Programme 2020 : un des colloques

Programme complet


Colloque reporté

En raison des événements exceptionnels liés à l'épidémie de la Covid-19, et sur proposition des directeurs, ce colloque a été reporté aux dates suivantes : du dimanche 18 juillet au jeudi 22 juillet 2021 [en savoir plus].

La direction du CCIC


MUSIQUES SACRÉES EN NORMANDIE : RITES ET PRATIQUES
( XIIe - XXIe SIÈCLES )


DU LUNDI 10 AOÛT (19 H) AU VENDREDI 14 AOÛT (16 H) 2020

[ colloque de 4 jours ]


Missale ad usum Montis Sancti Michaelis, XIIIe s., Bibliothèque patrimoniale, Ville d'Avranches, Ms 42 f. 437


DIRECTION :

Jean-Baptiste AUZEL, Georges-Robert BOTTIN, Jean-François DETRÉE, François NEVEUX


ARGUMENT :

Les importantes collections encore conservées de manuscrits liturgiques, le récit des visites pastorales, nous montrent que, dès le XIIIe siècle, la vitalité de la musique religieuse est grande dans les églises et abbayes normandes mais, aussi, que grandes sont les difficultés quotidiennes rencontrées dans sa mise en œuvre. Cependant, sa pratique a été, jusqu'à la fin de l'Ancien Régime, un élément structurant de la vie musicale régionale, notamment par le cadre pédagogique qu'elle offrait. Il faut attendre une autre époque, la fin du XIXe siècle, pour qu'un regard historique soit porté par quelques érudits et musicologues sur cette longue histoire.

Depuis la fin du XXe siècle, l'intérêt des musicologues français s'est peu à peu porté sur la vie musicale des provinces françaises, puis, sous l'impulsion d’historiens, les musiciens d'église sont devenus un objet d'étude, en particulier en ce qui concerne le XVIIIe siècle, comme en témoigne l'enquête Musefrem en cours ("Musiciens d'Église en 1790").

La Normandie a toute sa place dans cette réflexion que ce colloque voudrait mener, sur une longue durée, allant du cadre rituel et institutionnel défini au Moyen Âge jusqu'aux pratiques contemporaines, où se rejoignent l'évolution liturgique, depuis Vatican II, et un contexte culturel où la musique sacrée retrouve étonnamment sa place.

Trois axes se dégagent pour faire un point historiographique sur la musique sacrée en Normandie :
1. Les cadres de la pratique de la musique sacrée : rites, livres et répertoires, typologie des communautés et des musiques ;
2. Les acteurs de la musique sacrée : les professionnels, les organistes, les compositeurs, les assemblées ;
3. Les instruments de la musique sacrée : l'orgue, l'harmonium, les autres instruments et leurs représentations.


MOTS-CLÉS :

Abbaye, Chant, Compositeur, Concert, Création, Église, Festival, Interprétation, Liturgie, Musique, Orgue, Usages


CALENDRIER PROVISOIRE :

Lundi 10 août
Après-midi
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée
Présentation du Centre, des colloques et des participants


Mardi 11 août
I - LES RÉPERTOIRES ET LES RITES, DU MOYEN ÂGE À NOS JOURS
Matin
Jean-Baptiste AUZEL : Présentation
Jean-François DÉTRÉE : Rites et pratiques : la musique sacrée est-elle révélée ou masquée par les cérémoniaux ?
Guillaume ANTOINE & Louis CHEVALIER : Le chant liturgique du Mont Saint-Michel (XIe-XVe siècles)
Laurence BRISSET & Océane BOUDEAU : Autour du Tropaire de Saint-Evroult

Après-midi
Cécile DAVY-RIGAUX : Parcours et fortune des messes en plain-chant du P. Paul d'Amance de Lisieux (XVIIe-XXe s.)
Frère Maximilien LAUNAY : Le répertoire des Prémontrés de l'abbaye de Mondaye
Christine NEVEU : Au Mont Saint-Michel, le répertoire des Fraternités monastiques de Jérusalem (fin XXe et début XXIe siècle)

Soirée
"HORS LES MURS" - À LESSAY
Concert Heures musicales à Lessay : œuvres de compositeurs normands du XVIIe siècle (Ensemble Correspondances, dir. Sébastien DAUCÉ)


Mercredi 12 août
Matin
Georges-Robert BOTTIN : Les cantiques de pèlerinages dans la Manche (fin XIXe et début XXe siècle)

II - MUSICIENS ET INTERPRÈTES
François DUPOUX : L'harmonium au-delà des salons parisiens
Sylvie GRANGER : L'enquête Muséfrem en Normandie : hommes et corps de musique religieuse à la veille de la Révolution [communication établie avec Pierre MESPLÉ]

Après-midi
"HORS LES MURS" - À LA CATHÉDRALE DE COUTANCES
SÉANCE PUBLIQUE
Visite de l'exposition musique sacrée en salle du chapitre
Jean DURON : L'œuvre d'Antoine Merle (XVIIe siècle)
Jean-François DÉTRÉE, François MOREAU & François NEVEUX : Conférence-Concert à l'orgue autour d'œuvres de compositeurs normands (XVIIIe - XXe siècles)

Fin d'après-midi & Soirée
"HORS LES MURS" - À L'ABBAYE DE LA LUCERNE
Nicolas LECERVOISIER : Visite de l'abbaye et évocation du travail de redécouverte de la musique sacrée normande par l'abbé Lelégard
Concert Festival musical de l'abbaye de la Lucerne : musique médiévale normande (Ensemble De Caelis, dir. Laurence BRISSET)


Jeudi 13 août
III - AUTOUR DE L'ORGUE
Matin
Ghislaine AFFAGARD : Le chapiteau de Saint-Georges de Boscherville et l'organistrum
François NEVEUX : Histoire des orgues de Bayeux (XVIIIe - XIXe siècles)
Bernard JEHAN : Ménard-Orange-Laforge, facteurs d'orgues à Coutances de 1839 à 1892

Après-midi
"HORS LES MURS" - SÉANCES ILLUSTRÉES DE MUSIQUES TENUES EN L'ÉGLISE DE CERISY-LA-SALLE
SÉANCE PUBLIQUE
Fabrice SIMON : Paul Allix, un organiste compositeur à Cherbourg au XXe siècle [conférence illustrée à l'orgue]
Bernard JEHAN & François LEMANISSIER : Que sait-on des orgues de Saint-Lô ?
François LEMANISSIER : Organiste d'église aujourd'hui, témoignage

Soirée
"HORS LES MURS" - À COUTANCES
Concert à la chapelle du Sacré-Cœur du collège Guérard (Institut Jean-Paul II de Coutances) : musique sacrée normande des XIXe et XXe siècles (Vincent GENVRIN & Françoise MASSET)


Vendredi 14 août
IV - DES PRATIQUES EN ÉVOLUTION
Matin
Maurice ROUSSEAU : L'orgue à rouleaux dans les églises, 1800-1850
Bruno CENTORAME : La musique religieuse à l'Institut Saint-Paul de Cherbourg (début XXe siècle)

Musique sacrée et ses usages aujourd'hui, entre cultuel et culturel, table ronde avec Daniel JAMELOT et Enrique THÉRAIN

Après-midi
Jean-Baptiste AUZEL, Georges-Robert BOTTIN, Jean-François DETRÉE, François NEVEUX : Conclusions générales

DÉPARTS


RÉSUMÉS & BIO-BIBLIOGRAPHIES :

Guillaume ANTOINE & Louis CHEVALIER : Le chant liturgique du Mont Saint-Michel (XIe-XVe siècles)
Sanctuaire consacré à saint Michel et lieu de vie canoniale (v. 708) et monastique (966), le Mont Saint-Michel posséda au Moyen-Âge une riche liturgie en partie héritée de l'ordo de l'abbaye Saint-Bénigne de Dijon diffusé en Normandie au XIe siècle. Son cursus canendi est présenté dans plusieurs livres liturgiques, parmi lesquels un missel et un évangéliaire-nocturnal pourvus d'une notation carrée sur lignes ; le rôle des officiers de la liturgie nous est connu par les prescriptions des ordinaires et du cérémonial de l'abbaye. Après avoir établi le catalogue des sources nécessaires à l'étude du chant du Mont Saint-Michel au Moyen-Âge, nous étudierons le chant propre de l'abbaye et sa notation, puis les circonstances de son exécution lors des offices, des processions et des drames liturgiques au long de l'année.
Bibliographie
A. Colk Santosuosso, Letter Notations in the Middle Ages, Ottawa, The Institute of Mediaeval Music, 1989.
D. M. Dolan, Les drames liturgiques de Pâques en Normandie et en Angleterre au Moyen-Âge, Paris, Presses universitaires de France, 1975.
Millénaire du Mont Saint-Michel, T1 : Histoire et vie monastique, J. Laporte (dir.), Paris, Lethielleux, 1967.

Diplômé en direction de chœur et paléographie musicale de l'École internationale du Chœur grégorien de Paris, chef de chœur de la Schola Collegium Normannorum, Guillaume Antoine est prêtre du diocèse de Coutances. Il participe chaque année au "Festival de musique du Mont Saint-Michel et sa baie Via Aeterna".

Ingénieur de recherche contractuel en analyse des livres d'heures manuscrits médiévaux (IRHT-CNRS), Louis Chevalier a soutenu en 2019 à l'université de Caen Normandie une thèse d'histoire consacrée à l'étude et à l'édition critique et numérique des deux ordinaires liturgiques du Mont Saint-Michel (XIVe-XVe s.).

Bruno CENTORAME : La musique religieuse à l'Institut Saint-Paul de Cherbourg (début XXe siècle)
Créé en 1907, l'Institut Saint-Paul de Cherbourg est l'héritier du collège de Valognes, séminaire sous l'Ancien Régime ; en 1918, Georges Grente, son supérieur, futur cardinal et membre de l'Académie française, fut sacré évêque du Mans à l'église Notre Dame du Vœu de la ville. Durant l'entre-deux-guerres, l'on y relevait le soin apporté aux cérémonies religieuses, ainsi que la qualité de la vie musicale due au chanoine Jean Richard (1876-1957), professeur d'anglais, directeur et préfet des études à partir de 1930. Maître de chapelle, organiste — un orgue Mutin Cavaillé-Coll fut mis en place dans la chapelle en 1924 — il était également professeur de piano et d'harmonium et constitua une chorale renommée (70 choristes en 1939) ainsi qu'une formation orchestrale jouant des œuvres de Lully, Rameau, Grétry, Mozart, Schumann, Mendelssohn… Le répertoire de la chorale, d'un grand éclectisme (Josquin des Prés, Bach, Haendel, Scarlatti), allait du chant grégorien à Guilmant et Déodat de Séverac. Les compositeurs contemporains cherbourgeois Joseph Noyon et Paul Allix étaient mis à l'honneur, mais l'orientation générale des dernières années tendait vers la polyphonie palestrinienne, ainsi en était-il durant les offices de la Semaine Sainte.

Bibliographie
Le Mémorial de l'Institut Saint-Paul de Cherbourg (1919-1959)
Bruno Centorame, L'Institut Saint-Paul de Cherbourg, Art de Basse-Normandie, n°102 consacré à l'abbé Marcel Lelégard, Caen, 1995.

Cécile DAVY-RIGAUX : Parcours et fortune des messes en plain-chant du P. Paul d'Amance de Lisieux (XVIIe-XXe s.)
Premier auteur à qualifier comme telles les messes "en plain-chant musical", expression qu'il fait graver en 1687 à l'attention de l'abbesse des bénédictines de Chelles, le Père Paul d'Amance, religieux de l'Ordre de la Très Sainte Trinité et de la rédemption des captifs et organiste de son couvent à Lisieux, marque ainsi l'apparition d'un nouveau type de plain-chant dont il est alors probablement loin d'imaginer le succès à venir au fil des siècles suivants. Dans le contexte de la reconsidération des cérémonies et de ses acteurs, qui intervient dans le cadre de la Réforme catholique post-tridentine, la place du chant liturgique au sein du cursus cérémoniel se voit nettement revalorisée. En France notamment, cette revalorisation se traduit par l'apparition de propositions nouvelles, destinées non seulement à le réformer, mais encore parfois à substituer au chant grégorien de nouvelles formes de chants liturgiques. C'est ainsi que le "plain-chant musical" deviendra l'une des manifestations les plus emblématiques de ces "innovations", en particulier par le succès des messes du maître de la Chapelle de Louis XIV Henri Du Mont, qui suscitera de nombreuses créations dans ce genre, de plus en plus autonome, des pièces en plain-chant musical. Outre leur place déterminante dans l'histoire de ce genre musical, les messes de d'Amance offrent, à l'image de celles de Du Mont, la particularité d'avoir été chantées dans des périmètres institutionnel et chronologique plus larges que ceux visés au départ, objets de l'étude présentée ici.

Cécile Davy-Rigaux, directeur de recherche du CNRS à l'IReMus, a dirigé l'Institut de recherche en musicologie (IReMus, UMR 8223) et l'Institut interdisciplinaire Collegium Musicæ Sorbonne Université jusqu'en 2018, préside la Société française de musicologie (Sfm), et co-coordonne le réseau international des musicologies francophones Épistémuse. Ses travaux s'inscrivent dans les domaines de l'édition musicale critique (éditions Rameau, Saint-Saëns), de la musicologie numérique (bibliothèque de partitions numériques Neuma, base Sequentia), du plain-chant et de la musique d'église à l'époque moderne, en particulier à travers leur lien à la liturgie (coresponsable du projet ANR Muséfrem (2009-2013), codirection de la collection ELSEM, "Église, liturgie et société dans l'Europe moderne", chez Brepols, nombreux articles, directions d'ouvrages et une monographie sur l'œuvre de plain-chant de Nivers, CNRS-Éditions, 2004).
Bibliographie
Guillaume-Gabriel Nivers, un art du chant grégorien sous le règne de Louis XIV, Paris, CNRS éditions, 2004, 516 p.
"À propos de "La Récollette" : les récollets et la messe en plain-chant musical à l'époque moderne", Les Récollets en quête d'une identité franciscaine, C. Galland, F. Guilloux, P. Moracchini (dir.), Tours, PUFR, 2014, p. 301-316.
"Les messes en plain-chant en France à l'époque moderne", Actes du colloque international, 1000 ans de chant grégorien (9-10 septembre 2010), Études grégoriennes XXXVIII, Éditions de Solesmes, 2011, p. 201-231.
Avec la collaboration de Sébastien Gaudelus et de François Auzeil, "Parcours et détours du "chant de Nivers"", Noter, annoter et éditer la musique, Mélanges offerts à Catherine Massip, C. Reynaud et H. Schneider (dir.), Genève, Droz, 2012, p. 461-476.

Jean-François DÉTRÉE : Rites et pratiques : la musique sacrée est-elle révélée ou masquée par les cérémoniaux ?
Les "antiquaires" qui, dans les premières années du XIXe siècle, se sont interrogés sur l'histoire de la musique en Normandie ont, d'emblée, posé leurs recherches dans le contexte d'une histoire culturelle dominée par la double référence aux figures du sacré et du profane : d'une part, celle des premiers siècles de christianisation et, d'autre part, celle des invasions scandinaves. À la première, appartiendrait la longue tradition du chant religieux ; à la seconde, celle d'une hypothétique tradition de musique épique. L'une et l'autre se trouvent inscrites dans des rituels certes différents, mais tous les deux placés sous le signe de la mémoire : rituel liturgique qui fait mémoire de la Révélation, et rituel profane qui ferait mémoire de l'histoire des hommes. Si les contours du second volet de cette histoire musicale restent encore très incertains, les sources relatives au premier sont abondantes (manuscrits notés, cérémoniaux, iconographies) et justifient de l'interroger sur la longue durée, ce qui sera l'objet de ce colloque. Ces musiques sacrées n'étant rendues possibles et nécessaires qu'en référence aux rituels dont elles sont l'expression sonore, la dualité "rites et pratiques" s'est imposée comme un fil directeur pour l'orientation des recherches et le choix des communications. En le suivant, nous verrons que, loin d'avoir un caractère immuable, les répertoires et les usages ont subi l'influence des évolutions culturelles et sociales du monde profane, reliant ainsi les deux facettes de la vie musicale.

Après des études de philosophie et de sciences politiques (mais aussi de musique), Jean-François Détrée est nommé, en 1970, organiste titulaire du grand orgue de la cathédrale de Coutances. En marge de ses activités professionnelles, il publie régulièrement des articles relatifs à l'histoire de la musique en Normandie et valorise divers aspects de patrimoine par des restitutions d'œuvres, des expositions ou l'organisation de concerts. Une synthèse de ce travail est proposée dans la publication de Musiciens et musique en Normandie (2010). Depuis 2014, il participe au réseau MUSEFREM (Musiciens d'Église en France à l'époque moderne).
Bibliographie
P. Aubry, La musique et les musiciens d'église en Normandie au XIIIe siècle, 1906.
C. Davy-Rigaux, B. Dompnier, D.-O. Hurel, Les cérémoniaux catholiques en France à l'époque moderne, 2009.
Base MUSEFREM : Départements de l'Eure (Pierre Mesplé), de la Manche (Jean-François Détrée) et de l'Orne (Sylvie Granger).

François DUPOUX : L'harmonium au-delà des salons parisiens
Le XIXe siècle, avide d'émotion, ne tarda pas à faire naître un nouvel instrument à clavier qui, comme l'orgue, était à sons tenus certes, mais doté d'expression. En 1943 François-Alexandre Debain déposait le brevet qui devait lui donner son nom : l'harmonium. Adopté par la grande famille de la musique de chambre, il fit les plus belles heures des salons parisiens du seconde empire. Mais, très vite, les facteurs d'instruments de plus en plus nombreux ont vu en lui un succédané de l'orgue et inondant de leur production, églises, chapelles et autres oratoires lui ont conféré la réputation largement répandue qu'on lui connaît encore aujourd'hui, confinant à la caricature. Après avoir séduit compositeurs, interprètes et mélomanes, l'harmonium — et sa fabrication — allait de l'atelier à l'usine, apporter sa contribution au renouveau de la musique religieuse et aux essors industriels, sociaux, et pédagogiques qui ont illustré son époque. La Normandie en est un exemple clair, simple et attachant.

Bibliographie
Dieterlen Michel, L'harmonium, Thèse de doctorat D'État, Presses universitaires du Septentrion, Novembre 2000.
Revue de l'association "L'harmonium français", numéros 3, 4, 7, 9 14, 23 (harmonium.fr).

Sylvie GRANGER : L'enquête Muséfrem en Normandie : hommes et corps de musique religieuse à la veille de la Révolution [communication établie avec Pierre MESPLÉ]
Depuis le début des années 2000, l'enquête Muséfrem (Musiques d'Église en France à l'époque moderne) réunit historiens et musicologues autour d'un objet commun : les professionnels de la musique et les institutions ecclésiales qui les emploient à la fin de l'Ancien Régime. Cette communication s'attachera a faire le point sur l'avancement des travaux pour ce qui concerne la Normandie. Elle présentera quelques grands corps de musique mais cherchera aussi à mettre en lumière le parcours de quelques femmes et hommes employés comme musiciens par ces églises à la veille de la Révolution.

Pierre Mesplé est agrégé d'Histoire, doctorant en Histoire moderne au CHEC (Centre d'Histoire "Espaces et Cultures") - EA 1001 [Université Clermont Auvergne], et membre du réseau Muséfrem.
Publication
"La Révolution, un accélérateur de carrière pour les musiciens de la cathédrale de Chartres ?", Siècles, n°45 | 2018 [en ligne].

Bernard JEHAN : Ménard-Orange-Laforge, facteurs d'orgues à Coutances de 1839 à 1892
Pendant un demi-siècle, à Coutances, une famille de six facteurs d'orgues sur deux générations a construit des instruments pour la Manche, la France et même l'étranger. Pierre Ménard (1799-1886) travaille comme ouvrier en facture d'orgues à Paris. En 1839, après six mois chez Cavaillé-Coll, il revient à Coutances et ouvre un atelier. Il forme son demi-frère Célestin (1820-1887) qui, tout juste ouvrier, ouvre à son tour un atelier. Deux cousins de Ménard, Eugène Orange (1825-1887) et Henri Laforge (1838-…) apprennent avec lui le métier. Eugène Orange menuisier et facteur d'orgues dispose d'un atelier. En 1857, Ménard et Orange fournissent à Cavaillé-Coll un petit orgue de 6 jeux-8 tirants. Cette collaboration va durer plus de vingt ans. Émile Ménard fils de Célestin (1850-1892) et Auguste Orange (1859-1895) fils de Eugène deviennent à leur tour facteurs d'orgues. Actuellement, en France, 17 de leurs instruments sont en service et 7 d'entre eux bénéficient d'une protection au titre des Monuments Historiques.

Bernard Jehan, prêtre en retraite, s'intéresse particulièrement à l'histoire des orgues de la Manche. Il a publié, en 1990, Les orgues de Notre-Dame de Carentan (épuisé) entretenus par Ménard-Orange. Il publie en 2020, Ménard-Orange-Laforge, facteurs d'orgues à Coutances de 1839 à 1892.

Frère Maximilien LAUNAY : Le répertoire des Prémontrés de l'abbaye de Mondaye
Forte d'une histoire multiséculaire, l'abbaye de Mondaye a hérité d'une tradition musicale et chorale propre à son ordre des chanoines réguliers de Prémontré. Néanmoins, la réforme liturgique initiée par la constitution Sacrosanctum Concilium (SC) du concile Vatican II l'a conduite à adapter l'office divin "de telle sorte que ceux à qui il est confié puissent en profiter plus largement et plus facilement" (SC 90). L'office choral célébré quotidiennement est donc le reflet d'une telle recherche théologique et pastorale : abandon, maintien ou rétablissement du chant grégorien ; choix d'une traduction française du psautier ; sélection de compositions d'antiennes et d'hymnes… La présente contribution veut établir un portrait musical, entre héritage et adaptation, de la communauté de Mondaye.

Frère Maximilien Launay, o.praem., est chantre de l'abbaye de Mondaye depuis 2014. Après un cursus à l'Institut supérieur de liturgie (de l'Institut Catholique de Paris), il est titulaire, en juin 2020, d'une licence canonique en théologie liturgique et sacramentaire.

Bernard JEHAN & François LEMANISSIER : Que sait-on des orgues de Saint-Lô ?
Répondre à cette question consistait à citer Lepingard, 1882, donnant des informations de 1663 à 1842 pour Notre-Dame de Saint-Lô et l'on parlait de l'orgue construit par Debierre en 1885. À l'église Sainte-Croix, on citait la reconstruction de Debierre en 1892. La mise à jour de nouvelles archives permet d'en savoir plus sur l'installation d'un orgue Barker-Verschneider en l'église Sainte-Croix en 1865, agrandi par la suite, et relevé par Gloton en 1933. À Notre-Dame, en 1857, Cavaillé-Coll fournit un devis de reconstruction de l'orgue. En 1929, Gloton installa une soufflerie électrique et l'orgue actuel fut inauguré en 1968. La chapelle du Collège de Saint-Lô maintenant détruite possédait un orgue de 11 jeux (1886-1908), transféré à Percy en 1916. La chapelle du Bon-Sauveur, en 1905, avait un petit instrument de 5 jeux, un Orgue Portatif de Debierre, anéanti en 1944. L'institut d'Agneaux avait un orgue endommagé en 1944, suivi d'un projet de reconstruction en 1963. Enfin récemment quatre petits orgues ont été installés sur Saint-Lô.

Bernard Jehan, prêtre en retraite, s'intéresse particulièrement à l'histoire des orgues de la Manche. Il a publié, en 1990, Les orgues de Notre-Dame de Carentan (épuisé) entretenus par Ménard-Orange. Il publie en 2020, Ménard-Orange-Laforge, facteurs d'orgues à Coutances de 1839 à 1892.

François Lemanissier, organiste titulaire de Notre-Dame et de Sainte-Croix de Saint-Lô (depuis septembre 1980), ainsi que de la Cathédrale de Coutances (à partir d'avril 2020).

François LEMANISSIER : Organiste d'église aujourd'hui, témoignage
En un temps où la fonction de l'organiste semble de plus en plus être réduite à portion congrue — celle de donner la note au chant ou de combler les creux éventuels durant l'office, il paraît souhaitable de repenser le rôle éminent de l'orgue et de l'organiste dans la liturgie. Nourri d'une relecture de divers textes officiels en vigueur concernant les attentes de l'organiste liturgique, le témoignage du musicien saint-lois François Lemanissier veut contribuer à redonner à l'orgue toute sa place, en s'attachant à faire de l'organiste un serviteur exigeant et réfléchi de l'Église d'aujourd’hui.

François Lemanissier, organiste titulaire de Notre-Dame et de Sainte-Croix de Saint-Lô (depuis septembre 1980), ainsi que de la Cathédrale de Coutances (à partir d'avril 2020).
Bibliographie
Collectif, Charte des organistes (28 novembre 2000).
Pape François, Discours prononcé devant une délégation d'organistes, 31 décembre 2013.
Victor Hugo, "Dans l'église de***", in Les Chants du Crépuscule.
René Huyghe, "L'art entre le visible et l'invisible", Revue des deux mondes, janvier 1987.

Maurice ROUSSEAU : L'orgue à rouleaux dans les églises, 1800-1850
L'orgue à rouleaux et la tonotechnie qui va avec ne sont pas des inventions du XIXe siècle mais on les voit se répandre dans les églises à cette époque, essentiellement dans les paroisses rurales. Son fonctionnement est simple, il n'y a pas besoin de savoir lire la musique, juste les titres et savoir disposer le rouleau au bon endroit. Une synthèse de la composition des têtes de lectures donne un aperçu des notes "utiles" dans la musique d'orgues populaire de cette époque. L'analyse des rouleaux donne les éléments de la liturgie pratiquée dans les campagnes. Le répertoire est organisé de cette façon : les messes avec quelquefois un offertoire, une entrée, une sortie à la mode de l'époque ; Les autres offices tels que les vêpres, avec le Magnificat, les antiennes de la Sainte vierge ; Les hymnes et les proses ; Les cantiques. Il ne s'agit pas d'accompagnements mais de ritournelles d'introduction pour les cantiques, et de la partie non chantée par le chantre au cours des offices. L'expansion de l'harmonium, la publication des accompagnements du plain-chant et la réforme grégorienne seront fatales à l'orgue à rouleaux.

Fabrice SIMON : Paul Allix, un organiste compositeur à Cherbourg au XXe siècle
Paul Allix (1888-1960) est un organiste-compositeur et un pédagogue qui a marqué la ville musicale de Cherbourg. Son œuvre témoigne de l'évolution du langage musical dans la première partie du XXe siècle. Il a composé plusieurs pièces pour piano, orgue, ainsi que des mélodies qui ont été publiées et aussi des œuvres vocales religieuses non publiées.

Fabrice Simon a étudié l'orgue, l'improvisation et l'écriture musicale avec Yves Barreda (ancien titulaire des Orgues de la Basilique Sainte-Trinité de Cherbourg). Il est entré ensuite dans la classe d'orgue de Louis Thiry au Conservatoire National de Région de Rouen, maître unanimement apprécié et admiré avec lequel il a étudié notamment l'œuvre d'Olivier Messiaen. Il a occupé les fonctions d'organiste titulaire des orgues de la Basilique Sainte-Trinité de 1997 à 2008. Il est actuellement cotitulaire des orgues la cathédrale de Bayeux et enseignant au collège-Lycée Jeanne d'Arc de Bayeux.