Programme 2020 : un des colloques

Programme complet


Colloque annulé

En raison des événements exceptionnels liés à l'épidémie de la Covid-19, et sur proposition des directeurs, ce colloque a été annulé.

La direction du CCIC


CIRCULATIONS DES CARTES POSTALES DANS LA LITTÉRATURE ET LES ARTS
( XXe - XXIe SIÈCLES )


DU MARDI 2 JUIN (19 H) AU MARDI 9 JUIN (14 H) 2020

[ colloque de 7 jours ]


Eric Baudart et Thu Van Tran, Blue Saïgon, 2017, courtesy des artistes


DIRECTION :

Magali NACHTERGAEL, Anne REVERSEAU


ARGUMENT :

Ce colloque rassemblera artistes et chercheurs de différents horizons pour explorer le rôle qu'un objet, a priori banal, a pu avoir dans la culture visuelle et littéraire des XXe et XXIe siècles. Il s'agira d'étudier, jusqu'à l'époque contemporaine, les différentes façons dont poètes, écrivains et artistes ont regardé, ont manipulé, ont joué avec la carte postale et comment ils se sont appropriés ou se sont opposés à ce modèle médiatique plus polémique qu'il n'y paraît. Comment la carte postale, en étant réinvestie par les artistes contemporains, en particulier dans les protocoles iconographiques et de collection, connaît un renouveau qui amène aussi un regard critique sur cette production vernaculaire de masse ?

En abordant à la fois l'imaginaire de la carte postale dans les avant-gardes historiques et ses réinventions contemporaines, ce colloque entend proposer une relecture de ce medium moderne qui insiste sur ses enjeux communicationnels. Malgré les fluctuations de la production et la variabilité des supports, la notion de "carte postale" reste opérante et usitée jusque dans les correspondances numériques, témoignant du modèle médiatique qu'elle représente encore aujourd'hui.


MOTS-CLÉS :

Art contemporain, Arts visuels, Histoire visuelle, Littérature, Objet médiatique, Photographie


CALENDRIER PROVISOIRE :

Mardi 2 juin
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Mercredi 3 juin
Matin
Magali NACHTERGAEL & Anne REVERSEAU : Introduction
Servanne MONJOUR & Nicolas SAURET : Rematérialisation de la carte postale : autour de General Instin

Après-midi
CARTES POSTALES ET ART CONTEMPORAIN
Antoine QUILICI : Cartes postales de musées et appropriations
Marie BOIVENT : Les cartes postales d'artistes : fictions de l'image vs fictions du texte
Élisa BRICCO : Cartes postales : récit minimal et autobiographie chez Valérie Mréjen

Soirée
Dialogue avec Valérie MRÉJEN (artiste et écrivaine) sur son utilisation de la carte postale


Jeudi 4 juin
Matin
CARTES POSTALES ET ENJEUX HISTORIQUES CONTEMPORAINS
Dominique CASIMIRO : Des mémoires d'encre, de papier et de colle. L'art postal latino-américain face aux dictatures
Andy STAFFORD : La carte postale "postcoloniale" ?
Noëlle ROUXEL-CUBBERLY : Un générique de cartes postales : le cas de la Rue Cases-Nègres d'Euzhan Palcy

Après-midi
CARTES POSTALES DES EMPIRES
Caroline FERRARIS-BESSO : Tahiti, envers de la carte postale
Gilles TEULIÉ : Représentations de l'espace colonial et appropriations territoriales dans l'industrie de la carte postale du début du XXe siècle


Vendredi 5 juin
Matin
CARTES POSTALES ET EXPÉRIENCES LITTÉRAIRES
Denis SAINT-AMAND : La 'Pataphysique en cartes postales
Gaëlle THÉVAL : Le mail art en revue : les cartes postales DOC(K)S
Mathilde ROUSSIGNÉ : Cartes postales contemporaines et résidences d'écrivain. Littérature contextuelle, relationnelle, résidentielle ?

Après-midi
Le projet pOST : atelier mail art, avec des élèves du collège Anne Heurgon-Desjardins de Cerisy
Rencontre avec le collectif OST : retour sur expérience
Visite de l'exposition de livres d'artistes sur la carte postale


Samedi 6 juin
Matin
Jean-Pierre MONTIER : Les écrivains objets de cartes postales, autour de Louis Guilloux
Wolfram NITSCH : Photographies parlantes. Cartes postales dans les romans de Claude Simon
Pierre TAMINIAUX : Paul Nougé ou le poème comme carte postale

Après-midi
DÉTENTE


Dimanche 7 juin
Matin
CARTES POSTALES ET PATRIMOINE
Kim TIMBY : Le début de la vente de cartes postales dans les musées en France, 1900-1912
Marie-Clémence RÉGNIER : Imagerie et imaginaire contemporains des maisons d'écrivains et d'artistes en France : du polart à Instagram

Après-midi
RETOURS SUR EXPÉRIENCES ARTISTIQUES
Claire TENU : "The actuality of the past"
Renaud EPSTEIN : Un jour, une ZUP, une carte postale : retour réflexif sur une (re)mise en circulation
Cyrielle LÉVÊQUE : Des cartes postales entre documents et indignation : une lecture de l'œuvre de Ken Gonzales Day

Soirée
Raphaëlle BERTHO : Recherche autobiographique à travers deux albums de cartes postales


Lundi 8 juin
Matin
HISTOIRE ET GÉOGRAPHIE DE LA CARTE POSTALE
Marie-Ève BOUILLON : Pour une histoire transnationale de la carte postale
Laurence CORBEL : Le Brésil en cartes postales : iconographies poétiques et critiques
Maha GAD EL HAK : Les cartes postales de L'Égypte d'Hier en couleurs (2008)

Après-midi
Danièle MÉAUX : Les cartes postales, des documents privilégiés pour les artistes enquêteurs du XXIe siècle
Géraldine SFEZ & Sarah TROCHE : Le bonheur en couleurs véritables


Mardi 9 juin
Matin
Conclusion

Après-midi
DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Marie BOIVENT : Les cartes postales d'artistes : fictions de l'image vs fictions du texte
De nombreux artistes ont conçu des cartes postales, séduits par ce format compact produit en série, au coût de fabrication peu élevé, prévu pour voyager "à découvert". Mais si beaucoup exploitent ce support comme un simple moyen de faire circuler des reproductions d'œuvres, un certain nombre d'entre eux préfère tirer parti ou jouer avec les particularités de cette image-objet. Cette communication se propose d'examiner les déplacements opérés par les artistes dans les cartes qu'ils produisent, et d'observer comment ils mettent au jour, revisitent, voire dénoncent la fonction de la carte postale et analysent les mythes et croyances qu'elle a pu véhiculer. La mise en abyme ou encore la déconstruction de la relation du visuel (recto) à la légende (verso) sont autant de moyens qui leur permettent de mener une subtile réflexion sur la nature de l'échange propre aux cartes postales ou encore d'instiller dans cet objet banal a priori inoffensif une charge tantôt poétique, tantôt politique.

Marie Boivent est maîtresse de conférences en arts plastiques à l'université Rennes 2 où elle est membre de l'équipe d'accueil "Pratiques et théories de l'art contemporain". Ses recherches portent sur les publications d'artistes depuis les années 1960, en particulier lorsqu'elles empruntent des formes populaires, légères et/ou éphémères telles que les revues d'artistes, les calendriers, les tracts, ou les cartes postales.

Élisa BRICCO : Cartes postales : récit minimal et autobiographie chez Valérie Mréjen
La carte postale est un objet multifacette dans la pratique créative de Valérie Mréjen : ce sont des images trouvées dans les marchés aux puces qui sollicitent ensuite l'écriture fictionnelle et autobiographique. L'attrait pour les cartes postales est aussi évident si on parcourt la liste des œuvres de l'autrice où l'on découvre que l'exploitation de ces images est constante dans sa pratique artistique, et ne se limite pas à l'utilisation du support carte postale pour des installations par exemple, mais se développe dans les vidéos et les films où les images deviennent les décors des histoires racontées. La relation entre texte et image se déploie de manière hétérogène dans les récits, quel que soit le médium utilisé, la carte postale est un vecteur de sens et un support de l'écriture fragmentaire par laquelle Mréjen mène sa quête autobiographique et sa création autofictionnelle.

Élisa Bricco est professeur de littérature française à l'université de Gênes en Italie. Elle consacre sa recherche à la littérature française d'aujourd'hui, à la poésie, à la prose et depuis quelques années elle travaille sur les enjeux de l'intermédialité (roman et peinture, roman et cinéma, phototexte, bande dessinée). En 2012, elle a coordonné le numéro 23 de la revue en ligne Cahiers de narratologie sur "Le sujet et l'art dans la prose française contemporaine (1990-2012)". En 2015, elle a publié le volume Le Défi du roman. Narration et engagement oblique à l'ère postmoderne (Peter Lang) et la même année le collectif Le Bal des arts. Le sujet et l'image : écrire avec l'art (Quodlibet). En 2016 est paru dans la revue Nuova Corrente (126) le collectif Écritures hybrides d'aujourd'hui (Scritture ibridate contemporanee) et en 2018 le collectif dirigé avec Nancy Murzilli Pratiques artistiques intermédiales dans la revue en ligne Publifarum. Elle prépare un volume sur Raconter avec la photographie (2020). Elle dirige le groupe de recherche de l'ARGEC (Atelier de recherches génois sur les écritures contemporaines).

Laurence CORBEL : Le Brésil en cartes postales : iconographies poétiques et critiques
Le Brésil, pays de cartes postales ? À rebours des visions édulcorées qu'offrent les clichés touristiques, des artistes brésiliennes se sont emparées de ce support modeste et facile à diffuser pour proposer d'autres images dont on se propose d'analyser le potentiel critique. Depuis les années 1970 jusqu'à aujourd'hui, certains travaux de Sonia Andrade, Ana Bella Geiger, Regina Silveira, Rivanne Neuenschwander et Mayana Redin s'emploient à relire les représentations que véhiculent les images typiques dont les cartes postales, miroir déformant de la société brésilienne, sont souvent le vecteur. À travers un répertoire de gestes de parasitage, de détournement, de déconstruction mais aussi de poétisation, ces artistes substituent à une représentation mythique, exotique ou pittoresque de la "brésilianité", des images résistantes et poétiques, mettant ainsi au jour une politique du visible.

Laurence Corbel est enseignante-chercheuse en esthétique et philosophie de l'art à l'université de Rennes 2. Elle dirige les programmes de recherche "Arts en temps de crise au Brésil, en Argentine et en Colombie : résistances et activismes au prisme des mémoires politiques" et "Écrits et paroles d'artistes : contributions aux scènes artistiques contemporaines d'Amérique latine".
perso.univ-rennes2.fr/laurence.corbel

Renaud EPSTEIN : Un jour, une ZUP, une carte postale : retour réflexif sur une (re)mise en circulation
La communication propose un retour réflexif sur le projet "Un jour, une ZUP, une carte postale" développé par l'auteur depuis 2014, consistant dans la publication quotidienne d'une carte postale de grands ensembles des années 1950-1970. Cette (re)mise en circulation de cartes représentant des quartiers qui, après avoir incarné la modernité et le progrès social dans la France des trente glorieuses, sont devenus les symboles de la crise socio-urbaine, a suscité un flux continu de réactions sur les réseaux sociaux et des réappropriations artistiques diverses. Tout autant que la pratique de collection/diffusion de l'auteur, ce sont ces réactions et réappropriations qui seront analysées. Cette analyse s'appuiera notamment sur un traitement de plus de 2000 tweets de ces cartes postales de ZUP, qui permettra de quantifier les interactions (réponses, retweets, likes) suscitées par chacun d'eux. L'exploitation de la base ainsi constituée cherchera à déterminer les facteurs (géographiques, historiques, esthétiques) explicatifs des variations observées.

Renaud Epstein est maître de conférences en science politique à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye, spécialiste de la politique de la ville. Ses tweets "Un jour, une ZUP, une carte postale" ont servi de support à la création d'un papier peint par le collectif d'artistes et d'activistes Initiative Urban Kulturen, qui a été exposé à Berlin et aux rencontres photographiques d'Arles. Il prépare un actuellement un ouvrage sur les cartes postales de grands ensembles d'habitat social.
Publication
Rénovation Urbaine. Démolition-reconstruction de l'État, Presses de Sciences Po, 2013.

Caroline FERRARIS-BESSO : Tahiti, envers de la carte postale
Nous nous intéresserons aux avatars du mythe de Tahiti ou de la "Nouvelle Cythère", qui correspondent à autant de retournements affectant la carte postale telle qu'elle se manifeste dans le contexte polynésien : du recto vers le verso, du texte vers l'image puis de retour vers le texte. Dans un premier temps, nous considérons ce qui fait impression dans la production littéraire et artistique des XVIIIe et XIXe siècles, en accordant une attention particulière aux écrits et dessins de Pierre Loti et Paul Gauguin. Nous étudions ensuite la manière dont ces impressions sont codifiées dans les cartes postales du début du XXe siècle. Enfin, nous considérons la circulation de "cette image de carte postale paradisiaque" dans le recueil de nouvelles Cartes postales (2015) de Chantal T. Spitz : en s'appropriant le style du texte de la carte, elle fait mentir l'image pauvre du mythe et réaffirme la primauté de la parole.

Caroline Ferraris-Besso est professeur assistante dans le département de français à Gettysburg College, en Pennsylvanie. Ses travaux de recherche portent sur la fabrique des minorités par le biais de la littérature et des arts dans l'Empire Colonial Français. Elle travaille à un manuscrit intitulé Postcarding the Other : Polynesia and the Nineteenth-Century French Imagination.

Maha GAD EL HAK : Les cartes postales de L'Égypte d'Hier en couleurs (2008)
Notre étude, tournant autour du spatial et de l'humain dans ce recueil d'images, tentera de s'interroger sur les points suivants : "Quels y sont les genres de cartes postales utilisées ? L'emploi de chaque type répond-il à une explication quelconque ? Pour quelles raisons les auteurs ont-ils aujourd'hui édité cet ouvrage ? Est-ce une question de nostalgie d'une période révolue ou y aurait-il d'autres motifs à ce discours icono-verbal ? Et quelles conclusions peut-on tirer quant aux rapports existant entre pratiques et représentations ?". C'est pour répondre à ces questions que l'on analysera cette passionnante collection appartenant à la culture visuelle mondiale.

Professeur d'histoire culturelle et de sémiotique visuelle à l'université du Caire, Maha Gad El Hak est cofondatrice du GRI (Groupe de Recherche sur l'Image), coordinatrice du premier projet : "L'image de Paris, l'image dans Paris. L'image comme vecteur culturel" (2006-2011), du second projet du GRI : "La photographie comme produit culturel et document historique" (2011-2016), et du troisième projet : "La Femme entre pratiques sociales et représentations discursives" (2016-2019). Elle est aussi experte et partenaire du site français : decryptimages.net.
Publications
"Paris, Le Caire et Sao Paulo à travers le site TV5 Monde", in Dialogues et Cultures, n°59 : "Usages pédagogiques du site de TV5 Monde", 2013, pp.17-34.
"Le Sentimental. Les Images en Égypte contemporaine" (avec Aida Hosny), in L. Gervereau (dir.), Dictionnaire mondial des Images, Nouveau Monde, Paris, 2006, pp.961-963 (réédité en 2010, Nouveau Monde (poche), pp.1473-1477).
"L'Écriture de l'Histoire entre discours verbal et discours iconique", in R. Jacquemond (dir.), Écrire l'Histoire de son temps. L'Écriture de l'Histoire, Paris, L'Harmattan, 2005, pp.137-148.
"À propos d'une tradition : récit photographique", in Mémoires de la Méditerranée : Génie du lieu, Actes du IIIe Symposium des expressions culturelles et artistiques de la Méditerranéité, Monastir, janvier 2004, pp.110-125.

Cyrielle LÉVÊQUE : Des cartes postales entre documents et indignation : une lecture de l'œuvre de Ken Gonzales Day
La pratique de collectionneur de l'artiste américain Ken Gonzales Day s'oriente dans le cadre du projet Erased lynching, vers des cartes postales présentant des scènes de lynchages dans l'Ouest américain envers les Amérindiens, les Chinois, les Latinos et les Afro-Américains. Ces actes ont été photographiés et largement diffusés aux États-Unis de manière légale de la fin du XIXe siècle jusque dans les années 1930. Ken Gonzales Day s'empare de ces dernières et intervient sur les images par le biais d'un processus créateur singulier. L'acte de témoignage et de transmission face à ces évènements incite le spectateur à réévaluer le statut initial de la carte postale. Quels leviers sont mis en place par l'artiste, pour mettre à jour des images qui viennent bouleverser notre rapport à l'information initiale ? Ce questionnement permettra de nous interroger sur les échanges qui s'opèrent entre le document, l'Histoire et la mémoire par le prisme de l'évanouissement de la figure et de révéler l'engagement critique qui sous-tend cette proposition.

Cyrielle Lévêque est photographe, plasticienne et docteure en sciences de l'art. Ses recherches plastiques et théoriques s'orientent vers la mise en récit d'images d'archives et vernaculaires sous diverses formes et portent une attention particulière aux processus de transmission. Au cœur de ces derniers s'exerce une recherche constante autour de l'image manquante et des rapports de la disparition et de son absence, qui compliquent tout témoignage visuel, élaborant l'idée d'une résistance des images grâce à l'œuvre d'art.

Danièle MÉAUX : Les cartes postales, des documents privilégiés pour les artistes enquêteurs du XXIe siècle
De nombreuses œuvres contemporaines — se positionnant au croisement de la tradition documentaire, des pratiques conceptuelles et des recherches en sciences humaines et sociales — manifestent un intérêt renouvelé pour la compréhension de phénomènes réels, présents ou passés : elles constituent de véritables enquêtes menées sur le terrain ou au sein des archives. Parmi les documents collectés par les artistes, les cartes postales occupent une place toute particulière. Elles portent des informations, véhiculent des lieux communs instructifs d'un point de vue sociologique, historique ou anthropologique, trahissent des stratégies économiques ou territoriales ; associant à l'image une correspondance inscrite à leur verso, elles possèdent également une épaisseur intrinsèque qui en fait des documents doués de complexité.

Spécialiste de la photographie contemporaine, Danièle Méaux est professeur en esthétique et sciences de l'art à l'université de Saint-Étienne. Elle dirige le CIEREC EA 3068. Elle a récemment coordonné la publication du numéro 334 de la Revue des Sciences Humaines : Les Formes de l'enquête. Elle est rédacteur en chef de la revue Focales.
Publications
La Photographie et le temps, PUP, 1997.
Voyages de photographes, PUSE, 2009.
Géo-photographies. Une approche renouvelée du territoire, Filigranes, 2015
Enquêtes. Nouvelles formes de photographie documentaire, Filigranes, 2019.

Wolfram NITSCH : Photographies parlantes. Cartes postales dans les romans de Claude Simon
Si, dans le Manifeste du surréalisme, Breton se plaît à dénigrer les "cartes postales" que sont à son avis les descriptions littéraires, Claude Simon prend une position tout à fait contraire. Dans ses romans, surtout dans Histoire (1967) et L'acacia (1989), il assigne une place importante aux cartes postales du début du XXe siècle et en offre souvent une description étendue. Les passages en question indiquent une perspective double du narrateur, à la fois critique et complice. D'une part, il évoque non sans un certain sarcasme l'usage des cartes postales dans la correspondance galante du milieu grand-bourgeois, dans la politique visuelle de l'empire colonial et dans la propagande patriotique de la Grande Guerre, tout en insistant sur la standardisation des "vues" photographiques et des messages sommaires. D'autre part, il met en valeur la capacité des cartes postales de provoquer de fortes émotions auprès du destinataire, soit par un envoi très fréquent qui produit une véritable "avalanche" de messages, soit par des effets sémiotiques involontaires de "majesté" ou de "désolation", dûs à une mauvaise qualité de tirage ou d'impression des photographies qui par là même deviennent "parlantes". En outre, le jeu de cartes postales qu'on peut arranger d'une manière ou de l'autre sert de "machine" littéraire au romancier qui cherche à réduire le romanesque par une composition analogique d'images mémorielles.

Wolfram Nitsch est professeur de littérature française et hispanique à l'université de Cologne. Ses principaux champs de recherche sont la prose française du XXe siècle, la littérature espagnole du siècle d'or et la littérature argentine moderne, ainsi que la médiologie, l'anthropologie littéraire et la théorie de l'espace. De 2014 à 2018, il a dirigé un projet de recherche sur la poétique du terrain vague (terrainvague.de), dont est sorti l'ouvrage Terrains vagues (2019).
Publications
Sprache und Gewalt bei Claude Simon (1992).
Barocktheater als Spielraum (2000).
Co-auteur du livre Komödie (2013).
A co-dirigé les volumes Lectures allemandes de Claude Simon (2013), Scénarios d'espace (2014), Le mouvement des frontières (2015) et Marcel Proust und der Erste Weltkrieg (2017).

Antoine QUILICI : Cartes postales de musées et appropriations
Si les boutiques de musées proposent encore des reproductions d'œuvres sans altération, hormis celles imposées par les choix des photographes, et qui ont constitué le Musée Imaginaire d'André Malraux, nombreuses sont aujourd'hui les cartes qui donnent à voir les tableaux les plus célèbres de l'histoire de l'art retouchés afin de les rendre plus simples ou amusants. Ces modifications que nous analyserons tirent bien parti du statut de la carte postale mais elles obéissent également à des stratégies commerciales. Elles peuvent en revanche prendre une dimension artistique lorsque le champ de liberté offert par la carte postale est vu comme l'espace de la subversion, de la réinterprétation et non plus celui de la fantaisie. En prenant comme point de départ La Joconde de Marcel Duchamp maquillée sur ce petit format, nous nous intéresserons ensuite aux diverses possibilités que ce rectangle de quelques centimètres offre aux artistes souhaitant reprendre les classiques. Nous verrons qu'en invitant les travaux des grands maîtres dans la sphère domestique, la carte permet aux artistes de les appréhender d'une façon intime, de les refaire, de les marier à d'autres techniques et d'ouvrir de nouvelles possibilités au Mail Art.

Antoine Quilici est doctorant en troisième année en arts plastiques à l'université Rennes 2 sous la direction de Sandrine Ferret (unité de recherche PTAC - EA 7472), ses recherches portent sur les produits dérivés de musées et la place qu'ils occupent dans un parcours de visite.

Marie-Clémence RÉGNIER : Imagerie et imaginaire contemporains des maisons d'écrivains et d'artistes en France : du polart à Instagram
Dans un premier moment historique, la communication s'appuiera sur un corpus iconotextuel pour interroger la manière dont la réhabilitation de la plupart des maisons d'écrivains et d'artistes emprunte à un répertoire d'images et de valeurs propre à une certaine catégorie de carte postale patrimoniale, voire patriotique. Elle étudiera ensuite des "portraits de maison" illustrés dans des collections ad hoc et des fictions contemporaines dont la trame narrative se déporte progressivement vers le dévoilement plus ou moins critique des mécanismes de construction du patrimoine et du "génie des lieux" à l'appui d'illustrations reposant sur les codes iconographiques de la carte postale. La comparaison avec cette dernière y est employée pour pointer la fiction d'authenticité, l'esthétique et l'instrumentalisation idéologique et politique qui sous-tendent encore aujourd'hui la fabrique et l'entretien complaisant de ces paysages "de carte postale" que sont les maisons dans leur environnement, dans des descriptions imitant ou parodiant un "style carte postale" clichéique. Il s'agira d'en délimiter les ressorts poétiques (accumulation de stéréotypes, saturation adjectivale, lyrisme intimiste…). Les cartes postales subissent ainsi un processus de remédiation dont les "posts" sur les réseaux sociaux constituent un autre avatar sur lequel s'ouvrira la communication. Facebook, Instagram ou encore Pinterest regorgent effectivement de contenus iconotextuels adressés non plus à un individu identifié mais à des "communautés" selon des codes iconographiques et discursifs spécifiques. Ces cartes postales 2.0 fonctionnent comme autant de "déjà vus". Ceux-ci véhiculent une imagerie et un imaginaire de la maison d'écrivain et d'artiste homogènes avec les exemples examinés précédemment, comme autant de représentations légendaires façonnées par des scénographies auctoriales marquées par un art de vivre propre au génie créateur. Toutefois, les usages que permettent les technologiques numériques induisent de nouvelles pratiques et de nouvelles représentations, comme l'appropriation de l'image standardisée et anonyme de la carte postale par la mise en scène de soi ou encore par la mise en réseau du "post" au moyen d'un hashtag.

Ancienne élève de l'École Normale Supérieure de Paris, agrégée de lettres modernes et diplômée de Sciences-po Paris, Marie-Clémence Régnier a soutenu une thèse en littérature française à la Sorbonne sur la genèse des maisons-musées d'écrivains en France. Elle est maître de conférences à l'université d'Artois. Ses recherches portent sur la construction de la figure de l'écrivain et de l'histoire littéraire dans les maisons-musées, les musées et les expositions littéraires et, plus largement, sur les interactions entre littérature, patrimoine et culture médiatique moderne depuis le XVIIIe siècle [en savoir plus].
Publications
"Ce que le musée fait à la littérature. Muséalisation et exposition du littéraire", Introduction au numéro d'Interférences littéraires/Literaire interferenties, n°16, "Ce que le musée fait à la littérature. Muséalisation et exposition du littéraire", Marie-Clémence Régnier (dir.), juin 2015.
"Hauteville House : une scène pour l'exil ? Mise en scène de soi et du chez soi", Actes du colloque international "L'écrivain vu par la photographie" (Colloque de Cerisy, 21- 28 juin 2014), Anne Reverseau, Jean-Pierre Montier et David Martens (dir.), Rennes, Presses de l'université de Rennes, 2017, p. 229-236.
""Je ne suis pas de ceux dont la postérité signalera les maisons". Place et statut des maisons de Théophile Gautier dans sa patrimonialisation (1867-1922)", Catherine Mayaux (dir.), Quand les écrivains font leur musée, Bruxelles, Peter Lang, 2017, p. 237-243.
"Aspects du "pittoresque" dans le processus de patrimonialisation des maisons des écrivains : le cas des maisons de Pierre Corneille dans L'Hermite en province et les Voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France (1804-1829)", Actes de la journée d'étude organisée par Georges Zaragoza et le Musée de la vie romantique, Cahiers d'Études nodiéristes, Paris, Classiques Garnier, 2018/1, n°5, "Voyages pittoresques et romantiques : littérature et patrimoine dans la première moitié du XIXe siècle", p. 155-169.

Mathilde ROUSSIGNÉ : Cartes postales contemporaines et résidences d'écrivain. Littérature contextuelle, relationnelle, résidentielle ?
Les résidences d'écrivains stimulent un régime local de publication au double sens du terme : elles motivent des publications à diffusion restreinte et confrontent les écrivains à une écriture du séjour. Dans le cadre de ces deux modalités de publication locale, la carte postale apparaît alors comme un support privilégié. Qu'a à nous dire ce recours à la carte postale de la poétique des productions résidentielles ? Il nous éclaire, d'une part, sur les attentes et les contraintes qui pèsent sur cette production littéraire : assumer le besoin institutionnel de restitution, donner trace de l'expérience du séjour dans un lieu, faire de la littérature un art relationnel. Il donne à voir, aussi, les divers détournements et réappropriations de la littérature à l'épreuve de la carte postale. Il nous invite à penser, surtout, la littérature en termes de sociabilités, de médiations locales et de sphères de publications restreintes.

Mathilde Roussigné, ancienne élève de l'ENS de Lyon et agrégée de lettres modernes, mène une thèse sur l'épreuve du terrain en littérature contemporaine française sous la direction de Lionel Ruffel (Paris VIII) et de Gisèle Sapiro (EHESS). Elle a publié plusieurs articles sur les rapports d'enquêtes littéraires, les résidences d'écrivains et la question de l'intervention littéraire. Elle est membre du Séminaire Littéraire les Armes de la Critique (ENS Ulm). Elle enseigne à l'EHESS.

Noëlle ROUXEL-CUBBERLY : Un générique de cartes postales : le cas de la Rue Cases-Nègres d'Euzhan Palcy
Emblématiques de l'apogée de l'empire colonial français et de leur propre âge d'or, les cartes postales du générique de Rue Cases-Nègres (Palcy, 1983) ancrent l'intrigue dans la Martinique "exotique" des années 1930. Le film n'a pas commencé que ces cartes postales "parlent" : ainsi, à la légende "FORT-DE-FRANCE : La Rue de la Liberté", correspondent, ironiquement, arbres rectilignes, grilles dressées du palais de justice et rangées de militaires. Écho musical du sépia, le ragtime du générique, derrière ses accents à la fois gais et nostalgiques, évoque un "temps en lambeaux" alors que (ré)apparaissent dans le film des dimensions rythmiques et temporelles autres. On examinera la façon dont ce générique propose une réécriture et une relecture des représentations de la Martinique sur les cartes postales de l'époque.

Noëlle Rouxel-Cubberly est enseignante-chercheuse à Bennington College (Vermont). Ses recherches portent sur l'enseignement du français par le cinéma.
Publication
Les titres de film : Économie et évolution du titre de film français depuis 1968, Houdiard, 2011.

Denis SAINT-AMAND : La 'Pataphysique en cartes postales
Dans les premiers moments de sa fondation en 1948, le Collège de 'Pataphysique a produit des cartes postales réservées à ses membres et vouées à accueillir leur correspondance relative à l'institution. La face imprimée de ces cartes supporte à la fois l'élaboration d'un style potache inhérent à l'entreprise (gravures et photographies pourvues de légendes humoristiques, détournements, dessins irrévérencieux et absurdes, références aux textes fondateurs d'Alfred Jarry, etc.) et la constitution d'une mémoire collective (photographies des membres du Collège, seuls ou en groupe, lors de séances du Collège ou en vacances, etc.). On se propose d'interroger les logiques et mécanismes rhétoriques de ces faces imprimées, sur la base d'un corpus de plus de 250 cartes postales pataphysiciennes mises en circulation entre 1950 et 2000 et rassemblées dans l'anthologie établie par les éditions L'Hexaèdre (2014). En plus de la face iconique/imprimée, on se penchera également, à l'aune d'un corpus restreint d'une vingtaine de cartes destinées à Michel Lessard dans les années 1970-1980 et liées à l'activité de la faction montréalaise du Collège de 'Pataphysique, sur la façon dont les membres de l'institution s'approprient ces cartes et comment celles-ci deviennent le support d'un discours sur une activité collective fonctionnant en vase clos, voire comment elles peuvent favoriser l'émergence d'une création littéraire hors du livre.

Denis Saint-Amand est chercheur qualifié du FNRS à l'université de Namur. Codirecteur des revues Parade sauvage et COnTEXTES, il a notamment animé avec Anthony Glinoer le Lexique Socius. Attentif aux productions littéraires évoluant en dehors du marché du livre, spontanées et artisanales, il a livré une édition de l'Album zutique avec D. Grojnowski (GF, 2016) et a dirigé un numéro de la revue Mémoires du livre sur la "littérature sauvage" (2016).
Publications
La Littérature à l'ombre. Sociologie du Zutisme, Classiques Garnier, 2012.
Le Dictionnaire détourné, PUR, 2013.
La Dynamique des groupes littéraires (dir.), PULg, 2016.
Le Style potache, Éditions La Baconnière, 2019.

Géraldine SFEZ & Sarah TROCHE : Le bonheur en couleurs véritables
Les cartes postales, et plus précisément les cartes postales réalisées dans les années 1950-1960, ont été l'objet récemment d'un réinvestissement de la part de nombreux artistes contemporains. L'attrait de ce type de cartes postales semble en grande partie consister, pour ces artistes, dans les usages stéréotypés de la couleur et les mises en scènes figées qu'elles proposent. Les cartes postales constituent à ce titre, à l'instar des albums de photographies, des catalogues de vente par correspondance ou des dépliants touristiques, un répertoire d'images particulièrement cliché du bonheur. Comment penser la carte postale (son format, ses codes esthétiques, les représentations normées du territoire qu'elle induit) dans son articulation aux notions de cliché et de bonheur ? Pour explorer cette piste, on s'intéressera en particulier aux travaux de l'artiste "documentation Céline Duval", du photographe Mathieu Pernot, de l'écrivaine et vidéaste Valérie Mréjen, ainsi qu'aux Deux cent quarante-trois cartes postales en couleurs véritables de Georges Perec.

Géraldine Sfez est maîtresse de conférences en études cinématographiques à l'université de Lille et membre du CEAC (Centre d'Étude des Arts contemporains). Elle co-dirige depuis 2018 la revue du CEAC, Déméter. Théories et pratiques artistiques contemporaines. Ses recherches portent sur l'esthétique et la théorie des arts visuels contemporains et s'articulent principalement autour du rapport entre pratiques artistiques contemporaines et pratiques mémorielles d'une part, et des relations entre cinéma et art contemporain d'autre part. Elle a co-organisé à l'INHA (Institut National d'Histoire de l'Art), de 2012 à 2015, le séminaire "Écrans exposés. Cinéma, art contemporain, médias" ainsi que deux journées d'études sur le même thème au LaM (2014) et au Fresnoy (2016). Elle prépare avec Riccardo Venturi un ouvrage sur "L'attrait des écrans" pour la collection "Côté cinéma/Motifs" chez Yellow Now (à paraître, 2020).

Sarah Troche est maîtresse de conférences en esthétique et philosophie de l'art à l'université de Lille (UFR humanités) et membre du laboratoire Savoirs, Textes, Langage où elle dirige la thématique "Invention et pratiques dans les arts et la littérature". Ses recherches portent sur le travail de la mémoire dans les pratiques artistiques modernes et contemporaines, principalement dans le champ des arts plastiques et de la musique : arts de l'oubli (hasard méthodique, table rase, déprise, innocence active), norme du goût et habitudes perceptives, automatismes, gestes de reprise et de répétition, circulation et usages des images toutes faites et des clichés. Ses travaux ont fait l'objet de publications dans plusieurs revues (Nouvelle revue d'esthétique, Les Cahiers philosophiques, Tacet, Philonsorbonne) et ouvrages collectifs. Elle est également membre du comité de rédaction des revues Geste (2005-2012), Déméter et Methodos (depuis 2019).
Publication
Le hasard comme méthode, Figures de l'aléa dans l'art du XXe siècle, Presses universitaires de Rennes, coll. "Aesthetica", 2015.

Sur la question du cliché, Sarah Troche et Géraldine Sfez ont organisé une journée d'études en mars 2017 à l'université de Lille : "Faire cliché : enjeux esthétiques des images toutes faites". Elles ont également co-écrit un article : "Le bonheur en images : puissance et réactivation d'un cliché" dans The Images and the autonomy of their conflict, sous la dir. de José Quaresma, École des Beaux-Arts de Lisbonne, automne 2019.

Andy STAFFORD : La carte postale "postcoloniale" ?
Ce n'est sans doute pas une coïncidence que Le harem colonial de Malek Alloula sorte en 1981 au même moment que l'exposition de Marc Garanger au Festival d'Arles des "photos d'identité" qu'il avait prises des femmes algériennes pendant la Guerre d'Algérie pour les contrôles de l'armée française. La représentation des femmes nord-africaines avait certes ses exemples dans l'orientalisme terni des décennies antérieures ; mais le début des années quatre-vingts semblait promettre un renversement de cette imagerie colonialiste, renversement qui va à travers l'écriture romanesque d'une Leïla Sebbar, dans sa trilogie sur Shérazade (1982-1991), dans ses nouvelles et ses collaborations avec Garanger des années 1990, et surtout jusqu'à sa collaboration en 2002 avec Jean-Michel Belorgey sur des femmes d'Afrique du Nord dans les cartes postales. Mais pourquoi la carte postale pour un tel renversement ? Y-aurait-il une spécificité du médium qui pourrait défaire le stéréotype ? Cette analyse s'inscrit dans le contexte de l'extrême contemporain marqué ces jours-ci par la dispute amère autour du volume collectif Sexe, race et colonies (La Découverte 2018), et par le débat animé autour de l'exposition "Le Modèle noir en peinture" au musée d'Orsay (2019).

Spécialiste de l'œuvre de Roland Barthes, ainsi que du photo-texte, Andy Stafford a publié aussi sur les littératures francophones du Maghreb, de l'Afrique, des Antilles. Il contribue ces jours-ci à un volume sur Abdelkébir Khatibi dirigé par Khalid Lyamlahy et Jane Hiddleston (Liverpool University Press 2020), sur La revue du monde noir pour un volume sur les femmes et les revues (dirigé par Amélie Auzoux, Camille Koskas, Lisa Russo), et sur Mohamed Bourouissa dans un volume sur le photobook (Paul Edwards dir.). Habilité à diriger des recherches par l'université de Grenoble, il est enseignant-chercheur à l'université de Leeds au Royaume-Uni.

Pierre TAMINIAUX : Paul Nougé ou le poème comme carte postale
Cette intervention abordera avant tout la poésie visuelle du poète surréaliste belge Paul Nougé, qui occupe une place essentielle dans son œuvre singulière. Elle constitue à bien des égards une métaphore continue de la carte postale. Dans cet ensemble de propositions aléatoires, le poète dévoila une conception plastique des mots, c'est-à-dire la rencontre concrète dans l'espace de la page de fragments d'écriture et de formes graphiques. La carte postale, dans cette perspective, souligne l'idéal d'une forme d'expression instantanée et éphémère reposant sur des moyens modestes. On considérera en ce sens la carte postale, chez Nougé, comme un exemple original d'écriture automatique, mais aussi de collage poétique, fidèle en cela à l'esprit du surréalisme défini par André Breton, qui fut lui-même un grand amateur et collectionneur de cartes postales.

Pierre Taminiaux est professeur de littérature française et francophone du XXe et du XXIe siècles à Georgetown University.
Publications
Surmodernités : entre rêve et technique, L'Harmattan, 2003.
Littératures modernistes et arts d'avant-garde, Honoré Champion, 2013.
Du surréalisme à la photographie contemporaine : au croisement des arts et de la littérature, Honoré Champion, 2016.
Révolte et Transcendance : Surréalisme, situationnisme et arts contemporains, L'Harmattan, 2018.

Claire TENU : "The actuality of the past"
Je me suis intéressée aux cartes postales anciennes représentant des territoires que j’arpentais (Cherbourg ; un petit village en Creuse ; le port de Rouen et la vallée de la Seine pour un Observatoire photographique des paysages mené actuellement), en constituant de petites collections à mon usage, que j’ai parfois montrées en regard de mes photographies. Les cartes postales présentent, pour qui s'intéresse à la vue — à la croisée de la tradition picturale de la veduta et d'une histoire artistique et littéraire des topographies urbaines — des qualités descriptives presque incomparables, à la fois génériques et spécifiques. Les configurations urbaines et paysagères du moindre recoin de France ont été fixées dans les années 1900 à 1920, rejouant des points de vue déjà inscrits par la peinture ou la gravure, ou bien en forgeant de nouveaux. Cette communication sera l'occasion de faire le point sur l'incidence des cartes postales sur ma pratique artistique, afin de formuler des réflexions et des hypothèses sur l'intérêt que peuvent porter des artistes d'aujourd’hui à ces images imprimées. Ce propos s'appuiera aussi sur l'artiste Walker Evans, à qui j'emprunte la formule en titre.

Claire Tenu est artiste et enseignante à l'École supérieure d'art de Lorraine. Elle a développé une pratique de la photographie lyrique et spéculative, au croisement de diverses disciplines : composition et montage, description topographique et récit filmique, écriture et installation. Son exposition La ville que nous voyons au Centre d'art Le Point du Jour à Cherbourg en 2013 était accompagnée d'un livre. Elle a soutenu en 2016 une thèse en création artistique intitulée "Tamis lyrique", préparée à l'École nationale supérieure des beaux-arts de Paris dans le cadre du programme doctoral SACRe (Université Paris Sciences et Lettres).

Gilles TEULIÉ : Représentations de l'espace colonial et appropriations territoriales dans l'industrie de la carte postale du début du XXe siècle
Sans prétendre à l'exhaustivité, cette communication se propose de présenter une typologie représentative de la manière dont les cartes postales aussi bien britanniques que françaises induisent une certaine vision des empires coloniaux. Nous verrons que les cartes postales reproduisant des cartes géographiques, les clichés des infrastructures coloniales, des constructions européennes, les exploitations agricoles régies par des Blancs, une présence physique blanche, qu'elle soit officielle (représentant des États), individuelle (colons) ou militaire, sont autant d'éléments d'appropriation symbolique d'un territoire. Il s'agira d'examiner le regard croisé entre britanniques et français au travers des cartes postales et d'essayer de rendre compte des modes opératoires qui ont typifié le regard du photographe colonisateur autour d'un projet se voulant à la fois esthétique et pragmatique de contrôle de l'espace colonisé et par la même occasion du colonisé lui-même.

Gilles Teulié est professeur de civilisation britannique et du Commonwealth à l'université Aix-Marseille. Son laboratoire de rattachement est le LERMA (Université Aix-Marseille). Il est membre de la SEPC (Société d'Étude des Pays du Commonwealth) et du GRER (Groupe de Recherche sur l'Eugénisme et le Racisme). Son champ d'étude porte sur les représentations de la guerre et de la violence dans le monde britannique (en particulier à l'époque victorienne) et tout spécialement en Afrique du Sud. Il prépare actuellement un ouvrage sur les "Greetings from the Colonies : Picture Postcards and European Empires, 1891-1939".

Gaëlle THÉVAL : Le mail art en revue : les cartes postales DOC(K)S
Fondée en 1976 par Julien Blaine, la revue de poésie expérimentale DOC(K)S se fonde dans son principe même sur la pratique du mail art. Le nom faisant coexister les deux termes de "docks" et de "docs" pour "documents", désigne la revue comme plateforme où des documents venus des quatre coins du monde convergent et s'échangent : à la logique anthologique et non sélective s'associe une perspective documentale, chaque envoi étant traité comme un document, non éditorialisé, car reproduit tel quel en offset. Dans cette communication nous centrerons le propos sur les usages et devenirs de la carte postale, qui a fait l'objet de trois numéros spéciaux de la revue, au sein des autres supports d'envoi. Objet essentiellement hybride et iconotextuel, la carte postale est en effet un support d'investissement privilégié de cette poésie postale et visuelle qui devient, dans la revue DOCKS, un objet singulier intégrant à sa poétique ses conditions d'envoi et de réception.

Gaëlle Théval est professeure agrégée à l'université de Rouen (IUT). Chercheuse membre du laboratoire MARGE (Université Lyon 3) et chercheuse associée au THALIM (Université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle / CNRS), ses travaux portent sur les poésies expérimentales et contemporaines, dans le livre (comme espace de création) et hors du livre (poésie sonore, performance, vidéopoésie, poésie numérique…).
Publications
Poésies ready-made, XXe-XXIe siècles, Paris, L'Harmattan, 2015, coll. "Arts & médias".
Avec Hélène Campaignolle et Sophie Lesiewicz (dir.), Livre/Poésie : une histoire en pratique(s), Paris, Éditions des Cendres, 2017.
Avec Olivier Penot-Lacassagne (dir.), Poésie & performance, Nantes, Cécile Defaut, 2018.

Kim TIMBY : Le début de la vente de cartes postales dans les musées en France, 1900-1912
Les chefs-d'œuvre artistiques font partie des iconographies à succès de la carte postale illustrée dès ses débuts en France. Dans les musées, des cartes reproduisant les collections sont rapidement proposées, souvent par des gardiens entreprenants. Ce commerce est si florissant que dès 1905 les musées nationaux sont accusés de concurrence déloyale par un syndicat de marchands. Le gouvernement défend alors l'intérêt de la carte postale au musée : en faciliter l'accès est un service important pour les érudits et le grand public. L'État décide de prendre le contrôle de ce marché dans ses musées, avec des motivations à la fois culturelles et financières. Ainsi, avant même la Première Guerre mondiale, la carte postale est un support de diffusion de l'art ancien et contemporain, omniprésente dans l'espace public et les institutions, un intermédiaire essentiel pour la circulation de la connaissance artistique.

Kim Timby est historienne de la photographie, enseigne à l'École du Louvre et travaille pour une collection privée de photographies du XIXe siècle. Ses recherches explorent l'histoire culturelle des technologies photographiques. La carte postale et d'autres imageries populaires ont fait partie de son histoire des images en relief et animées (De Gruyter, 2015). Elle travaille actuellement sur les formes innovantes de la reproduction photographique d'œuvres d'art.


Le projet pOST : atelier mail art
Le collectif OST mène depuis plusieurs années le projet pOST, un atelier de création de cartes postales originales à envoyer à qui l'on veut et partout dans le monde.
À l'heure où des milliards de messages instantanés sont envoyés tous les mois sur le seul territoire belge, où des serveurs sur Internet donnent la possibilité à une seule personne d'envoyer 80000 mails par semaine, et bien plus de clic sur les smart phone, le traditionnel courrier papier se fait de plus en plus rare dans nos boîtes aux lettres si ce n'est les factures ou les criardes publicités.
Le projet pOST veut changer la donne et offrir l'occasion d'envoyer des messages aux amis, aux amants, aux voisins, à soi-même, à qui vous voulez !
OST met à votre disposition des tas de livres, magazines et images d'archives triés sur le volet. Dans ces ouvrages, il est permis de découper comme vous voulez, et à disposition vous aurez des outils graphiques pour créer un courrier avec la méthode du collage. Les oiseaux seront aussi à vos côtés pour vous aider à créer une carte toute spéciale !
Références
Différentes actions : ostcollective.org
Archives : flickr.com/photos/ostcollective/collections/72157646813737639
Un exemple d'atelier : vimeo.com/205012579

Né en 2009 à Bruxelles, le collectif OST conçoit et anime de nombreux projets artistiques et culturels en utilisant le médium photographique et différentes techniques de l'image afin de produire des messages riches de sens et de poésie. Fonctionnant comme un laboratoire expérimental à dimensions artistique et sociale, le collectif OST interroge des créateurs et des publics sur des notions d'identité, de représentation et d'imaginaire collectif.


BIBLIOGRAPHIE :

• Boivent Marie, "Cartes postales et reproductibilité de l'archive dans quelques pratiques artistiques contemporaines", Focales numéro 2 : Le recours à l'archive, 2019.
• Chéroux Clément & Eskildsen Ute (dir), La Photographie timbrée. L'Inventivité visuelle de la carte postale photographique au début du XXe siècle, Catalogue du Jeu de Paume, Paris (4 mars-8 juin 2008), Steidl, 2008.
• Canetti Elias, Masse et puissance, traduit de l'allemand par Robert Rovini, Paris, Éditions Gallimard [1966], 1986.
• Derrida Jacques, La Carte postale, de Socrate à Freud et au-delà, Paris, Flammarion, 1980.
• Gonzales-Day Ken, Lynching in the West : 1850-1935, Duke University Press, 2006.
• Immelé Anne, "Archives et constellations", Focales numéro 2 : Le recours à l'archive, 2018.
• Lageira Jacinto, L'art comme Histoire. Un entrelacement de poétique, Éditions Mimésis, Collection "Art, esthétique, philosophie", 2009.
• Sontag Susan, Sur la photographie, Paris, Éditions Bourgois, Collection "Énonciations", 2008.
• Sontag Susan, Devant la douleur des autres, Paris, Éditions Bourgois, Collection "Essais", 2003.


SOUTIENS :

• Laboratoire Pléiade - EA 7338 // Comité scientifique // Institut MEDIALECT | Université Sorbonne Paris Nord
• Projet Fictograph | Maison des Sciences de l'Homme en Bretagne (MSHB)
• Projet ERC Handling | Université catholique de Louvain