiori si l'on évalue la place que le système éducatif réserve aux migrants, actuels ou "historiques". La désillusion est au rendez-vous, et, à son tour, elle se révèle un indicateur… du niveau des luttes : la désillusion n'est que l'aveu de notre peur de la libération. Au-delà de l'aspect humanitaire qui invite à accueillir toute personne cherchant un refuge, nous questionnons les motivations des uns et des autres, des "accueillants" comme des migrants. Ce qui est recherché par les premiers comme par les seconds ne semble pas aller dans le sens de l'émancipation. Trop d'acteurs tentent en effet, malgré les conditions socioculturelles et économiques, de parvenir dans ce monde-ci. Ils oublient qu'ils pourraient choisir la voie du refus.
Philippe Godard travaille depuis deux décennies avec des jeunes mal profilés par le système éducatif et qui ont du mal à y trouver leur place (élèves dits décrocheurs, individus "violents" ou dits hyperactifs, et jusqu'aux enfants placés en foyer, souvent discriminés par l'institution). Il est actuellement en train de réaliser un ouvrage avec des enfants placés et leurs éducateurs. Il a mené durant plusieurs années des actions d'éveil aux langues dans des collèges, avec des enfants migrants nouvellement arrivés.
Dernier ouvrage
Croire ou pas aux complots ?, Édition Calicot, 2017.
Alain GRAS : Le piège électrique, la transition énergétique n’aura pas lieu
La fée serait-elle devenue une sorcière ? Assurément appuyer sur un bouton procure un sentiment de puissance auquel ne se mêle aucune culpabilité. En réalité, le système technique électricité est rarement pris dans sa totalité, à la fois diverse et fragile. On ne cesse, en effet, au nom de la transition, de vanter les mérites de cette "énergie", un terme foncièrement trompeur dont la propagande "progressiste" abuse. L'électricité n'est qu'un flux, un vecteur qui transporte une puissance, provenant d'une source primaire, à travers des réseaux, parfois à très longue distance. La transition ne peut s'affranchir d'une prise de conscience que globalement le flux électrique apparemment immatériel fait partie, selon le mot bien choisi de Bruno Latour, du Terrestre. Les COP 21+n sur le CO2 ne seront que des bavardages de politiciens et technocrates, qui resteront inefficaces sans une mise en cause de la croissance et de notre mode de vie. Le piège électrique risque ainsi de se refermer sur un monde qui retourne à l'énergie du XIXe siècle.
Alain Gras est socio-anthropologue des techniques, professeur émérite, UFR de Philosophie, Uté Paris 1. Fondateur du Centre d'Étude des Techniques, des Connaissances et des Pratiques (CETCOPRA), Paris 1, actuellement dirigé par Thierry Pillon après Bernadette Bensaude.
Publications
OIL, anthropologie du pétrole, B2, 2016.
Le choix du feu, Fayard, 2007.
Fragilité de la puissance, Fayard, 2003.
Fabien LEBRUN : Techno-capitalisme et destructivité : du massacre de masse en cours au Congo (RDC), déterminé par le secteur high tech
La détermination guerrière du capitalisme numérique est une réalité depuis vingt ans dans un silence médiatique révoltant. Une guerre interminable se déroule effectivement en République Démocratique du Congo (RDC), causée entre autres par l'industrie numérique qui y pille les minerais indispensables à la fabrication des gadgets électroniques envahissant notre quotidien (téléphones portables, ordinateurs, etc.). Ainsi, c'est l'extractivisme névrotique et l'exploitation des ressources naturelles sur lesquels il faut se pencher afin de comprendre la matérialité de nos vies occidentales virtualisées. Il faut remonter le circuit de la mondialisation économique, repartir à la base de la chaîne produisant les marchandises technologiques par milliards, jusqu'à leur composition en métaux, eux-mêmes produits à partir de matières premières et exposer où, comment, dans quelles conditions, pour qui cela est possible et avec quelles conséquences. Seront abordés, à partir de cette exploitation illégale du sous-sol congolais, l'institutionnalisation du crime, les conditions de travail épouvantables dans les mines, le saccage environnemental, les multiples conflits se traduisant par des millions de morts et des centaines de milliers de viols, la responsabilité indéniable du secteur high tech.
Fabien Lebrun, docteur en sociologie et membre du collectif Illusio, a notamment coordonné les quatre volumes de la revue Illusio consacrés à la Théorie critique de la crise.
Publications
"Vers la convergence homme-machine et société-machine ou le techno-capitalisme comme nouveau stade du sujet automate", in L'Homme et la société, à paraître en 2018 (avec Paul-Fabien Groud).
"Le Congo (RDC) : un génocide au XXIe siècle ? D'un massacre de masse déterminé par l'industrie numérique", in Illusio, n°16-17, Bord de l'eau, 2017.
"Crime institutionnalisé : un désastre social, culturel et politique", Préface à Wolfgang Pohrt, Sociologie du crime politique. L'être humain à l'époque de son utilité, Bord de l'eau, 2013 (avec Nicolas Oblin).
Footafric. Coupe du monde, capitalisme, néocolonialisme, L'Échappée, 2010 (avec Ronan David et Patrick Vassort).
Jorge NÓVOA : Une théorie critique des "nouvelles" formes de domination du capital en Amérique Latine : le cas du Brésil
Une difficulté des sciences sociales est de cerner les époques de la modernité qui, pour cause des survivances des structures des périodes précédentes, ont survécu longtemps de façon pré-capitaliste. La globalisation a été progressive et a joué un rôle très important dans des régions colonisées par des États qui ont pris des avancées conduisant à l'industrialisation. L'Amérique Latine a vécu toutes les formes de la dialectique "rupture et continuité". La crise actuelle exige la critique des théories qui cherchent à expliquer les rapports dominations/subordinations à partir des idéologies du progrès, de la croissance, du développement, avec des concepts tels que sous-développement, dépendance, impérialisme, centre-périphérie, etc., afin d'élaborer une théorie critique capable de cerner les groupes sociaux qui subissent ses relations réelles. Le Brésil fait partie de cette totalité sous la domination du capital fictif. Son rôle leader dans le BRICS et la politique pós-Dilma tracent deux lignes qui font revenir un phénomène né à l'époque coloniale : la relation entre les élites dominantes des espaces colonisés et celle des régions des États colonisateurs dominants. L'étape actuelle propage dans tous les coins du monde la logique marchande dominée par la valeur fictive. Celle-ci "recrute" des fractions avancées, comme à la période de l'accumulation coloniale, ce qui remet en cause toute velléité de développement du dit "État national souverain". Le juridique prend le devant de la scène pour réorganiser cette nouvelle domination.
Jorge Nóvoa est professeur titulaire à l'université fédérale de Bahia, Professor Invité de Paris III - Sorbonne (Département du Cinéma et de l'Audiovisuel), Coordinateur du Groupe de Recherche Oficina Cinéma-Histoire, Rédacteur en chef de la Revue O OLHO DA HISTÓRIA.
Publications
L'histoire à la dérive : un bilan de fin de siècle, Salvador, EDUFBA, 1993.
Carlos Marighella : l'homme derrière le mythe, São Paulo Editora UNESP, 1999 (avec Cristiane Carvalho da Nova).
Incontournable Marx, São Paulo/Salvador, UNESP/EDUFBA, 2007.
Cinématographe. Un regard sur l'histoire, São Paulo/Salvador, UNESP/EDUFBA, 2009 (avec Soleni Biscouto Fressato et Kristian Feigelson).
Les regards sensibles. Les beautés des villes et ses barbaries, Curitiba, Prismas, 2018 (avec Soleni Biscouto Fressato).
Nicolas OBLIN : Le sport : une forme historique d'esthétisation politique du transhumanisme
Au cours de cette communication, nous interrogerons le rapport au temps et à l'histoire entretenu par l'institution sportive. D'un côté, les mises en scènes spectaculaires organisées par les différentes instances du sport seront analysées comme des éléments importants du déchaînement d'une histoire événementielle masquant les structures profondes de la société (Hartmut Rosa). D'un autre côté, nous montrerons que les finalités de l'institution sportive, qu'il s'agisse de l'établissement des hiérarchies sportives ou de l'établissement de records sont des catalyseurs de l'idée de progrès articulée à une conception de l'histoire "inséparable de celle d'un mouvement dans un temps homogène et vide" (Walter Benjamin). Enfin, nous développerons l'idée selon laquelle ces conceptions de l'histoire et du progrès sont familières des fondements épistémiques, philosophiques et politiques du courant transhumaniste (humanité augmentée). Le sport, avant-garde du déterminisme technoscientifique, n'est, de ce point de vue, qu'une de ces institutions qui offrent aux masses l'occasion de jouir de l'anéantissement politique, culturel, esthétique des individus et des peuples.
Nicolas Oblin est docteur en sociologie de l'université Paul Valéry Montpellier III, directeur de rédaction de la revue Illusio et enseignant spécialisé auprès de jeunes en grande difficulté scolaire. Il s'intéresse, dans le cadre de ses recherches, à l'étude de la corporéité, de l'institution sportive, ainsi qu'à celle des institutions d'éducation et de formation ; en particulier aux rapports de domination et aux processus de réification qui s'y déploient.
Publications
Sport et esthétisme nazis, Préface de Patrick Vassort, Paris, L'Harmattan, 2002.
La Crise de l'Université française. Traité critique contre une politique de l'anéantissement, Préface de Jean-Marie Brohm, Paris, L'Harmattan, 2005 (avec Patrick Vassort).
Sport et capitalisme de l'esprit. Sociologie politique de l'institution sportive, Bellecombe-en-Bauges, Le Croquant, 2009.
Pourquoi nier le mal sportif ?, Lormont, Le Bord de l'eau, 2015.
Jouer le monde. Critique de l'assimilation du sport au jeu, Lormont, Le Bord de l'eau, 2017 (avec Ronan David).
Alain-Patrick OLIVIER
Alain-Patrick Olivier est Professeur des universités - Université de Nantes, CREN [en savoir plus].
Publications
Olivier, A. P. (2017), Identity and Difference in a post-dialectical Theory : on Theodor W. Adorno's Paris Lectures, Educação e Filosofia, 31 (63) [en ligne].
Olivier, A. P. (2017), "A demanda de reconhecimento em Educação [Le besoin de reconnaissance dans l'éducation]", in Bannell, R. I.; Gomes, L. R.; Gallo, S.; Pagni, P. A. (Eds), Filosofia da Educação. Entre a formação de educadores e a qualificação profissional, Sao Paulo : Cortez, 19-33.1.
Olivier, A. P. (2017), "Die Rhythmik des Fortschreitens. Über das Verhältnis zwischen Musik und Gesellschaft [La rythmique du progrès. Sur le rapport de la musique et de la société]", Zeitschrift für kritische Theorie, 44/45, 176-190.
Olivier, A. P. (2014), "La réception d'Adorno dans les institutions françaises d'enseignement : musicologie, sociologie, métaphysique", Illusio, 12/13, 367-377.
Olivier, A. P. (2014), "Théorie de l'éducation et philosophie politique selon Axel Honneth", Penser l'éducation, 35, 93-105.
Florent PERRIER : L'héroïsme du petit ou penser l'utopie après Auschwitz avec Miguel Abensour
Dans son dernier ouvrage publié avant sa disparition, La communauté politique des "tous uns" (Belles Lettres, 2014), Miguel Abensour est revenu sur la difficulté d'envisager la persistance de l'utopie après Auschwitz : qu'en est-il en effet de l'utopie après la catastrophe, comment peut-on même songer à l'utopie ? À l'opinion commune, satisfaite de pouvoir disqualifier l'idée qu'un monde meilleur puisse encore être envisagé, Miguel Abensour oppose pourtant "un renversement inattendu de la question" : "comme l'ont perçu à des degrés divers Etty Hilsum, Adorno, Levinas, loin de ruiner l'idée d'utopie, cette situation sans précédent aurait pour effet surprenant de faire naître, de susciter une sommation utopique d'un genre nouveau, inédite, inouïe, comme si le désir d'éviter la répétition de la catastrophe ne pouvait s'accomplir que par le choix radical de "l'écart absolu" propre à l'utopie de Charles Fourier" (p. 373). En revenant sur les moments d'apparition de l'idée de sommation utopique dans l'œuvre de Miguel Abensour, sur sa généalogie, nous proposons ici une lecture de la persistance de l'utopie après Auschwitz sous le signe d'un héroïsme du petit. Cette intervention participe d'une recherche en cours (cf. notamment Florent Perrier, "Insurgente insurgeante — Miguel Abensour ou la persistance de l'écart absolu", Lignes, Fécamp, mai 2018, n°56, "Miguel Abensour. La sommation utopique" (numéro conçu et réalisé par Michèle Cohen-Halimi et Sophie Wahnich), elle n'a donc aucunement un caractère définitif.
Membre de l'EA 7472 "Pratiques et théories de l'art contemporain" (PTAC), Florent Perrier est maître de conférences en esthétique et théorie de l'art à l'université Rennes 2, chercheur associé à l'Institut Mémoires de l'édition contemporaine (IMEC) et aux Archives Walter Benjamin de Berlin. Ses travaux portent sur les rapports entre l'art, l'utopie et le politique de l'ère industrielle à l'extrême contemporain, sur l'esthétique et le politique chez Walter Benjamin et sur l'esthétique de la résistance dans les arts contemporains.
Publication
Topeaugraphies de l'utopie, Collection "Critique de la politique", Payot, 2015.
Laurent PLET : La dialectique négative sous l'angle de la critique de l'abstraction
La dialectique négative est cette forme de discursivité philosophique qu'Adorno expose dans l'ouvrage éponyme paru en 1966 (Dialectique négative). Si la richesse de l'ouvrage permet de multiples entrées et traversées, il est possible de prendre pour fil conducteur la critique de l'abstraction comprise oubli, déni d'un réel impossible. Telle pourrait être, pour jouer avec la question initiale, la productivité encore actuelle de cette pensée malgré l'usage et l'usure possible de catégories apparemment bien fatiguées, comme de vieille chaussures abandonnées le long du chemin qui pourraient peut-être cependant retrouver une seconde vie.
Publications
Raison politique et dialectique négative chez Adorno, Variations, 2006.
La langue contre la langue, tentative de sauvetage, Théorie critique de la crise, Illusio, 2014.
Essai sur la Dialectique négative d'Adorno, Matérialisme critique et utopie, Classiques Garnier, 2016.
Gérard RAULET : Le débat sur la réification dans la théorie critique contemporaine
Dans le mouvement général de révision du marxisme orthodoxe, la publication du livre de Lukács Histoire et conscience de classe aux Éditions de Minuit a été un signe important. Elle correspond à une tendance générale à substituer le concept d'aliénation à celui, plus "basique" ou trop ouvriériste, d'exploitation et à ouvrir ainsi de nouvelles perspectives critiques à la pensée socialiste. S'interrogeant en 1998, à l'occasion du 30e anniversaire de Mai 1968, sur "les origines intellectuelles de cette révolution fondatrice […] de notre "France contemporaine"", Daniel Lindenberg prétendra, non sans raison, qu'Histoire et conscience de classe — "livre maudit du marxisme occidental" — est "(re)devenu la bible du gauchisme" (Daniel Lindenberg, "1968 ou la brèche situationniste", Esprit, n°242, mai 1998, p. 127-140). Cette question est importante — et d'autant plus que, pour la réception de Marcuse, par exemple, elle a constitué un point de fixation idéologique et théorique. Tandis que semblait dominer la vague de l'anti-humanisme — fût-il théorique (Althusser) — un front assez large s'est créé pour défendre la validité herméneutique et même analytique du concept d'aliénation, malgré son appartenance aux écrits du "jeune Marx". J'ai moi-même engagé ma thèse d'État de cette façon, en défendant la possibilité d'un humanisme marxiste utilisant la notion d'aliénation de façon négative, pour appréhender la tendance d'une désaliénation à conquérir. Dans un contexte d'épuisement de la Théorie critique, dans lequel elle peine à maintenir une ligne émancipatrice face à l'idéologie néo-libérale, Axel Honneth a relancé le débat sur Lukács et sur la réification. C'est l'occasion de faire le point sur une catégorie épistémologique qui est et a été tout autant au cœur des crises du marxisme que de sa théorisation des crises depuis les années 1920.
Gérard Raulet, professeur d'histoire des idées allemandes à l'université Paris-Sorbonne, est directeur du Groupe de recherche sur la culture de Weimar (Fondation Maison des Sciences de l'Homme & UMR 8138 SIRICE). Directeur de l'UPRES-A 8004 "Philosophie politique contemporaine" (CNRS / École Normale Supérieure de Lettres et Sciences humaines) de 1999 à 2003, il a dirigé le programme ANR/DFG CActuS (Critique, Actualité, Société) avec Axel Honneth de 2014 à 2016.
Publications en philosophie politique contemporaine
Critical Cosmology. Essays on Nations and Globalization, Lanham MD, Lexington Books, 2005.
La philosophie allemande depuis 1945, Paris, Armand Colin, 2006.
Republikanische Legitimität und politische Philosophie heute, Münster, 2012.
Philosophische Anthropologie. Themen und Positionen, Band 2 : Philosophische Anthropologie und Politik, Nordhausen, 2013 (dir. en collaboration avec Guillaume Plas).
European Constitutionalism. Historical and Contemporary Perspectives, Bruxelles e.a., 2014 (dir. en collaboration avec Alexandre Dupeyrix).
Wissen in Bewegung. Theoriebildung unter dem Fokus von Entgrenzung und Grenzziehung (dir. en collaboration avec Sarah Schmidt), Berlin, 2014.
Gilles-Éric SÉRALNI
Gilles-Éric Séralni est Professeur de biologie moléculaire, à l'université de Caen Normandie, membre associé de l'équipe CERREV. Responsable du pôle Recherche Risques, Qualité et Environnement Durable. Membre de l'équipe Estrogènes et Reproduction des Mammifères, laboratoire de biochimie ; sujet de recherche et d'expertise : effets des OGM et des pesticides sur la santé, président du Conseil scientifique du CRIIGEN.
Dernières publications
Le Sursis de l'espèce humaine, Belfond, 1997, Rééd. revue et augmentée sous le titre Nous pouvons nous dépolluer !, Josette Lyon, 2009.
OGM : le vrai débat, Flammarion, Collection "Dominos", octobre 2000.
L'Évolution de la matière, de la naissance de l'Univers à l'ADN, Éditions Pocket, Collection "Explora", 1994.
Jan SPURK : Encore du progrès… ?
L'ambiguïté et la perversion du progrès, de l'avancement réalisable et maîtrisable vers une vie meilleure, sont critiquées depuis longtemps et avec des orientations théoriques très différentes. On doit considérer non seulement les "dégâts du progrès" mais également sa perversion comparée à l'idée libératrice que les Lumières se sont faite du progrès. "Aussi peu l'humanité telle quelle avance suivant les lois de la réclame du toujours-mieux, aussi peu est l'idée du progrès sans l'idée de l'humanité" (Adorno). L'idée de l'humanité a disparu de la conception du progrès basé sur la généralisation de la logique marchande et de la marchandisation. En revanche, "Le progrès signifie la sortie de l'emprise, aussi de l'emprise du progrès, qui est lui-même une nature, grâce à l'humanité réalisant sa propre naturalité" (Adorno). C'est-à-dire que le progrès est à comprendre comme le projet de l'autonomie croissante et de la libération des hommes.
Jan Spurk est sociologue, professeur des Universités à l'université Paris Descartes, Faculté des Sciences Humaines et Sociales — Sorbonne, responsable du master "Sociétés contemporaines" ; études de sociologie à Francfort et à Paris. Ses champs de recherche sont : théories sociales, théories critiques, subjectivités, espaces publics.
Publications
Contre l'industrie culturelle. Les enjeux de la libération, Éditions Le Bord de l'Eau, 2016.
Au-delà de la crise ?, Éditions du Croquant, 2016.
Les limites de l'indignation ou la révolution commence-t-elle à Bure ?, Éditions du Croquant, 2017.
Olivier VOIROL
Olivier Voirol est Maître de Conférence à l'université des Sciences sociales et Politiques de Lausanne, membre du laboratoire de recherche Laboratoire capitalisme, culture et sociétés (Université de Lausanne).
Publications
"Autour d'Axel Honneth. Reconnaissance et communication", in Revue Réseaux, n°193, Paris, La Découverte, 2015.
"Luttes pour la reconnaissance", in Dictionnaire des mouvements sociaux, Paris, Presses de Sciences Po (P.F.N.S.P.), 2009.
"Axel Honneth et la sociologie : reconnaissance et théorie critique à l'épreuve de la recherche sociale", in La quête de reconnaissance, Paris, La Découverte, 2007.